Chapitre 12 : Confiance

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CLAC !!

J’ai giflé Shûhei. C’était la première fois. La première fois que j’étais aussi en colère contre lui. La première fois que je levais la main sur lui.

Ce matin-là, après que Saya et Saeko soient parties se balader en ville, Shûhei m’a avoué ce que Saya lui avait fait auparavant. Qu’elle l’avait embrassé hier soir, pendant que je dormais, et qu’il a tellement été pris au dépourvu qu’il n’a pas réagi.

Il m’a autorisé à le frapper, si cela pouvait me soulager et je ne me suis pas gênée ! Je comprenais bien que ce n’était pas sa faute, mais celle de Saya ! Et pourtant, une partie de moi lui en voulait de ne pas l’avoir repoussée !

Je lui ai encore donné une gifle ! Puis, j’ai commencé à frapper son torse de rage en disant qu’il avait gâché notre voyage ! Que c’était un traître ! Que je le détestais !

Bien sûr, c’était faux…

Je ne le détestais pas. Même si je le voulais de toutes mes forces, je n’arrivais pas à le détester. Nos disputes étaient rares mais ne duraient que peu de temps. Et puis, on se réconciliait toujours à la fin. Je n’aimais pas me disputer avec mon copain. Encore moi à ce moment-là, alors que je savais bien qu’il n’était pas vraiment en tort.

Je me suis arrêté de le frapper puis je suis mise à pleurer contre son torse, en lui demandant pardon de l’avoir frappé. Lui n’a rien dit et s’est contenté de me prendre dans ses bras en s’excusant. Il a fallu attendre une bonne demi-heure avant que je ne sois calme…

-Ça va mieux ? m’a-t-il demandé.

-Non… Oui… Un peu…, ai-je répondu avec une certaine hésitation.

De mon plein gré, je l’ai serré fort contre moi. D’un point de vue externe, je devais avoir l’air d’une idiote, de lui faire confiance après ce qu’il avait fait. Mais c’était Shûhei. Mon Shûhei. Je savais qu’il ne ferait jamais rien qui pourrait me blesser intentionnellement. Et puis, il n’avait pas essayé de me cacher ce qui était arrivé. Je n’étais pas sûre que cela aurait la même chose avec un autre.

-Tu vas faire quoi ? Pour Saya, lui ai-je demandé.

-Je… ne sais pas. Peut-être qu’on devrait trouver un autre endroit où loger, jusqu’à notre départ ou…

-Shûhei… Je ne parlais pas que du reste de notre séjour.

Il a poussé un long soupire.

-Honnêtement… Je ne sais pas. Je ne voulais pas en arriver là mais maintenant, il va peut-être falloir que je prenne mes distances avec elle.

-C’est un peu triste, non ?

-Clairement. Mais que veux-tu que je fasse, après ce qu’elle m’a dit ?

-Hm.

Je n’étais plus vraiment en colère à présent, bien installé contre lui. Mais triste. Saya, même je ne l’aimais pas trop et à force de discussions, je commençais à bien l’aimer. Et elle…

-Elle a vraiment dit que je l’attirais ? ai-je demandé avec étonnement.

-Crois-le ou non, ce sont ses mots.

-Alors… Elle est…

-Faut croire.

-Je l’aurais pas cru, en la regardant juste.

-Parce que tu peux deviner ce genre de chose du regard, toi ?

-Mouais… J’ai rien dit.

On est resté là, l’un dans les bras de l’autre, à regarder dans le vide.

-Shûhei… Tu crois qu’on peut rester amis avec elle ?

Il m’a regardé avec un drôle de regard, comme si j’étais folle ou qu’il avait gardé au fond de lui l’espoir que je dise ça.

-Ça… va être difficile, après ça, m’a-t-il avoué.

Je pouvais l’imaginer, oui… J’ai caressé son bras, comme pour essayer de le réconforter puis j’ai embrassé sa main. Je n’étais pas aussi intelligente que Shûhei mais je voulais trouver quelque chose pour l’aider. Pour les aider. Oui, même Saya.

(Enfin, je l’aiderai, après avoir réglé deux ou trois choses avec elle. Parce que faut pas abuser non plus !)

