Sauf une fois, au chalet
Le timide soleil d’avril réchauffait de sa caresse la profonde vallée, encore vierge du printemps. Sous ses doigts d’or, les fleurs écartaient leurs pétales parfumées, y attirant le vol des premiers butineurs. Auprès d’un torrent gonflé d’un émoi vernal, quelques arbrisseaux bourgeonnaient d’une sève montante et empressée. Plus haut, dressées à l’aplomb de leurs terriers, encore tièdes de leurs corps, se distinguaient les silhouettes à l'affût de quelques marmottes. Et puis, plus haut encore, l’éclat virginal des neiges, pur et immaculé, avait cette candeur de page blanche, propre aux histoires où rien, encore, n’est écrit.
Il ne trouvait toutefois dans ce superbe décor qu’une fugace dérobade, un souffle frais et salvateur dans l’orageuse apnée de son regard, immergé dans le roulis éloquent du fin pantalon de sport. Elle marchait quelques pas devant lui, comme depuis le début de la journée, non pas qu’il se plaigne de la vue outre mesure, mais elle imposait une foulée sportive qu’il s'essoufflait à suivre, son sang peinant à irriguer ses jambes, détourné qu’il était vers d’autres recoins de son corps. Il se forçait pourtant à tenir le rythme pour éviter quelques quolibets, tout en se mordant les doigts d’avoir laissé son orgueil relever ce stupide défi.
Ils auraient dû partir à trois, lui, son pote Seb et Chloé, la copine de Seb. Le genre de projet que l’on fait autour d’une raclette un peu trop généreuse, en se tenant le ventre, et qu’il avait cru définitivement abandonné le jour où ses amis s’étaient séparés. Mais la Chloé l’avait finalement relancé, avec suffisamment d’ironie pour qu’il ne puisse décemment pas refuser sans perdre toute virilité. Et le voilà qui suait dans la fraîcheur printanière et épiait malgré lui le fessier joliment musclé de l’ex de son pote, à se demander comment allaient bien pouvoir se passer ces deux jours de randonnée en montagne.
Ils n’avaient échangé que peu de paroles depuis le début de leur ascension, économisant leur souffle et profitant du paysage, l’une avec plus de réussite que l’autre. Elle s’était quelques fois retournée avec un sourire amusé pour lui demander s’il voulait faire une pause, chaque fois il s’était contenté d’ahaner qu’il allait très bien, cachant dans le rouge de l’effort celui de sa vergogne. Enfin, elle s'arrêta, après une escalade abrupte, sur une petite esplanade d’herbes folles où la roche affleurait. Il la rejoignit, face à la pente vive qui offrait à leur vue l’incroyable panorama de la vallée qu’ils venaient de remonter et, au-delà, les silhouettes d’autres monts qu’aucune brume ne venait troubler.
– Non mais t’as vu cette vue, s’extasia-t-elle, j’en reste sur le cul…
Il sursauta légèrement de ce choix d’expression bien trop à propos et lui jeta un regard en coin mais elle l’ignorait, plongée dans sa contemplation du paysage. Ainsi, elle semblait rayonner de quelque chose, comme si toute la beautée de la nature qu’elle admirait la transcendait et l’imprégnait. Elle n’était pas vraiment belle avec ses lèvres trop fines et ses fortes pommettes mais elle dégageait une énergie troublante, une force magnétique qui tenait autant de son corps athlétique que de son regard de glace. Ses yeux, pareils aux astres lointains, prouvaient pourtant, à chaque battement de cils, combien le bleu était une couleur chaude. Il détourna les siens, espérant que la paisible nature calmerait le feu de son sang. Il suivit ainsi quelques minutes le vol élégant d’un grand rapace tandis qu’à ses cotés, Chloé regardait d’un air sérieux sa carte de randonnée.
– On y retourne, c’est bon ?
– On est encore loin ? demanda-t-il en se tournant vers elle.
– Non, encore une heure, une heure et demie de marche, je pense. Ça va dépendre de toi, si tu arrives à suivre le rythme.
