[A4] Scène 11 : Aliane
Aliane, Pr. Aristide Withingus, Wilhelmina, Armageddon
Ae 3894 – cal. II
De l’eau spirituelle.
Aliane inclina le flacon. En apparence, son contenant ressemblait à de l’eau tout ce qu’il y avait de plus normal. Pas une bulle, pas une coloration, pas la moindre opacité ne permettaient de déceler qu’elle était spéciale.
« N’en prenez pas, surtout, l’avertit le professeur depuis le bord du lit où il s’était assis. Cette eau est extrêmement précieuse, je ne peux pas me permettre de la gaspiller. Sans compter qu’en trop grande quantité, elle peut susciter de l’accoutumance. Croyez-moi, j’en ai fait les frais.
— Pourquoi en possédez-vous ? »
A fortiori dans un endroit pareil. Aliane ignorait toujours où ils se trouvaient. Cela ressemblait presque à une dimension. Si elle méconnaissait les lois qui régissaient l’Essence d’Espace, la Chronologue savait que la Loi Majeure de la Cosmologie interdisait de créer une onzième dimension. Or, Aristide Withingus ne ressemblait pas à un néantide qui aurait subi la Punition. Seulement à un homme qui avait trop bu, en proie à des caprices gastriques.
« Je suis habilité à en posséder un extrait, en ma qualité de Grand Conseiller, lui expliqua-t-il à propos de l’eau. J’admets avoir abusé de ce droit au début, mais cela m’a servi de leçon.
— Et cet endroit ? s’enquit Aliane. C’est en votre qualité de Grand Conseiller que vous m’avez amenée ici à deux heures du matin ? Où est-ce qu’on se trouve, au juste ?
— Dans le pommeau de ma canne. Oui, ça paraît fou, mais je vous assure que c’est vrai. Portail, reprographie spatiale, miniaturisation, mise en abyme, et voilà le travail. Quant au fait de vous avoir emmené ici, j’étais mortifié à l’idée d’avoir pu être la cause de votre crise, tout à l’heure sur le balcon, c’est pourquoi j’ai tenu à réparer ma faute. Seulement je ne voulais pas qu’on me surprenne avec de l’eau, ou qu’on vous surprenne, vous, en train de…
— Alvare et ses domestiques sont au courant de mes crises, l’informa Aliane d’un ton cassant. Lazare d’Overcour avait réussi à se procurer de l’eau spirituelle quand il m’a recueilli. Sans cela, il y a longtemps que je ne serais plus.
— Par les dix dimensions, il a fait cela aussi ? s’offusqua Aristide. Décidément…
— Qu’importe, il n’est plus là pour en répondre, de toute façon, le coupa Aliane. Vous par contre, vous me devez des explications. Votre canne, il me semble, a été confisquée par votre Grand Conseil, c’est bien cela ? C’est ce que vous m’avez dit tout à l’heure. Si c’est vrai, cela signifie que nous ne sommes plus en la Versatile mais à Altapolis, n’est-ce pas ? Et arrêtez de boire cette saleté, vous allez encore vous rendre malade ! »
Elle intercepta le verre d’absinthe qui flottait malhabilement vers eux et en déversa le contenu dans l’évier tout proche. Withingus parut surpris de son geste mais n’osa pas protester.
« Nous sommes bien à Altapolis, confirma-t-il, résigné. Mais personne, à l’Institut, ne sait ce que renferme ma canne. Il n’y a que moi qui puisse ouvrir le portail qui permet d’y conduire, et ce peu importe la distance. D’ailleurs, si le Grand Conseil découvre tout cela, je suis fini.
— Pourquoi avoir accepté cette charge, dans ce cas ? N’était-ce pas risqué ? À moins que vous l’ayez fait pour mieux leur cacher votre secret ?