Mais j’avais besoin d’un peu plus de temps pour y réfléchir. Mais là, je n’avais pas les bonnes pensées dans ma tête pour le faire !

-Shûhei…

-Hm ?

-Saya et Saeko… Elles reviennent dans combien de temps ?

-Elles m’ont dit qu’elles reviendraient vers midi. Pourquoi ?

Aussitôt cela dit, j’ai enlevé mon t-shirt devant lui pour me retrouver en soutif. Je ne lui ai pas laissé le temps d’être surpris et je me suis jeté sur lui.

Pour me vider la tête rapidement, j’aurais très bien pu me débrouiller toute seule. Mais avec mon copain, c’était nettement plus agréable. Et puis, c’était presque notre façon à nous de nous réconcilier. Sans parler du fait qu’il était doué.

Si le sexe avec Shûhei était un plat, ce serait le genre que je savourais avec plaisir tous les jours et ce, jusqu’à la fin de ma vie.

Ce qui me permettait sans doute de me voiler un peu la face, mais qui ne répondait absolument pas à la question.

À midi, Saya et Saeko sont rentrées. De suite, j’ai dit à Saya qu’on devait parler, elle et moi. En privée. Chose qu’elle a accepté sereinement. J’avais promis à Shûhei que j’essaierai de rester le plus calme possible.

-Bien, Yuna. Pourquoi voulais-tu…

CLAC !!!

Je l’ai giflé avant qu’elle ne finisse sa phrase. J’avais promis d’essayer, pas de réussir. Au départ, je voulais vraiment régler tout ça en discutant mais je n’ai pas pu m’en empêcher. Au moins, je ne l’avais pas roué de coups. C’était déjà ça…

-Pardon, m’a-t-elle dit. Je l’ai mérité.

-Et comment ! Moi qui commençais à te faire confiance et à t’apprécier, voilà que j’apprends que tu embrasses mon copain dans mon dos !

-Pardon…

De colère, je m’apprêtais à la gifler de nouveau mais je me suis retenue. Une seule, c’était bien assez. Mais je n’en avais pas fini avec elle !

-C’est vrai, ce que tu as dit à Shûhei ?

-Quoi donc ?

-Que tu es amoureuse de lui !

Saya a légèrement tourné la tête. Dans ses yeux, je pouvais voir ce qui ressemblait à de la culpabilité.

-Ce n’était pas mon intention…, dit-elle. Je me suis rapproché de lui parce que… il est éclairé et ouvert. Avec lui, je pouvais parler d’autres choses que les cours ou les derniers ragots. Crois-moi, ça a un côté reposant…

Elle a marqué un arrêt puis s’est dirigé vers le lit pour s’assoir dessus.

-Yuna… Tu sais, parfois, c’est difficile d’avoir un esprit comme celui de Nishiyama ou le mien. Parce qu’on voit les choses autrement. On perçoit de nouvelles possibilités. On aborde les choses sous un angle différents. Ça n’a l’air de rien mais juste cette perception peut changer un paradigme ; une manière de voir les choses. Souvent, à cause cela, on finit par s’isoler ou on s’isole des autres, qui trouvent cela plus rassurant de suivre tous le même courant de pensée.

En me disant cela, je n’ai pas pu m’empêcher de penser au Shûhei de l’an passé, presque toujours seul. Qui voulait être seul. À l’époque où je pensais qu’il ne savait pas interagir avec les autres…

-Tout ça pour dire que cela m’a fait du bien de rencontrer quelqu’un qui possédait aussi une vision plus large du monde, a continué Saya. Je voulais faire partie de sa vie et qu’il fasse partie de la mienne, en devenant amis. Mais rapidement, je me suis rendu compte que mes sentiments envers lui ne pourraient pas se limiter à de l’amitié…

Elle marqua une courte pause.

