XV. Présomption

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 La pluie continuait à tomber drue et l’orage tonnait avec fureur sur l'océan agité. La tempête qui s’abattait sur les îles était d’une rare intensité. Heureusement les boucliers jouaient leur rôle protecteur face à la colère des flots.

Lumia avait maintes fois hésité à se rendre aux cachots, mais grâce au soutien de Mara, elle s’était ravisée à chaque fois. Les deux femmes s’étaient installées dans un agréable petit salon attenant au bureau de Caelan et qui lui était strictement réservé.

Étant donné les circonstances, Lumia s’était octroyé le droit d’y rester, car elle appréciait son ambiance chaleureuse et apaisante.

Face à la tension, Mara décida de distraire Lumia en lui parlant de son infructueuse expérience avec son alliance. Intriguée, Lumia attrapa l’anneau.

 — C’est bien tenté…, murmura-t-elle.

 — Est-ce que tu crois que tu pourrais essayer ? demanda précipitamment Mara.

Après tout, Lumia était une mage accomplie, cela ne devrait pas lui poser problème. Cependant, au grand étonnement de Mara, Lumia lui répondit par la négative.

 — Je ne crois pas en avoir la capacité. Si un objet est relié à un individu, il faut se connecter aux énergies invisibles qui nous lient. Le sort de localisation fait partie de cette magie subtile qui requiert une compétence que je n’ai pas. C’est un sort compliqué et qui aboutit avec une précision si faible qu’on pourrait presque dire que c’est inutile.

L’étincelle d’espoir s’éteint dans les yeux de Mara. S’en rendant compte, Lumia reprit la parole.

 — Je peux tout de même essayer, il faut bien outrepasser ses limites de temps en temps.

Lumia posa l’anneau circulaire dans la paume de sa main. Elle avait déjà vu quelqu’un lancer ce sort, la théorie elle l’avait, mais les résultats c’était autre chose.

Après de longues minutes interminables et à son grand damne, la bague ne bougea pas d’un iota. Lumia était navrée pour Mara qui avait mis beaucoup d’espérance dans ce sort.

 — Le bijou est connecté à toi. Je suppose que si l’anneau est revenu vers toi lorsque tu as lancé le sort, c’est qu’il essayait de te faire comprendre quelque chose.

 — … ou peut-être que cela n’a pas fonctionné comme tout le reste de mes sorts, conclut Mara ne cachant pas sa déception.

 Dans la soirée, Béruc et Dax firent leur apparition. Lumia était quelque peu déçue de ne pas voir Caelan. Cela signifiait sûrement que l’interrogatoire n’était pas terminé. Malgré tout, elle pourrait quand même essayer d’obtenir quelques informations de la part des deux agents.

 — Tu choisis bien tes partenaires Lumia, commenta Béruc. Têtue comme une mule et muette comme une tombe.

 — Je dirais plutôt que vous avez des goûts douteux, corrigea Dax.

 — Ne jouez pas avec mes nerfs Agent Marin, vociféra Lumia qui se retint pour garder son calme. Elle n’a toujours pas parlé ?

 — Bien que cela ne lui plaise pas, Caelan a donc décidé d’opter pour une autre méthode, éluda Béruc.

 — Je continue à penser qu’elle aurait bien besoin qu’on lui arrache les ongles ou qu’on lui brise un ou deux membres !

Lumia jeta un regard noir à Dax, mais ne dit rien. L’Iténien connaissait bien Adley et sa mort l’avait énormément ébranlé. De par sa position et son hypermnésie, Dax connaissait tous les Venoris de cette base, et bien évidemment, il entretenait des contacts particuliers avec les différents commandants. Il était capable de reconnaître le visage de tous les agents et même de citer leur nom. C’était l’une des fabuleuses capacités des Iténiens. Par ailleurs, Dax avait très mal pris le fait que l’un des siens fasse partie des coupables. Même si Baljak — l’un des Venoris incriminés dans le massacre — n’était pas un ami, il lui était arrivé de le côtoyer.

 — Il ferait vraiment ça ? s’inquiéta Mara.

 — Le Commandant à des ressources. Derrière son air flegmatique, Kane est redoutable, répondit Dax.

