Horoscopes [2/3]

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  Lola serra contre son cœur le diamant après cet encouragement, des larmes au bord des yeux. L’instant suivant, elles étaient de retour dans le temple. Le diamant avait disparu. La Sainte pointa le cœur de la jeune fille.

 « Tout ce dont vous avez besoin se trouve ici.

 — Merci. Je ferai de mon mieux. »

  Lola sécha ses larmes. Elle se leva du tapis et retrouva à son élan d'extraversion. Elle était quasiment à la porte quand elle refit face à la Sainte dans une envolée de rubans et de froufrous. Lola se rappelait un détail qui l'avait perturbée.

 « Pourquoi m’avez-vous appelé fille de Céfalon ?

 — Parce que vous êtes pleine de vie comme le Dieu-Singe. Gardez cette énergie pour devenir la personne que vous êtes réellement. On ne vous aimera que plus. Oh ! Et, oui, vous trouverez bientôt l'amour de votre vie. C’était bien la question que vous vouliez me poser en arrivant, n’est-ce pas ?»

  Affichant un sourire radieux, Lola repassa dans l’antichambre après avoir remercié la Sainte. Elle sautilla jusqu’à Arya qui l’accueillit amicalement avant de se tourner vers la sortie. Immobile, Lola fixa la porte menant à la l’oracle puis Arya qui l’attendait à la sortie.

 « Tu ne veux pas la voir ? s’étonna Lola.

 — Qui ça ?

 — La voyante.

 — Cela ne m’intéresse pas. J’étais venue pour Mora. Maintenant qu’elle va mieux…

 — Qu’est-ce que tu as à craindre dans ce cas ?

 — Rien.

 — Alors, vas-y. Je t’attends ! »

  Arya soupira, fit demi-tour et entra au cœur du sanctuaire sans attendre l’invitation d’un prêtre. La pièce était inoccupée mais remplie d'un encens agréable. La princesse leva la tête vers la statue de la Déesse-Lune et s’inclina devant elle. De tout le panthéon, Sighna était la divinité pour laquelle Arya ressentait le moins d’animosité, ce qui était paradoxal compte tenu des domaines sur lesquels la Déesse-Lune régnait. Sa relation à la religion était plutôt tendue. Comment croire en leur protection après tout ce qu’il lui était arrivé ? Arya soupira et se mit à tourner en rond en attendant que l’oracle vienne à elle.


#


  Astralia avait rejoint sa loge afin de s’y reposer après le départ de Lola Thouve. Quel drôle de pseudonyme quand on connaissait son ascendance, pensa la Sainte en cherchant Fonaï des yeux sur l'étagère où elle l'avait laissé. La Descendante de Céfalon n’était pas éveillée mais sa lumière rayonnait déjà pour qui savait la percevoir. C’était encourageant. Et une belle surprise que lui avait réservée Suna. Est-ce que la Bouclier cachait d’autres bonnes nouvelles dans sa manche ?

  Alors que la prêtresse avalait quelques figues pour reprendre des forces, Fonaï apparut soudainement et s’agita devant son nez.

 « Je peux savoir ce que tu fais là alors que quelqu’un attend pour te voir ? Et quelqu'un de très important en plus ! »

  Astralia tourna la tête vers la porte à l’évocation de la personne en attente. Elle avala sa figue puis demanda pourquoi elle n’avait rien senti. Fonaï l’encouragea à vite terminer son casse-croûte avant de reprendre ses devoirs.

#

  Arya soupira en trouvant le temps long. Peut-être n’était-elle pas destinée à entendre un oracle ce jour-là ? Lola ne pourrait pas lui reprocher d’avoir essayé. Arya se dirigeait vers la sortie quand on l’arrêta. La princesse fit volte-face et salua d'un signe de tête la jeune fille en robe verte qui était apparue au fond de la pièce.

 « Attendez, restez. Merci d'avoir patienté.

 — Navrée de vous importuner. Aviez-vous terminé votre office ?

 — Non, je me restaurais seulement. Venez, je vous en prie. »

  La voyante désigna les tapis où la vasque d'eau était posée. Arya s’installa comme ses amies avant elle. Quelque chose avait changé dans la pièce, un parfum ou une présence rendait les lieux étrangement rassurants. La princesse fixa la prêtresse qui lui tendait les mains. Arya accepta l’invitation et posa ses doigts sur les siens. Elle patienta un instant qui lui parut incroyablement long. Est-ce qu’il devait se passer quelque chose ? Parce qu’elle ne ressentait rien et la voyante semblait se crisper de plus en plus.

 « Quelque chose ne va pas ? »

  Pas de réponse. La religieuse respirait rapidement comme agacée.

  Astralia se trouvait dans une situation nouvelle. Elle avait beau fermer les yeux et se concentrer, elle ne percevait absolument rien de cette jeune fille. La Sainte ne parvenait à atteindre ni son esprit, ni son fil de vie, ni son âme et tout ce qu’elle renfermait. La frustration monta jusqu’à ce qu’elle renonce.

 « Je ne vois rien !

 — C’est-à-dire ? s’inquiéta Arya.

