Chapitre 24

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Les soirées du jeudi étaient de plus en plus fréquentes et celui-ci ne dérogerait pas à la règles.

« Normalement, à la saint Nicolas, on offre des chocolats à sa cheffe ! » Lui écrivis-je juste après avoir quitté le bureau.

« C'est vrai, j'aurais pu ! »

« Il est encore temps »

« Nan demain c'est la Saint Ambroise »

« Ce n'est pas toi qui m'as dit qu'il ne fallait pas s'imposer trop de règles ! »

Un peu plus tard dans la soirée, j'envoyais une photo d'un saucisson et de quelques bières.

« Tu vois quand les gens sont gentils, je paye ma tournée »

« Ça c'est bien! ☺
Tu es au bar ? »

« Oui et bourré de surcroît »

J'espérais que Paul ait envie de profiter de la situation.

« Ok ! Je sors peut-être après.
Tu dors où ? »

« Je ne sais pas, je peux plus prendre le voirtuer. », lui écrivis-je, avec cette énorme faute volontaire.

J'étais effectivement légèrement bourrée, mais j'en rajoutais un peu pour avoir une bonne raison de dormir chez Paul.

« Tu me dis. Sinon il y a mon canapé »

« Oui oui oui »

Mais j'espérais surtout que Paul nous rejoigne, surtout qu'au fil de la soirée, et des changements de bars, nous nous étions rapprochés de son appartement. Et puis, il aurait été moins bizarre d'aller chez lui, alors qu'il aurait fini la soirée avec nous, plutôt que d'arriver chez lui en plein milieu de la nuit, et saoule de surcroit.

Au moment d'aller me coucher, il était évident que je ne pouvais pas reprendre ma voiture, mais il était tard et Paul ne répondait plus aux messages. Nous n'étions plus que trois. Inès, une jeune collègue avec qui, au fil des soirées du jeudi, j'étais devenu amie et Nicolas un autre de mes collègues. Celui-ci nous proposa de dormir sur son canapé, pour éviter le retour dangereux en voiture.

En relisant tous mes mails le lendemain, je me rendais compte qu'ils étaient souvent ridicules, au mieux absolument incompréhensibles.

Quarante-quatre ans et j'agissais comme une adolescente qui découvre les joies de sortir, mais qui ne maitrise absolument pas ses débordements.

J'avais donc encore loupé une occasion de redormir chez Paul, même s'il ne m'avait proposé que son canapé.

Au moins, nous semblions presque réconcilier. Je n'utilisais encore que notre messagerie professionnelle, comme au commencement, mais petit à petit, je retrouvais la relation que j'avais perdue.

Comme Paul bossait pour l'instant pour moi, j'avais plus d'occasion d'échanger avec lui. J'étais donc encore plus impatiente d'aller au travail et à contrario, je retardais le moment de partir, les soirs, où je n'avais pas à récupérer les filles.

De nouvelles pensées érotiques envahissaient mon esprit. J'avais apprécié nos échanges qui m'avaient semblé érotiques et ils me manquaient. J'avais, de nouveau envie de les coucher par écrit, dans mon journal intime. C'était devenu un rituel.

8 décembre,

Dis-moi pourquoi je pense toujours à toi ?

Je fais un vœu. Qu'un jour, tu m'embrasses, que tes mains viennent s'emmêler dans mes cheveux, que peut-être même un léger Mmh vienne ponctuer la douce musique jouée par le frottement de nos caresses. Je crois que j'aurais follement envie de glisser mes mains sous ton pull, pour y caresser ta peau. Est-elle douce ? Je suis sûre que oui ! Quand j'aurai retiré ce pull, je viendrai embrasser et lécher chaque cm2 de ton torse. La tentation sera si forte de déboutonner ton pantalon et d'y glisser la main. J'imagine que je continuerais à embrasser chaque nouvelle partie de ton corps, une fois libéré de ces vêtements. Aimerais-tu que délicatement, je l'embrasse et qu'avec la langue, je remonte sur toute sa longueur encore et encore. Ensuite en remontant par ton nombril, ta poitrine, j'embrasserai le creux de ton cou et ta bouche...