– J’ai le rythme dans la peau, et je suis plus endurant que j’en ai l’air, t’en fais pas pour moi, répliqua-t-il.
Elle lui fit un clin d’oeil narquois et il s’en voulut aussitôt d’avoir parlé d’endurance.
– Hmmm, j’ai hâte de découvrir tout ça, rit-elle alors qu’il se penchait pour refaire ses lacets parfaitement noués.
Elle se remit en route, aussi à l’aise qu’un chamois dans le sentier plein de roches, elle l’entendit grimper à sa suite, grognant et crissant sur les éboulis dans un tapage de sanglier. Elle sourit en sentant son regard dans son dos et sur ses hanches, pas dupe pour deux sous des oeillades dont il la couvait et, joueuse, accentua légèrement l’amplitude de ses foulées. Ils avancèrent un instant à l’ombre verte de grands sapins, une forte odeur acidulée de résine emplit ses narines et elle inspira à plein poumon l’air frais et pur, les poumons et le cœur gonflés de joie. Elle se sentait tellement vivante et heureuse d’être là, et que Rémi ait accepté de l’accompagner. Après sa rupture, nombre de leurs amis communs s’étaient éloignés d’elle, aussi avait-elle été agréablement surprise de ne pas le voir se défiler et la suivre dans cette drôle d’aventure. Surtout qu’il n’était pas particulièrement sportif, elle s’en voulut d’ailleurs de le faire trotter ainsi et ralentit un peu l’allure. Elle ne le connaissait pas beaucoup mais elle l'aimait bien, et il la faisait rire quand ils se voyaient en soirée. Elle aimait aussi la façon dont il la regardait, mélange de gêne et de désir. Elle se retourna brusquement vers lui, amusée de le voir aussitôt détourner les yeux vers le chemin escarpé.
– Courage, on est presque en haut, après ça redescend doucement vers le refuge, ce sera plus facile.
– Il serait temps, ça fait six heures qu’on grimpe, quand même, je vais finir par croire que tu veux me perdre dans la montagne.
– Qui sait ? rit-elle en lui tournant le dos et en s’élançant à nouveau à l’assaut du sentier.
Ils s'arrêtèrent une nouvelle fois au sommet du col pour reposer leurs mollets fatigués, boire un peu et grignoter quelques fruits secs. De là-haut, ils avaient un point de vue splendide sur la vallée qu’ils venaient de gravir et sur celle, plus douce, qu’ils allaient maintenant emprunter. Du doigt, elle lui montra la discrète silhouette de leur refuge pour la nuit, un petit chalet en bordure d’un bois d’épicéas et de bouleaux. La vue de leur destination les revigora et ils reprirent leurs sacs et la route, longeant un alpage rempli de fleurs où quelques lièvres fuirent à leur approche, leur arrachant des sourires émerveillés. Enfin, après cette dernière étape plus reposante, ils se retrouvèrent devant le chalet. De petite taille et tout de bois, il surplombait une verte prairie qui descendait doucement jusqu’à un petit ruisseau. De l’autre côté commençaient les arbres, mélange de doux verts printaniers et de ceux, plus profonds, des conifères. Un tas de bûches sèches les attendait sous l’avancée du toit. Elle s’avança et poussa la porte, l’intérieur était sombre et petit mais propre. L’air sentait la résine sèche et la cendre. Au centre de l’unique pièce trônait une large table entourée de tabourets grossiers, au fond, un petit poêle de fonte tranchait dans cet univers boisé. Enfin, sur sa droite, un large plan de travail profitait de la lumière d’une petite fenêtre encadrée d’étagères contenant le strict minimum. Elle avança dans la pièce et posa son sac sur la table tandis qu’il rentrait derrière elle.
– Regarde-moi ce palace ! Comment on va être trop bien.
– Mais ! Il n’y a pas de lit ?
