À travers la vapeur
Chapitre 10- À travers la vapeur
Le téléphone d'Hector vibra une seconde fois. Il le sortit de sa poche, les doigts encore humides de mousse. L'écran afficha un nom qu'il aurait préféré oublier. Il hésita. Puis il quitta la salle de bain, refermant doucement la porte sur les rires étouffés de Diego.
Dans le couloir, la lumière était tamisée. Hector fronça légergment les soucrils ne s'attendant pas à cela.
Il décrocha..
— Allô ?
Une voix féminine, basse, hésitante.
— Hector... C'est moi. Clara.
Un frisson lui parcourut l'échine. Il jeta un regard vers le fond du couloir, là où Marie et Peter s'étaient retranchés. Il s'adossa au mur.
— Qu'est-ce que tu veux ? souffla-t-il.
— Je... J'ai appris que tu étais revenu. Je voulais savoir si tu allais me rappeler. Tu m'avais dit que tu le ferais.
Il ferma les yeux. Il n'avait rien promis, mais elle avait raison. Il avait fui, sans vraiment conclure ce qu'il avait commencé.
— Ce n'est pas le moment, Clara.
— Alors ce sera quand, Hector ? J'ai été là pendant des mois. Quand t'étais au plus bas.
Il serra les mâchoires.
— J'ai un fils. Une vie que j'ai abandonnée trop longtemps. Et je viens de passer la première vraie journée avec mon garçon depuis... trop longtemps. Alors non. Pas maintenant.
Un silence tendu suivit. Puis elle souffla :
— C'est donc fini ?
— C'est surtout jamais vraiment commencé.
Il raccrocha avant d'entendre sa réponse. Il resta un instant là, dans le couloir silencieux, son téléphone tremblant dans sa main. Puis, lentement, il retourna vers la salle de bain.
Il raccrocha avant d'entendre sa réponse. Il resta un instant là, dans le couloir silencieux, son téléphone tremblant dans sa main. Puis, lentement, il retourna vers la salle de bain, le cœur battant sans raison claire, une intuition obscure lui mordant les entrailles.
La lumière était encore allumée, la vapeur s'échappait en filets paresseux. En s'approchant, Hector entendit un murmure étouffé, comme une voix d'homme... et puis rien.
Il accéléra le pas. Sa main toucha la poignée. Fermée. Il frappa doucement.
— Diego ? Tu es là ?
Pas de réponse.
Il tourna la poignée plus fort, et cette fois, la porte s'ouvrit lentement. La scène à l'intérieur le glaça.
Diego était dans la baignoire, recroquevillé. De la mousse partout, et devant lui, Peter, accroupi, bien trop proche, la main tendue vers l'eau.
— Qu'est-ce que tu fais ? lance Hector, d'une voix plus dure qu'il ne l'aurait voulu.
Peter sursauta, se retourna en surjouant la surprise.
— Oh ! Je... je l'aidais juste à faire des bulles. On jouait. Rien de grave.
Hector s'approcha vivement.
— Sors. Maintenant.
Peter leva les mains, un faux air détendu sur le visage, comme s'il jouait encore.
— D'accord, d'accord. Pas besoin de s'énerver.
Il se redressa et sortit de la salle de bain en silence, refermant la porte derrière lui.
Hector se pencha vers Diego. L'enfant tremblait légèrement, les lèvres pincées.
— Ça va, fiston ? Il t'a fait quelque chose.. ?
Diego secoua lentement la tête. Puis, après une pause, murmura :
— Il voulait qu'on joue... mais j'ai pas voulu.
Hector serra les dents. Il prit une grande inspiration, puis saisit une serviette pour envelopper son fils.
— Allez, on sort. Ça suffit pour aujourd'hui.
Dans le couloir, derrière la porte, Peter était encore là. Il écoutait.
Et dans ses yeux, une lueur qui n'avait rien d'innocent.
Hector installa Diego sur le canapé, bien au chaud dans une couverture. Un chocolat chaud posé sur la table basse, il mit un dessin animé, sans vraiment y penser. L'écran diffusait des couleurs vives, des voix joyeuses, mais l'enfant ne souriait pas. Il fixait l'écran sans le voir, les yeux un peu trop grands pour son âge.
