Chapitre 3 : les jardins de Lew Castle (Partie 4 : Retour sur le parcours)

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Joseph et Harry dégustaient un petit whisky en attendant Mike. Logan s’était joint à eux.

– Alors comme ça Harrold est avec Mike, dit Logan.

– Oui, c’est lui qui s’est proposé.

– Et tout s’est bien passé ?

– Apparemment, il a su dompter notre petit diable ? Il m’a envoyé quelques photos et ils avaient l’air de bien s’amuser.

– J’espère qu’il ne l’a pas dérangé dans son travail.

– Non je ne pense pas, ajouta Joseph, Mike est toujours à l’aise et patient avec les enfants.

– Tout à l’heure, quand nous étions à la bibliothèque, il semblait ailleurs, je m’excuse Joseph, j’ai été maladroit, il regardait les photos sur le mur, et j’ai insisté sur le bonheur que m’apportaient mes enfants.

– Ne t’en fais pas Harry, il a appris à faire la part des choses, il est fils unique, il devait s’imaginer avec des frères et sœurs.

– J’espère que je ne lui ai pas ravivé des souvenirs douloureux.

– Non. Je ne crois pas. Joseph en profita pour demander. Comment va Jeremiah ? Il est rentré de Bagdad ?

– Oui, hier, il a eu une permission pour la naissance de son premier petit fils. Je pense que ce sera sa dernière mission.

– Le savoir rentré et auprès des siens est le plus important aujourd’hui, même si je suis son grand frère, je suis soulagé à mon tour. Bon en attendant, je dois vous laisser sinon mon colonel va m’attendre et m’assigner aux consignes.

Joseph et Harry éclatèrent de rire à cette dernière remarque de Logan, et Harry enchaîna.

– Ah c’est deux-là, ils se sont bien trouvés, Mia est la douceur dans un gant de fer.

– Tu peux être fier de tes enfants, et de ce qu’ils sont devenus.

– De ce côté-là, je pense que je peux retourner le compliment. Ce que vous avez fait avec Olivia est remarquable.

– Nous ne pouvions pas nous effondrer, nous devions être là pour Mike. Il est devenu un homme bien, et où que soient ses parents, ils peuvent être fiers de lui.

– Ah, nous donnerions tout pour nos enfants, et nos petits-enfants et je suis heureux d’avoir la chance de connaitre mes arrières petits-enfants.

– Allez, trinquons à leur bonheur.

– Slanté Joseph.

– Slanté Harry.

Les deux amis continuèrent à discuter de leurs progénitures jusqu’au retour de Mike.

– Me voilà.

– Parfait, nous t’attendions.

– Un whisky Mike ?

– Oui, pour trinquer avec vous.

Mike s’installa à côté de Joseph et face à Harry.

– Si nous levions nos verres au Comte de Forfar, annonça Joseph.

– Oui très bonne idée, enchaîna Harry.

– À n’en pas douter, conclut Mike.

La discussion était lancée et le repas fut un moment agréable, Mike en apprit un peu plus sur les invités stars du jour de l’inauguration. Mais la plupart des échanges tournèrent autour du départ de Mike pour Saint Andrews et de sa compétition de golf. À la fin du repas, Mike avait trouvé en Harry son fan numéro un. Et quand celui-ci apprit que Mike venait de casser son driver lors du dernier entraînement, il se proposa de lui financer l’achat du driver de remplacement. Mike essaya bien de lui faire comprendre que pour ce week-end ce serait difficile. Le Comte n’en démordait pas, et lui demanda de lui laisser le sien pour voir ce qu’il pourrait faire. Joseph connaissait bien Harry, il ne lâcherait pas l’affaire. Aussi Mike s’éclipsa pour aller récupérer son club dans le coffre de sa voiture. À son retour, Harry et Joseph s’étaient rendus dans le petit salon attenant au bar pour continuer à discuter.

– Voici mon driver en le tendant à Harry.

– Je vais voir ce que je peux faire, quand partez-vous ?

– Jeudi, nous prenons le ferry à sept heures.