– Non, vu que tu m’es sympathique je te ferai une place près de moi sur la table, elle est assez large pour deux. Sinon tu peux aussi dormir par terre, mais c’est aussi dur et plus froid, ha ha.
– Tu es trop généreuse, vraiment.
– Bon, je te propose qu’on s’installe confortablement, il n’est pas tard mais on a bien crapahuté, on a mérité une soirée cool à observer le paysage et manger du fromage au coin du feu. Et demain on se lève tôt, on grimpe au Baconnet et on redescend à la voiture par l’autre versant.
– Le programme me va. Bon, c’est toi la cheffe et moi le petit commis, dis-moi ce que je peux faire.
– Hmmm, bah tu peux aller nous chercher de l’eau et du petit bois bien sec pour qu’on s'allume un feu. Tiens, prends ça ! ajouta-t-elle en lui mettant une vieille casserole de fer blanc dans les mains.
Il descendit sans se presser vers le ruisseau, lui laissant le soin de déballer leurs affaires et de nettoyer le poêle. L’idée de dormir près d’elle mettait son corps dans un état d’excitation qu’il avait bien du mal à contrôler. Arrivé près du cours d’eau qui gazouillait et bondissait dans son lit, il trempa les mains dans l’onde et s’éclaboussa le visage, espérant se rafraîchir l’esprit et en chasser les images fantasmées du corps de Chloé. Le froid lui fit du bien et il remplit la casserole à ras bord avant de remonter vers le refuge en essayant de ne rien renverser. Se concentrer sur l’eau qui tentait de s’échapper l’aida à oublier sa partenaire de randonnée. Jusqu’à ce qu’il entre dans le chalet. Elle était à genoux, le nez dans le poêle à racler la cendre à l’aide d’une brindille et les fesses en l’air, face à lui, son pantalon moulant ne cachant pas grand chose de chaque forme et rondeur. Il déglutit, posa la casserole sur la table et s’enfuit en lâchant d’une voix un peu rauque qu’il allait chercher le bois.
Il courut un moment sur le tapis d’épines, parmi les troncs, mettant de la distance entre lui et le refuge, se retournant par moment pour vérifier qu’elle ne le suivait pas. Enfin, s’estimant assez loin, il s’adossa au tronc d’un bouleau et descendit son pantalon sur ses chevilles. La fraîcheur de l’air lui mordit les cuisses mais semblait bien incapable de calmer son érection. Il attrapa sa verge d’une main et décalotta doucement le gland déjà humide d’avoir bandé toute la journée. Il n’en pouvait plus et se masturba presque brutalement, secouant son membre gonflé avec précipitation pour éjaculer au plus vite. Il s’activait du poignet et cambrait ses reins, invoquant dans sa mémoire l’image des fesses fautives qu’il avait tant cherché à oublier. Il ferma les yeux pour se concentrer et se mit à gémir en sentant son plaisir monter.
– Hooo Chloé, Chloéé…
– Oui ?
Il se tordit le cou, le cœur en panique et sa bite soudain aussi molle qu’un biscuit trempé dans sa main. Elle était là, vraiment là, à l’observer, un sourire amusé aux lèvres. Il s'empêtra à essayer de remonter son pantalon à toute vitesse alors qu’elle s’approchait lentement.
– Alors c’est comme ça que tu ramasses du petit bois ? De dos on aurait plutôt dit que tu tentais d’allumer un feu. Ou de l’éteindre…
Elle était juste en face de lui, le clouant au tronc de son regard brûlant comme la glace. Il tenta de se dégager.
– Ce n’est pas ce que tu crois, je…
– Qu’est ce que je crois à ton avis, après t’avoir entendu murmurer mon nom, tout seul au milieu des bois…
Elle glissa doucement sa main sur sa hanche avant de la descendre dangereusement le long de son aine.
