J'appuie sur le bouton pour appeler l'ascenseur. Quand il arrive, je monte dedans et appuie sur le bouton du dernier étage. C'est aussi le dernier qu'il me reste à inspecter. Les portes se ferment et l'appareil monte. Quand elles se rouvrent, je descends de la cabine métallique et traverse le couloir plongé dans l'obscurité, en éclairant chaque recoin de ma lampe torche. Le dernier étage est aussi celui où se trouve la morgue. C'est le dernier endroit que j'inspecte. J'ouvre la porte et jette un coup d'oeil circulaire aux lieux. C'est alors que je constate que l'une des petites portes métalliques est ouverte. C'est étrange. Qu'il y ait un corps ou non, elles devraient toutes êtres fermées.

Je prends une grande inspiration et m'approche tout doucement, à pas de loup, de celle-ci. Je me penche lentement pour regarder à l'intérieur, retenant ma respiration. Je sens mon coeur battre à tout rompre, mais je dois vérifier. Tous mes muscles se détendent et je pousse un soupir de soulagement en constatant qu'elle est vide. Je laisse même échapper un rire nerveux, me moquant intérieurement de moi-même. À quoi m'attendais-je ? C'est sûrement l'un des membres du personnel qui a oublié de la refermer. Je m'en charge donc à sa place et quitte l'endroit, bien décidée à retourner au rez-de-chaussée pour prendre un bon café bien chaud.

Je retourne dans l'ascenceur et suis sur le point d'appuyer sur le bouton pour le faire descendre lorsque j'entends une petite voix aiguë m'interpeller :

- S'il vous plaît ! Je veux aussi le prendre !

C'est une petite fille aux longs cheveux noirs qui se précipite vers moi en courant. Elle porte la blouse de l'hôpital et j'en déduis donc qu'il s'agit d'une patiente. Elle entre dans l'ascenseur et me remercie avec un grand sourire. Je le lui rends et appuie sur le bouton. Les portes se referment et la machine se met en marche. J'en profite pour lui demander :

- Que fais-tu en dehors de ta chambre à une heure pareille ?

- Oh ! Je suis désolée. . . J'étais partie récupérer une affaire à moi que j'avais oublié dans la chambre d'une amie.

Je lui souris à nouveau pour la rassurer et son air attristé disparaît. Elle est vraiment jolie quand elle sourit !

Je suis sur le point de lui proposer de la raccompagner dans sa chambre lorsque je remarque que l'ascenseur remonte alors qu'il n'a même pas encore atteint le rez-de-chaussée. Je rappuie sur le bouton plusieurs fois, en vain. Nous retournons contre notre gré au dernier étage et les portes s'ouvrent sur le couloir obscur. Je parviens tout de même à distinguer une silhouette s'approchant à toute vitesse et braque ma lampe torche dessus pour l'éclairer. Je constate avec horreur qu'il s'agit d'un homme à la peau pâle, vêtu lui aussi de la blouse de l'hôpital. Il nous fonce dessus avec un sourire qui n'a rien de rassurant. J'appuie frénétiquement sur le bouton de fermeture des portes, sans lâcher du regard cet individu approchant inexorablement de nous !

Les portes finissent par se refermer in extremis et je pousse un soupir de soulagement. Je m'apprête à rappuyer sur le bouton permettant de descendre au rez-de-chaussée lorsque la petite fille à côté de moi me demande, confuse :

- Pourquoi ne pas l'avoir laissé entrer ?

Je ne devrais pas dire ça à une enfant, mais j'ai besoin de le partager avec quelqu'un pour exterioriser toutes les pensées qui se bousculent dans ma tête et menacent de la faire exploser. Je lui dis donc d'une voix blanche :

- Cet homme. . . Il porte une étiquette rouge au poignet. C'est celle que portent les morts. . .

- Une étiquette rouge ? Comme celle-ci ? demande-t-elle en relevant sa manche avec un sourire sinistre. . .