– Très bien, cela me laisse un jour et demi. Parfait.

– Merci. Je dois vous laisser, le jardin m’attend et ensuite je filerai vers quinze heures.

– Je t’attendrai sur le parking, annonça Joseph.

– Bien Grand-Pa, à tout à l’heure.

Harry et Joseph poursuivirent leur discussion. Harrold arriva avec Mia, un papier à la main.

– Super Papy, est ce que Mike est encore là ?

– Non, il vient de partir travailler.

– Ah mince, je voulais lui donner ce dessin pour le remercier de la matinée.

– Confie le à Joseph, il lui transmettra.

– J’ai une meilleure idée, annonça Joseph, rejoins-moi à quinze heures trente sur le parking avec une paire de basket et un blouson.

– Pourquoi ?

– Tu pourras le lui donner en main propre, il doit me rejoindre. Et tu nous accompagneras au golf, il doit s’entraîner.

– Oh mamy, tu penses que ce sera possible ?

– Si Joseph te le propose, pourquoi pas. Logan, tu en penses quoi ?

– Oui, c’est une bonne idée.

– Alors c’est d’accord, jeune homme.

– Merci, viens mamie, je vais apporter quelques améliorations à mon dessin.

Et Harrold disparut, courant dans les couloirs en direction de l’aile familiale.

Harry aux débuts des travaux, avait mis une pièce à disposition pour servir de bureau à Mike. Il l’avait aménagé avec beaucoup de soins. Grand-Ma lui avait offert un tableau le représentant à son bureau, la fenêtre ouverte sur le parc, le jardin en perspective. Mike passa les derniers coups de téléphone urgents avant son départ. Il commanda les nouvelles pergolas qui devraient être livrées avant la fin de semaine prochaine.

Il rejoignit Joseph qui l’attendait près de la voiture, Hugh rapportait la balle à Harrold, qui jouait avec lui.

– Me voilà Grand-Pa, excuse-moi j’étais au téléphone avec un de mes fournisseurs.

– Mike, si ça ne te dérange pas, j’ai proposé à Harrold de venir avec nous au golf.

– Pas de soucis, allons-y.

La trois cent quatre prit l’allée et quitta le château, la petite troupe chantonnant à tue-tête « the water is wide ». Hugh, bien calé sur le siège à côté d’Harrold, la tête posée sur ses genoux, appréciait les câlins du petit garçon. Arrivés sur le parking du golf, Arthur les attendait.

– Ah, vous avez un invité ? interrogea Arthur.

– Oui, je te présente Harrold, tu le connais, lança Joseph.

– Bien sûr c’est l’arrière-petit-fils d’Harry. Tu as encore grandi. La dernière fois que je t’ai vu, c’était en juin pour l’anniversaire de mariage du Comte et de la Comtesse.

Mike attrapa son caddie, suivi d’Harrold et de Hugh. Ils partirent à pied, pendant que Joseph était déjà en route dans la voiturette avec Arthur. En chemin, Mike expliquait au petit garçon les règles de ce sport qui lui était inconnu. Harrold était impressionné, et n’avait qu’une hâte pouvoir lui aussi essayer.

– Pourquoi, tu commences par le trou numéro onze Mike.

– C’est là que nous avons terminé notre match-play, hier avec mon grand-père.

– C’est là que tu as cassé ton driver ?

– Oui c’est bien ça, et surtout là où j’ai perdu la balle avec laquelle je jouais.

– C’est très grave ?

À cette question, Mike se surprit à sourire, Harrold par ces quelques mots venait de lui enlever un poids sans le savoir.

– Finalement, non !

– Ouf, tant mieux, parce que Hugh a quelque chose dans la gueule, et ce n’est pas la balle avec laquelle nous jouions sur le parking.

– Mais, oui tu as raison. Et Hugh n’a pas le droit de jouer à la balle sur le golf.

Mike appela Hugh, qui s’assit à ses pieds, fier de lui, il y déposa la balle. Puis il se retourna vers Harrold attendant une caresse.

– C’est bien Hugh, regarde comme Mike est content que tu aies retrouvé la balle.