– Tu m’appelais à l’aide, c’est ça ? Oh, mais voilà une brindille bien trop grosse pour servir d’amadou, ce serait du gâchis…
Il sursauta et se dégagea de la caresse de sa main. Son cerveau avait arrêté de fonctionner et il n’arrivait pas à suivre ce qui était en train de se passer. Il ne souhaitait que disparaître au fond d’un trou, non, le voilà qui pensait encore à des trous. Il chercha à s’éloigner d’elle mais elle l'attrapa par le bras et se rapprocha, très près.
– Allez, viens me montrer de quel bois tu te chauffes, t’en meurs d’envie…
– Non !
Il se dégagea encore, tirant sur son bras pour échapper aux siens et s’éloigna malgré l’envie qui remontait dans son bas ventre. Il n’arrivait pas à se dire qu’elle était sérieuse, elle devait se moquer de lui, son ton amusé le prouvait. C’est sa voix qui l’arrêta cette fois ci, le forçant à se retourner, elle était sérieuse, acérée, sans trace d’ironie ni marge de négociation.
– Rémi, si tu viens pas tout de suite me faire l’amour, je serais obligée de me satisfaire avec ça, annonça-t-elle en le menaçant d’une longue pomme de pin d’épicéa. Et si elle s’écaille à l’intérieur tu seras de toute façon obligé d’y mettre les doigts pour m’aider à en sortir les bouts. Alors ramène-toi.
Alors il se rapprocha d’elle, lentement, encore incertain. Elle vint à sa rencontre et se serra contre lui, plaquant son bassin contre sa verge durcissante. Il posa ses mains timides sur son dos avec une précaution inadaptée.
– Mais quel empoté, s’exclama-t-elle, allez, viens là.
Et elle l’attira par le col pour l’embrasser à pleine bouche, un baiser vif, rude, qui fit à son corps l’effet d’un électrochoc. Il rougit encore un peu de sa gaucherie mais ses mains se firent plus entreprenantes, pressant ses reins et ses fesses avec une fougue grandissante. Leurs lèvres et leurs langues se découvraient, s’exploraient, s’agaçaient dans un ballet improvisé, instinctif. Ses mains trouvèrent le chemin de sa peau, elle était si chaude, ou était-ce ses doigts qui étaient gelés ? Il caressa son dos et glissa lentement plus bas, sous le coton de sa culotte, le long de ses fesses qu’il écarta du bout des doigts, frôlant son intimité. Elle se cambra contre lui, écrasant sa poitrine ferme contre son torse, et poussa un gémissement étouffé par leur baiser. Elle s’accrochait à lui d’un bras dans son dos et avait glissé sa main libre entre eux, caressant doucement le membre turgescent à travers le voile du pantalon.
Leurs corps s’enhardissaient, ondoyaient dans une danse lascive, collés l’un à l’autre, leurs peaux se cherchaient, se trouvaient à mesure que les vêtements étaient remontés, baissés, arrachés et jetés sans égards sur le sol de la forêt. Le vent frais faisait poindre ses tétons hauts qui venaient piquer son torse et donnait à sa peau un grain de braille qu’il se plaisait à caresser, à déchiffrer, depuis ses épaules jusqu’à la base de ses fesses. Elle se libéra de leur étreinte et descendit lentement en frottant ses seins contre son ventre et sa bite, il lâcha un petit râle de plaisir quand elle la libéra de la prison de son boxer. Elle l’attrapa doucement à la base et tira petit à petit la peau, exhibant son gland qu’elle taquina d’un léger souffle. Elle embrassa du bout des lèvres la peau fragile puis fouilla rapidement dans la poche du tas informe de son pantalon, en tirant un petit paquet qu’elle déchira. Elle revint à sa verge dressée, impatiente et vibrante de désir et déroula le préservatif sur toute sa longueur. Puis elle embrassa le latex froid et fin, tourmentant des lèvres et de la langue le gland gonflé, explorant sa couronne et les veines palpitantes du manche tendu. Puis elle le prit en entier dans l’écrin humide de sa bouche et entama une série de va-et-vient le long de sa queue, tandis que de sa main, elle caressait ses bourses rendues fermes par la fraîcheur de l’air.
