Chapitre 46 - 1

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  • Franchement… C’est quoi tout ce délire ? interrogea Lya. Moi je veux bien l’aider, mais si on ne m’aide pas à comprendre, ça va être compliqué !

Karel était ressorti maussade et renfrogné de son entretien. Depuis, il avait refusé de converser et avait décidé de s’isoler dans la chambre de l’auberge. Il avait seulement décrété avec humeur qu’il avait vu beaucoup trop de monde pour aujourd’hui, et qu’il en avait désormais assez de faire des efforts en constatant que ceux-ci ne payaient pas. L’adolescent avait même refusé de manger avec sa famille, attablée dans la salle commune.

  • Je pense que le passé de ton frère refuse de le lâcher, suggéra Sorel. Tu sais, le monde de la sorcellerie croit beaucoup aux légendes et aux prédictions. Tu es au courant, maintenant, ton frère en a payé très chèrement les conséquences.
  • Ce n’est pas juste…
  • En effet. Et crois-moi, cela nous met autant en colère que toi. Si ça ne tenait qu’à nous, nous ne vous aurions jamais envoyé ici, mais le fait est que nous tenons beaucoup à vous. Vous mettre en danger simplement à cause de nos méfiances nous paraît particulièrement irresponsable. Vous êtes doués de magie. Il est très important que vous sachiez maîtriser vos pouvoirs, pour votre propre bien. Et ça, nous ne pouvons malheureusement pas le faire.
  • J’ai la désagréable impression que certains vont plus s’intéresser à ses pouvoirs et à son histoire qu’à son bien-être, soupira Eylen. Nous avons déjà suffisamment de mal comme ça à sortir Karel de sa carapace… Je ne sais pas si c’est une bonne idée, finalement. Personne ne sait ce qu’il a réellement vécu, et j’ai peur de l’imaginer. Ça me rend malade… Et ne pas savoir complique les choses. Je ne sais même pas comment aider mon propre fils ! Ces gens risquent d’empirer son état !
  • Ça n’arrivera pas.

Eylen et Sorel se tournèrent vers leur fille, surpris. Son regard brillait d’une intense détermination, son poing serré sur la table.

  • On a beaucoup trop avancé pour se permettre de reculer, reprit fermement Lya. Karel arrive à parler, maintenant. Bon, il faut encore qu’il s’améliore, mais il revient déjà de loin en à peine un mois. Avant, il ne savait ni parler, ni lire, ni écrire, et ne comprenait rien à ce qu’on lui disait. Aujourd’hui, il arrive à faire des phrases. On lui a même rendu le sourire ! Je vous le promets, je ne le lâcherai pas !
  • Lya, tu es adorable, mais n’oublie pas ce que je t’ai expliqué à Var, lui rappela Sorel.
  • Oui, je sais ! Mais je ne sais pas si tu le sais, mais depuis quelques temps, Karel se met à me protéger aussi. Tu sais… Toutes ces bagarres à l’école… Ben en fait… C’est lui chaque fois qui s’interposait pour les arrêter malgré les moqueries qu’il subissait. Même s’il n’y arrivait pas tout le temps. Tout à l’heure, dans la salle d’attente, trois garçons nous ont provoqué. J’ai failli réagir comme à chaque fois. Sauf que je me suis souvenue de ma promesse, et surtout, j’ai pensé à Karel, qui m’a empêchée d’agir n’importe comment. Alors je n’ai pas réagi comme d’habitude. Enfin, tout ça pour te dire de ne pas t’inquiéter, il me rend bien la pareille. Et il m’aide beaucoup dans les domaines où j’ai des difficultés. Comme moi quand je l’aide à traduire ce qu’on lui demande.

Ses parents préférèrent ne pas relever, et surtout, ne pas penser à « l’autre manière » que Lya avait employé, connaissant le caractère bien trempé de leur fille. Un tempérament qui ne s’était pas amélioré depuis l’arrivée de son frère, bien au contraire.

  • On ne se lâchera pas, promit Lya. Il faut juste ne rien lâcher, c’est tout. En fait, il faut juste qu’il apprenne à se défendre et qu’il apprenne à avoir confiance en lui.
  • Et toi, ma chérie, lui demanda Eylen. Comment s’est passé ton entretien ?

Lya lâcha un léger soupir.

  • Ben faut l’avouer, passer juste derrière Karel après tout ce remue-ménage, ça n’a pas été évident ! En plus, vu la situation, j’avais plutôt peur de laisser Karel tout seul avec tous les autres qui jasaient. Puis vu la tête qu’il faisait en sortant, je craignais qu’il ne fasse une bêtise… Parce que franchement, quand il craque, il devient imprévisible et tout aurait empiré, surtout avec les trois crétins, là…

Lya se rappelait avec amertume sa violente réaction, lorsque Karel les avait accusés de vouloir les abandonner. La colère qu’elle avait lu dans ses prunelles la faisait encore frissonner.

  • Heureusement, j’ai prévu le coup ! Qu’on lui fasse une scène ou pas, avec les trois autres, j’étais quand même super inquiète. Alors pendant qu’il était avec eux, j’ai demandé à Lyrielle, une fille très sympa avec qui on a parlé, de rester avec lui, et j’ai demandé à Karel de faire de même juste avant de rentrer.
  • Nous te demandons de nous parler de toi, Lya, pense un peu à toi, dans cette histoire, la coupa gentiment Sorel. Comment est-ce que ça s’est passé pour toi ?

Lya répondit par une moue un gênée, peu habituée à parler d’elle-même.

  • Ben c’était un peu bizarre, pour le coup. Ils ont d’abord vérifié quelle magie j’avais, puis ils m’ont posé des questions… Sur Karel.
  • Et que leur as-tu répondu ?
  • Je leur ai répondu que je n’avais pas envie de leur répondre, renseigna Lya le plus normalement du monde, fidèle à elle-même.

Ses parents n’eurent pas le cœur de lui faire la moindre réflexion, et évitèrent soigneusement de s’imaginer la scène.

  • Après, ils m’ont juste demandée de faire de la magie, sauf que je ne sais pas comment m’y prendre. Alors ils m’ont expliquée, et j’ai réussi à faire un semblant de feu avec ma main. Ensuite, ils ont allumé un feu pour voir comment est-ce que ça réagissait avec moi, et à quel point j’étais capable de plier la flamme à ma volonté. Mais ça n’a pas été très facile. Après, j’ai pu rejoindre Lyrielle et Karel.

Lya se retint d’ajouter qu’elle avait dû en remettre deux à leur place pour défendre les deux concernés, parce que même Lyrielle semblait du genre à s’écraser quand il ne le fallait pas. Lya soupira. Dans ce domaine, ces deux-là étaient de vrais boulets, qu’elle avait juste envie de saisir par les épaules pour les secouer comme des pruniers afin de les obliger à affronter les problèmes.

  • Bon. Dans tous les cas, vous êtes tous les deux admis, déclara Eylen en désignant un document qui leur avait été remis. Nous irons dans la boutique d’artéfacts cet après-midi après manger. Ensuite, nous réglerons les détails de votre hébergement.
  • Pas de problème ! répondit Lya. Je vais aller le chercher.
  • Non, Lya, reste ici, je m’en charge, l’arrêta son père en se levant. Il est temps que nous discutions sérieusement.

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