Mike s’agenouilla, et prit le chien par le cou sous le regard attendri de Joseph. Hugh était le Sherlock de Mumy.

– Bon Mike, nous nous y mettons. Nous le finissons ce match-play.

– Je suis ton homme, à toi de jouer, ta balle était encore sur le fairway, la mienne vient de réapparaitre. Aussi, considérons qu’elle était hors limite, je me droppe avec un coup de pénalité.

Arthur et Harrold suivirent la joute entre les deux hommes avec beaucoup d’attention. Le chérubin qui était toujours à courir à gauche et à droite en temps normal, était aujourd'hui au bord du green sage comme une image, et demanda à Arthur

– C’est qui le meilleur des deux ?

– Sans hésiter, c’est Mike.

Il remporta le trou numéro onze, enchaîna le douze, le treize un par quatre en trois coups seulement, laissa filer le quinze et le seize, et termina par un birdie sur le dix-sept, et un eagle sur le dix-huit un par cinq, sous le regard médusé d’Harrold.

– Comment est-ce qu’il a réussi à faire ça ? demanda Harrold à Joseph.

– C’est exceptionnel, lança Arthur.

– Je pense qu’il est fin prêt, annonça Joseph.

– Tu l’as mis directement, c’est toi le meilleur.

Mike était pleinement satisfait, cette journée était une bouffée d’oxygène. Et ce petit garçon y était pour beaucoup.

– Grand-Pa, tu vas pouvoir sortir le bateau de pêche pour tout le mois à venir.

– Apparemment, je n’ai plus le choix, je pense tout de même que ton emploi du temps sera un peu chargé.

– Il y a des chances.

– Tiens attrape, un petit cadeau d’Olivia au cas où.

– Qu’est-ce que c’est ? demanda Harrold.

– Une balle de golf lumineuse, répondit Mike en souriant.

– Pourquoi ta mamie te l’a offerte ?

– Au cas où Sherlock ne l’aurait pas trouvée.

– Elle m’a surtout dit, enchaîna Joseph, qu’elle te permettrait de garder le cap, comme un phare sur le green.

– Bon allez, rentrons, Henriett et Olivia doivent nous attendre, annonça Arthur.

– Arthur, je viens de recevoir un message du Comte : Karl attend Harrold à l’accueil du golf. Peux-tu le ramener ? demanda Joseph.

– Oui, un petit tour en voiturette, jeune homme.

– Nous finirons à pied avec Mike, ne nous attendez pas.

– Attendez monsieur, je dois donner quelque chose à Mike.

Harrold descendit et tendit son dessin à Mike.

– Tiens, j’ai fait ça pour toi, pour cette journée, c’était génial.

– Merci Harrold, et n’oublie pas dans un mois, nous ferons la deuxième visite du jardin, et cette fois, si le temps nous le permet, nous pourrons peut-être jouer ensemble au golf.

– Ce serait trop chouette. À bientôt Mike et bonne chance pour Saint Andrews.

Harrold fila s’assoir à côté d’Arthur, faisant de grands gestes en guise d’au revoir en direction de Mike et Joseph.

– C’est un sacré petit bonhomme, il me fait penser à toi au même âge.

– Oui, il est très attachant. J’ai passé une bonne journée avec lui. Tu as eu raison de lui proposer de venir avec nous sur le parcours.

– Tu sais, tu as tout pour devenir un bon père à ton tour.

Les deux hommes avancèrent d’un bon pas, l’obscurité s’installait, accompagnée d’humidité et de froid. Ce n’était pas le moment de s’enrhumer. Olivia emmitouflée dans sa capeline, observait avec tendresse les deux ombres qui s’avançaient. Joseph s’approcha de Grand-Ma pour lui offrir un doux baiser et tout le monde entra.

– Bonsoir Mike.

– Bonsoir Tata, tu as besoin d’aide.

– Non, avec Olivia nous avons tout préparé.

– Ça sent trop bon.

– À table, Arthur se présenta avec le cullen skink dans les mains.

