Chapitre 5 : Un matin d’octobre à Pitlochry (Partie 2 : Maman tu m’as tant manquée).

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Harold et Céléna entrérent dans la cuisine, où ils trouvèrent Isabel, derrière le piano de cuisson préparant le petit déjeuner. Cette pièce avait été amanégée au cours de l’été. La grande cheminée d’époque en était l’élément principal. Deux ilots avaient été pensés et montés sur place avec le bois de l’ancienne table, l’un portant le nouvel évier en pierre, le second accueillant la plaque de cuisson. Le jour de sa livraison, elle fut l’attraction de la journée, parce qu’elle faisait son poids. Harold aidé de Rory et Grégor en avaient bavé.

Ce matin, quand Céléna vit sa mère dans la cuisine, elle savait qu’elle allait se régaler. Isabel avait eu la chance au cours des voyages d’affaires de son mari, de cotoyer de grands chefs. Elle était en charge de l’évenementiel pour la distillerie et une organisatrice de gala caritatif très appréciée. Sa virée dans les Hébrides extérieures ces deux derniers jours, avaient été l’occasion pour elle d’affiner les préparatifs en vue de la réception Charity Child à Saint Andrews de ce week-end.

Céléna s’approcha de sa mère, et déposa un bisou sur sa joue. Au contact de son nez tout froid, Isabel lui suggéra :

– Tu devrais aller prendre une petite douche et te changer avant de prendre froid. Le petit déjeuner ne sera pas prêt avant une quinzaine de minutes.

Une douce odeur se répandait déjà dans la cuisine, Céléna attrapa un scone et fila, suivant les conseils de sa mère.

– Je vois qu’elle a retrouvé son sourire, dit Isabel une fois qu’elle eut disparu.

– La neige apporte toujours joie et réconfort aux petits comme aux grands.

– Elle t’a dit quelque chose de particulier pendant votre sortie ?

– Non, nous avons parlé de tout et de rien. Elle m’a juste dit qu’elle voulait passer un moment avec moi.

– Tu penses qu’elle est prête ?

– Oui ! Après tout c’est notre fille, elle sera à la hauteur.

– Je crois que nous devrions discuter avec elle.

– Je pense que nous devrions attendre, la connaissant c’est elle qui viendra.

– Tu as surement raison, mais hier quand je l’ai eue au téléphone… Isabel hésita avant de poursuivre, – … Je ne sais pas, elle avait une petite voix.

Harold attrapa sa femme par la taille et l’enlaça. Il voulait la rassurer, mais avant tout il aimait la prendre dans ses bras. Depuis toujours, elle était à ses côtés, c’était elle la plus à même de gérer les situations difficiles. Elle avait été si forte quand ils avaient découvert qu’ils ne pourraient jamais avoir d’enfant biologique. Aujourd’hui, pourquoi semblait-elle si fébrile ?

– Isabel, tout va bien ?

– Juste un pressentiment.

– Tu ne me caches rien ? s’inquièta tout à coup Harold.

– Non, tout va bien mon chéri. Cela fait dix mois, elle était loin, elle ne nous a pas tout raconté, j’en suis sure. Je me demande si elle ne nous cache pas quelque chose.

– Elle viendra nous en parler, si elle en ressent le besoin. Elle l’a toujours fait jusqu’à maintenant. Elle est arrivée seulement hier, laisse lui un peu de temps.

– Oui, tu as raison. Au fait, je l'emmène faire du shoping après le petit déjeuner, tu n’avais pas besoin d’elle ?

– Non. Une journée entre filles vous fera du bien.

Harold attrapa le café que lui tendait Isabel et changea de sujet :

– Tu ne m’as pas dit, tu as trouvé ce que tu voulais ? J’ai entrapercu un paquet dans notre chambre.

– J’ai acheté une toile, quand tu la verras, tu tomberas sous le charme, tout comme moi.

– Tu veux lui offrir à quel moment ?

– Demain, lors de la remise du diplôme si cela te convient.

– Parfait. Et pour Saint Andrews, tu as besoin de quelque chose ?

– J’ai pu obtenir que l’on me prête une œuvre pour l’exposition.

– Ta soirée à Lewis and Haris a été une vraie réussite si je comprends bien.