Mara ravala sa salive peinant à imaginer la scène de torture, et surtout elle était navrée pour Lumia.

 — Dites-moi au moins si elle a avoué quelque chose, insista Lumia.

Dax et Béruc échangèrent un bref regard, histoire de s’entendre sur celui qui lâcherait le morceau. Béruc se lança.

 — Il semblerait bien qu’elle soit responsable de la mort d’Adley…

Une larme coula le long de la joue de Lumia. Les derniers espoirs sur l’innocence de Ludvinia venaient de s’effondrer pour de bon.

 — Le Commandant essaye toujours de lui soutirer des informations. Si j’étais vous, j’irais me coucher. Ça pourrait durer encore un moment, ajouta Dax.

Sur ces bonnes paroles, il suivit son propre conseil et s’en alla.

Béruc et Mara accompagnèrent Lumia jusqu’à ses appartements et après s’être assurés qu’elle n’avait plus besoin d’eux, ils prirent le chemin vers leur chambre.

 — Est-ce que Caelan va vraiment torturer Ludvinia ? demanda alors Mara au moment où elle s’arrêta devant sa porte.

Béruc soupira.

 — Tout ce que je peux vous dire, c’est que Caelan s’est s’y prendre. Il ne fera jamais usage d’une quelconque violence si celle-ci n’est pas indispensable. Reposez-vous, Mara. De ce que j’ai ouï dire, vous aussi, vous avez beaucoup encaissé aujourd’hui.

Béruc tourna les talons et s’en alla silencieusement.

 Cette nuit-là Mara eut encore plus de difficulté à trouver le sommeil. Cette journée avait été riche en émotions et en confidences. D’une part elle peinait à imaginer qu’à seulement quelques lieux d’ici, une femme était en train d’être « interrogée » et d’autre part, elle devait désormais assumer la lourde de tâche d’être impliquée dans une mystérieuse révélation. Toujours autant de questions et si peu de réponses. Jusqu’à maintenant, cette nouvelle vie dans ce monde étranger s’était résumé à peu de chose : un voyage d’une planète à l’autre dans une galaxie inconnue et des semaines dans une base venorie paradisiaque à manipuler sa magie. On aurait pu imaginer pire scénario.

S’interrogeant mentalement, Mara se rendit compte que malgré ses notes et tout ce qu’elle avait appris jusqu’à présent, elle ne connaissait encore rien du côté obscur de cet univers. Depuis son réveil, sa vie n’était qu’une mascarade dissimulant une vérité impitoyable. Pouvait-elle continuer à se voiler la face et ignorer une menace qui se dessinait inexorablement autour d’elle ? Qu’elle était la clé de cette révélation ? Mettant de côté la réalité presque idyllique dans laquelle elle se croyait jusqu’à présent, elle en conclut que désormais elle allait devoir s’endurcir ou mourir. Elle n’était pas ici en convalescence ou en vacances, mais en formation. Ici, on lui apprenait à être une guerrière, pas une magicienne ! Comment ne l’avait-elle pas vu plus tôt ? Après tout elle se trouvait dans une base venorie. Cela aurait dû faire sens depuis le départ. Qui plus est, on ne lui avait rien caché à ce propos. À son premier jour ici, on lui avait mis une épée entre les mains. Encore un signe qu’elle n’avait pas saisi.

Soudainement paniquée à l’idée d’avoir été enrôlée sans le savoir dans une guerre dont elle ne comprenait pas vraiment les tenants et les aboutissements, son envie de retourner chez elle reprit le dessus. Elle avait presque oublié ce sentiment, obnubilée par la magie et la beauté des lieux. Elle se sentait idiote d’avoir pensé que sa présence ici était juste de la bonté. Connaissant désormais la vérité, elle voulait retrouver son chez-soi, ou elle était certaine que tous ces dangers n’existaient pas.

Hélas, tant que ses souvenirs ne seraient pas plus clairs, elle était coincée. Et puis de toute façon elle ignorait ou se trouvait sa planète.