Écrire me redonnait momentanément le sourire.

10 décembre

Coucou Paul,

J'ai encore besoin de te parler, en fait, tu es la seule personne à qui je peux... j'ai envie, de dire ce que je ressens.

Hier, ma fille aînée m'a tellement poussé à bout que j'ai failli lui dire ce que je « traversais » en ce moment. Ensuite, j'ai pleuré comme une madeleine dans mon lit. Ça m'arrive tout le temps en ce moment. Ce soir au bureau, en rentrant dans la voiture et je suis sûre que je vais remettre ça en allant me coucher.

Ce matin Florian est parti en déplacement et il n'a même pas dit au revoir. En fait, je crois que ce qui l'a mis en colère, c'est mercredi dernier. Je suis allée écouter un concert et je pense qu'il s'était « programmé » un truc sexuel. Le problème, c'est que lorsque je suis venue me coucher (à reculons) il est arrivé avec sa délicatesse de dinosaure et j'ai craqué. J'ai encore pleuré et je lui ai dit que je ne pouvais pas. Mais l'abstinence ce n'est pas le truc de Florian et encore moins sentir que je n'éprouve plus de désir pour lui. Avant, je trichais en imaginant que c'était toi, mais même ça, ne suffit plus. Le pire, c'est d'imaginer vivre encore le reste de ma vie comme ça. Faire mon devoir conjugal, en éprouvant autant de plaisir qu'une prostituée avec ses clients. Organiser des vacances en faisant semblant que l'on est heureux, pour ne pas faire trop souffrir les enfants. Rentrer et le voir regarder des jeux télévisés, comme s'il avait cent ans. Parler de la pluie et du beau temps, pour ne pas parler de nos souffrances.

Mais Maëlle ne me pardonnerait jamais si je partais !

Une vie pour les autres. C'est peut-être ce que je dois faire. M'oublier ! De toute façon, je ne sais pas si le bonheur est un truc fait pour moi ?

J'ai cru l'apercevoir une fois, il m'a dit que j'étais gentille, mais il a eu peur de me faire du mal. Des hommes qui m'ont fait du mal, il y en a eu pourtant et ce ne sont pas les remords qui les étouffaient. Un jour, je te raconterai peut-être.

Et voilà deuxième mouchoir !

11 décembre

Peut-être que ça va devenir un rituel, une discussion avec un Paul qui n'est pas vraiment là. Je me suis encore posé cette question aujourd'hui, qui me trotte dans la tête en ce moment : Est-ce que tu m'en veux ou es-tu désolé de m'avoir fait du mal ? Peut-être que tu ne sais même pas à quel point, tu m'en as fait !

J'ai un poids continuellement sur la poitrine et des fois ça remonte et je me mets à déborder. Le chagrin me submerge une larme vient perler aux coins de mes yeux, mon esprit s'évade loin, espérant que tout cette tristesse s'envole. Mais rien n'y fait, je reste paralysée sur ma chaise, écoutant le temps qui passe.

J'ai toujours aidé les autres espérant un jour, quand j'aurai besoin d'aide à mon tour, quelqu'un vienne me tendre la main.

Le jour est venu, où j'ai besoin d'aide, mais personne n'arrive, pas le moindre chevalier, pas même un ami pour me prendre dans les bras, pour me dire vient pleurer sur mon épaule, je n'ai pas peur d'être trempé poulette.

Florian est un pessimiste chronique, à tendance dépressive, ancien alcoolique. J'ai continuellement essayé de lui remonter le moral, d'apaiser ses angoisses et maintenant que c'est à mon tour d'être mal, il me fait culpabiliser en parlant de mourir...

Aujourd'hui, j'ai repensé à une de nos conversations : suis-je ange ou démon ?

Tu as dit un gentil démon, mais au fond, je sais que je suis un ange, car je pense toujours au plaisir de l'autre, alors que le démon pense d'abord à son plaisir. Peut-être est-ce mal, car pour donner du plaisir, il faut aussi être à l'écoute du sien.

Voilà, il est l'heure de dormir et demain, je retrouverai le vrai Paul toujours joyeux (en surface peut-être).

Bonne nuit.

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