CHAPITRE UN

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« Mesdames, Messieurs. Chers peuples de l’Humanité.

Aujourd’hui, nous célébrons un moment historique. Un moment que vous attendiez tous avec impatience. Aujourd’hui, nous révolutionnons la conquête spatiale !

Sans plus attendre, la Fédération d’Exploration Spatiale vous présente le fruit d’un travail acharné. Le projet lancé il y a de cela plusieurs années, en vu de ce grand jour. Voilà le centième départ définitif de la Terre pour les six différentes colonies spatiales !

Et oui, j’ai bien dit six ! Car cette année aura une particularité. Une splendide particularité que seul la F.E.S. aurait put imaginer.

Quatre de nos jeunes pionniers ne s’arrêteront pas à Nerani mais poursuivront leur route jusqu’à une nouvelle colonie découverte une année auparavant : Alpha 15 ! Et aujourd’hui, vous avez l’honneur de voir l’élite de notre nation, l’avenir de notre civilisation !

Mesdames et Messieurs, je vous demande d’applaudir bien fort Luce, Pamela, Loïc, et Romain ! »

Aveuglé par le feux des projecteurs, je ferme les yeux. Je fais le vide autour de moi et, comme me l’a appris Serena, je respire calmement. Ne pas penser aux journalistes… Ne pas penser à la foule… Ne penser à rien… Mais quelque chose me perturbe, un léger picotement à la jambe droite. Il s’intensifie jusqu’à me faire rouvrir les yeux. Je jette un rapide coup d’œil à cet endroit et identifie la douleur ; Loïc ! Il me souffle quelques mots avec un grand sourire et détourne la tête. Loïc est le seul avec qui j’ai pu discuter brièvement avant que l’on nous fasse monter sur une estrade entourée de journalistes et de badauds venus assister à l’événement. Mais je les comprend, nous sommes les seuls adolescents à avoir choisi une planète aussi lointaine pour notre Choix.

-Que ressentez-vous Loïc, vingt minutes avant votre départ définitif de la Terre pour Alpha 15 ? demande un journaliste.

Je regarde discrètement ma montre topographique qui confirme les dires du journalistes : 13 juin 2183, 11h39.

-Du soulagement ! lui répond-t-il. Du soulagement de enfin pouvoir quitter cette Terre de merde, rongée par la pollution de toute part ! Quand j’aurais enfin embarqué dans la navette, je ne jetterais même pas un regard derrière moi !

La fille a ma gauche pouffe et je retiens difficilement l’envie qui me prend. Décidément, Loïc a l’art de détendre la situation. Je le regarde plus attentivement cette fois et remarque ses yeux. Ils ne sont pas de la même couleur ! Grand, athlétique, blond aux yeux verts et bleus, ce type a vraiment un charme naturel.

-Pourquoi avoir choisi une planète aussi lointaine, et ne pas être plutôt partit pour Mars, ou Nerani ?

Cette fois, la question m’est directement adressée. Je réfléchis, déglutis difficilement, et consens enfin à y répondre :

-Justement car elle est lointaine. Justement car la plupart des personnes partent sur Mars, Jupiter, ou reste sur Terre. Nous avons tous été les quatre meilleurs élèves de notre promotion de terraformation et nous n’avons plus de famille. Pour ma part, il n’y a personne que je connaisse sur Terre.

Serena… Elle a été la seule personne à m’avoir remarqué et je ne l’oublierais jamais.

Les journalistes ont du apercevoir mon hésitation car les flashs crépitent et les caméras antigrav s’approchent de moi, prêt à immortaliser mes larmes. Je m’empresse donc de refouler ma tristesse derrière ce mur que je m’étais construit pendant toutes ces années de solitude. Loïc aussi a du s’apercevoir que quelque chose cloche car il continue à ma place :

-Le Choix arrive une fois par an pour tous les jeunes de seize ans. Ils choisissent dans quelles colonies ils souhaitent aller et y restent pour toutes leurs vies, sauf mission spéciale accordée. Tous ça, on nous l’a appris à l’école primaire. Notre n’avons pas choisi le plus facile, nous avons choisi le chemin tortueux. Notre Choix est la nouvelle planète Alpha 15, et nous ne le regrettons pas !