D’un geste il écarta ses cheveux fins et admira son beau visage avaler son sexe en creusant ses joues et levant des yeux pétillants vers lui. Il retenait comme il pouvait le flot de plaisir que sa langue taraudait et appelait. Sentant ses digues prêtes à céder face à l’ouragan de sensations qu’elle provoquait en lui, il recula et la força à se relever. Il l’embrassa longuement, goûtant la saveur caoutchouteuse de sa salive, puis il se glissa dans son dos et fit cascader ses lèvres en baisers effleurants le long de sa colonne vertébrale. Elle s’était appuyé contre un tronc et frémissait doucement. À genoux, il arriva à la couture de sa culotte, il y glissa ses indexs et lentement, continuant d’embrasser la peau irisée de frissons, il la descendit, dévoilant le galbe blanc de ses fesses à l’échancrure sybilline. Il laissa tomber le fin vêtement sur ses chevilles et saisit à pleines mains les rondeurs capiteuses, les massant et les pétrissant, les pressant et les écartant. Elle se cambra vers lui, dévoilant le creux de ses cuisses dont la vue, à ses yeux, valait bien toutes les vallées du monde. Malgré son envie, il ne s’y précipita pas, continuant de caresser le croissant de sa lune, la soie de ses cuisses, s’approchant à la lisière de ses lèvres pour mieux s’éloigner, frôlant le doux buisson de son intimité.
Lassé de ces tortures, il humecta son index et, avec une lenteur fabuleuse, le fit glisser depuis son anus, le long du périné, jusqu’aux lèvres qu’il écarta, descendant le canyon de sa vulve humide, explorant ses reliefs jusqu’au pinacle de son plaisir. Il s’y arrêta, caressant la douce protubérance, l’encerclant et l’escaladant. Elle gémit. De son pouce il vint pincer et titiller le clitoris tandis qu’elle ourlait ses cuisses et ses fesses, désirant plus, avide de caresses et de contact. Son autre main, jusqu’alors sagement posée sur sa fesse glissa vers la première, ses doigts écartèrent les fins replis de peau et l’un d’eux s’engagea dans la fente palpitante. Les parois humides et chaudes n’offraient pas de résistance, l’accueillaient en elles avec envie, et il commença à bouger, doucement d’abord puis plus vite, entamant un va et vient rapide. Il sentait les muscles onduler et se tendre autour de son index, en réponse aux caresses passionnées dont il l’assiégeait. Sans les cesser, il se redressa un peu et vint embrasser et mordiller les fossettes de ses reins. Son odeur musquée remontait dans ses narines, le rendant fou d’excitation. N’en pouvant plus, il se releva, dirigea sa verge dressée face à son vagin et la pénétra. Elle y glissa sans accroc, comme une épée en son fourreau. Les mains agrippées à ses hanches, il ressortit et s’enfonça à nouveau, plus profondément, lui arrachant un cri.
Fébrile et enflammé, son corps heurtait le sien dans une sarabande infernale. Encore et encore, ses cuisses s’écrasaient en vagues sauvages sur ses fesses, encore et encore, son sexe la sondait, la fourrageait, encore et encore, il se noyait dans cette danse animale et frénétique, avec une vigueur croissante et tumultueuse à mesure que la marée de son désir le submergeait. Elle tendait son bassin vers lui, accompagnant et prolongeant ses allers retours et poussant de petits cris plaintifs sans les retenir.
– Continues ! Plus vite !
Il accéléra, s’essoufflant en coups de boutoir arythmiques, ahanant son plaisir d’une voix rauque. Enfin il céda, donna encore quelques secousses de son corps électrisé de soubresauts et s’échoua sur le rivage soporatif de la plénitude.
– Non… encore, réclama Chloé en agitant ses hanches, encore...
Mais sa fougue et son énergie l’avaient déserté et il fit mine de se retirer. Elle agrippa ses poignets et le retint.
– Non reste, je veux te sentir, viens tout au fond, je veux te sentir en moi encore.
