15. Les lignes d'Anata

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La chaleur était déjà présente lorsque l’étranger fut tiré de son sommeil par des secousses prodiguées sur son épaule. Il ouvrit les yeux pour tomber sur le visage de Topaze, accroupi proche de lui.

— Viens avec moi.

À ces mots, Onyx comprit qu’il était l’heure pour lui de montrer de quoi il était capable. Il se leva donc, laissant Sarshall sur les quelques bouts de tissus qu’il avait utilisés pour le couper du sable. Dans la grande tente, tout le monde dormait encore, exténué par leur journée de traverser. Il remarqua dans un coin le dernier gardien, allongé à côté de son chien, tous deux dormaient calmement.

Dehors, Unakite et Topaze l’attendaient proches d’une caisse posée à terre, où se trouvaient sur son dessus des sacs remplis de sable. En s’approchant un peu plus, Topaze vint lui tendre un arc, corde tendue, et flèches dans un carquois.

— Je ne pense pas que ce soit encore le moment pour t’apprendre le maniement d’un sabre, mais la visée est une chose très importante.

Le plus vieux lui donna l’arme en main, il posa une main sur son épaule, poussant l’aventurier à se placer face aux cibles.

— Vise et tire.

Le jeune homme était un peu perdu. Il n’avait jamais utilisé d’arme auparavant. Bien entendu, il avait déjà vu les gardes de la cité s’entrainer et protéger Tenerice, mais il n’avait jamais pratiqué. Il essaya de reproduire les gestes qu’il avait vus, encochant une flèche sur la corde, tendant son bras gauche vers la cible avant de ramener la corde de sa main droite, proche de son visage.

Automatiquement, sa respiration se fit plus lente, ses yeux étaient rivés sur la pointe floue de sa flèche, et le sac de sable qu’il visait. Un dernier souffle s’échappa d’entre ses lèvres, avant qu’il ne lâche la corde. La flèche fila droit vers sa cible, mais la manqua. Ses bras s’affaissèrent, sa tête tomba en avant, soupirant de frustration.

— Ce n’est rien, tu n’as jamais tiré, et pourtant tu connais les premiers gestes à faire, sourit Unakite en s’approchant de lui. Tu dois t’entrainer, c’est pour ça que nous sommes là.

— Continuons.

Topaze courut chercher la flèche, revenant pour la replacer dans le carquois du garçon.

— Recommence.

Il s’exécuta donc, durant une bonne partie de la matinée. Le reste de la caravane se réveilla lentement, certains attirés par les bruits de corde tendue, d’autres par la chaleur devenant étouffante. Le déjeuner fut servi, mais Onyx continua son entrainement, tandis que les deux gardiens le regardaient faire tout en discutant avec les femmes du Wahah.

Le dernier gardien se leva à son tour, déjeunant calmement avant de remarquer l’étranger s’entrainer avec un arc de la caravane. Une grimace traversa son visage avant qu’il ne détourne le regard, caressant la tête de l’Arise. Badho demanda à ce que le camp soit levé rapidement pour qu’ils puissent reprendre la route, l’air se faisait plus sec que la veille.

Chacun se mit au travail, aidant à ranger les parties de la grande tente, les affaires et autres. Unakite surveilla Onyx de près, l’aidant à se positionner correctement, tandis que le meneur du Wahah discutait avec Tilidad de leur itinéraire journalier.

Le dernier gardien, aidant Howlite à déposer et attacher les fournitures sur le dos d’une des montures, tourna son regard vers l’étranger de Tenerice, avant de sourire espièglement. Il déposa les affaires au sol avant de s’approcher du jeune homme, sous le regard intrigué des plus vieux.

— Tu n’y arrives toujours pas ?

Il se posta à côté d’Onyx, le toisant du regard.

— Tu ne parviendras pas à te défendre dans le désert.

— Jun.

