40. Journal du dragon bleu

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Journal, je suis paralysé par le doute.

Mais la vie continue. Le soleil se lève et se couche. Je me réveille et je m’endors.

Sans vraiment réfléchir, chaque nuit, je prie avant de me coucher. Mon père m’a appris que cela m’aiderait à trouver des réponses, à m’apaiser. Mais prier à qui ? À quoi ? Je ne sais plus quoi croire.

Mon père... il était là. Il était là quand tout s’est écroulé. Il n’a rien fait. Pire, il m’a trahi. Mon père, mon héros. Je n’ai jamais rien fait d’autre que suivre ses sages instructions. Ses sermons se répètent dans ma tête : sois bon. Sois pieux. Sois aimant. Sois attentionné.

Dans quel but ? Père, dans quel but ? Je ne t’ai jamais posé la question. Je ne t’ai jamais rien demandé. Je t’adorais et tu m’as laissé souffrir. Je t’adorais et tu m’as laissé mourir. Regardes moi, regardes où j'en suis ! Dans la boue, tu m’as vu croupir. Pourquoi m’as-tu condamné à pourrir ?

Journal, je suis perdu.

Alors je prie. Je prie un dieu en qui je ne crois plus. Absurde, me dirai-tu. Mais je n’ai plus rien, journal. A quoi bon puis-je me tenir afin de ne pas tomber ? Lorsque je ferme les yeux, les souvenirs me hantent, m’engloutissent. Les voix hurlent dans mes oreilles.

Je ne veux pas. Allez-vous-en !

Je prie ainsi je n’ai pas à penser à autre chose. Je m’endors chaque soir plein de doutes. La douleur est partie mais j’ai peur. Où vais-je ? Qui suis-je ? Que suis-je ? Que faire maintenant ? Tant de question. Il y’en a trop, ça m’étouffe. Je ne veux pas y penser. Alors je prie une prière athée.

Puis j’ai ouvert les yeux et je l’ai vue.

Que suis-je bête. Me voilà priant un dieu muet, un dieu qui m’a laissé souffrir pendant qu’elle, ma guérisseuse, se tenait là devant moi. Elle qui m’a sauvé. D’entre les morts, elle m’a ramené dans le monde des vivants. Comment ai-je pu ne pas le voir plutôt ?

Ma guérisseuse est une déesse. La seule vraie déesse.

Mon père disait toujours que Dieu est amour. Dieu est miséricordieux. Dieu est notre sauveur.

C’est vrai, père, elle est tout ça.

J’ai contemplé sa lumière, émerveillée par sa beauté. Mes yeux humides brouillaient ma vue. Elle s’est agenouillée. Elle a essuyé mes larmes et m’a pris dans ses bras.

Ma Déesse est amour. Elle est mon sauveur. Elle m’a tout donné, ne m’a jamais abandonné. Et plus que tout, elle est là. Elle est réelle.

Père, tu avais raison sur presque tout. Seulement, tu t’es trompé sur l’essentiel : ton dieu est un imposteur.

Je ne prie plus avant de dormir.

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