La douce odeur d’oignons, et de haddocks venait chatouiller les narines de Mike, et son estomac faisait des gargouillis qui ne pouvaient tromper personne. Joseph et Olivia s’installèrent, suivi d’Henriett et d’Arthur, Mike n’avait pas pu attendre, il s’était assis, prêt à commencer. Le repas se poursuivit avec un saumon sur un lit d’épinards. Arthur s’était une fois de plus surpassé, pour faire plaisir à Mike et régaler tout le petit monde.

– Bon avant de passer au dessert, Mike nous avons une surprise pour toi, annonça Henriett, elle ne tenait plus en place.

Arthur arrivait avec un énorme paquet.

– Attends, je vais t’aider, je ne voudrais pas que tu te fasses un tour de rein.

– Merci, Mike.

– Allez ouvre-le, s’empressa de dire Henriett.

Mike était aussi impatient que sa marraine, c’était noël avant l’heure. Il déchira le papier et la surprise fut aussi grande que l’emballage.

– C’est bien trop !

– Tu entres dans la cour des grands, aussi il te faut le matériel qui va avec.

Mike était planté devant le carton, il n’en croyait pas ses yeux, un sac de golf, c’était un sacré investissement.

– Tu vas pouvoir frimer sur le parcours, lui suggéra Arthur.

– Il y a de fortes chances, vous n’auriez pas dû. C’est de la folie.

– Non, c’est juste parce que nous t’aimons fort.

Mike fondit sur sa marraine, la serrant fort contre lui, Arthur vint à son tour voulant profiter des embrassades. Mike avait les yeux qui brillaient.

– Comment pourrai-je vous remercier ?

– À toi de leur prouver que tu es le meilleur, suggéra Arthur.

– Je ferai de mon mieux.

– Tiens, l’interrompit Olivia, nous aussi nous avons un petit quelque chose pour toi.

Olivia et Joseph tendirent un paquet moins imposant. Mike le prit avec précaution, et l’ouvrit en prenant tout son temps, l’émotion le gagnait petit à petit. Et les larmes qu’il avait retenues jusque-là, glissèrent sur ses joues en découvrant le contenu du cadeau. Mike tenait dans ses mains un télémètre de golf. Mike ne trouvait plus ses mots, Henriett l’aida en annonçant :

– Bon allez après toutes ces émotions, quoi de mieux qu’un bon dessert.

– Un bon whisky pour l’accompagner ne serait pas de refus, ajouta Joseph, après tout nous avons quelque chose à fêter.

Tout le monde s’installa à table, attendant le dundee cake. Joseph attrapa les verres qui étaient rangés derrière le bar, et tout en cherchant l’élixir, demanda à Arthur.

– Est ce que Olivia t’a dit qu’elle avait rencontré Lady Mac Graig hier à son exposition ?

– La femme du Lord Mac Graig, du whisky Mac Graig ?

– Oui c’est bien elle.

– J’ai entendu dire qu’il allait passer la main dans la semaine.

– C’est ce qu’elle m’a aussi dit aux cours de notre discussion.

– Parle-moi de Lady Mac Graig ? s’empressa de demander Henriett.

– C’est une vraie Lady. Je te raconterai tout dans les détails promis.

– Bon désolé, je n’ai pas de whisky Mac Graig, la prochaine fois pense à lui demander un échantillon, ajouta Arthur.

Il était minuit quand Olivia, Joseph et Mike prirent congés. Raisonnablement, la trois cent quatre et la Triumph deux milles restèrent garées sur le parking du golf. Ils firent les deux kilomètres qui les ramenaient à la maison à pied, continuant à parler du week-end à venir.

En franchissant la porte, Mike embrassa une fois de plus ses grands-parents, cette journée l’avait réconforté. C’est à ce moment-là, qu’il se souvint qu’il y avait le dessin d’Harrold dans la poche de son blouson, il avait oublié de le regarder. En dépliant la feuille, il découvrit le jardin de Castle Lews tel qu’Harrold l’avait perçu avec ses yeux d’enfants, et il avait ajouté un petit mot : merci Mike, mon super héros.

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