-Tu sais, Yuna, parfois, c’est pesant de n’avoir personne avec qui partager le même état d’esprit. J’aime beaucoup Saeko mais dans le fond, elle reste une fille simple…

Après cela, elle est restée silencieuse. Elle attendait sûrement une réaction de ma part. Donc, en gros et si j’avais bien tout compris (ce dont je n’étais pas sûre), elle voulait être amie avec Shûhei parce qu’avec lui, elle pouvait être plus « elle » qu’avec d’autres ? Parce qu’il était un peu comme elle ? Ça… ça avait un certain sens, bien que ce fût un peu dur à avaler. Je n’avais pas éliminé la possibilité que tout ceci n’était qu’une énorme connerie pour tenter de justifier le fait d’avoir embrassé mon mec ! En temps normal, ça aurait été l’unique conclusion que j’aurais accepté ! Mais comme je m’étais donné du mal pour la connaître un peu (bien que le but premier fût de la surveiller), j’étais prête à lui accorder le bénéfice du doute…

(Pour l’instant…)

Ça de côté, je voulais maintenant clarifier autre chose.

-Saya, Shûhei m’a dit autre chose…

Quand je lui ai dit ça, elle se raidit et me regarda avec une certaine stupeur. La Saya calme et assurée semblait avoir laissé place à une Saya nerveuse et mal à l’aise, voire apeurée. Et c’était assez… étonnant à voir.

-Q…Quoi donc ? a-t-elle demandé.

Elle bégayait, en plus ! J’en étais sûre, maintenant ! Elle avait peur de quelque chose !

Et je me doutais bien de quoi.

-Shûhei m’a dit que tu étais attirée par moi.

Juste après, elle s’est mise à rougir et à détourné le regard. Ce fut aussi à ce moment que je me suis dit que j’y suis allé de manière trop directe.

-D… Désolée…, a-t-elle dit.

-Hein ?

-C’est vrai. Tu… tu m’attires.

Mon cerveau a cessé de fonctionner quelques secondes, avant d’intégrer ce qu’elle venait de me dire.

-Attends, attends ! ai-je dit un peu surprise et en panique. Tu es amoureuse de moi !?

-Quoi ? Non, pas du tout.

Je l’ai regardé, encore plus confuse.

-Hein ?!!

-Yuna, je ne suis pas amoureuse de toi.

-Mais… mais… Attends ! Shûhei m’a dit… Tu viens de me dire…

Saya a poussé un léger sourire.

-Je ne suis pas amoureuse de toi. Je suis attirée par toi. Ce n’est pas pareil.

-Mais tu entends quoi, par « attirée » ?!

-Attirée. Physiquement.

-Physiquement ?

Il a fallu quelques minutes pour que mon cerveau fasse enfin les connexions nécessaires. Dès que j’ai compris, je fais mine de couvrir mon corps de sa vue. Ce qui a fait rire Saya.

-Je ne vais pas te sauter dessus, me dit-elle de manière peu convaincante.

-Après ce que je viens d’entendre, je préfère être sur mes gardes.

-Et penses-tu que ce sera suffisant ?

Brusquement, Saya s’est rapproché de moi. Son visage faisait face au mien, son souffle me chatouillait et ses yeux semblaient plonger dans les miens…

Je ne savais pas quoi faire ! J’étais paralysée ! De peur ou de surprise, je ne savais pas. Une voix dans ma tête me disait de ficher le camp de cette chambre ou d’appeler Shûhei à l’aide. Mais une autre…

-Pardon, je suis allé trop loin.

Saya a alors reculé et à remit en place une de ses mèches de cheveux. Elle s’est alors levée pour se diriger vers la porte mais je lui ai attrapé la main pour la retenir :

-T’as essayé de faire quoi, là ?

-Rien.

-Menteuse !

Oui, c’était clairement un mensonge. Je savais ce qu’elle avait essayé de faire. J’avais fait la même chose avec mon ex et je faisais la même chose avec Shûhei. Elle a voulu m’embrasser. Et je voulais qu’elle l’admette !

Elle sourit, comme si elle devenait à quoi je venais de penser à l’instant. Ce qui m’a un peu irrité.

-Tu voulais que j’aille jusqu’au bout ?

-Que… Non ! Je… je…

J’ai dit « non » mais… quand elle était si proche de moi… j’étais curieuse de savoir jusqu’où elle irait. Et… une petite partie de moi a été un peu déçue quand elle a reculé.

Saya souriait en voyant ma tête. Est-ce qu’elle se moquait de moi ou non, je ne savais pas. Mais ça m’énervait.