– J’ai surtout eu la chance de discuter avec l’artiste Olivia Conroy. Ensuite j’ai vu avec le directeur de la galerie, pour qu’elle me fournisse trois tableaux supplémentaires pour les enchères. Et en discutant avec lui, il m’a dit que justement elle serait à Saint Andrews ce week-end.

– Tu devrais l’inviter au gala.

– Le directeur doit se renseigner auprès d’elle, cela devrait pouvoir se faire. Il faut vraiment que je te la présente, tu l’apprécieras autant que moi.

– Ce sera avec plaisir, peut-être voudra-t-elle … Harold n’eut pas le temps de finir sa phrase que Céléna fit irruption dans la cuisine, suivie de Cheeky.

– Pardon, je vous ai interrompu, dit Céléna embétée.

Harold embrassa Isabel, déposa un dernier baiser sur le front de sa fille, fit une gratouille à Cheeky et partit en direction de la distillerie. Céléna s’installa face à sa mère, entamant son petit déjeuner avec entrain.

– Comme ces moments m’ont manqué ! lança Céléna entre deux bouchées. Dix mois qui m’ont apparu une éternité sans vous !

– Maintenant tu es à la maison, c’est l’essentiel.

– Tu sais dans tout ça, le plus dur, c’était de ne pas pouvoir vous embrasser tous les soirs avant de m’endormir. Je sais que je ne suis plus une enfant et pourtant cela m’a couté.

Isabel contourna l’ilot et s’empressa de serrer sa fille contre elle, enfouissant son visage dans la couette de Céléna afin de dissimuler ses propres larmes.

– Oh, maman, les Highlands m’ont tant manqué. C’était comme si j’avais perdu mes repères, comme si j’étais retournée au point de départ avant que vous me recueillez.

– Pourquoi ne m’en as-tu jamais parlé, j’aurai pu venir passer quelques jours avec toi ?

–Non, il fallait que j’en passe par là pour continuer à grandir.

– Tu veux en parler ?

– Pas pour l’instant, je ne veux pas gacher notre journée. Pas de jérémiades, juste une journée mère-fille, je veux en profiter comme quand petite tu m’emmenais jouer aux princesses dans les boutiques.

Céléna ne voulait pas embêter sa maman, après tout c’était derrière elle. Ce n’était pas si grave, pourquoi les inquièter ? Elles finirent leur repas en discutant des charmes de la région bordelaise. Céléna découvrit que c’était au cours de cette escapade sur les terres du millésime St Emilion, pour leur cinquième année de mariage, que ses parents avaient décidé de faire un dossier d’adoption.

Céléna fila dans le hall. Sur le perron, elle croisa Rory, l’intendant du Castle, qui prenait la direction de la distillerie. Avec le temps les deux hommes s’étaient liés d’amitié, et tout naturellement il était devenu le bras droit d’Harold. Il vivait dans une longère du parc avec sa femme et ses deux filles. La petite famille avait souvent été un point de chute pour Céléna lorsque ses parents devaient partir pour affaires à l’étranger et qu’ils ne pouvaient pas l’enmener. Rory était devenu un grand-père d’adoption.

– Bonjour, ma libellule, surnom qui lui avait donné.

– Bonjour Rory, je suis contente de te voir.

– Et moi donc, tu es de plus en plus jolie.

– Tu es bien trop gentil. Tu rejoins papa.

– Oui, nous avons quelques petits détails à régler. Et toi, prête pour le grand jour.

– Plus que jamais, bien que je doute parfois. Est ce que je serai à la hauteur ?

– Forcément, tu es une Mac Graig.

À ces mots, Céléna ressentit beaucoup de fierté. Oui, après tout elle était une Mac Graig et elle s’était battue pour être reconnue comme telle. Elle ne laisserait rien, ni personne lui faire croire le contraire.

– Je le pense vraiment, si ton grand-père était encore de ce monde, il serait honoré de pouvoir partager son héritage avec une femme comme toi.

Céléna sauta au cou de Rory. C’est au même moment qu’Isabel fit son apparition.

– Désolée de vous intérrompre, nous devons y aller.

Rory s’éclipsa à son tour, saluant les deux Ladys.

– Allons-y Céléna, je pense que mon mascara va finir par couler.

– Tu es trop belle maman, je t’aime fort.

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