J'habitais près du lac
Marcher, tête baissée, le smartphone en main gauche, la main droite vérifiant les clefs, le sac à dos, lourd sur les épaules empêchant d'oublier les réunions du jour, gris ce jour.
Il pleut.
Trop de bruit sur les trottoirs de la ville. Elle bruisse, les phares éblouissent, les klaxons retentissent.
Qu'est-ce qui a conduit mes pas à s'écarter du tambour de machine à laver qu'est devenue ma ville ? Elle rince et essore les reins des êtres costumés et parfumés des mêmes senteurs de stress.
Je ne sais pas ce qui m'a pris.
Les talons ont fait demi-tour.
J'ai traversé hors les clous. J'ai marché sur le Pâquier. J'ai respiré et levé la tête. Lui, était toujours là.
Vert gris, couleur ardoise, sa laque frémissait jusqu'à rejoindre les cieux où couraient d'étranges nuages rose et argent. Les mouettes traversaient la jetée. Un couple de cygnes glissait, leurs cous arrondis, les ailes en corbeille. Les frémissements des flots sous le clapotis de la pluie fine créaient un chuchotement doux.
Mon regard erra au loin. Les crêtes de la Tournette encore blanche de névés se découpaient sur la gauche. L'entrelas des cimes et des vallons de verdure couraient en pentes ponctuées d'à-pics et de roches. Les lignes adoucies comme une aquarelle mouillée en fondu se rejoignaient à l'horizon vers la Savoie voisine.
Alors le temps ralentit, mes pensées respirèrent au rythme lent de cette nature proche. Comment ne pas croire à la magie ?
J'habitais près du lac. Je scandais cette phrase et la savourais en bouche comme si les voiles d'illusions qui ternissaient les quotidiens levaient l'entracte et laissaient place à l'enchantement.
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En réponse au défi de @Lady Stephanie@
L'enchantement
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