Histoire de Léa

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L'histoire se déroule dans un petit village de Picardie, où vivaient les parents de Léa. Son père, Picard de naissance, et sa mère, Parisienne. Qu'était-elle venue faire ici ? Une femme très belle, mariée à un ours. On se croirait dans un roman. Malheureusement, ce sera un roman dramatique.


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Les grands-parents paternels de Léa ont eu onze enfants. Son père était le deuxième. Il était celui qui travaillait aux champs, pendant que son aîné allait à l'école. Il devait veiller sur ses petits frères et sœurs. Toute son enfance, Léa l'a entendu leur répéter qu'ils devaient travailler à l'école pour ne pas être comme lui : un homme illettré travaillant en usine, car il n'avait pas d'instruction.

Il n'a pas eu une vie facile. Il a assisté au décès de sa benjamine. Depuis quelques jours, elle souffrait de maux de tête et de ventre. Sa mère ne s'était pas inquiétée. Elle a demandé à son fils Marcel et à une de ses sœurs de rester avec elle, pendant qu'elle allait à Paris rejoindre son amant. Vers la fin de l'après-midi, voyant leur sœur souffrir, ils ont appelé le docteur. En arrivant, le médecin n'a rien pu faire. Elle est morte quelques minutes plus tard. Ils ont vu leur sœur hurler de douleur avant de se vider devant leurs yeux.

Léa n'a jamais su la maladie responsable de cette mort. Mais elle se souvient des larmes de son père quand il en parlait avec ses enfants. Ce drame a blessé profondément ces deux adolescents, mais aussi le reste de la famille. Sa tante gardera des séquelles psychologiques toute sa vie. Son seul soutien sera ce frère, qui savait l'écouter, quand elle l'appelait une fois par semaine, pour épancher sa peine et ses regrets. Il ne l'a jamais rejetée, car il savait qu'elle souffrait depuis toutes ces années. Les oncles et ses tantes de Léa n'ont jamais formé une famille unie. Il y avait toujours des rancœurs et des jalousies entre eux. Son père a toujours joué son rôle de grand frère en allant les voir régulièrement. Cette fonction énervait la mère de Léa, car ses beaux-frères et belles-sœurs la critiquaient.

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Les grands-parents maternels de Léa vivaient à Paris. Ils avaient eu trois enfants. La mère de Léa, Sabine, est la benjamine. À cette époque, les hommes appelés pour la guerre pouvaient être dispensés s'ils avaient plus de trois enfants. La mère de Léa est née en février 1940. Ainsi son grand-père a été dispensé d'aller se battre pour sauver son pays.

Sabine a entendu cette rengaine toute sa vie. Elle était la petite dernière. Son père et son frère aîné l'aimaient beaucoup. Un peu trop même, puisqu'ils ont abusé d'elle.

Après son certificat d'études, elle aurait voulu suivre l'école Pigier, pour apprendre le métier de secrétaire. Sa sœur n'a pas voulu, car on lui avait refusé de faire des études quelques années plus tôt. Sabine était une très belle femme. Blonde, les yeux marrons, un mètre soixante-dix, soixante de tour de taille et une jolie poitrine. Elle a souvent été contactée dans la rue par des photographes qui voulaient qu'elle devienne mannequin. Mais son père n'a jamais voulu.

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Pour fuir sa famille, elle s'est mariée avec un homme qui vivait en Bretagne. Personne ne sait comment elle l'avait rencontré, mais Léa connaît le calvaire qu'elle a vécu. Il était très jaloux. Elle n'avait jamais connu d'homme avant lui. Sa nuit de noces fut un viol. Cet homme avait un pénis de vingt-cinq centimètres. Il aurait dû porter des bagues pour diminuer la pénétration, ce qu’il refusait. Pour lui, cela aurait été reconnaître qu'il avait un problème. Cette femme a souffert chaque fois qu'ils avaient des rapports sexuels. Il la battait, et, quand il sortait, il l'attachait au radiateur. Il lui interdisait de parler ou de recevoir ses parents. Elle est restée mariée avec lui un an. Un jour, elle a réussi à envoyer une lettre à son père, lui racontant son calvaire. Il est venu la chercher et elle a divorcé.