— Je suis entré au Grand Conseil contre mon gré, exposa-t-il avec lassitude. Je devais initialement demeurer maraudeur pour un groupe de recherche qui enquête sur les anomalies de l’Espace mais, à cause de cette stupide thèse ou de je ne sais quel complot, ils m’ont classé trop haut dans la Liste d’or. Lorsqu’un siège de Cosmologue s’est trouvé vacant, j’ai donc été nommé pour le prendre, ce qui n’arrange personne et surtout pas moi. Depuis lors, me voilà contraint de voter des lois sans queue ni tête, de faire cours à des étudiants blasés et de briguer des sièges de conseiller dans le Réseau pour espérer échapper un temps soit peu à cette cage qu’est l’Institut. »
Pauvre chou.
Aliane ne comprenait que trop bien la situation, mais elle ne pouvait s’empêcher de l’accueillir avec cynisme. Voilà que cet homme, à qui on essayait de la vendre sous prétexte de dette, était en réalité dans la même situation qu’elle. Si c’était la capture d’Édouard qui avait valu au professeur tant de prestige, elle pouvait entendre son désarroi et son désir de contrebalancer en réclamant son dû auprès d’elle. Elle se demanda néanmoins de quelle façon elle pourrait à son tour tirer partie de cette histoire.
« Vous n’êtes pas la seule à devoir cacher ce que vous êtes », avait-il prétendu tantôt sur le balcon.
Voilà qui faisait sens, à présent. Mais qu’était au juste Aristide Withingus, hormis un alcoolique cachottier ? Aliane laissa traîner à nouveau son regard sur la pièce où ils se trouvaient. À première vue, celle-ci ressemblait à un cabinet de travail, avec un bureau, une paillasse, toute une ribambelle de tubes, flacons, carnets, livres bourrés de signets et de notes manuscrites, sans oublier placards, tiroirs, une couchette rudimentaire et une fontaine à absinthe, bien sûr. Elle se demandait vraiment comment il avait pu parvenir à former un lieu pareil. Certainement s’y étaient-ils mis à plusieurs. Et puis il y avait cette créature mi-aragne mi-humaine qui les regardait converser depuis le coin de la pièce, tête en bas, crochets plantés dans l’entome grisonnant qui lui tenait lieu d’en-cas. Pourquoi l’avoir gardée ici ?
Aliane tira une chaise et s’assit face à lui. Elle voulait comprendre.
« Vous êtes donc tout à la fois un gardien de la paix, un enseignant, un politicien et un chercheur, énuméra-t-elle. Cela fait beaucoup d’attributions pour un seul homme.
— Beaucoup de poudre aux yeux envoyée par la Société, surtout, se moqua-t-il avec un rire triste. Pour nous faire croire, à nous néantides, que nous avons toujours la main sur notre création. Ce n’est pas l’absolutisme qui a cours, au sein de ce régime, mais la cacophonie. Tout le monde a un avis sur tout, les débats sont sans fin et sans l’espoir que le Grand Conseil puisse infléchir le cours des choses puisqu’il n’a pas voix au chapitre. C’est l’Assemblée qui tire les ficelles et cette instance est un capharnaüm sans nom. »
Il sortit un mouchoir et tamponna la sueur qui perlait sur son front. Aliane n’avait que faire de ses considérations politiques : tout ce qu’elle voulait, c’était comprendre ses agissements et s’assurer qu’il ne se retournerait pas contre elle. Elle sentit soudain le pelage d’Armageddon glisser contre ses jambes. Le catsid chercha encore à se faire une place sur ses genoux. Cette fois-ci, elle lui céda.
« Donc tout le monde fait un peu ce qu’il veut, glissa-t-elle finalement.
— Qu’est-ce qui vous fait croire cela ?
— Eh bien… vous. Vos maraudes, vos interventions arbitraires, vos expertises mensongères… Vous faites un peu ce qui vous chante, en fin de compte. S’il vous plaît de dissimuler les faits, comme vous l’avez fait pour moi, personne ne trouve rien à y redire.
— Vous n’y êtes pas, la contredit-il. Être nommé au Grand Conseil ne place pas au-dessus des lois. D’ailleurs, si l’on prend mon cas spécifique, je n’y ai pas été intégré par hasard. Ma scolarité, ma thèse, mes expéditions, les fonctions que je brigue au sein du Réseau, jusqu’à ma progéniture potentielle : À chaque pas que je fais, le Grand Conseil et mon entourage peuvent se retourner contre moi. À chaque bravade, je prends le risque de me faire rappeler les limites à ne pas franchir.
