T'es trop chou

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— Vu les cris de joie que j'ai entendus depuis le comptoir, j’ai bien compris que tu les avais tous battus. Mais ce n'est pas de ça dont je te parle, Monsieur qui fait durer le suspens inutilement.

— Oui, je sais.

— Je n'arrive pas à croire qu'il t’ait embrassé devant tout le monde.

— Autant te dire que je ne savais plus où me mettre. Mais tu me connais, quand je suis en mode guerrier et que je remporte la partie, je m'enflamme toujours. Alors je l’ai embrassé moi aussi.

— Sacré Julien, toujours là où on ne l'attend pas !

C’est clair, je me surprends moi-même sur ce coup-là. J’ai envie de me prendre dans les bras, tellement je suis content pour moi.

— Moque-toi, va. Je te signale que c'est toi qui m'a dit de me lâcher… alors voilà le résultat.

— Et dire que j’ai loupé le baiser du siècle. Dommage, je suis arrivée juste après pour te proposer de continuer la soirée chez Valérie et Sandra.

— D'ailleurs, tu ne m'as pas dit si tu as passé une bonne soirée chez tes nouvelles amies…

— Ne changez pas de conversation Monsieur ! Je ne sais pas si t’as remarqué la tête de Fred. Il était tout gêné quand je suis venu lui faire la bise.

— Ouuiii ! Ça m'a bien fait marrer. Je pense qu'il a enfin compris que nous ne formions pas un couple.

— Oui, ton mime du bisou était imparable. Tu savais qu'il connaissait Valérie et Sandra ?

— Oui, il me l'a dit. Il avait l'air tout excité d'apprendre que tu aimais les filles. Il n’en revenait pas ! Il m'a dit en plaisantant que cet été à la colo, on avait tous été les spécialistes dans l’art du camouflage Autant il avait de gros doutes pour moi, autant toi, il ne se serait pas douté un instant.

— Oui, bah c'est pas écrit sur mon front.

— C'est ce que je lui ai dit.

— Mais revenons à nos moutons, Juju. Et moi qui culpabilisais de partir et de te laisser seul au Petit Marcel. Je ne pouvais pas imaginer que tu repartirais avec Pierre pour finir la soirée.

— Et moi donc !

— Tu fais ce que tu veux … mais je l'ai bien regardé ton Pierre, c'est pas du tout ton genre de mec. Il a l’air bien trop sérieux.

— Ce n'est pas mon Pierre d'abord, et oui, tu as raison. Il est pire que moi.

— Et tu es quand même allé avec lui…

— …

— Excuse-moi, ça ne me regarde pas.

— Dit-elle pour en savoir plus ! Je te connais par cœur, Madame curieuse.

Alice me tire la langue.

— Tu vas me prendre pour un mec facile.

— Mais non idiot. Je te prends tel que tu es. Il n'y a pas de mal à chercher de la chaleur humaine et du réconfort, me répond-t-elle avec une certaine malice dans la voix.

— Mouais, comme tu dis. Au fait, j'ai préféré lui donner ton numéro de téléphone. Comme nous serons officiellement en colocation la semaine prochaine.

— Parce que tu souhaites le revoir, je n'arrive pas à te suivre ?

— Pas plus que ça. Mais je le sentais mal à l'aise de le planter, comme ça, en pleine nuit.

— T'es trop chou. Vous avez passez un bon moment, c'est le principal, non ?

— Oui, tu as raison.

— C'est un petit oui. C'était pas si bien alors. Il suce mal, c'est ça ?

Alice a toujours une fâcheuse tendance à être trop direct dans ces cas-là. Elle sait pourtant que ça me met toujours un peu mal à l'aise. À l’inverse, ça ne me viendrait pas à l’esprit un instant de lui poser des questions d’ordre intime. Je n'ai pas du tout envie de savoir comment elle s'y prend pour lécher une… Oh la la, trop d'images me viennent en tête. J'ai déjà envie de vomir.

— Alice, t'abuses. Je dirais juste que c'était bien, très bien même. Et dis-toi que si Pierre paraît sérieux comme ça, en privé, c’est très différent. T'es contente ?

— Coincé, mais pas de la bouche, ouf ! Tu m'as fais peur. Oh, regardez-le, voilà que mon meilleur ami rougit !!

— N'importe quoi d'abord.

— Si, c'est vrai, tu rougis.

— Non

— Si

— Je te dis que non.

— Et moi, je te dis que…

La sonnerie du téléphone nous fait sursauter. Alice décroche.

— Bonjour… Oui tout à fait.

Elle pose sa main sur le combiné. Elle se retient de rire.

— Quand on parle du loup ! dit-elle en chuchotant.

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