-6- Bouleversements

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Cette rubrique a pour objectif de résumer le rôle prépondérant de la Tour dans le fonctionnement de notre galaxie.

Il s’agit d’un organisme, indépendant des neuf royaumes, dirigé par l’Archimage, l’homme qui représente l’autorité suprême des méta-entis. Afin de pouvoir prétendre à cette fonction, il doit être un mage, mais il doit aussi avoir terminé l’ensemble des cursus de la Tour, à savoir le combat, la terraformation et la médicine. Le dirigeant de la Tour siège au haut conseil, avec les neuf représentants des royaumes ainsi que le directeur général de la Coalition.

Le nom ‘Tour’ lui a été attribué en raison de son aspect atypique pour une station spatiale. Elle est en effet de forme cylindrique, mais aussi de taille gargantuesque. Au fur et à mesure de ses millénaires d’existence, l’expansion de l’administration des méta-entis a engendré l’ajout de générateurs, propulseurs et quartiers supplémentaires à la station. À mesure que la taille de la Tour augmentait, il n’était plus possible de la placer en orbite autour d’une planète. Son champ gravitationnel devenu trop imposant risquait de déséquilibrer celui de mondes habités. La Tour se trouve désormais dans le système de Samialys, gravitant autour de son étoile, telle un corps astral à part entière.

Les méta-entis voyagent toujours par binômes. Un mage est systématiquement accompagné d’un cérèbre pour le surveiller. Les cérèbres sont conditionnés dès que leurs pouvoirs s’éveillent, afin de devenir les gardiens des mages. Beaucoup pensent que les cérèbres ont été lobotomisés pour leur interdire de ressentir des émotions les empêchant ainsi de faire un usage inopiné de leurs pouvoirs. Cependant en dehors de la Tour personne ne sait comment sont entraînés les télépathes puisque le processus de leur formation n’a jamais été rendu public. Comme un cérèbre doit empêcher son mage de transgresser les lois de la Tour les binômes constitués d’un cérèbre et d’un mage sont défaits tous les trois à cinq ans ce qui empêche toute proximité affective pérenne. Les préférences sexuelles des mages sont prises en compte puis contrariées à l’occasion de la constitution d’un binôme : un hétérosexuel fera équipe avec un cérèbre du même genre que lui tandis qu’un homosexuel sera associé à un cérèbre de genre différent. Les relations dans le binôme ne sont alors pas influencées par l’attirance ou le désir.

Les mages sont un véritable mystère. Ils sont capables de manipuler la matière les entourant à l’aide d’un champ électromagnétique qu’ils génèrent autour d’eux. Cependant ils ne peuvent pas créer ou détruire des atomes à l’aide de leurs pouvoirs. Pour faire usage de la magie ils doivent obligatoirement être en contact avec un objet en arcanite : un artefact. Afin de ne pas déséquilibrer certains marchés financiers, l’utilisation de leurs capacités est très précisément mesurée, quantifiée par la Tour. Personne ne sait quelle caractéristique physiologique ou génétique permet de devenir mage. Parfois toute une famille possède la capacité d’extraire le pouvoir des cristaux d’arcanite, parfois seul un individu isolé en est capable. Il ne semble y avoir aucun trait commun entre les mages. Toutes les races sont concernées, la répartition entre les genres est équitable.

Le commerce de l’arcanite est très régulé. Ce cristal formidable n’a aucune autre propriété que celle de déclencher les pouvoirs des mages. Équipé d’un cristal le mage est alors en mesure de faire appel à son don en utilisant sa propre force vitale. Cependant s’il doit fournir un effort allant au-delà de ses limites, il est en mesure de drainer la puissance contenue dans l’arcanite. Alors, le cristal se consume, le mage doit en obtenir un nouveau pour retrouver ses capacités. On trouve l’arcanite hors de notre galaxie, elle se concentre dans les portails qui traversent le temps et l’espace : les donjons. Nous possédons très peu d’informations sur ces arches mystérieuses, la Tour n’en fournit pas aux personnes extérieures à son administration. Nous émettons l’hypothèse que ces ouvertures soient les stigmates d’une technologie perdue, ayant appartenu aux Immémoriaux, une civilisation antérieure à toutes les autres. Les rares vestiges que nous avons pu retrouver de ces êtres fantastiques restent totalement imperméables à nos études, les matériaux les constituant nous étant encore inconnus. Cette ignorance a ainsi créé un épais voile de mystère, derrière lequel il n’est pas insensé d’imaginer découvrir des réponses à l’ensemble des énigmes qui planent encore sur notre galaxie. L’arcanite serait peut être un cadeau des Immémoriaux fait à l’ensemble de l’univers. La récolte de ces cristaux se fait à l’aide des chasseurs de trésors, des groupes de combattants ou d’entrepreneurs qui sont homologués par la Tour pour trouver les donjons puis y entrer. Certains témoignages anonymes font état de portails dispersés aux quatre coins de la galaxie, s’ouvrant ou se fermant sans explication. Il est a priori certain que même si une arche s’ouvre au même endroit, la destination de son portail ne sera jamais la même que la précédente. Les chasseurs de trésors n’ont aucun contrôle sur l’instabilité des failles, ils risquent de s’y retrouver prisonniers à tout jamais, sans moyen d’en revenir. Mais la Tour récompense grassement les chasseurs de trésors, parfois ces derniers trouvent autre chose que des cristaux. L’arcanite est donc une ressource très précieuse, dont la Tour détient le monopole. Il existe cependant un marché noir où il se monnaye à des prix exorbitants. L’Inquisition, la force d’intervention de la Tour, fait évidemment tout pour empêcher ce trafic.

