130. Les mots durs
Ma nymphe fendit l'air puis plongea dans les eaux miroitantes du lac. Aussitôt, le sifflement zézayant de la soie s'interrompit et le creux retrouva toute sa quiétude silencieuse.
J'étais sorti tôt pour pêcher, mais le cœur n'y était pas. Mes oreilles bourdonnaient encore des mots échangés avec Audrey la veille au soir, ma poitrine brûlait encore de la déception que j'avais lue dans son regard.
Elle m'avait surpris avec Jack. Penchés sur le dossier estampillé du sceau du FBI, nous ne l'avions pas entendue arriver. Elle avait jeté un œil noir aux rapports d'enquêtes préliminaires, aux bilans médico-légaux, aux clichés pris par les policiers, mais ne s'était pas approchée. Autant de marches vers cette noirceur dans laquelle j'avais si longtemps louvoyé. Qui m'habitait même, m'avait-elle lancé, furieuse. En coup de grâce, elle m'avait asséné que ma décision de replonger était probablement déjà prise.
Et je me tenais, ce matin-là, au bord d'un entre-deux de lumière et d'obscurité. Je regardais les ténèbres et, du fond du précipice, elles m'observaient en retour.
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