— C’est-à-dire ?
— Ils ont peur de moi. »
Il eut un sourire un peu étrange. Aliane fronça les sourcils en retour. Elle commençait à se laisser persuadée qu’Aristide Withingus était plus redoutable qu’il ne le laissait paraître, sauf qu’elle ne voyait pas très bien en quoi. Certes, il éprouvait un dédain manifeste pour la démocratie telle qu’elle était exercée au sein de la Société. Sans compter ses initiatives aussi incompréhensibles que risquées et le carcan que représentait le statut de Grand Conseiller pour lui.
« Pour quelles raisons devraient-ils vous craindre ? l’interrogea-t-elle en caressant distraitement Armageddon. Parce que vous n’aimez pas les débats interminables ? Vous n’appréciez visiblement pas l’idée de partager tous ces pouvoirs.
— Si c’était le cas, je ne serais plus de ce monde, ricana le professeur. Certains savent que je pourrais me retourner contre eux, que je pourrais leur confisquer le pouvoir. Ils le savent et ils y sont préparés. C’est à tel point que, si demain je lève ne serait-ce que le petit doigt dans cette direction, ils ont les moyens de me mettre à terre.
— J’imagine que cela vous embête. L’idée qu’ils puissent vous empêcher d’avoir toutes les cartes en main. »
Elle croyait toucher au but, mais Aristide haussa mollement les épaules :
« Ça n’est pas mon ambition. Il est déjà compliqué de cumuler tous les pouvoirs en étant plusieurs, alors imaginez le fait de les cumuler tout seul. C’est impossible, j’exploserai avant ! Et puis, pour avoir tout cela et en faire bon usage, ou même un usage quelconque, il faudrait que j’entende quelque chose à la politique et, au-delà, à l’âme humaine. Mais je ne comprends ni l’un, ni l’autre. La seule chose que je comprends, du moins que je croyais comprendre, c’est l’Espace. Je sais que j’ai les moyens d’en savoir plus, à ce sujet, que n’importe qui. Une partie du Grand Conseil le sait aussi et c’est ce qui leur fait peur. »
Aliane hocha la tête sans rien dire, essayant de ne pas prendre un air moqueur. Elle n’aurait donc pas affaire à un autocrate en puissance mais à un savant fou. Peut-être essayait-il juste de l’effrayer ou de l’impressionner mais, dans un cas comme dans l’autre, c’était raté. Pas avec sa gueule de bois et ses propos vaguement cohérents. À cet instant, dans sa robe de chambre et son pyjama mal boutonné, Aristide lui paraissait surtout ridicule. Adorablement ridicule.
Lui seul, elle ne parvenait pas à le redouter. Ce qu’elle craignait, c’était d’être surveillée par le Grand Conseil à travers lui.
« Ce que je vous dis a l’air de beaucoup vous amuser, fit-il remarquer avec un sourire en coin.
— Mais pas du tout.
— Vous avez le droit de rire de moi. Je suis sûr que vous me prenez pour un affreux vantard. C’est sans doute vrai… Parce que la vérité, c’est que je ne sais toujours pas ce que je dois comprendre, dans tout cela.
— De ? Ce qu’il faut penser de vous ?
— Non : de l’Espace. Du multivers, de l’Essence ! De la Création, en général ! s’enflamma-t-il soudain. Parce que j’ai hérité de ce… de ce gène infâme qui me fait tout effleurer sans rien me faire saisir, je suis condamné à poursuivre des chimères. En cela, je suis beaucoup moins effrayant qu’elle.
— Elle ?
— Anastasia. »
Le rapprochement avait été fait de façon si abrupte qu’Aliane mit un instant à comprendre de quoi il parlait. Puis elle coula de nouveau un regard vers le reste du cabinet. Le jardin, la bibliothèque, ce portail vers la canne... Ce n’était pas l’œuvre d’un seul Cosmologue, ou bien ce dernier n’était pas normal. Soudain, elle comprit où il voulait en venir :
« Vous l’avez donc vous aussi. La Synesthésie.