-Ce soir, dit-elle subitement.

-Hein ?

-Ce soir. Après le dîner. Je te propose qu’on règle ça définitivement, entre moi, toi et Nishiyama.

-Pourquoi ce soir !? Réglons ça maintenant !

-Non.

-Quoi ?! Tu…

Elle posa soudainement son index sur mes lèvres, pour me dire de me taire.

-Je veux que tu prennes le temps de repenser à tout ça. Avec Nishiyama, si tu le souhaites.

Elle ouvrit alors la porte.

-Mais rien ne vous y oblige, continua-t-elle. Si vous souhaitez partir, je comprendrais.

Sur ces mots, elle sortit la première de la chambre.

À quoi elle jouait ? Qu’est-ce qu’elle espérait accomplir en faisant ça ? Je n’en savais rien. Trop de trucs étaient arrivés trop vite. Je n’arrivais pas à gérer tout ça toute seule.

Cet après-midi-là, Shûhei et moi sommes sortis nous promener et je lui ai dit ce qui s’était passé dans la chambre. Comme je l’avais imaginé, il n’a pas bien pris le fait d’apprendre que Saya a tenté de m’embrasser. J’ai eu du mal à le retenir de retourner à l’appartement pour avoir une « conversation » avec elle. On s’est posé dans un café, Le Gavroche, pour discuter calmement autour d’une boisson fraîche qui n’était pas de refus par une journée si chaude. Surtout pour Shûhei, qui avait l’air de décéder.

-Qu’est-ce qu’on fait, finalement ? lui ai-je demandé en sirotant mon Coca.

-On peut toujours loger dans un hôtel…

-C’est vraiment ce que tu veux ?

-Honnêtement ? Non.

-Parce que ça coûte cher ?

-Il y a de ça, mais ce n’est pas le vrai problème…

Je faisais tourner ma paille dans mon verre et jouait avec mes glaçons.

-Shûhei, à ton avis, que ferait un couple normal dans ces conditions ?

-On n’est pas un couple normal ?

-Shûhei…

-Je demande vraiment ! Je ne suis pas un expert en la matière !

-Bien… Si les gens ne connaissent pas les détails, je suppose que de l’extérieur, on a l’air normaux…

-Quel genre de détails ?

-Genre, Shûra…

-Ah… Mais c’est pas non plus singulier, qu’une fille sorte avec un mauvais garçon, non ?

-Ah, parce que tu te considères encore comme un mauvais garçon ?

J’ai rigolé en voyant sa tête un peu vexée. Je rigolais mais honnêtement, si cela avait été un autre garçon, j’aurais sans doute pris mes distances. Enfin, techniquement, je l’avais fait, l’automne dernier. Cette fois où, quand j’ai appris le passé de Shûhei, nous avons faillit nous séparer pour de bon. Cela aurait logique. Cela aurait été normal. Et pourtant… Nous étions encore ensemble. Nous avions décidé de poursuivre cette route que nous avions emprunté ensemble l’année dernière. Cette épreuve nous a permis de nous rendre compte que nous tenions trop l’un à l’autre. Et puis sans cela, nous ne serions pas ici, ensemble, dans ce petit café, en France.

-Shûhei, à mon avis, on devrait voir ce qu’elle va faire, avant de prendre une décision.

Il était pensif mais ne disait rien pour me contredire.

-Oui. C’est sans doute le mieux à faire. Mais tu es préparée à ça ?

-Comment ça ?

-Je veux dire… Kinoshita, depuis qu’on est ici, est imprévisible. Qui sait ce qu’elle nous réserve…

J’étais sur le point de lui dire de ne pas s’en faire, mais d’un autre côté, elle lui avait déjà fait du pied et l’avait même embrassé. Donc oui, il fallait s’attendre à tout…

-T’… T’inquiète, Shûhei. On… on va affronter ça ensemble !

-Tu n’es pas très convaincante, en le disant…

(Pitié, Shûhei ! Je fais de mon mieux…)

Ce soir-là, Saya s’occupait seule de nous faire un dîner somptueux. Elle avait aussi fait les courses seule. Autour de la table basse du salon où nous mangions, tout le monde était un peu mal à l’aise. Même Saeko, qui avait été mise un peu de côté dans l’histoire. Du moins, c’était ce que je pensais au début. Personne n’osait vraiment parler, jusqu’à ce que Saya ramène les plats.

