Chapitre 1

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L’ombre lui attrapa les cheveux et la tira vivement dans une pièce sans issue. La peur s’immisçait dans ses veines, glaçant son sang. Elle ne pouvait plus bouger. La silhouette noire la poussait vers une table. Son cœur battait à tout rompre. Elle retenait un cri qui pourtant voulait s’échapper.

Elle se réveilla en sursaut, mouillée de sueur, encore ce rêve. Même s’il venait de moins en moins souvent, son intensité ne mollissait pas. Elle se prépara pour une nuit écourtée par le spectre vertigineux de ses angoisses.

*****

La sonnerie du réveil et l’odeur du café qui finissait de couler lui chatouilla le nez et l’aida à sortir de la torpeur tourmentée d’un sommeil qui était finalement venu, trop tard ou trop tôt, elle ne savait plus. Elle s’étira et repoussa sa couverture. Un pied, deux pieds au sol, dans une demi-heure elle devrait être partie. Pas question d'être en retard aujourd’hui.

Le café bu, ses cheveux attachés à la va-vite, des habits choisis à la hâte dans l’armoire, et ses chaussures enfilées, sac sur l’épaule, elle sortit de son petit appartement. Elle croisa Peter qui comme tous les matins dévalait les marches d'escaliers deux par deux dans un acte désespéré pour rattraper le temps.

Elle ouvrit la porte du hall et l’air froid de l’hiver New Yorkais vint la happer avec intensité. Elle tira le bonnet du fond de son sac et l’enfila jusqu’aux oreilles.

Elle n’habitait pas très loin des bureaux Bouchard, un petit quart d’heure à pied. Elle aimait ce moment où perdue au milieu de la foule déjà dense elle pouvait observer sans être vu. Elle adorait étudier les passants, leur façon de s’habiller. Ici, les gens n’avaient que faire du regard de l’autre et osaient parfois des mariages de couleurs ou de genres improbables d'un rendu magnifique. Elle avait toujours été subjuguée par les tissus, les pigments. Elle imaginait des alliances de dentelles et de coton gratté.

Qui aurait pu penser que la jeune femme gauche et mal fagotée travaillait pour une petite maison de création. Elle n’était pas styliste, ce rêve-là n’était pas pour elle. Elle occupait le simple poste de secrétaire.

Souvent la première arrivée, elle allumait son PC, coulait un café, récupérait le courrier, le triait en sirotant le breuvage fumant dont elle laissait toujours refroidir le fond sur un coin de son bureau.

Aujourd’hui, un nouveau Directeur de Collection arrivait. Elle avait dû s’occuper de tout, il ne manquait plus que les connexions au réseau. Elle espérait que leur correspondante informatique était déjà là. Elle pianota le numéro interne sur son téléphone.

Son vœu fut exaucé, Jude était déjà arrivée. Elle ne semblait pas très en forme, elle avait la voix rauque de quelqu’un qui s’était couché tard et avait trop fumé. Sa soirée avait dû être agitée. Ce qu’elle confirma dans un grand bâillement qui résonna dans l’oreille d’Eva.

Eva lui demanda de venir au bureau du nouveau pour effectuer les dernières connexions au réseau qu’il manquait pour que tout soit opérationnel. Et même si Jude rechignait sur le ton dictatorial, elle passa son joli petit minois à travers la porte cinq minutes plus tard.

Eva lui tendit la tasse de café qu’elle avait pris soin de lui verser en l’attendant.

Les deux collègues entamèrent une conversation plus personnelle que professionnelle. Elles étaient arrivées en même temps chez Bouchard et avaient très vite lié un lien d'amitié.

- Sortie avec Jammie hier soir ?

- Non Jammie c’est de l’histoire ancienne ! Hier on est sortie avec les filles au Sunset.

-La nouvelle discothèque ?

-Ouais faudrait que tu viennes avec nous un de ces quatre ma vieille.

-Tu sais bien que j’ai du mal avec Carla, je ne vois vraiment pas ce que tu lui trouve.

-Oh, elle a juste des entrées privées dans tous les bons coins de la ville."

Cette remarque fit sourire Eva, c’était du Jude tout craché, sympa mais parfois opportuniste. Carla était la jeune styliste fraichement sortie de l’école embauché par M. Bouchard il y avait à peine six mois. Cette fille était une carriériste, le cauchemar de toutes les femmes et le fantasme de tous les hommes. Jeune, belle, intelligente, son physique d’Italienne cheveux longs jusqu’aux reins ne laissait aucun homme indifférent, elle le savait et en jouait largement. Carla avait un côté hautain et depuis qu’elle était là, elle dédaignait purement et simplement Eva. Elle paraissait la détester. Eva ne comprenait pas. Comme à son habitude, elle restait discrète et effacée et pourtant Carla était méprisante. Sûrement se demandait-elle ce qu’une fille aussi mal habillée faisait chez Bouchard. Carla, elle, était toujours tirée à quatres épingles avec des vêtements de grandes marques. Jamais rien ne clochait. Eva de son côté accordait peu d'importance à son apparence et Carla s’en amusait sans aucune bienveillance.

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