Les méta-entis ainsi que le marché de l’arcanite sont régulés par l’Inquisition. Ses unités sont formées de trois individus : un mage pour venir à bout d’éventuelles difficultés physiques, un cérèbre pour venir à bout de mages renégats et un SEC ou Sentinelle Éclaireur Commando, pour venir à bout des cérèbres renégats : les parias. Le SEC est la seule machine de la galaxie à être autorisée à combattre des êtres vivants. Son programme est suffisamment poussé pour qu’elle puisse rivaliser avec les meilleurs soldats de la Coalition. Ces machines anthropomorphiques sont conçues pour être terrifiantes. Pourquoi les envoyer par trois ? Ils ont aussi comme mission de se surveiller mutuellement. Si l’un d’eux envisage de trahir la Tour, il est immédiatement neutralisé. C’est une sorte de cercle vertueux.

L’Inquisition se charge aussi du dépistage des méta-entis dans les écoles et les mondes reculés, auprès des enfants dès l’âge de cinq ans.

En ce qui concerne les mages, le système de la Tour est quelque peu pervers car l’ensemble des enfants de la galaxie doit passer un test pour voir si il manifeste quelque forme de pouvoir au contact des artefacts. Mais même si ces derniers n’ont pas accès à de l’arcanite, donc qu’ils ne sont pas en mesure de développer leur pouvoir, ils doivent aller se former à la Tour. Le cursus est entièrement financé, mais l’étudiant contracte une dette qu’il met parfois toute sa vie à rembourser. Un mage peut renoncer à son droit de pratiquer la magie, il ne sera pas pour autant libre, il devra régulièrement se manifester auprès de son administration de tutelle pour subir des vérifications psychologiques. Bien que détaché d’un cébère il sera soumis à des contrôles inopinés. Si d’aventure il a tenté d’obtenir des artefacts sans autorisation de la Tour il sera immédiatement neutralisé sans aucune forme de procès.

Les méta-entis se voient refuser la liberté de vivre leur existence comme ils l’entendent. Ces mesures, bien qu’excessives sont là pour la sécurité du plus grand nombre. Mais elles sont tellement étouffantes que beaucoup cherchent à s’y soustraire. C’est pour cette raison que nous entendons régulièrement parler de sorciers ou de parias, rattrapés par l’Inquisition.

De la Tour

Professeur HIELPHOM

IRA

***

Rothan avait réuni le groupe dans un ancien salon, devenu pour l’occasion centre logistique de la résistance : « Ce déménagement va nous ralentir. Nous devons nous remettre à préparer notre départ dès à présent. ». Certains étaient debout, d’autres assis. Le prince poursuivit : « Nous devons définir nos priorités, nous n’avons pas encore trouvé de pirate informatique pour nous aider. Il va falloir organiser une reconnaissance au spatioport. Nous devons trouver un vaisseau en capacité de nous emmener jusqu’à Ragosys 5. Je pensais... » La gorge de Pirau se serra, le prince avait raison, ils allaient perdre du temps à se reconstruire. Mais partir en reconnaissance au spatioport serait tout aussi contre-productif. Il inspira à fond, interrompit Rothan :

-Votre altesse. » Il y eut un silence, les regards se tournèrent vers lui. Au fond de son esprit une petite voix lui hurla de se taire, mais il ferma les yeux puis avoua : « Mon vaisseau n’a pas été saisi par les Raxs, il est stationné à l’extérieur de la ville : dissimulé. Mon équipage le tient prêt à partir dès qu’il en recevra l’ordre. » Le prince mit quelques secondes à assimiler l’information. Pirau regarda autour de lui. Devah et Issra, déjà au courant approuvèrent son intervention. Borae et Moggarr semblaient soulagés, Yerid resta impassible. Rothan demanda : « Vous serez en mesure de nous emmener tous ? » Pirau acquiesça en grattant son tatouage de chaîne à la gauche de sa mâchoire :

-La Panse est un transporteur cargo de petit calibre, mais il sera plus que suffisant pour nous tous. Je vais laisser ma cargaison ici pour faire de la place. De toute façon je ne parviendrai probablement pas à la vendre... » Le prince répondit avec sérieux :

-Sachez que dès que je le pourrai, je vous dédommagerai. » Il lança un regard alentour : « Tous autant que vous êtes. »

-Je remercie sa majesté. Il faudra juste aménager des chambres supplémentaires, nous en avons déjà quelques-unes vacantes, mais pas assez pour l’ensemble du personnel accompagnant. » Le prince opina en recoiffant ses mèches brunes. Il planta son regard vert dans celui de Pirau :

-Je ne vous demanderai pas pourquoi vous avez attendu de me donner cette information, j’imagine que vous aviez vos raisons. Merci. L’opération de récupération d’un vaisseau était la plus risquée, j’étais très angoissé à l’idée de vous envoyer au spatioport. Surtout maintenant que les Raxs sont sur les dents, ils nous cherchent... » Il prit le temps de s’asseoir, de souffler. Il arbora même un léger sourire : « Nous y sommes presque. » Son soulagement se propagea sur les membres du groupe qui sourirent à leur tour eux aussi. Sauf Yerid. Le prince reprit à l’intention de Pirau : « Je vous laisserai voir avec Erothe comment organiser la préparation de votre vaisseau.

