Cataclysme

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La voiture avait quitté les principaux axes routiers et la circulation devenait plus fluide. Gleb soupirait, il avait hâte d’arriver. « Un peu de patience, mon chien. Ça vient… Tu vas bientôt pouvoir te dégourdir les pattes avant de rencontrer nos nouveaux amis » La voiture se gara dans une petite ruelle calme du quartier de l'aéroport. De petits immeubles en retrait de la rue, des façades simples mais soignées, des allées bordées de part et d'autre de parterres bien entretenus et protégés par d'élégants murets de briques rouges, de larges trottoirs arborés, voilà qui égayait un peu cette fin d'après-midi blafarde, grise et froide.

Gleb s'était redressé et, sans être impatient, observait attentivement ce que faisait son maître. Vitaly prit son ordinateur, la laisse et sortit du véhicule. Chouette, il allait pouvoir se dégourdir les pattes. Dès que la portière s'ouvrit, Gleb sauta et s'avança en trottinant jusqu'au muret le plus proche pour se soulager et surtout s'informer. Il renifla attentivement et perçut la présence régulière de deux femelles ainsi que celles plus disparates de promeneurs canins plus occasionnels. Il marqua immédiatement sa présence, le plus haut possible, juste histoire de saluer les habitués. C'était bien là la moindre des politesses. Sa petite affaire terminée, il se retourna vers Vitaly qui l'attendait en souriant avec sa laisse...

C'est à ce moment qu'il entendit la moto ralentir et s'arrêter juste derrière leur véhicule. Deux hommes casqués, vêtus de noir. Le moteur continuait de tourner... Gleb avait immédiatement flairé le danger. Il se figea, le poil de l'échine dressé, et grogna. Vitaly quant à lui eut juste le temps de tourner la tête vers l'homme qui s'était approché. En une fraction de secondes, l'homme pointa son revolver sur Vitaly et fit feu à deux reprises, en pleine tête. Pendant que Vitaly s'écroulait sur le sol dur et humide, l'homme remonta sur la moto qui démarra en trombe et s'enfonça dans la nuit moscovite.

Gleb hésitait à avancer. Il ne voyait plus que son maître, étendu dans une position bizarre à quelques mètres de lui. Sa main tenait encore la laisse, l'ordinateur s'était fracassé contre un arbre tout proche. Du sang avait éclaboussé la portière et une large flaque commençait à se former autour du corps. Gleb fit quelques pas, perturbé par l'odeur du sang. La tête baissée, le regard embué, il s'approcha, tremblotant. De la pointe du museau (de la truffe), il tenta de repousser le bras inerte de Vitaly. « Pourquoi ne se relève-t-il pas ? » Il lécha une main sans vie pour s'imprégner de ses dernières odeurs et les conserver à jamais en mémoire. Puis il redressa la tête vers un ciel déjà assombri et poussa de longs hurlements plaintifs pour crier à tous sa douleur et son sentiment d'abandon. Après de longues minutes, il s'allongea au plus près du cadavre, reposa la tête sur l'épaule de Vitaly et pleura.

Depuis les immeubles voisins, quelques personnes étaient sorties mais restaient prudemment éloignées du lieu du drame. Au loin, les premières sirènes avaient retenti et s'approchaient, inexorablement. Derrière un bosquet, contre le vent, deux paires d'yeux l'observaient...

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