Étonné par tant d’audace de sa part, je reste bouche bée. Pamela lui donne une grande tape dans le dos et Luce acquiesce. Même l’équipe chargée de veiller sur nous est ébahie. Un grand homme en costume vient annoncer la fin de cette interview. Il nous fait descendre de l’estrade et nous amène jusqu’à notre astronef. Nous marchons sur un tapis rouge moelleux. Ils se sont vraiment donnés du mal pour nous !

L’homme devant moi se retourne et nous explique comment se déroulera le voyage :

-Bonjour à vous. Dans quelques secondes, vous allez embarquer dans la navette n°M0371 en direction de Mars. Le voyage durera très précisément 3 minutes et 2 secondes. Une fois arrivés, vous serez accueillis par une autre personne qui vous mènera jusqu’à une seconde navette, la n°J823. Le voyage en direction de Jupiter durera 34 minutes et 54 secondes. À la fin de…

-Oui on sait tout ça, l’interrompt Loïc en montant dans l’astronef. Bon, vous venez ou vous restez sur Terre ?

-Je peux pas te laisser tout seul, tu serais capable d’oublier de descendre de la navette, le charrie Pamela.

Et sur ces mots, nous nous engouffrons à bord de la navette n°M0371. Celle-ci est assez spacieuse. Des banquettes en cuir synthétique sont fixées au murs. Toutes sont occupés, sauf quatre. Je m’y assois, accompagné de Luce. Tous le monde nous regarde jalousement. Gêné, je détourne le regard et observe ma camarade.

Luce a le même âge que moi, pourtant, quelque chose dans son regard la rend plus mature, comme si elle avait enduré beaucoup de souffrances. Ses cheveux roux soigneusement ondulés le matin même lui tombent jusqu'aux épaules, ses yeux verts légèrement bridés s’accordent parfaitement avec son visage longiligne. Je dois le reconnaître, elle est assez attirante.

Tentant d’engager la conversation, je la questionne :

-Pourquoi tu as choisis de partir pour Alpha 15 ?

Elle devait être dans de profondes réflexions car elle me regarde bizarrement.

-Ils ont besoins de scentifique, et le travail là-bas servira au moins à quelque chose. Car tout a déjà été analysé sur Mars, Jupiter, Oxy, Niox 3 et Nerani. Et toi ?

Je ne sais pas pourquoi, mais la question m’a pris de court. Je tente de formuler une réponse intelligente sans y parvenir pour autant. Les seuls sons qui sortent de ma bouche sont des « heu ».

-Pourquoi tu veux être scientifique Luce ? Demande Pamela, se prenant à la conversation. Parce que je sais pas toi mais rester derrière des bureaux c’est vraiment chiant.

-Peut-être, mais sans nous, tu n’aurais pas de munitions et aucunes armes digne de ce nom.

-Comment…

Heureusement que la navette décide de décoller à ce moment précis et les empêche de se disputer ; je ne suis vraiment pas d’humeur à écouter ce genre de chose. La question du journaliste m’avait profondément bouleversée. Ai-je fais le bon Choix ? La seule personne à ne m’avoir écouté fut Serena. Elle m’avait aidé lorsque les autres élèves me rejetaient, elle m’avait inscrit au lycée de la Fédération d’Exploration Spatiale et m’avait permis d’étudier, à l’abri des moqueries. « La différence n’est pas acceptée. Pas encore... »

-C’est quoi cette tête de porte de prison ? m’interpelle Loïc.

Ses yeux vairons m’observent. Il semble lire en moi comme dans un livre grand ouvert.

-Tu sais, là où l’on va, c’est le paradis. Et entre le paradis et l’enfer, il n’y a aucun doute possible. Surtout quand la clé est dans tes mains. Alors oublie le reste. C’est maintenant que ta vie commence. Avant c’était… un entraînement !

-Qui parle d’entraînement ? lâche Pamela avec un regard d’envie, ce qui fait rire Loïc.