-Ma seconde se mettra en relation avec elle. Il nous faudra user de prudence, ce qui ralentira l’opération, mais si une troupe complète se rend aux abords de la ville, nous risquons d’être repérés.

-J’en conviens, j’ai toute confiance en vous et Erothe pour y parvenir. À présent il va nous falloir trouver ce pirate… mais pour l’instant je n’ai malheureusement aucune piste, peut-être pourriez-vous aider Jomida ou Erothe ? Je dois aller préparer un discours pour rassurer le peuple sur l’avenir de notre planète. Je n’étais pas optimiste jusqu’à présent, mais grâce à vous monsieur THRIDA, j’ai repris espoir. Je vais tâcher de le transmettre à mes sujets. La réunion est terminée, je vous contacte dès que j’ai du nouveau pour vous. » Le prince se leva puis sortit, tandis que le reste du groupe patientait. Les regards étaient tournés vers Pirau. Moggarr se cala devant lui en croisant les bras sur son torse : « Alors comme ça tu avais un moyen de fuir que tu nous as caché ? » Le contrebandier se gratta la nuque avant de répondre embarrassé :

-Oui et non, la Panse est effectivement prête à partir, mais ce n’est pas un vaisseau de combat. Je ne peux pas forcer le blocus avec. C’est trop risqué. » L’orc fit une moue dédaigneuse :

-Pourquoi nous avoir caché son existence. » Pirau soupira :

-Je ne vous faisais pas confiance. » Il regarda dans les yeux chacun de ses compagnons d’infortune puis ajouta : « Je ne savais pas si je pouvais faire confiance au prince. Je ne savais pas si son plan était viable.

-Qu’est-ce qui t’as fait changer d’avis ?

-Rien du tout. Même si je me méfie moins de vous, j’ai toujours des doutes sur nos chances, c’est vrai. Mais aujourd’hui, si je n’avais pas mentionné mon vaisseau, nous serions allés au spatioport, nous aurions couru des risques inutiles ou perdu un temps précieux. Ça je n’aurais pas pu me le pardonner. J’ai agis selon mes convictions, honnêtement, je me fiche bien de savoir si ça vous plaît ou non. » Il planta son regard gris-vert, dans celui gris de Moggarr. Ils maintinrent le contact pendant un moment, comme pour se défier, puis l’orc pouffa de rire. Il donna une claque dans le dos de Pirau en disant :

-T’inquiète pas, je ne suis pas fâché l’ami. » Puis au groupe : « Venez, allons voir si on peut se rendre utile ! » Il sortit le premier. Les autres prirent le temps de signifier à Pirau qu’ils ne lui en voulaient pas pour son manque de confiance en eux, avant d’emboîter le pas à l’orkhal.

Pirau avait rejoint le centre de sécurité d’Erothe, il lui avait expliqué la situation de son vaisseau. Cette dernière, après avoir enregistré l’information, le questionna : « Dites-moi, votre cargaison n’a rien d’illégal ou de dangereux ? » Pirau se passa la main sur la nuque avant de répondre : « Je me doutais que vous alliez deviner… Je me demande si sa majesté a compris lui aussi... » L’orc le foudroya du regard :

-Vous êtes un contrebandier. » Pirau soupira :

-Oui, mais que ce soit bien clair : premièrement, je n’ai rien fait d’illégal sur votre planète, si ce n’est atterrir sans me déclarer. Deuxièmement : mon chargement n’est pas dangereux. Il s’agit de minerais rares... » L’orc en uniforme ouvrit des yeux ronds, Pirau précisa : « Non ce n’est pas de l’arcanite je vous rassure. Les métaux que je transporte subissent un embargo sur Dilautys 5. Le gouverneur local a pris le contrôle d’une exploitation minière, il a interdit toute importation pour gonfler ses prix afin d’extorquer le maximum de novs aux métallurgistes locaux. Je devais leur faire parvenir le minerai pour les aider à poursuivre leurs activités. » Erothe le toisa un instant avant de répondre :

-Je vérifierai ça. En attendant voici mes coordonnées d’oreillophone, donnez-les à votre second pour organiser ensemble le départ. » Pirau récupéra l’information puis contacta son équipage. Il s’appuyait sur l’oreille quand une voix de femme résonna : « Oui chef ?

-Cheryle, j’ai de bonnes nouvelles. Nous avons rassemblé le nécessaire pour quitter la planète.

-Qu’est-ce que tu veux qu’on fasse ?

-J’ai prévenu le chef de la sécurité du prince que je pouvais mettre la Panse à contribution. J’ai dû clarifier nos activités avec elle.

-Ah ! Est-ce que ça lui pose un problème ?

