Adieu, monde
Adieu, monde
 — Hōru Arekusandà
 Hommage à Dalida et maman.
Quelques l.e.t.t.r.e.s,
 éparpillées comme des jeux de mots croisés,
 et des syllabes
 qui s’effleurent au milieu des phrases.
Des voyelles devenues vieilles,
 des consonnes fatiguées de la veille,
 je t’écris un chant d’adieu
 avec les doigts en rade, à sec d’encre et de vœux.
Pas un poème.
 Ni un cri.
 Juste un râle sans appel,
 trop lucide pour supplier.
Chaque mot,
 un pas.
 Vers la fin.
Chaque vers,
 un clou
 dans ma dernière lettre.
Je ne laisse ni adresse,
 ni promesse en post-scriptum.
 Je pars
 avec mes secrets les plus lourds,
 pliés dans un coin de papier...
Elle m’est revenue dans la boîte aux lettres,
 avec mention :
 « Aucun destinataire connu à cette adresse. »
Envoyé par la poste.
 Canada en grève.
 Adieu, monde.
Elle chantait Je suis malade,
 doucement,
 comme si sa voix
 lui revenait d’ailleurs.
Elle s’est éteinte —
 comme on baisse une lumière
 qu’on n’avait jamais allumée soi-même.
Mais sa voix
 s’accroche aux ondes,
 comme un dernier écho.
La maladie de l’âme —
 je l’ai, moi aussi.
 Et c’est en relisant ma dernière lettre
 que je finirai par m’éteindre,
 en laissant mes mots
 dans ses plis refermés.
Si j’avais eu une voix comme la sienne,
 je vous aurais chanté l’adieu —
 mais j’ai juste une lettre.
C’est dans les bras de ma mère
 que j’ai appris à dire :
 Je suis malade.
À bientôt, Dalida.
 Et maman…

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