Chapitre 1.3

3 minutes de lecture

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* Vocabulaire

qué fatu yes ! = "Que tu es bête !" en espagnol-asturien
qué tal ? = "Comment ça va ?" en espagnol
Oyé = Interjection espagnole
fratello = "mon frère" en italien
Calla, ho ! = équivallent de "Mais Non !" en espagnol-asturien
tío = littéralement "oncle", utilisé en espagnol familier pour désigner ses amis
Guau ="Waouh" en espagnol

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Oscar.

 Pouah ! D'habitude, j'aime courir sur le sable. C'est une surface mouvante, elle provoque des sensations inhabituelles sur les muscles du pied et de la jambe. Les mollets, les chevilles, les ischios bossent en profondeur. C'est différent, exigeant, mais satisfaisant. Sauf que, ce matin…quelle corvée ! La fatigue et l'abus d'alcool du week-end, pour sûr. Allons bon, j'ai un point de côté ! Je m'arrête et regarde ma montre : temps pitoyable. Nulo, oh ! Je râle tout seul. Bah… De toute façon, je ne suis pas à ce que je fais. Devrais-je continuer ?

 Je marche sur le sable. Je n'ai que cette fille en tête. Elle m'obsède. Joder, qu'est-ce que j'ai été con de la laisser partir comme ça ! J'enrage contre moi-même. Pourquoi je n'ai rien tenté ? Pourquoi je l'ai laissé me dire « au revoir » sans la retenir ? Pourquoi je ne lui ai pas couru après ? Je suis resté planté là, au pied du bateau, à fixer comme un couillon sa silhouette de mini-pousse, sa démarche légère et ses fascinantes boucles brunes s'éloigner, jusqu'à disparition. ¡ Que fatu yes* ! Je n'ai aucune chance de la revoir, elle est rentrée à Madrid maintenant. Et puis, Oscar, sois honnête : aurait-elle été intéressée par le fait de garder contact avec moi ? Nous avons passé la nuit à parler parce qu'elle n'avait rien de mieux à faire, mais désormais... n'en a-t-elle pas rien à fiche d'un type aussi banal que moi ?

 Je secoue la tête et lève le nez. Les plages de Barcelone s'éveillent. Les boutiques ouvrent leurs rideaux. J'observe d'un œil torve l'immonde remblai bétonné. La côte sauvage asturienne me manque. Je ne comprendrais jamais l'attractivité de la Méditerranée clinquante et sans âme. Je ne sais même pas si, depuis le sud de l'Espagne en passant par la France jusqu'à la côte ouest de l'Italie, on peut trouver autre chose que du luxe et du béton. Je soupire. Italie... Italie ?

 Je dégaine mon téléphone.

— ¿ ? Oscarito, ¿ qué tal* ?

— Luigi ! Ça va ? Oyé*, j'ai un service à te demander.

— Tout ce que tu veux, fratello*.

— C'est un peu… spécial. Tu connais plein de monde, toi, hein ? J'ai besoin que tu me retrouves quelqu'un.

— Ah ? Qui, dis-moi ?

— Eh bien, une fille, mais... j'ai pas son nom.

— Quoi ?! Calla, ho*, t'es sérieux ?

— Oui ! Je l'ai vue à la soirée d'avant-hier soir, et...

— Attends, attends, rassure-moi : tu me demandes pas un truc chelou, hein ? Genre t'as vu une fille, tu ne la connais pas mais tu veux son contact... ça peut être flippant, ça, Oscar, tu vois ?

— Non, pas du tout, non ! On a passé la soirée ensemble !

— La soirée ?... Han, han. Bien joué, tío*.

— Non mais pas ce genre de soirée, Luigi ! On a passé la soirée à discuter.

— Ah... Évidemment, quoi d'autre. Et tu ne sais pas son nom ?

— J'ai oublié de lui demander.

— … Oscar ?! Mec ! T'es incroyable, mais tu sais quoi ? Je ne suis même pas surpris.

— Tu peux m'aider ! Elle m'a dit avoir été invitée par un Italien beau parleur !

— Ah ! Hé hé… Bah vas-y, dis-moi comment… euh ben, comment elle est ?

— Eh bien, elle est brune… pas très grande… Euh, elle est jolie…

Guau*, une petite brune jolie ? Je veux bien t'aider mais va falloir faire un effort, mon vieux ! Y'avait cent cinquante jolies brunes sur ce bateau !

— Euh... elle est Française !

— Ah ! Là, c'est intéressant.

— Et elle étudie à la fac de droit de Madrid !

— Ah oui, les filles de droit ! Mmm, Oscar, tío, donne-moi la journée.

 Effectivement, le soir-même, mon meilleur pote m'envoyait un SMS contenant un numéro et le message :

  « de : Luigi
Je connais son nom, mais je ne te le dirais pas. Démerde-toi, andouille. PS : t'as raison, elle est jolie »

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