— Une Synesthésie assermentée, nuança Aristide. Je peux certes tordre l’Espace dans tous les sens que je souhaite mais je ne le perçois qu’à sa saveur. Contrairement à moi, la Synesthésie d’Ana n’est scellée par aucun serment. Un Sens pur, préservé dans sa forme originelle, qui n’est pas soumis aux caprices d’un sens conducteur. Un Sens qui peut détruire et annihiler toutes vies sans être inquiété.
— Pourtant, cette simili-dimension où nous sommes, vous êtes bien parvenue à la créer au nez et à la barde de votre Grand Conseil. C’est que vous n’êtes pas vraiment limité dans vos actions, vous non plus.
— En fait, je le suis. La Synesthésie est précisément la raison pour laquelle le matriarcat est de rigueur, chez les néantides : seules les femmes en héritent pleinement. Les hommes, eux, sont automatiquement soumis au Serment tout en gardant une perception supérieure aux non-Synesthésistes. Nous sentons qu’il y a quelque chose qui dépasse les limites de nos sens mais la puissance de notre perception et nos possibilités d’action sont limitées par le Serment des Erynies. Anastasia peut percevoir tout ce que l’Être fait et peut faire : elle peut mettre la main sur chaque corps, chaque esprit pour lui faire accomplir ce que bon lui semble. Et personne ne lui enlèvera ce droit, vous savez pourquoi ? Parce qu’elle est précisément une Erynie : C’est elle qui dicte les règles. Vous comprenez, Aliane ? s’agita-t-il encore. On me tient en cage, on me craint, on me menace, mais je n’ai pas le tiers de la puissance de cette femme. La politique, l’âme humaine ; tout cela, elle peut l’entendre et en faire ce qu’elle veut quand elle veut. Sauf qu’il lui manque une chose cruciale : la morale. Et à l’heure où nous parlons, elle est toujours en cavale. »
Il pressa son mouchoir sur ses lèvres pour réprimer un assaut nauséeux. Aliane le considéra en silence avec un mouvement de recul. Ainsi en revenait-on encore à l’Erynie. Withingus semblait décidément vouer une obsession pour cette femme, mais elle commençait à comprendre pourquoi. Fallait-il pour autant en déduire qu’il agissait uniquement par jalousie pour cette Corporatiste ? Celle-ci, après tout, était parvenue à se placer au-dessus des lois, ce qu’il semblait envier. Mais cela n’expliquait toujours pas l’implication de la Chronologue et de ses enfants dans cette histoire. Cela, seule Lorène Lenoir le savait, mais elle ne lui dirait rien. Aliane s’était aventurée trop de fois à essayer de la faire parler en vain.
Peut-être n’y avait-il tout simplement aucune raison. Tout cela l’agaçait. À peu près autant que les boutons mal attachés du pyjama du professeur, qu’elle s’efforçait de ne pas voir depuis le début de la discussion. Aliane n’était pas du genre maniaque mais cette asymétrie la tendait, soudain. L’idée de le reboutonner correctement lui traversa l’esprit. L’espace d’un instant, elle se vit même le faire. Cette perspective ouvrit un abîme dans lequel elle n’était pas certaine de vouloir se jeter.
« Je suis fatiguée, déclara-t-elle alors en faisant descendre Armageddon de ses genoux. Comment puis-je regagner ma chambre ? »
En guise de réponse, Aristide signa : un portail s’ouvrit près d’eux à travers lequel Aliane reconnut ses draps barbouillés de noir. Un sentiment coupable l’étreignit.
« M-Merci.
— Vous ne devriez pas, dénia-t-il d’une voix éteinte. J’ai peut-être mal fait de vous emmener ici, vous avez raison.
— Certes, mais vous m’avez soigné. Rien ne vous y obligeait.
— Je n’allais pas vous laisser dans cet état en sachant que c’était de ma faute.