Écoutant le violent orage qui faisait presque trembler les murs, Mara remerciait le ciel de l’empêcher de dormir sachant que le cauchemar viendrait encore l’importuner cette nuit. Elle s’emmitoufla sous ses couvertures et versa une larme. Elle désirait ardemment rentrer chez elle.

 La nuit fut courte et après un terrible réveil, Mara avait enfilé les premiers vêtements qu’elle avait trouvés et s’était directement rendue devant la porte de Lumia. Elle frappa doucement espérant une réponse. Ses vœux exaucés, elle entendu un bruit sourd, comme si quelque chose venait de tomber sur le sol. La tête de Lumia apparut quelques secondes plus tard.

 — J’ai une mine affreuse, la nuit a été si mauvaise, maugréa Lumia.

 — Pareil ! balbutia Mara qui chercha vainement un indice de cette « mine affreuse ».

À son habitude, Lumia était radieuse, fraîche comme la rosée du matin.

L’Eforie sortit de sa chambre et referma la porte :

 — Allons manger, j’ai faim ! pépia-t-elle.

Mara n’avait pas faim, mais elle espérait que la sensation de la nourriture dans son estomac apaiserait son malaise. Hésitante un instant, elle se demandait si par hasard, Lumia avait eu des nouvelles durant la nuit. D’un simple regard, Lumia lui fit comprendre qu’elle était aussi dans l’ignorance.

 Le réfectoire était plus rempli que d’habitude. Cela devait être à cause de la météo mauvaise. Le bouclier orostatique protégeait peut-être la base venorie des tumultueuses vagues océaniques, mais cela n’empêchait pas la capricieuse météo de déverser des trombes de pluie. Le ciel était toujours aussi noir et grondant. Le bouclier aurait pu être activé telle d’un dôme, mais il aurait entravé l'hydratation de la terre.

Béruc était assis tout au fond de la salle, il s’était volontairement isolé pour lire quelques rapports. Mara et Lumia se servirent d’un bol de bouillie de céréale et d’un fruit avant de le rejoindre.

 — Des nouvelles ? demanda Lumia s’attablant.

 — Mangez donc votre petit déjeuner et on ira les voir.

Lumia goba littéralement le contenu de son assiette et dévora son fruit. Mara pas vraiment sûr de vouloir suivre le mouvement eut le temps de manger quatre cuillerées, Lumia était déjà debout. Résolue, Mara posa sa cuillère et garda son fruit pour plus tard.

Le petit déjeuner liquidé, les trois compagnons étaient en chemin en direction le bureau du Commandant. Lumia frappa la première. Caelan ouvrit la porte. Exténué, il invita ses hôtes à entrer avant de se rasseoir à son bureau jonché de feuilles. Des notes rédigées à la main. Le meilleur moyen pour que cela reste en dehors du réseau et du piratage. Tout ceci finirait probablement au feu.

 — Je savais que tu ne me laisserais pas tranquille. Tréviane m’a prévenu, mais lui est allé dormir, murmura Caelan.

 — Tu n’avais qu’à venir me voir après avoir terminé, je ne me serais pas fait du mouron toute la nuit, plaida Lumia.

Caelan hocha la tête en frottant ses yeux cernés :

 — Ça n’a pas été évident, mais j’ai pu lui soutirer un certain nombre informations. Par contre, il y a des zones d’ombres que je n’ai pas réussi à déchiffrer…, il soupira, le regard inquiet. J’ai un doute sur sa culpabilité.

 — Comment ça, elle n’est pas responsable de la mort d’Adley ? s’étonna Lumia avec un regain d’espoir.

 — Hélas, elle ne s’en est pas caché, mais ce que j’essaye de dire c’est qu’il y a quelque chose qui ne tourne pas rond chez Ludvinia. Son esprit est tellement confus. J’ai donc décidé de la renvoyer immédiatement à la loge principale…

Il ravala sa salive, sachant que cette nouvelle n’allait pas plaire à Lumia. En prenant cette décision, il mettait le sort de Ludvinia entre les mains du Concile venori où elle allait être jugée pour son crime.

 — Comment tu as pu ? brailla Lumia en faisant de gros yeux.

 — Crois-moi, c’est mieux ainsi, murmura Caelan qui n’avait nulle envie de tergiverser après les dernières heures qu’il venait de passer.

