Parler à un mur 

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Parlez dans l’hygiaphone – Parlez au mur de notre hotline

Soyons réalistes. L’intelligence artificielle sera programmée pour être débile. Pour recevoir votre indemnité, sautez sur un pied en tenant votre téléphone face au soleil. Ça ne fonctionne pas ? Changez de pied.

C’est sûr qu’avec ce genre de stratagèmes, quelqu’un va réussir à économiser des sous. Pas celui qui s’évertue à essayer de faire valoir ses droits à l’autre bout du fil, ni ceux qui payent des impôts ou des cotisations dans l’espoir de bénéficier, un jour, du fond de solidarité qu’ils auront alimenté. Pendant ce temps, l’addition continue de grimper : une taxe pour l’environnement par-ci, une vignette par-là, et n’oubliez surtout pas de sourire quand vous passez devant les radars. En revanche, pas un kopeck pour les hôpitaux ; ce serait gâcher. Il faut se serrer la ceinture. Vous comprenez, il n’y a plus de sous dans les caisses ; on a tout transféré aux caraïbes.

Pour avoir de l’avenir, l’intelligence artificielle devra donc être une andouille, ascendant dialogue de sourd. Elle sera programmée pour ne pas comprendre, comme une partie des gens aujourd’hui. D’ailleurs, c’est pas humain de faire semblant d’être aussi con, de nier l’évidence avec une telle mauvaise foi ; une véritable torture pour l’âme.

Donner des exemples ? Il y en a trop. Des services après-vente qui nous font tourner en bourrique à ma conseillère pôle emploi qui m’assène que « les règles sont les mêmes pour tout le monde ». Du plombier au directeur R&D en passant par la femme de ménage, on doit tous répondre au même nombre d’annonces pour obtenir ses indemnités de chômage. Il n’y en a pas assez dans votre domaine de compétence ? Pas de bras, pas de chocolat.

Le pire, ça doit être de devoir faire semblant de croire ce qu’on affirme. On doit, soit finir par s’en convaincre, soit devenir fou, voire les deux. L’autre jour, je me suis plainte que la ventilation de ma chambre d’hôtel pulsait une odeur d’égouts. L’affaire me semblait d’autant plus évidente que ce même parfum avait envahi le rez-de-chaussée de la tour au trentième étage de laquelle se hissait mon quatre étoiles. En réponse, la réceptionniste m’a regardée avec scepticisme et dédain, en me rétorquant qu’une femme de ménage allait « venir vérifier ». Avec ce même air, elle m’a proposé une bonbonne de spray désodorisant ; de quoi regretter de ne pas être descendue au camping.

Alors, Etienne... je l'affirme haut et fort: l’avenir s’annonce peuplé de crétins barrant la route à leurs congénères. Et comme la terre est ronde, chacun jouera tour à tour le débile empêchant l’autre d’accéder à son dû pour le compte d’un employeur serrant les cordons de sa bourse avec de plus en plus de pingrerie. Et avant que nos neurones ne découvrent le pot aux roses, les intelligences artificielles joueront aux cons à notre place, tandis que nous nous retrouverons coincés à l'extérieur de ce petit jeu, tels les dindons de notre propre farce.

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