Chapitre I

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Un hurlement brisa le silence. À l'arrière du lycée, dans un terrain vague baigné par les derniers rayons d'un soleil déclinant, mêlés aux murmures du vent annonçant la fin de la journée, dans l'ombre de l'établissement, Zoé, une adolescente de seize ans, vivait un calvaire. Les cours avaient laissé les lycéens épuisés, regagnant leur foyer. Deux jeunes filles de son âge l'agressaient sauvagement. L'une d'elles saisit la chevelure brune de Zoé, la propulsant violemment en avant. La jeune fille chuta tête la première, dans une flaque d'eau stagnante, dont la surface miroita un instant. Son visage, en détresse, ses longs cheveux bouclés étaient désormais souillés par la boue et l'eau croupie.

Penchées sur elle, les deux agresseuses ricanaient avec une cruauté jouissive, contemplant Zoé dans son impuissance. Elles l'insultaient de tous les noms et lui assénaient des coups de pieds. Après quelques minutes qui lui semblèrent une éternité, les jeunes filles partirent, laissant Zoé à genoux dans l'eau souillée, seule et en sanglot. Elle prit le temps de rassembler ses esprits avant de regagner péniblement son domicile, ses vêtements mouillés lui collaient à la peau.

Chaque jour, Zoé se trouvait piégée dans le tourbillon incessant des persécutions. Une toile d'agonie tissée par ses bourreaux, qui la plongeait dans un abîme psychologique avant même de franchir le seuil de sa demeure. Le chemin du retour, loin d'apaiser son tourment, s'étendait comme une route pavée de souffrance, car même ses parents semblaient avoir oublié le langage de la compassion.

Sur un sentier de campagne, Zoé avançait seule, loin du tumulte urbain qui animait ses camarades. Sa demeure, nichée en retrait de la ville, se dressait comme une vieille relique aux confins d'une forêt. Chaque soir, sur ce chemin poussiéreux, elle revisitait les moments douloureux qui teintaient sa journée, perdue dans ses pensées tourmentées. Entre les cours, la lycéenne demeurait seule, incapable de tisser des liens amicaux, devenant le souffre-douleur de son lycée. Endurer cette cruauté quotidienne aurait pu briser n'importe qui.

Le soleil, en déclin, peignait le ciel d'une palette de teintes crépusculaires, enveloppant le paysage d'une douce pénombre. Zoé hâtait le pas, redoutant de se retrouver seule dans l'obscurité naissante. Des pensées sombres l'assaillirent, imaginant un scénario où un être malveillant l'attendrait dans un buisson, prêt à la happer, voire pire. Un instant, elle songea que ce ne serait peut-être pas plus mal ainsi. Puis, reprenant ses esprits, elle s'encouragea à voix haute, fortifiant sa force intérieure.

— Allez, ça va le faire. Ce matin, maman semblait de bonne humeur, donc ça devrait bien se passer, murmura-t-elle d'une voix tremblante.

Arrivée devant l'entrée de la demeure, Zoé marqua une pause, hésitant un instant avant de saisir la poignée de la porte d'entrée. Le métal froid sous ses doigts semblait transmettre une tension palpable, résonnant avec l'anticipation des traitements cruels que ses parents pourraient lui réserver. Un grincement sinistre accompagna l'ouverture lente de la porte, une symphonie lugubre imprégnée du poids des craintes qui planaient dans l'air.

À l'intérieur, un étroit couloir au charme rustique se dévoila, révélant un escalier ancien qui menait vers l'étage supérieur. Chaque marche paraissait porter le fardeau des secrets enfouis, une ascension vers un sanctuaire qui mélangeait le réconfort et la terreur. À l'extrémité du couloir, une cuisine négligée s'offrit au regard de Zoé. Les vestiges d'un repas oublié jonchaient la table, et la vaisselle sale, datant d'avant-hier, languissait dans l'évier.

Soudain, la silhouette familière de sa mère émergea du salon, un visage fatigué se présentant devant Zoé. Les yeux de sa mère où miroitaient la frustration et la colère scrutaient la jeune fille.

— C'est à cette heure-ci que tu rentres ? s'exclama-t-elle, sa voix empreinte d'indignation.

— Pardon, maman.

— Où es-tu encore allée traîner ? Regarde-moi dans quel état tu es, on dirait une sans-abri. Tu ressembles à ton père. Va te changer dans ta chambre. Et viens m'aider dans la cuisine quand tu auras fini.

Zoé fit demi-tour, gravissant lentement les escaliers avec le poids de la journée sur ses épaules, épuisée moralement et physiquement. La faim tiraillait son estomac, faisant écho aux cris de famine. Arrivée dans sa chambre, elle laissa glisser son sac de cours le long de son dos, laissant le poids des responsabilités retomber sur le sol avant de se dévêtir pour prendre une douche réparatrice.

