Dernière prière

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Le vent s’élève au-dessus des arbres collés, rapprochés comme pour se tenir chaud. Le froid me cisaille les membres malgré mon épaisse couche de vêtements usés et troués.

Mes lèvres tremblent. Je ne vois pas à dix mètres tant la brume opaque voile ma vision. Je suis piégée au sein d’une bulle invisible que je n’ai pas créée. Et de laquelle je souhaite fuir.

À tout prix.

Mon cœur s’accélère. Je me souviens pourquoi je suis là.

Un cri de rage résonne dans la nuit. Un frisson lacère mon échine de long en large. J’écarquille les yeux et commence à suffoquer.

Non, ce n’est pas le moment. Pas maintenant.

Mes jambes se dérobent sous mon poids. Une lame siffle dans l’air au loin. Bientôt, elle sera en moi si je ne me relève pas immédiatement !

Une larme silencieuse rampe le long de ma joue pour fuir. La tristesse ne doit pas laisser place à la peur. La peur ne doit pas anéantir la tristesse. Je dois vivre avec. Pour toujours.

Dix ans séquestrée. Un malade. Un virus sans aucun remède. Une folie meurtrière. Voilà le tableau de mon agresseur. Et une nouvelle couleur pourrait s’y ajouter si je ne fais rien. Du rouge. Du sang. Le mien.

Je cours dans la direction opposée à la cheminée, tandis que des pas se rapprochent. Je déglutis. Me fige.

Un homme me fixe entre deux arbres voûtés, une grimace terrifiante éclairée par la lueur de sa lampe torche. Une bourrasque balance les gouttes de pluie agglutinées aux feuilles et aux branches sur les joues de mon bourreau. Flegmatique, il ne cille pas. Ne cligne pas des yeux.

Il fait un pas. Mon cœur tambourine. Je recule. Des brindilles craquent. Un objet pointu me touche le dos. Je pousse un cri. Regarde furtivement. Une vieille branche qui s’apprête à céder.

Un hululement de hibou me ramène à la réalité. Une seconde d’inattention est suffisante. Trop tard.

Mon agresseur en profite pour bondir sur moi, son arme à la main. Je suis une gazelle blessée. Lui est un lion affamé. Je prie. Je supplie.

La vie ne fait jamais défaut à la mort. Lorsque l’avion a décollé pour sa destination finale, il ne redescend jamais avant d’être arrivé.

Le couteau s’enfonce dans ma chair. Je suis incapable de hurler. Ma gorge se noue. Ma langue baigne dans mon sang. Ma vision se brouille.

L’homme me mordille l’oreille.

Tout tourne autour de moi. Il arrache mon jean couvert de terre humide.

Une ultime prière accompagne ma seconde larme de la soirée qui, je l’espère, sera la dernière : mourir avant d’être violée par un monstre.

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