Vos yeux ne se posent pas sur ces mots, vous n’avez pas à déchiffrer cette lettre inutile que je n’ai pas écrite pour m’excuser et me justifier. Vos mains ne tiennent pas une lettre qui n’existe pas, d’un papier né de la cellulose d’un arbre qui n’est pas encore coupé, annonçant l’absence d'une fin que vous redoutiez, espériez peut-être. Je n’ai pas tracé de point final et n’en imprimerai pas maintenant. Alors, juste un point-virgule, un hashtag vers un autre monde, une barre de fraction pour nous séparer.

J’aurais sans doute écrit que mes pensées sont tournées vers vous en cet instant, mais je ne l’ai pas fait. Et je n’ai pas pensé à vous, ni à toi, ni à eux. Il n’y a pas d’indices, de codes, de messages subliminaux écrits à l’encre sympathique ; pas de legs, de dons. Ne faites pas l’effort de lire, de déchiffrer et de graver mes derniers mots dans votre mémoire, ni de conserver le billet entouré d’un ruban rose ou noir, dans un tiroir qui grincera dans une longue plainte déchirante alors que vous vous abstiendrez de l’ouvrir.

Vous n’aurez pas à regretter de ne pas m’avoir parlé avant, de ne pas m’avoir glissé un mot manqué, un non-dit mal prononcé dans un aveu muet. Rien de tout cela ne sera nécessaire ou aurait pu l’être, car vous ne trouverez pas cette lettre coincée sous un verre d’alcool à moitié vide, ni à moitié plein ; parce que cette lettre n’existe pas.

Vous souhaitiez ressentir mon absence, mais vous ne trouverez ni la sensation, ni ma non-présence.

Je suis encore là, et rien n’est différent, tout en étant plus tout à fait identique. Une lumière de saison qui pétille et refuse de s’éteindre. Je ne vous écris pas, j'existe encore, puisque j’ai décidé de rester jusqu’à la fin