Quelque temps plus tard, Zoé, lavée et changée, émergea de sa retraite pour rejoindre la cuisine où sa mère s'activait. La table avait été débarrassée, mais une montagne de vaisselle sale attendait son destin. Dans le salon, son père était affalé dans le canapé devant la télévision, ricanant face à son programme télévisé préféré. Une épaisse fumée s'échappait de la cigarette qu'il tenait entre ses doigts, embaumant le salon d'une odeur âcre de tabac.

— Allez, dépêche-toi au lieu de rêvasser, aide-moi à faire la vaisselle. On a encore le dîner à préparer, s'exclama sa mére.

— Je suis fatiguée maman.

— Tu es fatigué? Oh ma pauvre fille! Tu crois pas que je le suis, moi ? Ton père ne fout rien de ses journées. C’est moi qui fais tout dans la maison, et je suis obligée de supporter une gamine qui chouine à chaque fois qu’elle rentre de l'école. Alors, aide-moi avant que je t’en foute une.

Les paroles acerbes de sa mère résonnaient dans l'air. Tandis que Zoé, épuisée, mais résiliente, s'exécutait, portant le fardeau de la domesticité et de l'incompréhension parentale. Le salon, saturé de l'odeur du tabac et du fardeau des conflits non résolus , était le théâtre quotidien d'une tragédie familiale.

brusquement, le père de Zoé fit son apparition dans la cuisine, une forte effluve de tabac, d'alcool et de transpiration émanait de lui.

— Encore en train de faire la vaisselle. J'ai la dalle, moi, et rien n'est encore prêt. Allez, bougez-vous le cul. Je sors chercher de la bière et des clopes. Quand je reviens, il vaut mieux que ça sente bon et que tout soit clean, sinon ça va chier, lança-t-il d'un ton méprisant, sa voix rauque résonnant dans la pièce.

D'une carrure imposante, il fit valser une chaise qui heurta la table à manger. Derrière sa barbe négligée et des cheveux mi-longs et gras se dessinait un visage colérique ravagé par l'alcool et le tabac. Son ventre, distendu comme celui d'une femme enceinte, semblait toujours plein de liquide. D'un pas lourd, il se dirigea vers la sortie en ronchonnant avant de faire claquer la porte derrière lui.

— Tu as entendu ton père? dépêche-toi, on a trente minutes avant qu'il revienne.

— Oui, maman.

La demi-heure s'écoula, quand la porte d'entrée se mit à grincer. Les deux femmes venaient à peine de commencer à préparer le repas lorsque les pas pesants du paternel retentirent. Une angoisse saisit Zoé tout entière ; elle savait qu'elle allait subir la colère de son père. Les pas se rapprochaient inexorablement. La jeune adolescente n'osa pas se retourner lorsque soudain la voix rauque de son père retentit, la faisant sursauter.

— Bordel de..., s'interrompit-il brusquement, frappant violemment la table de sa grosse main épaisse et poilue.

— vous n'avez même pas été fichues de faire à manger en 30 minutes! Et toi, tu n'es même pas capable d'aider ta mère convenablement. Ajouta t-il en se tournant vers Zoé. Tu es une moins que rien. Qu'est-ce qu'on a fait au bon Dieu pour mériter une fille pareille ? Pour la peine, tu ne mangeras pas ce soir. Laisse ta mère se débrouiller et monte dans ta chambre. Tu as cours demain matin, Allez, dégage-moi le plancher.

La jeune fille ne pouvait pas prononcer un mot par peur que son père ne lève la main sur elle. Elle quitta la cuisine et se dirigea vers l'escalier, la gorge serrée, les larmes aux yeux. Elle monta les marches deux par deux, claqua la porte de sa chambre, et éclata en sanglots sur son lit. Une fois de plus, elle était privée de dîner. Zoé avait toujours été une adolescente sensible, et cette soirée n'avait pas été différente des autres. La tension dans la maison était presque palpable, et le poids des non-dits pesait lourdement sur ses épaules.

Allongée dans son lit, les émotions la submergeaient. La colère, la tristesse et la frustration se mélangeaient dans son esprit tourmenté. Elle ne parvenait pas à trouver le sommeil. Le temps semblait s'étirer à l'infini, comme si la nuit elle-même partageait sa peine. Sa seule consolation était de se dire que ses parents avaient été relativement gentils, du moins aujourd'hui. Ils ne m'ont pas assénée de claques.

Puis soudain, quelque chose d'extraordinaire se produisit. Elle ressentit d'intenses vibrations parcourir tout son corps. Ses émotions négatives se transformèrent en quelque chose d'inattendu, et soudainement, elle fut projetée au plafond à une vitesse fulgurante, tel un boulet expulsé d'un canon. Elle se réveilla brusquement, mais au lieu de se trouver dans sa chambre, elle était entourée d'une lumière éblouissante. Les couleurs étaient si vives et intenses qu'elles semblaient irréelles. Elle se redressa, regardant autour d'elle, incapable de croire ce qu'elle voyait.

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