Le hasard des chemins mènent parfois à de singulières rencontres.

Les brumes de l'aube se dissipaient dans les premières chaleurs de la journée. Nous franchissions une petite butte lorsque Emily, assise entre Beatrice et moi, aperçut un chien plus haut sur la route.

 " Papa, ne l'écrase pas ! s'écria-t-elle.

 - Quelle drôle d'idée, Em.

 - À qui il appartient ?

 - Certainement à un fermier du coin. " répondit Bea.

Malgré mes efforts pour repérer une habitation au milieu des prairies vert tendre, je ne voyais ni toit ni cheminée, seulement des fils électriques qui suivaient la piste de terre.

 " Il est perdu ?

 - Peut-être est-il juste en train de se balader. Ou bien il piste un autre animal.

 - On peut lui donner à manger ? S'il te plaît, Papa ! "

Je ne résistai pas longtemps à sa supplication.

Un petit jeu s'instaura entre notre fille et le chien. Quand elle essayait de s'approcher, il s'éloignait. Mais dès qu'elle tournait le dos, il jappait et revenait vers elle.

 " Le plus simple serait de lui jeter. suggéra Beatrice, rieuse.

 - Bonne idée, Maman. Tu m'aides, Papa ? "

J'envoyai l'une des côtelettes de notre repas de la veille aussi loin que je le pus. Le nouvel ami d'Emily la renifla avant de l'emporter dans le talus.

Quand nous passâmes au pas avec le van, notre fille se pencha par la fenêtre ouverte, mais elle ne le vit pas. Il avait gagné un repas gratuit puis avait disparu, comme un mirage.

 " Ne sois pas triste. Tu lui as offert un très beau cadeau.

 - Tu pourras l'écrire dans ta prochaine carte postale. ajouta Beatrice en lui ébouriffant les cheveux.

Certains rendez-vous ont l'éphémérité du vent dans les branches, mais marquent à jamais.