Mémoires : treizième fragment

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Je me réveillai allongée dans ma chambre. La lèvre endolorie. Un médecin s'occupait de me raccommoder. La porte s'ouvrit sur l'homme de mes cauchemars. Il s'approcha du lit, voulant me caresser les cheveux. Je me reculais vivement. Les deux hommes échangèrent un regard entendu. Je criais presque :

" Où est-il ?

- Qui ça bébé ? Me demanda-t-il le plus naturellement du monde.

- Eric, où est-il ?

- Je ne sais pas de qui tu parles. "

L'épouvante me prostra. Il n'était quand même pas... Mais plus rien ne pouvait m'étonner venant de lui. Était-il capable d'aller jusque-là ? Je le pensais. Anéantie par ma culpabilité, je me mis en position fœtale. Mes bras entourant mes genoux. Je ne voulais plus penser, seulement m'évader de cette tristesse.

Les deux hommes s'interrogeaient sur la nécessité de m'interner. Mentalement, je validai. Qu'ils m'internent, qu'ils me sortent de cette prison où mon âme s'asphyxiait. De toute façon, j'étais perdue, ma raison s'envolerait bientôt comme un vieux souvenir. Le médecin me tendit trois cachets que j'avalai sans broncher. Ma nuit fut profonde et noire, sans cauchemar.

Le lendemain matin, je montai dans la voiture direction la clinique privée du Docteur Pelletier. Il me tendit les papiers déjà remplis, mon cher concubin aimait être prévoyant, il ne me restait plus qu'à signer en bas à droite. Je devais encore me considérer chanceuse, car il me paya une chambre individuelle avec salle de bain privative. Elle était épurée au maximum, un lit, une table de chevet, une chaise, un bureau et une télé accrochée au mur. Elle me rappela celle du foyer.

Mon programme était bien établi. Tous les matins, en m'apportant mon déjeuner, l'infirmière s'assurait que je prenne toutes mes pilules. Le psychiatre s'attardait cinq minutes pour me parler. Puis, on me laissait à mes occupations. Je restais des heures à ingurgiter les images qui défilaient sur l'écran de télévision.

Lorsque les médicaments me le permettaient, je pensais à Eric. Que lui était-il arrivé ? Un seul homme pouvait me l'apprendre, mais il restait muet sur le sujet. Il ne passait me voir que très rarement. Je n'avais pas droit à d'autres visiteurs que lui, alors sa venue ressemblait à une récréation. Il aimait se sentir important pour moi.

Après plusieurs semaines, le médecin signa mon aptitude à sortir et reprendre une vie normale. Je ne savais plus ce qu'était une vie normale. Mon cerveau était endormi, je vivais sous la coupe d'un homme obsessionnel et je n'avais plus goût à rien.

Me retrouver une nouvelle fois dans la prison qu'était mon appartement ne m'enchantait guère. Renouer avec lui et sa folie me semblait insurmontable. Mais je n'avais pas d'autres choix.

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