Chapitre 18 - 2

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Le soir-même, après avoir aidé Karel à s’endormir, Elma convoqua les autres dans la salle la plus éloignée de sa chambre et des quartiers du Maître des lieux. Elle avait choisi une pièce à l’étage qui leur était dédié. L’agitation était palpable.

  • Je n’y crois pas… s’exprima Orën, comment est-ce possible ? Comment est-ce qu’il a fait ?
  • Je dirai plutôt que la question se porte sur Radôn, répondit Elma. Qu’est-ce qui lui a pris de défier le pacte ? Jusqu’à aujourd’hui, il n’avait jamais montré de signes qu’il voulait trahir le Maître…

Elle émit un court silence et toisa chaque homme en face d’elle. Ce n’était pas normal. Radôn avait toujours fait en sorte de rester neutre, et avait toujours paru agacé de perdre son temps quand Serymar remettait tout le monde à sa place.

  • Cela ne signifie qu’une chose, reprit-elle d’un ton accusateur, quelqu’un l’a poussé à commettre cet acte ! Et je veux savoir qui c’est !

Des éclats de consternation parcoururent l’assemblée.

  • Je vois, intervint Enorën. Seuls les actes avérés comptent dans ce pacte qui nous lie. Quelqu’un a donc poussé Radôn à commettre l’irréparable à sa place afin de ne pas mourir. Quelqu’un qui a sous-estimé la puissance du Maître.
  • Mais… intervint Erik, ses pouvoirs ne sont-ils pas censés s’affaiblir, vu son état ?
  • C’est toi qui as poussé Radôn à sa perte ? gronda Syvën.
  • Non ! Absolument pas ! J’énonce juste un fait logique… ce n’est pas normal, ce qui se passe !

Elma demeura silencieuse, mais garda la remarque en tête. Il était vrai que c’était étrange. Les sorts de Serymar étaient aussi efficaces que lorsqu’il était au sommet de ses moyens. Il y avait quelque chose qui n’allait pas. Connaissant Serymar, elle se doutait qu’il avait, comme toujours, pris de l’avance et fait en sorte que sa convalescence ne lui soit pas préjudiciable. Elma était curieuse de savoir comment il s’y était pris.

Dans tous les cas, ses homologues venaient de confirmer son hypothèse. Radôn avait été manipulé, et d’autres suivraient. Elle fixa Elkor.

  • Tu as déjà fait le coup pour Grim. Est-ce toi ?

Elkor la fusilla du regard.

  • Pourquoi tu m’accuses ?
  • Quand Grim est mort, il t’a accusé de l’avoir fait, et tu t’es défendu avec un grand calme. Pourquoi t’aurait-il accusé sans raison, alors que le Maître était sur le point de l’exécuter ?
  • Ça ne prouve rien ! Il était devenu fou, normal qu’il ait complètement débloqué, se défendit Elkor. Ce n’est pas étonnant quand on est sur le point de mourir.

Il marqua une courte pause.

  • Ensuite… reprit-il avec un mauvais sourire aux lèvres, je ne fais que mettre en pratique ce que le Maître fait lui-même : il a au moins raison quand il dit qu’il faut apprendre à ne jamais perdre ses moyens lorsque l’on se fait acculer, avec raison ou non.
  • Tu l’approuves quand ça t’arrange, souleva Orën. Après tout, tu es souvent le premier à le critiquer.
  • Je ne fais que voir d’une façon neutre ce qu’il est, se défendit Elkor. En tout cas, il montre qu’il reste dangereux même affaibli. C’est quand même pas de ma faute si Grim ne s’est pas rappelé à qui il avait affaire !
  • Qui pouvait savoir que les pouvoirs du Maître étaient encore à leur plus haut niveau ? soupira Reynald.
  • Ah, parce que tu comptes aussi te retourner ? questionna Raël.
  • Je n’ai jamais…

Un coup de canne sonore fit taire tout le monde.

  • Ce n’est pas en nous jetant des pierres que nous avancerons ! s’agaça Enorën. Il est évident que le coupable ne se dénoncera pas.
  • Alors comment le trouver ? questionna Lorn.
  • Je n’ai pas réponse à tout. Je sais seulement que nous devons continuer à nous épauler les uns les autres pour survivre.

Un ricanement retentit. Enorën darda ses yeux gris sur Elkor.

  • Aurais-tu quelque chose à redire ?

Elkor lui offrit une expression suffisante.

  • J’apprécie que tu te rendes enfin compte que ton cerveau déraille ! Mieux vaut tard que jamais !
  • Elkor ! cria Elma, furieuse. Je te somme d’être plus respectueux !
  • Elma, calme-toi, je t’en prie, la coupa Enorën avec calme. Des mots aussi creux ne m’atteignent pas, tu le sais.
  • Ce n’est pas une raison ! Je ne laisserai plus passer de tels propos !

Elma contourna la table et s’avança au milieu de ses homologues. Elle les toisa chacun.

  • Je tiens à vous présenter des excuses, à tous. Si Grim et Radôn sont morts, c’est de ma faute. Je suis sincèrement désolée.
  • Pourquoi tu dis ça ? fit Raël. Ce n’est pas toi qui as poussé Grim et Radôn à violer le pacte.
  • Le Maître m’avait donné pour mission de créer une cohésion. Pourtant… j’ai failli à cette tâche. Je… je l’avoue, je n’ai pas osé vous en demander plus. Je ne voulais pas vous imposer une quelconque autre pression que celle que vous ressentiez déjà. Si… si j’avais osé m’imposer, si j’avais mérité votre confiance à chacun… peut-être que Grim ne serait pas mort. Il m’aurait peut-être demandé de l’aide au lieu de dériver. Peut-être que Radôn ne serait pas mort hier soir. S’il m’avait parlé, j’aurais pu l’aider à trouver une autre solution.

Un silence accueillit sa déclaration. Elma se força à garder la tête haute malgré la culpabilité qui l’étouffait.

  • Je suis tellement désolée…
  • C’est tout ? répondit une voix glaciale.

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