-Aux grands maux les grands remèdes, je crois qu’on est tranquilles de ce côté-là. Je te passe son identifiant d’oreillophone pour que vous organisiez le chargement de la Panse. Surtout soyez prudents, n’hésitez pas à faire garder le vaisseau par les hommes du prince.

-Tu en es certain ? Ce n’est pas dans nos habitudes.

-Si le prince et sa suite font des concessions quant à notre situation, nous pouvons en faire quant à nos protocoles de sécurité. Tu ne penses pas ?

-Card ne va pas aimer ça.

-Il ne va pas avoir le choix. Ce vieux barbu va être mis à contribution lui aussi.

-Ne t’inquiète pas, je m’occupe de lui chef. Ce sera tout ?

-Pour l’instant oui. Note les identifiants que je te dicte... » Il lui transmit les codes d’accès avant de la saluer puis de couper la communication. Il remercia Erothe, lui dit : « Mes hommes vont vous contacter. Je sais que c’est un peu osé de ma part de vous demander ça mais : pouvez-vous essayer de ne pas trop les brusquer ? » Erothe sembla d’abord imperméable à la négociation, puis elle déclara :

-Pas d’inquiétude, je vais faire preuve de tact avec eux. » Avant de lui esquisser un sourire. Elle avait compris qu’il s’inquiétait pour son équipage, elle lui fit comprendre qu’elle ne nuirait pas à ses amis. Pirau la remercia en inclinant la tête puis sortit.

Ensuite il rejoignit ses compagnons. Ils montaient un pupitre à la hâte au milieu d’un appartement vide avec l’aide de volontaires. Le prince voulait faire une déclaration afin de montrer qu’il ne craignait pas le régime, qu’il soutenait son peuple. Grâce aux médias, l’enregistrement serait très rapidement diffusé sur l’ensemble de la planète. Cependant, avec Erothe, ils avaient convenu de faire preuve de discrétion. Il ne fallait pas que les habitants du quartier nord sachent que le prince était parmi eux. Inutile de prendre le risque que quelqu’un prévienne les Raxs puis qu’ils débarquent en force. Ils avaient mis un grand drap gris orné du blason royal derrière le podium pour masquer le décor afin que l’ennemi ne puisse repérer leur position. Le prince arriva dans une tenue sobre toute en nuances de gris et or, il voulait montrer que sa situation était proche de celle du peuple, mais sans provoquer la pitié de ses sujets. Il s’installa à son pupitre puis commença à parler dans le microphone. Le son de sa voix fut enregistré : « Mes chers sujets ! Je suis le prince Rothan DANENTHAR, fils de feu le roi Thratan DANENTHAR, héritier légitime du trône de Taorys 4. Je viens à vous en ce jour, avec de bonnes nouvelles ! » Il fit une pause : « Notre monde qui m’est si cher est en difficulté. J’en suis témoin, je partage avec vous cette peine qui nous accable. Cependant il ne faut pas céder ni à la peur ni au désespoir ! Je travaille en ce moment même à résoudre cette crise, je touche au but ! Nos souffrances ne sont pas terminées, je vous demande de tenir encore. Je ne vais pas vous mentir, nos efforts ne s’arrêteront pas là ; car après la libération de Taorys 4 - et n’en doutez pas, elle sera libérée ! - il nous faudra alors reconstruire. Mais ces nouveaux défis, nous pourrons les affronter ensemble, main dans la main, avec pour objectif notre bien-être à tous ! » Au fur et à mesure qu’il prononçait son discours son ton s’enflammait : « Je vous remercie pour votre soutien, pour votre courage. Nous sortirons de cette épreuve grandis ! Ensemble ! » Son cri de ralliement achevé l’enregistrement holo-vidéo fut coupé. Le prince descendit de l’estrade puis alla voir les techniciens. Il les remercia pour leur travail, discuta avec eux de la suite du plan. Son discours serait envoyé de manière anonyme aux médias encore fonctionnels de Taorys 4, dans moins de dix minutes. Ils essayeraient aussi de le diffuser via une fréquence publique, mais depuis un autre lieu, afin que les Raxs ne remontent pas jusqu’ici. Ils furent interrompus dans leur discussion par un des soldats du prince qui vint à lui pour lui murmurer une information à l’oreille. Son expression ne changea pas, il resta chaleureux, souriant. Il demanda confirmation, lorsqu’il la reçut, il prit congé. Il fit signe à Pirau et au groupe de le suivre, dès qu’il fut hors de vue des techniciens il changea de figure, redevenant sérieux, déterminé. Sa chef de la sécurité arriva au pas de course, il se porta à son niveau, continuant de marcher d’un pas décidé il lui demanda : « De quand date cette information ?

-Même pas cinq minutes mon prince.

-Il faut nous dépêcher. Je veux voir ça dès que j’arrive en salle de briefing. » Son allure était soutenue, le groupe le suivait presque en courant. Ils montèrent les escaliers quatre à quatre. Ils parcoururent les couloirs jusqu’à être essoufflés puis arrivèrent pour entendre le prince demander d’un ton autoritaire : « Mettez-les-moi sur la table. » Un des agents de liaison hocha la tête, pianota sur son terminal numérique. Puis l’image d’une flotte de vaisseaux apparut en trois dimensions, projetée au-dessus de la table numérique. Erothe fut la première à repérer le problème : « Ce ne sont pas des Raxs. Ce n’est pas leur symbole. » Le prince prit le temps de bien détailler les navires, il demanda :

-Qui sont-ils alors ? Des amis ou des ennemis ? » Un de ses officiers intervint :

-On ne sait pas votre altesse, mais ils ont été autorisés à franchir le blocus il y a cinq minutes. Notre informateur sur place nous l’a confirmé.

