Pendant cinq heures, dix jeunes gens de dix-huit ans font leur entrée au Centre de Sélection National. Afin qu’aucun ne se rencontre avant leur entrée dans l’arène, ils sont accueillis séparément par des Instructeurs, des Sanctifiés bénévoles, et placés dans des salles étroitement surveillées. Aëlis Varn est la première arrivée. Confiant, calme, son Instructeur la fait entrer dans la salle d’examen. Tous les combattants vont passer le même examen dont le médecin ma adapter le dernier repas, pour essayer de réduire les inégalités entre tous. Pour Aëlis, fille de Sanctifiés, entrainée depuis l’enfance pour gagner, l’examen est rapide. Son repas sera ce qu’elle a toujours connu. Légumes, protéine, féculent. Pas besoin d’apport complémentaire. Elle a le profil parfait d’une gagnante. Sa famille compte sur elle, et elle ne compte pas les décevoir.

— Madame Elister ? Général Kall, je…

— Kall ? Comme Soren Kall ? Général, ne savez-vous donc pas qu’il est interdit aux parents d’assister au Programme de leur enfant ?

— Je le sais, Madame. Je venais simplement vous informer que les dix participants sont arrivés, aucun déserteur. Je me retire maintenant pour que mes fonctions n’interfèrent pas avec la présence de mon fils.

— Merci, Général Kall. J’espère que vous avez fait vos adieux à votre fils. Tout comme les Varn, et les Delevre. Vous pouvez disposer.

Sur l’immense mur de la salle des opérations du Centre de Sélection National, dix écrans géants diffusaient en direct les visages de dix participants, confinés dans leur chambre jusqu’au début du Programme. La présentatrice, Madame Elister, analysait attentivement les dossiers des participants, tandis que l’équipe technique se mettait en place. Des centaines de caméras ornaient l’arène, de quoi suivre chaque geste de chaque participant, dans chaque recoin. Chaque candidat avait une équipe de trois techniciens, qui allait se relayer, jour et nuit, jusqu’à la mort et la gagne de leurs candidats attitrés, pour afficher en temps réel chaque instant de celui-ci.

— Votre attention s’il vous plait ! commença-t-elle. Voici vos équipes et le combattant qui est affecté. Équipe une, Aëlis Varn, Eden, fille de Sanctifiés. Équipe 2, Naël Corven, Zone pauvre, orphelin. Équipe trois, Soren Kall, Eden, fils de Sanctifiés. Équipe 4, Ilya Rames, Zone moyenne, fille d’infirmière, dossier de sa mère confidentiel, père inconnu. Équipe 5, Eron Delevre, Prison carcérale d’Eden, fils déchu de Sanctifiés. Équipe 6, Tessa Jorn, Quartier industriel, père sanctifié durant la Session 229, mère décédée durant la session 231. Équipe 7, Cameron Sirven, Zone pauvre, orphelin de la forêt. Équipe 8, Mira Dovren, Zone religieuse, mère et père décédé durant la session 231. Équipe 9, Jalen Tor, Zone ouvrière, père et mère décédée lors de la Session 230. Équipe 10, Liora Ensen, Zone moyenne, père et mère décédée durant la session 232.

— La session 232 ? Interpella l’un des techniciens. La mère est tombée enceinte à quinze ans ?

— Exactement. Pour notre plus grand plaisir aujourd’hui. Si tout le monde mourait sans faire d’enfant, nous n’aurions plus de Programme 10. Il leur est, très fortement, conseillé de faire au moins un enfant avant leur Programme. Leur moyenne est à dix-sept ans. Certains, comme les Ensen, veulent passer quelques années avec leur progéniture, avoir plusieurs enfants, donc s’y prennent tôt. Cette jeune fille a eu des parents pendant trois ans. C’est rare, quand on n’est pas un enfant de Sanctifié.

Pendant les dix minutes suivantes, l’ensemble des équipes de techniciens s’affairent à étudier le dossier de leur combattant. Toutes les informations personnelles récoltées allaient leur servir à adapter les choix de plans des caméras. Les Maitres des Jeux, trois hommes et femmes Sanctifiés qui avaient analysé les combattants en amont, pour définir les épreuves, les énigmes, les jeux qu’ils allaient devoir effectuer, pour espérer gagner des armes, des protections ou même un peu de nourriture et d’eau. Eh bien quoi ? Qu’est-ce que vous croyiez ? Que toutes les armes seraient mises au centre de l’arène, à porter de tous pour créer un bain de sang en moins d’une minute ? Et bien non. Ça n’amuserait pas les Maitres des Jeux et les techniciens. Par exemple, un combattant tombe sur une caisse dans un couloir, avec un cadenas. Sauf qu’au lieu qu’il y ait des chiffres, il y a des symboles. Comment peut-il trouver les symboles, me direz-vous ? Eh bien, il va devoir observer son environnement. Et ensuite ? Soit il a de la chance et il trouve une arme, soit la chance a choisi un autre combattant et il aura seulement une trousse à pharmacie. Vous avez tout compris ? Alors qu’attendez-vous ?

— Instructeur, ajouta Madame Elister, faites entrer les combattants dans l’arène. Que le Programme 10 — Session 247 — Groupe 6 commence.

— Vivre est un privilège ! entonnèrent les techniciens. Prouvez que vous le méritez.