Il obéit et colla ses cuisses à sa croupe rougie et l’étreignit contre lui. Elle contractait ses muscles autour de son sexe encore gonflé de sang, il les sentait rouler, se nouer, se détendre et l’entendait soupirer en rythme. Mais l’on n’allume pas un feu avec du bois trempé et il termina de se dégonfler et se fit expulser par le roulis de son vagin. Elle se tourna vers lui alors qu’il retirait le préservatif, échevelée, elle avait le rouge aux joues et l’oeil brillant d’une lueur inassouvie.
– Hmm, pas mal, sourit-elle, j’ai toujours eu envie d’essayer en pleine nature.
– Moi aussi, avoua-t-il d’un rire hésitant. Désolé pour, j’étais trop excité…
– Ne t’excuse pas, Rémi, c’était très très agréable, ça manquait peut-être juste un peu de confort pour que je me lâche complètement.
– La prochaine fois, on essaiera de trouver un tapis de mousse pour madame, plaisanta-t-il en essuyant les épines de pins collées à ses genoux.
– T’es bête.
Il ne releva pas et ils restèrent là à se regarder un moment, les yeux dans les yeux, s’échangeant des sourires complices et sans malice, partageant l’un de ces moments rares où le silence se charge d’une troublante éloquence, où les mots cèdent la place à une langue innée et primitive, où la grammaire se fait geste et la ponctuation siège à la virgule d’un cil. Autour d’eux, le soleil ras venait colorer les troncs de reflets rougeoyants et enflammer l’air d’étincelles virevoltantes de pollen. Le vent froid du soir vint briser le charme de l'instant, la faisant frissonner.
– Tu voudrais bien me serrer dans tes bras ?
Elle levait les yeux vers lui, soudain petite, et dans sa voix presque implorante, il décela une fragilité qu’il ne lui connaissait pas. Touché plus qu’il ne voulait bien l’admettre, il ouvrit les bras où elle vint se blottir doucement, ses mains gelées se lovèrent contre son torse tandis qu’il l’entourait de sa faible chaleur. Elle tendit son visage et ses lèvres vers lui et, avec une tendresse et une timidité tranchant avec leurs ébats passionnées, ils partagèrent un long baiser. Le soir tomba lentement sur leurs corps unis, nus comme au premier jour.
– On rentre ? finit-il par proposer.
Elle hocha la tête et ils se rhabillèrent en se lançant des regards à la dérobée qui parfois se croisaient, provoquant des sourires enfantins.
– N’oublie pas le petit bois, qu’on se fasse une bonne flambée, je suis gelée.
Il en ramassa une large brassée et ils coururent vers l’abri du chalet parmi les ombres de la forêt.
Elle alluma les brindilles, le laissant sortir les pâtes et le fromage de leurs sacs à dos. Aux premières flammes elle entassa quelques branches plus grosses puis deux belles bûches. Elle referma le poêle sur le feu naissant et bientôt, une douce chaleur se diffusa dans la petite pièce pour son plus grand bonheur. Elle plaça la casserolle d’eau sur le dessus du foyer pour la faire bouillir et alla aider Rémi à couper la tomme. Ils n’échangèrent que quelques mots mais leurs mains se cherchaient se trouvaient, se frôlaient, s’égaraient sur leurs corps en caresses pleines d’audace, et leurs yeux suivaient le même chemin, se croisant en regards lourds de promesse et d’envie. Ils égouttèrent tant bien que mal les pâtes à la fourchette, se riant du matériel rudimentaire, et y firent fondre une montagne de fromage. Ils mangèrent à la lueur des flammes, évoquant des souvenirs et des connaissances communes, riant et savourant la présence de l’autre. La chaleur de l’âtre avaient envahi le chalet et échauffait leurs sens et leur esprit. Elle voyait ses iris briller du reflet de son désir orageux. Le sien couvait aussi, languide mais brûlant comme un tapis de braise, dans le creuset de son ventre.
