Enfermée (claustrophobie)
J'ai toujours adoré les grands espaces, dans lesquels l'esprit et le corps peuvent se mouvoir à l'infini. Là je suis vraiment épanouie, je me sens à ma place.
Où que j'aille il faut que les portes et les fenêtres restent ouvertes, que le monde extérieur puisse rentrer en contact avec le mien. Là où certains voient un cocon rassurant, protecteur dans des lieux fermés, j'y vois une prison qui me fait perdre tous sens communs.
Les ponts aussi m'attirent, comme un moyen de rejoindre deux rives que parfois tout oppose. Sûrement parce qu'ils représentent l'ouverture, que l'on peut y circuler indifféremment dans les deux sens, qu'ils permettent toujours d'avancer malgré la contrainte du vide.
De même, dès qu'il y a un trou ou une faille dans un mur, j'y glisse un regard inquisiteur pour découvrir ce qu'il y a derrière. Poussée par un besoin irrépressible d'élargir mon champ de vision, que mes yeux ne se heurtent pas à de la matière sans vie.
Dans certaines situations : dans le métro à Paris, le tramway à Brest, un ascenseur ou d'autres lieux confinés ; une forme d'oppression me gagne, la peur me noue l'estomac - je n'ai qu'une envie, fuir.
Une panique irrationnelle s'empare de moi dès qu'une porte refuse de se déverrouiller.
Les murs semblent se rapprocher dangereusement. J'ai l'impression d'étouffer.
C'est comme avancer pesamment, au ralenti, dans un long tunnel à peine éclairé et n'attendre qu'une chose, atteindre l'issue tant espérée.
Impression d'être enfermée dans mon corps et dans ma tête. Des barreaux invisibles m'ôtent toute liberté. La vie suspend son court, privée de tout mouvement. Le monde se dissipe.
La perte de contrôle est totale, celle de tous repères brutale.
Au moment de la libération, il faut un moment pour se réadapter, pour se caler de nouveau sur ce monde qui a conservé son fonctionnement normal pendant que j'étais en train de perdre pied, de m'éloigner de la réalité.
Je sors de ce long cauchemar, je respire enfin à pleins poumons. Délivrée de ce mystérieux mal.
Je suis guérie lorsqu'un dédale de rues se déploie devant moi ou que de grandes artères permettent de circuler aisément. Quand l'océan m'offre la possibilité de voyager où je le souhaite et d'embrasser l'horizon. Quand à la campagne, malgré quelques clôtures éparses, je suis en communion avec la nature de la Terre entière.
Libre. Libre comme l'air.
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