-Vous a-t-il dit ce qu’ils viennent faire ici ?

- Nul ne semble savoir. » Le prince se renfrogna, comme pour essayer de comprendre. Personne dans la salle n’avait d’hypothèse valable. Erothe intervint alors, elle interrogea les officiers de liaison : « Savons-nous où ils sont ? Où ils vont ? » L’un d’entre eux répondit :

-Ils se sont dirigés vers les sites d’excavations minières près du mont Lernton.

-Ce n’est pas très loin d’ici. » Elle se tourna vers le prince pour lui dire : « Votre majesté, nous devrions envoyer un groupe d’intervention en reconnaissance. Nous n’avons pas assez d’informations. » Rothan se gratta le menton :

-Nous ne pouvons pas nous permettre de nous éparpiller. Nous devons nous concentrer sur le départ en redoublant de vigilance vis à vis des Raxs. » Devah claqua du bec puis intervint :

-Le plan est en attente d’informations que nous n’avons pas. Notre groupe est actuellement inactif : laissez-nous aller y jeter un œil. » L’adolescent hésita, il se gratta le sommet du crâne puis soupira :

-Nous devons savoir ce qu’ils font ici, sont-ils là afin de nous aider, ou l’inverse ? Vous allez effectuer une rapide reconnaissance pour essayer de comprendre ce qu’ils fabriquent. Attention, ne les combattez pas, surtout ne vous faites pas capturer. Nous avons besoin de vous pour la suite, alors pas de risques inutiles. ». Tous acquiescèrent, ils sortirent de la salle des opérations pour préparer leur départ à la hâte.

Le groupe s’équipait comme pour partir à la guerre. Chacun récupérait ses armes ou son matériel. Ils étaient dans leur appartement en train de se préparer, prêts à partir quand des exclamations en provenance des couloirs attirèrent leur attention. Ils sortirent, virent des gens courir en tout sens. Ils demandèrent à un résistant qui passait par là quel était le problème. Ce dernier leur cria entre deux souffles : « Le régent est en train de faire un discours en réponse à celui du prince ! C’est diffusé sur tout le réseau ! » Les compagnons retournèrent à leur appartement où ils allumèrent l’holo-écran du salon pour voir apparaître la silhouette de Morach. Son air hautain, ses cheveux coiffés en arrière, son tatouage de mosaïque géométrique. Il scandait d’une voix de stentor : « Mes chers sujets ! À la suite du message diffusé par Rothan DANENTHAR, traître à la couronne de Taorys 4, je vous rappelle que mon neveu a omis de spécifier certains faits déjà publics. Pour mémoire, avec la complicité de sa mère adoptive, dame Angkel DANENTHAR il a attenté à ma vie. Ils ont échappé aux autorités du palais, depuis ils sont activement recherchés. C’est suite à cet attentat que j’ai été forcé de mettre en place plusieurs mesures de sécurité que certains d’entre vous jugent excessives, mais qui sont nécessaires à la capture de ce dangereux terroriste. Notez bien que ces mesures prendront fin, dès que Rothan DANENTHAR sera neutralisé. J’invite donc la population de Taorys 4 possédant des informations sur les activités ou la localisation de ce traître à la couronne, à contacter n’importe quel officier des Rangers Ax au plus vite. Nous savons que la diffusion de son message de haine a pour origine les quartiers nord d’Union. Nous recommandons à la population de ne pas sortir sans en avoir reçu l’autorisation explicite d’un membre des Rangers Ax. Tout contrevenant sera abattu à vue. Notre armée va mener une opération de recherche dans les quartiers en question, nous trouverons bientôt Rothan DANENTHAR, nous l’appréhenderons, n’en doutez pas. Une fois cette tâche accomplie nous pourrons ramener le calme, la paix, sur notre chère planète. Je vous remercie pour votre attention et vous souhaite une bonne fin de journée. » Encore sous le choc le groupe resta figé, ils sursautèrent lorsque Moggarr grogna :

-Quel tas de conneries, il a déclaré son indépendance par rapport à la charte novemmienne. Même s’il attrapait le prince, il ne respecterait pas sa parole en libérant Taorys 4. Soit il continuera à la tenir en otage pour ne pas être démasqué par le Bas Conseil de Nal’On, soit la vérité se saura, alors la répression n’aura pas un goût de calme et de paix. Personne n’ira gober ça. » Devah recoiffa ses plumes brunes et blanches puis soupira :

-Dans leur désespoir, les citoyens croiront ce qu’ils voudront… Le plus inquiétant est que Morach sait où se cache le prince. Maintenir un QG ici va devenir délicat. Jomida va devoir mobiliser ses hommes pour ralentir les Raxs sans créer d’échauffourée.