Howlite le regarda attentivement faire, les poings sur les hanches. Le concerné lui jeta un rapide coup d’œil avant de tourner de nouveau son attention sur l’archer. Il regarda ses mains, crispées sur le bois de l’arme, le faisant sourire méchamment.

— Il finira par tuer ses alliés, ou nous tuer.

— Jun !

Le meneur semblait sortir de son calme habituel en s’avançant vers eux, il empoigna le biceps du gardien pour l’emmener à l’écart, laissant Howlite et Unakite en compagnie du jeune archer. Ce dernier serrait la poignée de l’arc avec force, blessé par les mots du gardien.

Les sourcils froncés, il entendit le chef du Wahah et Jun se disputer, tandis que la jeune femme à ses côtés tentait de le calmer et le rassurer. Pourtant, une colère soudaine prit possession de son corps. Il brandit son arc avec force, étirant tous ses muscles, avant de décocher sa flèche.

Un trou fut percé dans le sac de sable, qui tomba à terre face à la rapidité de la flèche, sous les regards surpris des gardiens et des femmes de la caravane. Jun contempla le sac se vidé au sol, avant de relever son regard vers le visage d’Onyx, ce dernier le fixait avec détermination. Un fin sourire s’étira sur les lèvres du plus vieux. Il se détourna du meneur, partant aider le groupe à ranger le bivouac.

Unakite félicita le jeune voyageur, mais Badho semblait vouloir quitter les lieux rapidement, les interrompant dans leur séance d’entrainement. Le gardien laissa pourtant l’arc à Onyx, l’incitant à le garder sur lui, comme une arme de longue distance pour leur voyage. L’étranger sourit, lui étant reconnaissant de croire en lui, avant qu’ils ne partent aider le reste de la caravane à emballer leurs affaires.

C’est une demi-heure plus tard qu’ils se retrouvaient tous sur leurs montures, et quittèrent cette zone découvert pour suivre leur itinéraire journalier. Ils marchèrent durant de longues heures dans le désert, Onyx cachait son visage de son chèche, son regard doré rivé sur l’horizon. Sa main droite était posée sur le pommeau de sa selle, sa main gauche elle résidait sur le dos du félin, caressant lentement son pelage.

Il se trouvait au centre de la ligne qu’ils traçaient sur la crête des dunes, le meneur restait en avant avec le plus jeune gardien. Les deux plus vieux étaient en arrière, surveillant les alentours. Son regard se perdit à contempler les différentes dunes. Puis, un détail attira sa curiosité.

— Qu’est-ce que c’est ?

Son regard s’attarda plus en détail la ligne qui se dessinait à travers les dunes.

— Reste en ligne.

La voix de Tilidad retentit dans son dos, le faisant tourner la tête vers elle.

— Qu’est-ce que c’est ?

— Ce sont les lignes d’Anata.

Le nom lui était inconnu et il ignorait sa signification, mais à en voir l’air prudent que prenait la plus vieille du Wahah, il comprit qu’un danger était relié à cette ligne. Il tourna de nouveau son regard vers cette strie de plus en plus proche d’eux, et il parvint enfin à discerner ce qui la constituait.

C’était des plantes acaules, dont le feuillage était de couleur ocre, tandis que les fleurs qui les ornaient sont d’un rouge sanguin. Elles étaient disposées sur un segment, et semblaient suivre le tracé d’un chemin, ou d’un passage. Il remarqua également que les racines paraissaient être proches de la surface, se propageant comme des veines sous une fine couche de sable.

— Les racines, elles…

— Se rejoignent.

Elle vint se placer à côté de lui, éloignant sa monture qui s’approchait inconsciemment de la ligne.

— Qu’est-ce que ça signifie ?

Il comprit que ce n’était aucunement un bon présage en vue de sa réaction, ainsi que celle de la caravane, qui avait ralenti l’allure et semblait regarder autour d’eux avec attention.

— Elles annoncent la présence d’Esyadell.

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