Heureusement pour lui, Lumia n’insista pas. Elle voyait bien qu’il avait fait tout son possible et après tout, il était normal que Ludvinia reporte de ses actes.

Caelan poursuivit :

 — Nous connaissons enfin le nom de l’entité qui est apparu en même temps que Mara. Il s'appelle Mephrine. Et d’après Ludvinia, sa venue est censée apporter l’ordre et la paix. Nous n’aurions donc nulle raison de le craindre. Il est prêt à tendre la main à tous ceux qui font appel à lui.

 — Va dire ça à Adley et les autres étherians, maugréa Béruc un brin sidéré par cette annonce.

 — On est bien d’accord…, s’exclama Caelan marquant une pause. Mephrine a réussi à corrompre un agent venori pour lequel j’avais une haute estime. Il la mandater pour perpétrer un massacre. Cela ne signifie qu’une chose, la révélation des Étherians devait être suffisamment compromettante pour commanditer cet assassinat.

 — Il est donc temps qu’on leur accorde davantage de crédit, ajouta Lumia.

Caelan hocha la tête par l’affirmative :

 — Des nouvelles de la chambre étheriane d’Erendrïn ?

 — Toujours pas.

Caelan se tourna alors vers Mara.

 — Nous allons accélérer votre entraînement. Si Mephrine estime que la révélation est vraie, il y a fort à parier qu’il vous considère comme une menace. J’ai peur pour votre sécurité.

Mara dégluti, peu rassuré.

 — Vous ne risquez rien près de nous, il n’y a rien de plus sur qu’une loge venorie, précisa Béruc pour rasséréner la jeune femme.

 — Merci, je suppose…, murmura-t-elle, peu convaincue.

À vrai dire, elle ignorait en quoi elle pouvait être une menace pour ce Mephrine. Ne pas savoir qui elle était commençait à lui peser sur le système, enragée d'ignorer ce qu’elle avait bien pu faire pour finir dans une telle situation.

 — Tout ira bien, ajouta Caelan avant se lever.

Il fit le tour de son bureau et se dirigea vers la porte. C’était un moyen pour lui de signifier qu’il était temps pour ses hôtes de quitter les lieux. Il avait franchement besoin de repos.

***

 Au même moment en des lieux perdus au milieu de l’espace, Istovir détenait enfin les informations nécessaires. Il pouvait aller à la rencontre de son maître pour lui présenter ses dernières découvertes. Extatique, il quitta son petit office encombré.

Déambulant dans les coursives du Forteraine, il évitait des flaques d’eau sur le sol. L’humidité était omniprésente sur les parois irrégulières. Le vaisseau était probablement ancien. Plus étonnant encore, des lignes rougeâtres, presque noir traversaient de part et d’autre les lieux, reflétant la vie, comme le sang qui coule dans les veines.

Comme annoncé, Mephrine avait déployé son navire à partir de son médaillon. L’immense engin était alors apparu dans le ciel, visible uniquement par une poignée d’élu. Quoique fût l’origine du Forteraine, il n’était pas ordinaire. Il semblait être autonome, guidé par les pensées de son propriétaire. Istovir en avait conclu qu’il s’agissait peut-être d’une extension de son nouveau maître, mais cela restait une spéculation.

Istovir bifurqua et arriva devant les quartiers de Mephrine. Il écarta les rideaux et se faufila à l’intérieur de la haute pièce et s’arrêta. Mephrine se tenait au milieu psalmodiant dans une langue inconnue à travers une fenêtre immatérielle. Elle était lumineuse et semblait permettre de voir un autre lieu. Sentant l’intrus, Mephrine effaça d’un coup de main l'étrange magie, empêchant Istovir de déceler quoique ce soit.

Le Danarien balbutia gêné.

 — Parle Istovir, susurra Mephrine s’asseyant sur son siège.

 — Ceux qui ont découvert la révélation sont morts. Désormais, les Venoris ne peuvent que jongler sur des suppositions, commença timidement Istovir.