Hector resta un instant debout derrière lui, à l'observer. Puis il alla vers la cuisine.
Peter était là, adossé au plan de travail, une bière à la main.
— T'es tendu, dit-il, comme si rien ne s'était passé. Faut te détendre, Hector. Tu dramatises.
Hector s'approcha, les poings dans les poches pour ne pas les utiliser.
— Il a six ans, Peter. Tu n'avais rien à faire là, seul avec lui. Encore moins à... à le toucher ou à l'effrayer. C'est un gosse.
Peter eut un rire bref, creux.
— T'es parano. Je l'aidais à s'amuser, c'est tout. Marie sait très bien que je m'occupe de lui parfois. Elle me fait confiance.
— Moi non, répliqua Hector. Et crois-moi, c'est moi son père.
Peter haussait les épaules, comme lassé. Il avala une gorgée de bière, sans quitter Hector des yeux.
— Tu devrais faire attention, Hector. À ce que tu dis. T'es pas ici chez toi.
Un silence épais suivit. Puis Hector souffla, plus calme, mais glacial :
— Et cette maison est la mienne, et le restera alors la personne de trop ici . C'est toi, Peter, et si je sens encore une seule chose louche autour de mon fils... ou que tu ne touches ne seraissent un cheveux de mon enfant, je t'arracherai de sa vie.
Peter le regarda partir, le sourire figé. Derrière ses dents, il y avait quelque chose d'autre. Une tension. Une haine.
Plus tard, quand Marie rentra — les yeux rougis, les cheveux en bataille, encore l'odeur de vin sur son manteau — Hector ne cria pas. Il ne fit pas de scène.
Il prit Diego dans ses bras, le porta jusqu'à la voiture, doucement.
— On va dormir chez papi ce soir, lui dit-il, comme une évidence. D'accord ?
Diego hoche la tête sans poser de question.
Plus tard, dans le salon assombri, Marie était seule. Peter était reparti après avoir aidé à ranger. Il lui avait dit qu'il ne voulait pas s'imposer. Elle n'avait pas insisté.
Hector descendit lentement, Diego endormi dans ses bras.
— Il s'est écroulé après le bain, dit-il doucement.
Marie se leva, un peu raide.
— Tu peux le mettre dans sa chambre. Le lit est prêt.
— Non. Je l'emène avec moi, je refuse qu'il reste chez toi , tu ne fais même pas attention auu danger qui l'entourent.
— Parce que y ' a un danger? , la jeune femme rigola
— Peter. Peter est un problème Marie. Je ne l'aime pas et pourtant il fait déjà partie de la famille !
— Tu as rater beaucoup de choses tu sais , comme toujours. Mais si ça te dérange autant j'irai parler à Peter.
— Bien mais sans moi, je prend diego avec moi, ce soir.
— Et tu reviens quand?
— Je ne reviens pas. Pas ici
— Il t'aime encore, tu sais, dit-elle.
— Je le sais. Et c'est ce qui me fait le plus peur.
— Pourquoi ?
Il s'approcha, s'arrêta à quelques pas d'elle.
— Parce que je ne veux plus jamais lui faire croire que je vais rester, si je ne suis pas sûr.
Un silence. Marie croisa les bras.
— Et tu es sûr, cette fois ?
— Non. Pas encore. Mais je suis prêt à me battre pour le devenir.
Elle le regarda. Longtemps. Comme si elle cherchait quelque chose sur son visage.
— Il y a quelqu'un d'autre ? demanda-t-elle alors.
Hector hésita. Puis secoua la tête.
— Il y avait. Mais elle ne comptait pas.
Marie détourna les yeux, les bras toujours croisés.
— Tu n'as plus de place ici, Hector. Pas officiellement. Pas dans ma vie. Mais dans celle de Diego... c'est à toi de la construire.
— J'ai pas besoin d'un titre. Juste d'une chance.
Elle acquiesça, brièvement.
— Une chance. Pas deux.
Il s'approcha, doucement, puis tendit la main. Elle ne la prit pas. Mais elle ne recula pas non plus.
— Bonne nuit, Hector.
— Bonne nuit, Marie.
Hector prit Diego dans ses bras, endormi, et l'emmena chez lui.
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