Et de l’alcool !?

-D’où ça sort !? ai-je lancé, étonnée.

-Je les ai achetés, si c’est ta question, répondit calmement Saya.

-Où ?! Quand ?! Comment !? s’écria Saeko, tout aussi surprise que moi.

-Au supermarché.

-Mais… !

-Hé ! intervint Shûhei. Y en a beaucoup plus que ce qu’on a acheté la dernière fois, non ?

-J’ai pensé qu’il fallait en profiter. On est en vacances, non ?

-HEIN !? avions crié Saeko et moi.

J’avais du mal à accepter ce que je voyais. Saya, une mineure, en train de boire une bière tout en mangeant sa viande. Et Shûhei qui faisait pareil !

-Shûhei !?

-Écoute, on ne fait pas ça tous les jours, dit-il en roulant des yeux. Et puis, c’est les vacances. On peut se lâcher un peu.

-Oui mais bon…

Je comprenais son point de vue, mais quand on t’a rabâché toute ta vie que tu ne devais pas boire d’alcool avant ta majorité…

Saeko a été plus téméraire que moi et a attrapé une cannette de bière pour l’ouvrir et en boire une gorgée. Tout de suite après, elle a tiré la langue en disant que ça avait un drôle de goût.

-Ça fait toujours ça, la première fois. Tu t’y habitueras. Et puis, il faut dire que cette marque n’est pas la meilleure non plus.

-Parce que ça fait longtemps que tu bois ?

Saya ne répondit pas et continua son repas. Shûhei, lui, buvait comme si c’était une boisson comme une autre. Peut-être qu’il buvait déjà, dans sa période Shûra.

Ne voulant pas être mise de côté, j’ai aussi attrapé une cannette et je l’ai ouverte. La boisson avait une odeur bizarre et j’hésitais encore à goûter ça.

-Ne te force pas, si tu n’as pas envie, me dit Shûhei.

J’ai un peu froncé les sourcils puis je les ai tous regardé.

(Allez, Yuna ! Courage !)

J’ai fermé les yeux et j’ai commencé à boire. Une gorgée. Deux. Trois… Quatre…

Avant que je ne m’en rende compte, j’avais vidé la moitié du contenant d’une traite avant de le reposer bruyamment sur la table. Je trouvais le goût pas terrible, je me sentais étrangement légère et un peu plus joyeuse sans raison.

-Ça va ? me demanda mon Shûhei, un peu inquiet.

-Voui, lui dis-je avec le sourire.

-Attends… Elle est déjà bourrée ? demanda Saeko.

-Bourrée, je ne crois pas, fit Saya. Peut-être un brin euphorique. C’est la première fois qu’elle boit, après tout… N’est-ce pas, Nishiyama ?

-Pour autant que je sache, oui.

Je n’étais pas bourrée ! J’avais les idées claires ! Pour l’instant…

Le repas s’est ensuite mieux passé. Nous parlions de nouveau, de tout et rien. Mais je voulais surtout parler de Saya et Saeko. Surtout qu’avec l’alcool, j’avais un peu plus de courage de demander !

-Alors… Saya et Saeko… vous êtes… ?

-On est quoi ? demanda Saeko.

-Ensemble ?

Elle s’est mise à rougir d’un coup et finit sa bière, avant de répondre :

-Non ! On est pas ensemble ! On est amies et c’est tout !

-Enfin, plutôt « amies avec des bénéfices », intervint Saya avec nonchalance.

-Saya !

-Vous couchez ensemble, alors ? ai-je continué.

-C’est ça, confirma Saya.

-Oooooooh…

Je fixais Saeko. Et j’avais la tête qui tournait un peu.

-Quoi ? m’a-t-elle demandé.

-Rien… J’aurais juste jamais cru que tu aimais les filles…

-J’aime les filles ET les garçons ! Avec une préférence pour les garçons…

-Oooooooh ! Alors, t’es sorti avec un garçon ?

-… Juste un.