— Non, ce n’était pas... »
L’image fugace de l’Ombre, au fond de la cave. L’Ombre qui souriait tristement, chapeau-claque et canne tordue à la main. Sans doute grâce aux effets de l’eau, Aliane ne se sentit pas débordée par cette vision. L’Ombre ne représentait plus un danger : c’était seulement sa mère. Ses derniers mots résonnaient moins comme des menaces que comme une mise en garde, à présent.
L’œil noir du destin te regardera toujours dans l’ombre.
« Pensez-vous… s’enquit-elle soudain. Pensez-vous que vous pourriez vous servir de cette eau pour soigner Hortense ? Je sais qu’elle est rare et qu’il ne faut pas en abuser mais, à l’heure actuelle, je ne vois aucune autre solution.
— Certainement, mais pas avant d’avoir tout essayé, affirma-t-il. Je vous l’ai dit : la Dégénérescence est une maladie de l’esprit. Il faut trouver ce qui grippe le mécanisme de son esprit avant d’en venir à cette… extrémité. »
Aliane hocha la tête en signe d’assentiment. L’heure était venue de regagner son lit mais elle n’osait pas partir. Quelque chose le retenait dans ce lieu étrange quoique accueillant. Un abîme qu’elle s’efforçait d’ignorer. De son côté, le professeur Withingus était resté prostré au bout de sa couchette et paraissait hésiter à se resservir un verre. Elle se sentait mal de le laisser seul alors qu’il l’avait aidé, qu’il avait consenti à lui répondre et qu’à aucun moment il n’avait trahi d’intentions déplacées à son égard. Pourtant, dans ce lieu clos hors de portée d’autrui, il en aurait eu mille fois l’occasion.
« Bonne nuit, Aliane », lança-t-il, comme elle ne bougeait pas.
Elle jeta un dernier regard vers la Créature Prohibée – Wilhelmina, elle s’appelait Wilhelmina – et se demanda pourquoi un tel prénom. Peut-être lui demanderait-elle lorsqu’il aurait les esprits plus clairs – lorsqu’ils l’auraient tous les deux.
« Bonne nuit », murmura-t-elle seulement.
À regret, elle franchit le portail.
De retour dans sa chambre, Aliane considéra longuement ses draps souillés avant de décider qu’elle ne dormirait pas dedans. Il était cependant trop tard pour les faire changer. Elle réalisa alors que la chambre d’ami, où le professeur aurait dû dormir, se trouvait finalement libre. Elle se saisit d’une lampe à huile et s’y rendit, non sans avoir toqué au préalable pour s’assurer qu’elle ne dérangeait personne. Comme prévu, la chambre était vide. Rien ne trahissait la présence d’Aristide Withingus. Elle en conçut une étrange tristesse et se trouva ridicule. Il n’était plus l’heure de discuter, de toute façon. Ayant ouvert la fenêtre pour laisser entrer la fraîcheur de la nuit, Aliane se lova dans le lit où ses enfants avaient dormi naguère. Cette pensée lui serra le cœur et elle s’endormit en pensant à eux.
Le sommeil la conduisit dans un dédale de songes mystérieux. Dans l’un d’entre eux, elle se retrouva, adulte, dans la maison de ses parents telle qu’elle avait été avant d’être mise à sac. En ouvrant la trappe qui emprisonnait sa mère jadis, elle découvrit une bibliothèque souterraine, un œil de verdure et un grand escalier qui descendait en tournant jusque dans l’ombre d’un cabinet. Elle voulut descendre mais la première marche était trop éloignée et elle dut refermer la trappe. Une autre fois, peut-être.
Aliane se réveilla bientôt avec la certitude de ne pas être seule. Les yeux clos, elle chercha à tâtons une présence dans le lit mais ne trouva rien d’autre que les draps entortillés qui l’induisirent brièvement en erreur. Un bruit de pas et de cliquetis. On cogna quelque chose qui répondit avec un bruit de corde – le théorbe de Stanislas ? Aliane se redressa et se frotta les yeux. Ce n’était ni Aristide, ni son fils qui venait de s’introduire dans la chambre.
« Marquise ! Bien dormi ? »
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