-Je n’en reviens pas que les Raxs s’associent à ça… Ils vont être traqués puis condamnés par des Veilleurs. Ils n’ont aucun moyen de se sortir de cette situation sans être inquiétés. Ils ne peuvent pas obéir à un gouvernement indépendant, c’est absurde. » Moggarr s’emporta : « Et ils doivent le savoir en plus ! Alors qu’est-ce qu’il leur passe par la tête ? » Issra avait les bras croisés. Le menton de son masque ivoire posé dans sa main droite. Elle marmonna :

-Vous pensez que cette histoire d’indépendance est un mensonge ? Qu’en réalité le régent brouille les pistes ? Que les Raxs sont au courant ?» Chacun semblait réfléchir, mais Pirau déclara :

-Je ne comprends pas moi-même, mais nous nous en inquiéterons plus tard. Nous avons une mission à accomplir. Dépêchons-nous avant que le quartier soit bouclé. » Il prit la tête, suivi par l’ensemble du groupe qui dévala les marches des escaliers.

Ils avaient traversé la ville pour rejoindre un contact qui les avait fait monter dans un camion antigrav. La présence des Raxs était réduite en dehors de la capitale, mais ils se dissimulèrent en s’installant à l’arrière sur des bancs de fortune. Ils étaient parés au combat, Borae avait insisté pour venir mais s’était vu refuser le droit de porter sa tenue bariolée. Il était équipé d’une armure de combat légère noire, n’ayant conservé que ses lunettes teintées. Ses cheveux blonds mi-longs étaient coiffés en arrière. Devah tenait un pavé numérique à la main, il lisait les données concernant la flotte mystérieuse, qui avaient été transmises par les agents infiltrés dans le régime. Il passa une de ses serres sur son crâne comme pour recoiffer son duvet brun avant de déclarer : « Ça ne me dit rien qui vaille. » Ils avaient ouvert un canal de transmission continue avec leur oreillophone, le camion roulait vite en faisant un vacarme assourdissant. Issra vérifiait le tranchant de ses lames, mais elle demanda à l’épervier :

-Qu’est-ce qui ne va pas ?

-Le régent Morach a bloqué la planète, on ne peut plus ni entrer ni sortir. Pourquoi cette flotte est-elle passée ? Ce ne sont pas des Raxs, en plus ils ne sont pas armés.

-Des alliés de l’extérieur ?

-Peu probable maintenant que le régime s’est déclaré indépendant, je ne pense pas que le CGI s’intéresse à cette planète. La question est de savoir qui irait s’associer à un gouvernement dissident ? Et pourquoi ? J’ai vérifié les rapports concernant l’exploitation minière du mont Lernton, les ressources sont basiques. Il s’agit de roche solide excellente pour la constitution de béton.

-Comme l’a dit Pirau auparavant nos questions ne changeront rien aux faits. Allons sur place, nous aviserons par la suite. » Ils décidèrent de la stratégie à adopter. Devah expliqua qu’ils resteraient ensemble, chacun couvrant un flanc de la troupe. Il demanda à Borae et Yerid de rester en arrière, au point de rendez-vous pour le retour, mais le mage insista pour venir. Il était déterminé, il s’entêtait. Tous comprirent qu’il n’avait pas digéré son accrochage avec Moggarr, il souhaitait démontrer sa valeur. Le véhicule stoppa, ses portes s’ouvrirent, le groupe sauta au sol. Le chauffeur leur assura qu’il ne bougerait pas avant leur retour, il leur communiqua ses coordonnées d’oreillophone. Chacun dégaina rapidement ses armes puis ils suivirent Devah qui avait préféré une arme de poing à son fusil. Ils traversèrent une forêt de conifères peu dense, la tension était palpable ; l’épervier-humain s’arrêtait quand il entendait un bruit ou croyait voir une ombre. Leur furtivité était compromise par le tapis d’aiguilles qu’ils faisaient craquer à chaque pas. La région n’abritait pas de prédateurs dangereux, mais ils faisaient preuve d’une prudence de tous les instants. La nuit commença à tomber, ils surent qu’ils approchaient lorsqu’un drone de surveillance passa au-dessus des frondaisons, les forçant à se jeter au sol, immobiles. Après son passage Moggarr fit remarquer : « Il se passe des choses louches pour que la sécurité soit aussi renforcée. » Ils aperçurent les lumières de l’exploitation derrière une crête qui leur faisait face. Yerid intervint :

-Jusqu’à présent je n’ai rien dit, mais, le docteur et moi n’approcherons pas plus. Inutile de nous mettre encore plus en danger que nous ne le sommes déjà. » Il fixa ses grands yeux noirs dans ceux de son partenaire, ajouta : « Ceci est une directive monsieur VORTAN, merci de ne pas la contester. » Borae faillit discuter, puis se résigna avant d’aller se dissimuler derrière un arbre vite rejoint par son cérèbre. Les autres rampèrent tous ensemble jusqu’au sommet où ils se cachèrent dans de petits buissons. Là ils découvrirent une scène étrange. L’excavation avait démarré formant un cratère. Ensuite un puits avait été creusé qui servait à descendre dans les profondeurs de la montagne. Il n’y avait plus de végétation mais beaucoup de poussière. Ainsi qu’une véritable fourmilière d’activités. Des ouvriers sortaient des quantités impressionnantes de roche, sous la supervision de gardes armés. L’ensemble du personnel semblait sur le pied de guerre. Les militaires avaient leurs armes prêtes à faire feu, il y avait beaucoup de drones flottants au-dessus de la zone. Le groupe comprit qu’il allait disposer de très peu de temps pour effectuer sa reconnaissance, surtout s’il ne souhaitait pas se faire repérer. Au vu de la puissance militaire présente, ils préféraient tous éviter le combat. Des armures lourdes, des exo-armures, des batteries anti-aériennes, de quoi tenir un véritable siège. Devah s’équipa de jumelles numériques pour espionner les conversations des soldats à l’aide d’un micro intégré. Il relaya l’image et le son aux pavés, feuillets ou oreillophones de ses camarades. Deux sentinelles commencèrent à discuter : « On en a encore pour longtemps ?