Elle fit courir ses doigts sur son avant bras, fixant ses yeux dans une invitation muette. Ils débarrassèrent rapidement la table, y empilèrent leurs deux sacs de couchage, en profitèrent pour s’effleurer, se frôler, se frotter l’un à l’autre. Il la souleva dans ses bras et la posa au bord de la table, elle écarta les jambes et il y engouffra son corps, se collant à elle et l’embrassant. Elle ferma les yeux et glissa ses mains dans son dos, remontant son t-shirt en quête de peau. Les siennes faisaient de même, épousant ses épaules, ses flancs, ses hanches comme pour la modeler. Elle leva les bras au dessus de sa tête et il lui ôta son haut, elle l’imita et leurs peaux confluèrent, s’unirent en méandres de chair agités de remous lascifs. Elle explora des lèvres la douceur de son cou, la ligne de sa mâchoire, traçant un chemin jusqu’au havre de sa bouche qu’elle cajola, croqua, mordit. Sa langue s’immisca dans l’estuaire entrouvert, remonta la digue de ses dents, trouva enfin la sienne, la titilla, s’y enroula. Elle sentait son corps répondre et appuyer contre son entrejambe. Leurs mains s’activaient, fiévreuses et empressées, attisant le feu de leur désir. Elle noua ses mollets dans son dos et, se penchant en arrière, l’attira sur elle, goûta avec plaisir le poids de son corps sur le sien. Leurs lèvres scellées formaient un terrain de jeu d’ivoire et d’ombres où leurs langues se dérobaient, se pourchassaient, se trouvaient et se découvraient dans une chorégraphie haletante.
Elle le sentit soulever son bassin et remonter son pantalon et sa culotte sur ses cuisses, toujours lovées autour de lui. Une main glissa sur ses fesses, s’approcha, commença à la caresser. Elle ferma les yeux, offerte à ses doigts audacieux qui s’aventuraient dans les entrelacs de son sexe. Il dénoua ses jambes et se libéra de son baiser, pour venir apposer ses lèvres à la naissance de sa gorge, encore et encore, s’approchant avec lenteur de ses tétons. Il les lécha enfin, l’un après l’autre, les suça avec gourmandise, elle se cambra sous sa langue taquine, gonflant vers lui sa poitrine avide d’étreintes. Ses mains s’emparèrent de ses seins, les enveloppèrent, les pressèrent, les attirèrent à ses lèvres, à ses dents. Elle sentait son corps ondoyer en rythme, frissonner sous les morsures tendres, elle descendit une main à son clitoris, se toucha en gémissant, la bouche sèche d’envie. Il descendait maintenant sur son ventre, son nombril, son pubis. Elle gardait les yeux fermés, imaginait son regard posé sur elle, l’examinant, lorgnant sur son intimité avec convoitise et tentation. Ses baisers suivaient le dessin de son aine, de ses cuisses dénudées. Il ramena ses genoux, encore prisonniers de son pantalon, sur elle, découvrant sa croupe et sa vulve que seule sa main venait encore cacher. Il vint embrasser l’arrière de ses jambes, l’arrondi de ses fesses, électrisant sa peau de sursauts fulgurants. Puis il s’en prit à ses doigts, les lécha, les téta, les écarta comme les volets d’une fenêtre. Sa langue prit le relai, agaçante, et impitoyable, tourmentant son clitoris sans relâche ni échappatoire. Des doigts innombrables la secondaient de caresses passionnées, jouant avec elle, la pénétrant et l’abandonnant pour mieux l’envahir de nouveau. Elle avait enfoui sa tête dans son coude et s’entendait pousser des plaintes rauques sans pouvoir les réfréner. Son plaisir montait en vagues brûlantes, la parcourant de secousses sismiques depuis l’épicentre tourmenté de son bas ventre. Elle l’appelait, le réclamait, s’offrait à son chaos délicieux comme l’aimant à la foudre.
