23 - Soumis, mais pas trop

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Alors que je me levai assez tôt, après avoir difficilement trouvé le sommeil, rongée par la culpabilité et la honte, quelqu’un sonna à ma porte. C’était Quentin. Visiblement, il n’avait pas dormi de la nuit.

Sans un mot, je le fis entrer dans la cuisine où je m’apprêtais à prendre un bol de café noir. Je lui en proposai un et le priai de s’assoir. Il avait le visage de nos jours sombres, loin du flamboyant jeune homme de la veille. Mais, après un moment de mutisme, comme s’il cherchait à rassembler ses pensées, il se lança dans le récit de sa nuit agitée.

- Après notre étreinte de retrouvailles plutôt inédite et ton départ précipité, j’ai eu de gros doutes sur tes motivations. De ce fait, peu après que tu sois partie, j’ai décidé d’aller vérifier par moi-même si tu disais vrai. Arrivé au pied de ton immeuble, comme j’ai vu qu’il y avait encore de la lumière, j’ai décidé de monter. Heureusement, le code de l’entrée était toujours valide. Ensuite, à ton étage, comme j’ai entendu du bruit derrière ta porte, je me suis caché dans un recoin du palier. Peu de temps plus tard, j’ai vu un homme inconnu quitter ton appartement et je l’ai suivi jusque dans la rue.

Alors que je voulais tenter de lui donner quelques explications, il me fit signe de me taire et de continuer d’écouter son histoire. A son expression, je sentais bien que ce qu’il avait à dire était suffisamment grave pour que je l’écoute attentivement.

- Lorsque le type a passé le porche, je l’ai interpellé. Je lui ai demandé s’il me connaissait, et ce dernier m’a répondu sèchement : Que trop bien, hélas ! Cependant, comme il a constaté que j’étais plutôt calme, il m’a proposé qu’on aille discuter de tout cela ailleurs.

Comme je me doutais de la nature de la conversation que les deux hommes avait pu entretenir, je commençai à me sentir mal. Mais, Quentin me prit la main pour me rassurer et il poursuivit :

- Nous nous sommes alors rendus dans un bar de nuit que tenait un ami de longue date de Simon. Entretemps, il m'avait dit son nom. Là, entre deux verres de whisky, l’homme s’est longuement étendu sur les détails de son aventure avec toi et des affres dont il souffrait à cause de toi. Cela m’a rappelé des situations que j’avais, hélas, trop bien connues. Mais, surtout il a évoqué sa malheureuse demande en mariage ainsi que, par le menu, la cruauté de ta dernière séance avec lui. Dernière séance, où j’ai appris que j’avais eu un rôle de guest star !

Il avait plongé son regard clair et fatigué dans le mien. Je me sentais si honteuse que j’aurais voulu disparaître dans un trou de souris. Mais, curieusement, il ne semblait pas m’en vouloir. Il enchaîna sur la suite de cette rencontre.

- Après cet échange avec Simon, j’ai fini plutôt ivre. J’aurais voulu lui casser la figure, mais j’étais plus compatissant et abattu qu’autre chose. Devenus complices, nous nous sommes alors rendus chez le patron du bar. Le type est un maître BDSM qui dirige un autre établissement où travaillent, entre autres, des dominas professionnelles. Là, le patron nous a proposé un Sévice complet, ce que nous avons accepté avec plaisir. Des femmes hautes en couleur et en talons, nous ont attachés, fouettés et sodomisés dans un ballet de latex froid et minuté.

Alors que Quentin faisait une pause dans son récit, j’étais effondrée. J’imaginais déjà Alex venir me trucider parce que son protégé avait rechuté dans la débauche à cause de moi. Puis, il poursuivit et je m’attendis au pire.

- A l’aube, nous avons quitté l’établissement, mais Simon a insisté pour que je l’accompagne chez lui. Là, allumant le mur d’écrans qui trône dans son bureau, il a lancé un film qu’il avait sur son ordinateur.

A ce moment, Quentin leva les yeux vers moi et prenant un air grave, il m’annonça tout de go que Simon possédait le film complet de sa petite visite dans le bordel BDSM de son ami. Et, qu’il souhaitait maintenant en balancer des extraits sur des sites spécialisés sur le net. Vu le physique avenant de mon amoureux, nul doute qu’il y ferait fureur.

Je laissai tomber ma tasse sur la table, tellement cette nouvelle m’avait accablée. Mais, Quentin me rassura. Il avait pu le convaincre de renoncer à cette basse vengeance, ainsi qu’avoir obtenu l’assurance de sa part qu’il détruirait le film en question. Alors que je l’interrogeai sur la contre partie de ce renoncement, il me lança avec un sourire :

- Il veut qu’on le fasse tous les trois ensemble. J’ai trouvé que c’était un mince prix à payer. Et puis, cela peut être amusant !

J’étais atterrée. Quentin avait de nouveau perdu la tête et une fois de plus j’avais tout faux. Et ce diable de Simon, sous couvert de passer pour une pauvre victime humiliée, avait encore réussi à retourner la situation à son avantage. Il poussait le jeu encore plus loin et profitait maintenant de mes sentiments, bien réels, pour Quentin pour me maintenir sous son emprise.

Hors de moi, j’appelai immédiatement ce monstre pervers. Il décrocha et ricana à l’autre bout du fil, jubilant de sa petite plaisanterie. Je lui indiquai vouloir porter plainte s’il mettait ses menaces à exécution, mais il n’en avait que faire. Il déposerait le film sur des plate formes à l’étranger et la justice française serait incompétente.

J’avais voulu jouer à la plus fine, mais il s’était joué de moi. En s’en prenant à Quentin, il avait mis au point, en un éclair de temps, une réplique de haut vol. Il me donnait là, la leçon qui me manquait, celle du respect de l’adversaire. J’apprenais, à mes dépens, qu’il ne fallait jamais sous-estimer un soumis. Surtout, un soumis qui ne l’était pas.

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