-Elle est militaire explique-t-il a mon intention. Bientôt…

C’est vrai qu’elle en a le physique. Cheveux coupés courts, yeux marrons pétillants, aspect rebelle, épaules massives ; voilà un spectacle étonnant, qui plus est pour une fille de seize ans.

Le temps d'assimiler cette information, la navette a déjà atterri sur Mars. Je me lève, me dirige vers le hublot et observe cette planète maintenant exotique. De grandes tours en verre synthétique s'élèvent fièrement au milieu de plaines luxuriantes. Il y a plusieurs années, un scientifique eut la merveilleuse idée d'amener sur la planète rouge des plantes génétiquement modifiées pour survivre à la biotope de cette planète inhospitalière. Depuis, elles envahissent tout espace délaissé, ce qui n'est pas forcément une mauvaise chose.

Loic me tire de ma contemplation a l'aide d'une grande tape dans le dos.

-Allez mon gars, on t'attends pour embarquer dans la nouvelle navette. Surtout Mike en fait... ajoute-t-il avec un clin d'oeil.

Nous sortons de la navette maintenant vide. Devant moi se tient un homme en costume gris impeccablement taillé sur mesure. Ses chaussures en cuir luisent sous le soleil. Comment a-t-il réussi à s'en procurer, je n'en ai absolument aucune idée. Il doit être sacrément bien payer pour pouvoir s'en payer !

-Nous n'attendions plus que toi, Romain, s'adresse-t-il à moi. Suivez-moi, je vais vous accompagner jusqu'à votre seconde navette en direction de Jupiter.

Il nous oberseve puis continue :

-Je pense que l'on vous l'a déjà dit mais ce voyage durera 34 minutes et 54 secondes. Ensuite, vous partirez directement pour Oxy. Et seulement là-bas, vous ferez une escale et pourrais y dormir.

-Le voyage jusqu'à Oxy durera combien de temps ? questionne Loïc.

-5 heures et 29 minutes, récite Luce comme un texte appris par coeur.

-Effectivement. Bon, suivez-moi.

Nous partons à sa suite vers notre nouvelle navette. Elle est de la même taille que celle que nous venons de quitter sauf que le logo de la F.E.S. est imprimé en grand sur son côté. Nous y pénétrons. A l'intérieur, des fauteuils attrayants reposent sur le sol, très certainement fixés eux aussi. La plupart des gens ne sont pas assis mais discutent en petit groupe. Je rejoins Loïc et Pamela, déjà en grande discussion avec un garçon aux cheveux bleus.

-C'est à cause d'eux que tout le monde est derrière les barreaux ou alors assassiné, explique le garçon. Ils ont corrompu tout les membres du gouvernement qui détiennent un pouvoir quelconque. Regarde ce qui c'est passé avec Mark Hanson ! Le premier ministre a tenté de faire un coup d'état. Et le ministre de l'environnement était à sa botte. Un peu d'argent et le tour est joué !

-Vous parlez de qui ?

-Des Rebelles, me répond Pamela. D'après moi ils ont raisons, mais ce n'est pas l'avis de tout le monde...

-Ils ont raison ? Alors qu'ils font des attentats et tuent plusieurs innocents ? s'énerve le garçon.

-Mais si ton gouvernement agirais, peut-être que aujourd'hui nous n'en saurions pas là ! rétorque Loïc. La chaleur du soleil ne fait qu'augmenter à cause de la pollution lumineuse, et le président n'agis pas ! Personne n'agis ! Alors les Rebelles ont décidés de se faire entendre.

-En tuant !

-Mais le gouvernement ne veux pas les écouter ! Alors ils sont obligés d'en venir à ça... !

C'est vrai que le débat "Rebelles Paul Tris" est d'actualité ! Paul Tris, l'actuel président français, ne croie pas à la pollution lumineuse, alors les Rebelles lui font comprendre l'urgence de la situation... à leur manière.

Je continue d'écouter d'une oreille distraite le débat. Le temps passe rapidement, et nous sommes arrivés sur Jupiter avant même qu'ils aient épuisés tous leurs arguments.

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