9 - Le rêve

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Le soleil m’arrache de la pénombre, aussi doux et rassurant que cruel. Je me sentais si bien, détendue et à ma place. Le jour est tellement plus difficile à vivre que la nuit. J’ouvre les yeux et me laisse bercer par le chant des sirènes transporté par un vent léger, presque frileux lorsqu’il pénètre l’épaisseur des rideaux couvrant la baie. Une odeur de bois et de lavande apaise ma grimace matinale de l’ours réveillé après des semaines d’hibernation.

Quelle heure est-il ? Je m’en moque.

Dans un élan de courage, je tire sur les draps fins et me hisse au bord du lit pour m’étirer avant de me lever. Mes pieds épousent délicatement le parquet tandis que j’insiste quelques secondes à forcer mon équilibre pour ne pas vaciller. Chaque matin, c’est la même histoire, je me sens arrachée au sommeil comme on extirpe un pansement. Il reste des traces, une marque qu’il faut masser et prendre soin pour s’en défaire. Un frisson me parcourt, j’enserre ma poitrine de mes bras nus et attrape un plaid posé sur le fauteuil en osier qui sert de penderie.

Une fois emmitouflée, je sors de la chambre, la porte grince. Le parquet sous mon poids craque et je traverse le couloir sombre en mélodie singulière et dissonante. Des cadres sont accrochés un peu partout, illustrant différents paysages de campagnes pittoresques, bordés de bois enchantés, et de rivières féériques propres aux peintures anciennes. Je retrouve rapidement mon ami le vent qui s’engouffre comme il le peut dans les dormants d’une fenêtre abîmée par le temps. Les escaliers me demandent un effort de concentration, j’ai encore la tête dans les nuages. En bas se trouve une grande table en bois rustique et le parfum de lavande se mélange à celui du jasmin et du café noir.

La pièce est immense et lumineuse, imparfaite et subtile, pleine de bibelots et petites céramiques. Je fais glisser ma main sur la poutre à l’entrée de la cuisine ouverte, et je sens les défauts du bois, son essence, sa rudesse, quand une main vient frôler ma nuque. Mon corps se raidit, je manque un battement et laisse la chair de poule habiller ma peau. Sans même me retourner, je joue volontiers aux pantins de bois. Le plaid quitte mes épaules remplacé par un souffle chaud qui me frôle du bout des lèvres. La douceur du geste me fait chanceler, mais je suis protégée par ce corps derrière le mien qui me retient et me bouleverse. Dans un mouvement lent et maitrisé, j’accueille la caresse des doigts qui parcourt mon épaule, puis glisse le long de ma clavicule quand soudain, le chat se met à miauler.

Prise de panique, la maison de campagne s’effondre sous mes pas. Je crie, perdue jusqu’à ouvrir les yeux dans une pièce sombre où seule la silhouette de Mephisto assise sur le bout du lit me ramène à la réalité.

C’était un rêve.

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