-Pas moyen de savoir, l’excavation a pris du retard, le maître est furieux. » Les gardes furent rejoints par une troisième silhouette, leur supérieur hiérarchique visiblement, qui leur intima de se taire et de retourner à leurs postes. Ensuite, l’ensemble du personnel garda le silence puis travailla d’arrache-pied. Impossible de deviner la race des personnes présentes, elles portaient toutes des combinaisons complètes ainsi que des casques ou des masques de protections. Les rares discussions étaient en réalité les instructions que donnaient les ouvriers à leurs collègues ou aux robots les assistant dans leurs tâches. Une chose était certaine ils ne stockaient pas la roche pour en faire du béton. Les minutes défilèrent sans un bruit. Les patrouilles approchaient de leur groupe, aussi décidèrent-ils de battre en retraite. Ils récupérèrent Borae et Yerid en dévalant la colline puis s’engouffrèrent dans les bois. Le chemin du retour s’effectua en silence, à surveiller les environs ainsi que le ciel. La nuit tomba entre temps, ils utilisèrent des lunettes de vision nocturne sur le restant du trajet. Ils atteignirent le camion sans problème puis partirent immédiatement. Personne n’était satisfait de ce qu’ils avaient trouvé, aussi Devah passa son temps à regarder l’enregistrement en boucle. Une fois arrivés à la périphérie de la capitale Union, ils descendirent du véhicule, remercièrent le conducteur. Ce dernier leur indiqua que les Raxs avaient encore renforcé la sécurité dans la métropole, ils étaient désormais omniprésents. Le groupe se dirigea vers le quartier nord, en prenant soin d’éviter les troupes de soldats. En dehors de ces derniers les rues étaient vides, le couvre-feu était toujours en vigueur alors les compagnons seraient abattus à vue s’ils étaient surpris. À plus d’une reprise ils manquèrent de se faire repérer, mais ils parvinrent au quartier du marché, retrouvant ainsi une relative sécurité.

Arrivés au QG en pleine nuit, ils furent surpris d’apprendre que le prince les attendait. Ils le trouvèrent endormi, assis en salle de briefing. Sa garde du corps Erothe se tenait debout en silence dans son uniforme gris. La reine Angkel était à ses côtés, elle réveilla délicatement son fils, lui annonça l’arrivée du groupe. Il se recoiffa, les invita à le rejoindre, les yeux gonflés de fatigue. Devah transféra les données de ses jumelles numériques dans la table, ils commencèrent à les analyser ensemble. Au premier visionnage Erothe fit la moue jugeant que : « C’est maigre, mais la sécurité laisse à supposer qu’il se trame quelque chose d’inquiétant. » L’épervier-humain en convint :

-C’est vrai. » Un léger sourire illumina son visage : « Mais vous avez manqué un détail. Regardez. » Il tripota sa tablette de ses pattes griffues pour effectuer un agrandissement sur le torse d’un garde où il dévoila une médaille. Elle représentait un œil au cœur d’un soleil irradiant de lumière. Le prince Rothan intervint : « Je ne connais pas cet emblème, l’un d’entre vous l’a-t-il déjà vu ? » Personne ne put l’aider, aussi effectuèrent-ils une recherche sur le réseau extranet. Car bien qu’ils soient coupés du reste de la galaxie et des mises à jour, la planète gardait une empreinte de l’extranet stockée sur un serveur en orbite. Ils ne trouvèrent aucune trace de l’insigne où que ce soit. Le prince ne se démonta pas : « Nous avons appris que mon oncle possède des soutiens en dehors de Taorys 4, qu’ils œuvrent à un projet ensemble. Difficile de savoir ce qu’il en est, mais les premiers résultats ne semblent pas satisfaire ce maître dont ils parlent. Nous avons demandé à nos espions s’ils pouvaient obtenir plus d’informations. Nous attendons leurs rapports. Nous avons aussi effectué des recherches dans les fichiers concernant cette exploitation minière, nous n’avons rien trouvé de probant. » Il se leva tranquillement, se tourna vers un affichage mural numérique présentant l’état du blocus : « Il va falloir laisser tomber cette affaire pour nous remettre à préparer notre départ. Vous pouvez aller vous reposer, je vous contacterai dès que j’aurai du nouveau. » Issra se leva de toute sa hauteur, avant de partir elle conseilla respectueusement :

-Vous devriez en faire de même votre altesse. ». Le prince remercia l’elfe d’un signe de tête pour sa sollicitude. Cependant il resta dans la salle à observer les images du médaillon ou du blocus, comme pour obtenir des réponses.