 — Je suis désolée. C’est la première fois que cela m’arrive. Peut-être suis-je trop fatiguée, ou…

 — Arrête de forcer, tu vas te faire mal, belle Sainte. »

  Fonaï était soudainement apparu entre elles. De surprise, Arya faillit tomber à la renverse. Puis la curiosité prit le pas sur le reste.

 « Vous avez un livre qui parle ! »

  Paniquée en voyant son compagnon, Astralia tenta de l’attraper. Il lui échappa puis se ferma et lui tomba sur la tête plusieurs fois en insistant pendant qu’Astralia tentait de se défendre :

 « C’est le Phénix ! Petite sotte !

 — Arrête ! Tu me fais mal !

 — J’arrêterai seulement quand tu auras repris tes esprits. Tu es en face du Phénix ! Tu sais ce que ça signifie ?

 — Oui, je sais… Le Phénix n’appartient qu’à lui-même. »

  Fonaï cessa de martyriser Astralia et soupira.

 « Dieux, merci ! Tu as compris !

 — Euh… Moi aussi, j’aimerais comprendre. »

  La Sainte se massa la tête. Il lui fallut quelques secondes pour réaliser que sa visiteuse la dévisageait en attente d’une explication. Astralia n’était pas sûre qu’il soit judicieux de tout lui expliquer. Et en même temps, c’était probablement la meilleure chose à faire. Elle appela Setsuan et lui demanda de clore les portes pour la matinée. Ensuite, la Sainte raconta son histoire, son retour sur terre après son entrée dans les Ordres puis l’objectif de sa mission avant d’en venir au rôle du Phénix.

 « Il est dit dans les Écritures que le Phénix est l'aiguille qui permettait à Sighna de tisser la toile du destin. Les descendants du Phénix ont donc hérité de cette capacité à modifier le destin de certaines personnes. Cela n'est pas sans conséquences puisque cela place cette lignée de mages hors de la Grande Toile. »

   Astralia lui parla ainsi des plus grandes figures de la lignée du Phénix, de leur place dans le monde et des puissantes capacités dont ils avaient fait preuve. D’abord sceptique, Arya finit par écouter attentivement. Peut-être que la puissance qu’elle ne parvenait pas à maîtriser était due à cette ascendance extraordinaire. Qu’est-ce qui l’empêchait d’y croire un peu ? Surtout s’il y avait à la clé l’assurance d’une amélioration. Si les efforts combinés de la religieuse et du médecin portaient leurs fruits, Arya parviendrait peut-être à ne plus être un danger pour personne.

 « Qu’est-ce que je dois faire ?

 — Il faut que chaque Descendant s’éveille. Ensuite, nous pourrons nous unir contre le Déchu et accomplir l’œuvre de notre vie. »

  Arya soupira, regarda ses mains puis Astralia.

 « Comment je fais pour m’éveiller ? »

  La Sainte tenta de voir autour de la princesse puisqu’elle ne parvenait pas à voir au-dedans. Les spectres qui lui tournaient autour ne lui plaisaient guère, pourtant ils n’étaient pas malveillants, bien au contraire. Astralia se tint silencieuse un moment avant de demander :

 « Est-ce que vous avez perdu des proches ? Des personnes qui tenaient fortement à vous et que vous ne vouliez pas voir partir ? »

  Arya détourna le regard, embarrassée par la question. L’oracle l’observait attentive. Mais la princesse sans royaume n’était pas prête à aborder le sujet. Le silence tomba lourdement. Tout cela devenait gênant. Arya avait envie de s’enfuir à toutes jambes. Elle ne voulait pas discuter de cela, ni même évoquer le sujet. C’était beaucoup trop douloureux.

  Pour la rassurer, Astralia prit délicatement sa main et la caressa en lui envoyant des vagues d’amour bienveillantes. Il fallait qu’elle comprenne que rien de mauvais ne pouvait lui arriver dans le sanctuaire. Malgré cette certitude, Arya fut incapable de répondre. Elle rompit le contact et se leva.

 « N’hésitez pas à revenir me voir quand vous vous sentirez prête, s’écria Astralia sur une impulsion en la voyant battre en retraite. Je ne souhaite qu’être votre alliée.

 — Mm. »

  Arya sortit l’âme en peine, laissant la Sainte quelque peu désappointée. Où avait-elle échoué ? Fonaï avait envie de rire mais se montra rassurant.

 « C’est bien pour un premier contact. Tu ne t’en es pas trop mal sortie.

 — Vraiment ? Ce n’est pas l’impression que j’ai.

 — Dis-toi que Galriel a dû attendre plusieurs semaines à la frontière avant que la Reine Rouge accepte de lui accorder une audience.

 — Pourquoi si longtemps ?

 — Parce que le Phénix a toujours été un être méfiant, que ses descendants ont hérité de ce trait de caractère et que Galriel avait une mauvaise réputation. Ce qui n’est pas ton cas.

 — C’est censé me consoler ?

 — Oui.

 — Essaie autre chose.

 — D’accord. Et si je te dis qu’il faut que tu te dépêches de balayer l’île avant qu’on t’attrape. Ça te change les idées ?

 — Pas vraiment.

 — C’est pourtant ce que tu vas faire. Allez ! Au travail ! »

Ж

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