Même dans la pénombre de la pièce, il avait peur de croiser le regard de Mephrine dont le visage restait dissimulé sous une capuche. Mephrine écouta attentivement les déclarations du Danarien. Ce qu’il entendit ne lui plus pas, mais il s’efforça de garder son calme.

 — Tout est espoir est dangereux. Nous devons éradiquer cette espérance futile. Les révélations ne sont que des mots manipulables et interprétables. Qu’ont-ils compris ?

 — Ils pensent que vous êtes une menace et la chose qui est arrivée en même que vous, est leur sauveur.

 — Alors comme ça, ils croient que « le catalyseur » pourra les aider ? C’est trop de crédit accordé à un corps aussi fragile. Ces Venoris ne comprennent rien aux révélations, obnubilées par leur arrogance, soupira Mephrine.

Il resta une longue minute silencieux, réfléchissant.

 — Il est temps d’éradiquer ce vain espoir.

 — Nous ne sommes pas encore assez nombreux pour attaquer une base venorie, souligna Istovir. (Mephrine jeta un regard méprisant à Istovir.)… Mais on va s’arranger pour isoler le catalyseur, ajouta Istovir en bafouillant.

***

 — Qu’est-ce qui te préoccupe, Romus ? demanda une voix lascive.

 — Toujours la même chose, rétorqua le Roi à la jeune femme qui avait sa tête posée sur son torse nu.

Il lui donna une caresse mécanique sur sa chevelure d’un roux flamboyant tandis qu’il lisait un message qu’il venait de recevoir. Il finit par se lever pour attraper sa chemise.

 — Tu sais que tu peux tout me dire ? entonna la jeune femme en enroulant les draps autour de son corps dénudé.

 — Je ne veux pas t’ennuyer avec ça, Aurore. Tu es l’unique personne qui sait me porter de l’amour. Avec toi, j’ai l’impression de me reconnecter à moi-même, déclara-t-il en venant embrasser la femme.

 — L’amour se cultive, Romus.

 — Et toi tu as très bien compris comment t’y prendre, conclut-il en enfilant enfin sa chemise.

Avec Aurore, Romus se comportait différemment. Son amante depuis plus d’une année, elle avait su conquérir son cœur. À cette époque, il n’était pas encore Roi, mais aspirait déjà à la conquête d’Alkian. Aurore avait l’étonnante habilité de contenir les colères de Romus. Il n’écoutait pas toujours ses bons conseils, mais avec elle, il s’apaisait. Pour cela, il en était profondément amoureux.

Appelé par son devoir, Romus finit de se rhabiller en vitesse et quitta sa somptueuse, mais sombre chambre non sans embrasser une dernière fois sa chère et tendre Aurore.

***

 — Encore avec Aurore ? couina Tririel lorsque Romus pénétra dans les tréfonds du fort.

Tririel n’aimait pas la jeune femme. Pour elle, c’était une source de distraction inutile. Elle modérait le Roi et avait la fâcheuse tendance à tempérer ses ambitions. Si cela ne tenait qu’à elle, elle l’aurait déjà jeté par-dessus la falaise. Mais ça, jamais elle ne le dirait à Romus. Et elle savait qu’il ne lui pardonnerait pas un tel acte.

Romus ne répondit rien. Il se fichait de ce qu’elle pensait. Il enchaîna sur les raisons de sa visite.

 — Une invitation de l’impératrice Bascrêt, balança-t-il en la projetant devant lui.

 — Elle veut évaluer tes motivations, supputa Tririel en examinant l’invitation.

 — Elle sait pour les sources divines et doit chercher un moyen de me décrédibiliser ! vociféra Romus.

 — Une raison de plus pour y aller. Ce sera l'occasion de renforcer le lien entre vos civilisations et de démontrer que les Armeians et les Alwyiens font partie du même peuple.

 — Et si c’est un piège ?

 — Sous le couvert d’une visite diplomatique ? L’impératrice est connue pour ses manigances, mais elle n’oserait pas s’attaquer à toi aussi frontalement. Ne lui donnons pas de quoi alimenter ses soupçons et rends-toi à Alkian.

Le Roi Romus scruta longuement Tririel. Il n’était pas motivé, mais sous l’insistance de l’Eforie, il finit par concéder.

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