Saeko a de suite prit une expression triste. J’ai compris qu’il ne valait pas mieux insister.

-Et toi, Saya ? Maintenant que je sais que tu aimes les deux, tu es sorti avec quelqu’un, avant ?

-T’y vas direct, toi…, commenta Shûhei.

-Et alors ! Me dis pas que tu veux pas savoir, après qu’elle t’ait embrassé !

-J’ai pas dit ça…

Saya a rigolé avant de répondre :

-« Sortir », c’est un bien grand mot. J’ai bien eu une petite aventure au collège mais bien vite, elle m’a fait comprendre que ce n’était pas vraiment sérieux…

-Jamais avec un garçon ?

-Jamais. En même temps, je n’en avais jamais rencontré un qui m’intéressais assez pour.

-Jusqu’à mon Shûhei.

Shûhei m’avait un jour dit que j’avais le don pour lâcher des bombes qui pouvait faire de gros dégâts. Et vu l’ambiance qui venait de s’installer après ce que j’avais dit, j’en venais d’en lâcher une belle.

-En effet, avoua Saya tout en se rapprochant de mon Shûhei !

-Hé ! Qu’est-ce que tu… ! s’écria ce dernier.

Sans crier gare, elle s’est mise à lui attraper le bras et le coller, comme s’ils étaient en couple ! Sous mes yeux !

-Non mais t’es bourrée ou quoi ! s’écria Shûhei.

-Non. Pas encore.

Pendant que Shûhei essayait de lui faire lâcher prise, j’observais en étant légèrement énervée.

Non ! Je détestais vraiment ce que je voyais ! Et je n’allais certainement pas me laisser voler mon copain comme ça ! Je me suis jeté sur mon Shûhei pour lui attraper l’autre bras et j’ai fait en sorte que ma poitrine le colle.

(Yuna utilise Séduction mammaire !)

Shûhei a été très surpris et de ce que je voyais sous sa ceinture, ça ne lui déplaisait pas.

(C’est super efficace !)

Au moins, il était clair que mes « arguments » lui plaisaient plus ceux de Saya. Je ne voyais pas mon visage mais j’étais presque sûre que je faisais une drôle de tête en affichant mon sourire vainqueur aux deux autres.

-Bon ! Vous allez vous calmer, toutes les deux !

Shûhei s’est dégagé de nous, à la fois énervé et gêné. Saya a rigolé mais moi, je suis revenu à la charge, pour avoir un câlin. J’étais sa copine ! J’avais le droit !

Au dessert, nous avions délaissés les bières pour de l’alcool un peu plus fort, genre vodka et whisky. Je trouvais que le goût était meilleur mais que c’était aussi vachement plus fort ! Une gorgée et j’avais l’impression que ma bouche et ma gorge étaient en feu pendant un court instant. Saeko et moi avions fait une belle grimace en goûtant ça, pas Shûhei ni Saya. Clairement, ils étaient habitués. Clairement, j’avais encore de choses à apprendre sur mon chéri. Mais ça ne me dérangeait pas. Au contraire.

Ma tête commençait à tourner un peu. Nous continuions à discuter, à rire.

Saeko finit par nous raconter son histoire avec son premier petit copain. Une relation classique, sauf qu’il supportait de moins en moins son fort caractère jusqu’à ce qu’il la plaque par message.

Saya nous en a dit un peu plus sur son aventure au collège, avec une fille dont elle était follement amoureuse. Mais pour l’autre fille, ce n’était pas sérieux. Juste un « jeu entre filles ». Saya avait eu le cœur brisé quand cette fille ne lui a plus adressé la parole quand cette dernière a compris que pour Saya, « aimer les filles » n’était pas une passade…

J’ai parlé de mon histoire avec mon ex, Ken, qui était du genre jaloux possessif, qui ne m’encourageait jamais dans ce que je faisais voire me rabaissait. De comment il me pressait pour qu’on couche ensemble. De notre rupture et de comment il essayait pitoyablement de me faire revenir à lui. En vain, depuis que j’avais mon Shûhei adoré…