Elle ne prit conscience qu’il avait arrêté ses attouchements que lorsqu’il revint la libérer de ses vêtements. Elle écarta ses cuisses affamées, le suppliant de la prendre par de longs gémissements, elle le voulait en elle. Elle sentit son gland frotter contre sa vulve avec insistance, elle devina le contact lisse et reconnaissable d’un préservatif et tout au fond d’elle, en fut rassurée. Il venait toujours la titiller, glissant le bout de son sexe entre ses lèvres, contre son pubis, l’enfonçant à peine en elle, puis un peu plus, encore un peu, ressortant entre chaque pénétration avant d’enfin venir en elle entièrement, emplissant son vagin de sa bite durcie de désir. Elle se mordit les lèvres quand il commença à bouger, avec une lenteur calculée, elle le sentait s’insinuer et refluer à l’intérieur d’elle. Une odeur lourde de stupre et de sueur flottait dans l’air saturé de chaleur et la laissait pantelante et étourdie, sans défense face aux allées et venues qui s’accéléraient. Elle mordit son poignet et s’agrippa au sacs de couchage d’une main crispée. Son corps assailli et taraudé par la marée tempétueuse, elle sentait grandir en elle un déferlement de jouissance. Il dût changer de position car son sexe vint racler sa paroi dans un angle indicible, sa tête se courba en arrière, la bouche ouverte sur un cri muet. Elle tendit les bras vers lui, s’accrocha comme un chat, griffa son dos tandis qu’il continuait de la labourer de plaisir. Son souffle coupé, échouée contre son corps tendu et infatigable, dévastée par la puissance de l’orgasme qui explosait en elle, elle trouva la force et l’air de murmurer un ‘’viens’’ chancelant.
Elle l’entendait grogner et souffler bruyamment, ses coups de reins devenaient plus lents, plus amples, plus profonds, un autre son, sifflant et aigu, étouffé, parvenait à ses oreilles sans qu’elle comprît tout de suite que c’était elle. Elle encerclait ses épaules de ses bras, le dos rond et tendu, tremblant comme une feuille dans la bourrasque. Puis les dernières saccades survinrent, laissant la place au calme, à l’épuisement, à un silence qui n’en était pas vraiment un, déchiré de souffles courts et rauques. Ses membres se détendirent, elle défit ses bras et ouvrit les yeux. Penché vers elle, il la regardait avec un air béat et repu. Elle fut soudain prise d’un fou rire inextinguible, nerveux, incontrôlable qui lui noua le ventre et lui amena les larmes aux yeux. Lorsqu’enfin il se dissipa, elle se sentit vidée, et comblée, et tant d’autres choses encore sans en avoir les mots. Elle ne les chercha pas, attrapa un bras dont elle se couvrit comme d’une couverture et, pelotonnée contre son torse chaud et embué, s’endormit doucement en ronronnant un tout petit ‘’bonne nuit’’.
Le matin la cueillit d’une caresse ensoleillée à travers ses paupières, elle était enroulée dans son duvet, seule. Elle releva la tête et vit le dos nu de Rémi qui, à contre jour, s’activait sur le plan de travail. Elle l’observa en silence jusqu’à ce qu’il se tournât enfin et approchât en souriant, un bol à la main.
– Salut l’endormie, tu as faim ?
Elle picora des tranches de pommes et des amandes tandis qu’il lui apportait un peu d’eau.
– Quelle heure est-il ? demanda-t-elle, entre deux gorgées.
– Plus de dix heures, tu avais l’air bien épuisée, se moqua-t-il.
– Merde, déjà ? On va pas avoir le temps de monter au Baconnet, fais chier…
– Ce sera pour une autre fois, et puis il y a un avantage…
Elle regarda son sourire mutin et l’éclat dans ses yeux, voyant clair dans son petit jeu.
– Ha oui ?
– Vu qu’on ne va pas jusque là bas, on a toute la matinée de libre pour d’autres activités…
– Hmmmm, fit-elle mine de réfléchir en s’étirant, avant de se redresser face à lui, malicieuse, ça peut-être une idée, en effet...
Et elle l’attira pour un premier baiser.
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