Elle a emménagé dans un appartement à Paris, avec comme voisine une jeune femme de la campagne oisienne. Elle lui racontait qu'elle habitait dans un château et que sa famille était riche. C'est ainsi qu'elle a rencontré son futur époux, un homme doux et gentil, comparé à son ex-mari. Ils se sont vus plusieurs fois et ont commencé une relation intime.

Sabine ne connaissait rien au sexe, seulement la violence. Lui était tendre et attentif. Malheureusement, après avoir été détruite par son premier mari, jamais elle n'aura de plaisir sexuel. Quelques mois plus tard, elle attendra son premier enfant. Elle se pensait stérile, car elle n'était jamais tombée enceinte pendant son mariage. Le médecin lui expliquera que cet homme, par son pénis trop grand et sa violence, détruisait ses spermatozoïdes chaque fois.

C'est ainsi qu'elle a emménagé chez ses futurs beaux-parents dans la jolie campagne picarde.

La vie à la campagne, dans un village de trois cents habitants, ne fut pas de tout repos pour cette jeune maman. Elle sentait le regard de sa belle-mère qui n’était pas du tout satisfaite de cette union. Son mari, lui, se taisait. Ils vivaient chez ses parents et il faisait profil bas, le temps qu'ils puissent avoir un chez eux.

Sabine était très belle, et tous les regards le lui montraient. Elle en était gênée et essayait de ne pas en tenir compte. Comme partout, les femmes étaient jalouses, et sous-entendaient qu’elle allait très certainement tromper son mari.

Après six longs mois, ils ont pu trouver une petite maison dans le haut du village. Une vieille bâtisse où les murs laissaient les araignées et les souris se balader. Elle a souvent cabossé des casseroles sur ces petites bêtes. Derrière sa fenêtre, elle voyait passer les voisins et habitants de cette commune, si peu accueillants à son goût.

Ces paroles, ces regards, ces mesquineries l'ont amené à ne plus vouloir sortir de chez elle. Sa seule visite était la tante de Léa, la sœur de son mari, son ancienne voisine de palier qu'elle avait connue à Paris. Léa les entendait parfois rire aux éclats, surtout quand Sabine lui rappelait qu'elle n'avait toujours pas trouvé le soi-disant château.

Seize mois après la naissance d’Étienne, le fils aîné, Fabrice, le cadet est arrivé. La maison devenant trop petite, les parents ont fait construire une maison, dans le bas du village, sur un terrain vendu, à l'époque pour une misère, par la grand-tante du mari de Sabine. Heureusement qu'ils avaient vu grand, car, quand ils ont emménagé, ils avaient déjà trois enfants avec la naissance de Gabriel et le quatrième, Lucien, était en route. Léa est la cinquième de cette fratrie, la seule fille, suivie de Ludovic, Charles, Octave, Cyril et Sylvain. Dix enfants en quinze ans !

***

Le père était routier pour les céréaliers. La mère ne travaillait pas, car son travail était chez elle. Le ménage, les repas, les enfants, les devoirs… Sauf les courses, car elle n'avait pas le droit de sortir. Elle aurait pu dépenser l'argent du foyer ! Et ça, il ne le voulait pas. Alors, parfois, elle commandait sur La Redoute ou Les Trois Suisses. Elle essayait d'habiller ses enfants à la mode. Mais il ne fallait pas que son mari soit là quand le livreur passait, sinon, c’étaient des cris jusqu'à n'en plus finir. Elle accepta tout, pendant des années. Sa vie était d'être mère. Mais pas quand ils grandissaient. En fait, elle était heureuse de s'en occuper de la naissance à leurs quatre ans. Après elle ne pouvait plus. C'était trop dur ! Pourquoi ? Bonne question ! Aujourd'hui encore, la question est toujours sans réponse.

Peut-être devenaient-ils trop indépendants ? Pas assez dépendants de leur maman ! Alors au fil des années, elle s'est déchargée sur sa seule fille, et Léa est devenue une petite maman.

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