Shûhei a été le plus réticent à s’ouvrir à elles. L’alcool lui donna un peu de courage, mais j’aimais à penser que le fait que je l’encourage ait joué un rôle. Finalement, il leur a parlé de son ex, Aïko, de la façon dont elle l’avait plaqué, l’épisode Shûra qui en a découlé et ce qu’il avait fait… Comment il s’était repris en main, après le grave incident (dont il a préféré omettre certains détails). Puis, il leur a raconté comment son passé l’avait rattrapé l’automne dernier et comment ça aurait put mettre fin à notre relation. Il a fini en disant qu’il ne savait comment il aurait tourné, si je ne lui avais pas dit que je voulais rester avec lui. Je ne savais pas si c’était l’alcool qui avait décuplé mes émotions, mais j’ai éclaté en sanglots en le serrant dans mes bras et en criant que je l’aimais de tout mon cœur. Même Saya et Saeko ont été émues.

La soirée s’est poursuivie, ainsi que notre dégustation d’alcool. Mais la suite était floue… Mes souvenirs, légèrement confus…

J’avais… le vague souvenir de moi et Saya discutant côte-à-côte en riant… Shûhei… prenait l’air à la fenêtre en compagnie de Saeko…

  Saya continue de boire   Moi aussi, un peu…   C’est peut-être pas une bonne idée…

Shûhei me demande si ça va

Saya me demande si ça va

Saeko me conseille de ne plus boire

Ma tête tourne

Je suis fatiguée…

Sommeil

  au lit                    Les autres   Saya   Saeko   Shûhei.

Quelqu’un devant moi

embrassé

avec la langue

déshabillée

mains douces

Shûhei ? J’entends sa voix. Celles de Saya et Saeko aussi.

  chaud en bas          mouillée

Je vois Shûhei. Je le sens. En moi. Il m’embrasse.

Quelqu’un m’embrasse aussi sur la nuque.

Quelqu’un me caresse alors que je le fais avec Shûhei.

Non. Maintenant, je suis avec quelqu’un d’autre.

Ce n’est pas Shûhei…                          Mais ça ne me déplaît pas.

Je suis horrible ?

Deux personnes m’embrassent dans le cou.

Shûhei ?

Je ne sais pas.

Je m’en fiche, pour l’instant…

N’arrêtez pas…

Je vois de nouveau Shûhei.                           Il me fait du bien.

Je ne veux que lui, maintenant.

Encore…

Encore.

Encore !

ENCORE !

AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAH !!!

Tout est flou…

Je me sens bien…

Mais j’ai sommeil…

Je vois toujours Shûhei. Je me blottis contre lui. Je ferme les yeux. Il est chaud.

Je l’aime…

Le lendemain, j’ai été réveillé par les rayons du soleil qui s’étaient engouffrés dans la chambre. J’avais mal au crâne et ma bouche était sèche et comme pâteuse. C’était normal, après avoir bu ?

(Je vais pas retenter l’expérience tout de suite, moi…)

Quand je fus mieux réveillé, j’ai vu Shûhei dormir à côté de moi. Nu. Au début, j’ai été étonné puis je me suis rendu compte que je l’étais aussi, nue. Je supposais qu’on avait fait l’amour, hier soir. Mais je n’en avais pas le souvenir. Ou plutôt, j’en avais des bribes pas claires.

Ce fut là que je vis un bras m’enlaçant au niveau de la taille. Un bras qui n’était pas celui de Shûhei. J’ai tourné la tête de l’autre côté, lentement et en ayant peur de ce que j’allais découvrir. J’ai alors découvert Saya, endormie à côté de moi. Nue. Confuse et en sueur, je me suis demandé ce qui se passait, entre mille et une questions qui traversèrent ma tête en un éclair. Mais un gémissement de l’autre côté du lit a attiré mon attention. Ce n’était pas Shûhei. Le gémissement était plus… féminin. J’ai encore tourné la tête et là, à mon grand étonnement, j’ai vu Saeko, elle aussi nue, dormir à côté de Shûhei.

Outre l’aspect surréaliste de cette scène dans son ensemble, je retenais plus son aspect choquant : moi, mon copain et deux de ses camarades de classes, des filles, tous nus dans un lit.

Et quelque chose me disait que nous n’avions pas fait que dormir dessus...

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