Pirau ne parvenait pas à dormir, il remuait sur sa couchette, trop de questions se bousculaient dans sa tête. Il décida de se lever pour aller marcher dans la résidence. Il fut stoppé par Moggarr qui lui attrapa le bras alors qu’il passait à côté de lui. Pirau sursauta tandis que l’orc lui demandait en chuchotant : « Où vas-tu ?

-Je n’arrive pas à dormir, je vais prendre l’air.

-Attends je t’accompagne. » Il se leva puis marcha à sa suite, sans prendre la peine d’enfiler une veste. L’orkhal était pieds nus, en maillot de corps avec pantalon ample. Ils arrivèrent près d’une rambarde, s’installèrent là. Pirau soupira : « J’ai l’impression de me noyer dans un marasme sans fin. Toute cette situation n’a pas de sens…

-Il nous manque un élément clé pour comprendre ce que trame le régent. Je pense que nous pourrions trouver si nous prenions le temps de chercher.

-Malheureusement nous ne l’avons pas. L’urgence est montée d’un cran. Désormais il nous faut rejoindre l’ami de la famille du prince avant que la nouvelle de la scission de Taorys 4 ne parvienne aux oreilles du Bas-Conseil.

-Une question me taraude.

-Laquelle ?

-Les gardes ont parlé de retard dans leur plan. Mais ils venaient d’arriver sur Taorys 4. Qu’est-ce qui a pu prendre du retard ? » Pirau ouvrit les yeux en grand. Provoquant un malaise chez Moggarr qui croisa les bras en demandant : « Quoi, j’ai dit une connerie ?

-Non, au contraire, je suis surpris que tu aies souligné ce détail.

-Hé ! » Dit l’orc feignant d’être vexé : « J’ai beau être une masse de muscles, j’ai aussi fait face à pas mal de dangers, j’ai appris à réfléchir vite.

-Je m’excuse. » Rit Pirau : « Les stéréotypes ont la vie dure.

-Ma race est un cliché à elle seule. C’est vrai que nous gardons ce côté brutal, rustre de notre histoire, mais nous avons beaucoup changé tout de même. Pour en revenir à ce que je disais : qu’est-ce qui a pu les retarder ?

-Aucune idée, mais tu as raison, il nous manque des éléments. Nous passons à côté de quelque chose. » Ils sursautèrent lorsque Devah se joignit à eux en remarquant :

-Il nous manque tant d’éléments, mais je suis surpris de vous voir vous inquiéter autant d’une planète que vous allez quitter à la première occasion. » L’orc et l’humain se renfrognèrent. L’épervier claqua du bec puis ajouta : « Pour ma part j’ai un objectif sur le long terme qui requiert des amis puissants. Je compte demander de l’aide au prince dans ma quête lorsque tout ceci sera terminé.

-Pourquoi ne pas demander au régent ?

-L’idée m’a traversé l’esprit, mais il s’est condamné à mort le jour où il a déclaré son indépendance vis à vis de l’espace novemmien. De plus je doute qu’il ait besoin de mon aide avec les Raxs à son service. » Pirau acquiesça. Il se sentit obligé de donner ses raisons :

-J’ai horreur des butors, des oppresseurs. Le régent Morach en est un… Si je peux aider à le destituer, ce sera avec plaisir. » Moggarr rechigna à prendre la parole, il ne semblait pas très enclin à s’ouvrir aux autres. Il expliqua cependant :

-Le régent n’a aucun honneur, il s’en prend à plus faible que lui. Je ne supporte pas ce genre de personne, j’ai envie de lui éclater sa sale gueule... » Devah et Pirau sourirent mais approuvèrent. Ils passèrent quelques minutes à regarder les étoiles, vers lesquelles ils brûlaient tous de retourner. Pirau se mit à bailler, il s’étira : « Je crois que je suis prêt à dormir, j’y vais, du coup. » Moggarr pouffa puis lui emboîta le pas, suivi de Devah.

Ils furent convoqués le lendemain dans la matinée. Le prince les attendait dans la salle de briefing avec Erothe, sa mère ainsi qu’une sylveskelle. Le prince avait retrouvé de sa superbe, le maquillage que lui appliquait sa mère masquait de plus en plus difficilement les marques de fatigue. Angkel se faisait du souci pour son fils adoptif, son inquiétude devenait flagrante à mesure que l’adolescent déclinait. Erothe était fidèle à son poste, son uniforme gris impeccablement plié, propre. Enfin la jeune femme-plante devait à peine être sortie de l’adolescence, ses poings étaient serrés, son corps tendu. La sylveskelle avait une drôle de peau de couleur vert foncé. Ses cheveux en longues feuilles fines étaient attachés en un chignon. Son visage portait une pyrogravure rituelle de son peuple. De magnifiques motifs enlacés serpentaient sur sa joue gauche jusqu’à son front en contournant son œil. Rothan s’adressa à eux : « Mes amis, voici Samranne, elle a des informations qui vont vous intéresser. » Il fit signe à la jeune femme-plante de parler, cette dernière attrapa son bras droit avec sa main gauche en affirmant :

-Je sais où vous pouvez trouver un pirate informatique. »

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