Les Couloirs De La Putréfaction
Le manoir vibrait comme un organe malade.
Tom courait. Ses pieds frappaient le sol détrempé de sang. Les murs pulsaient lentement autour de lui, comme un thorax vivant.
Chaque respiration du monstre semblait résonner dans les fondations. Chaque plainte viscérale était une menace.
Il glissa, se rattrapa à une poignée rouillée, ouvrit la première porte venue.
Une chambre. Froide. Déserte.
Il claqua la porte derrière lui, la verrouilla. Son cœur battait contre sa gorge.
Il tituba jusqu’à un placard. S’y jeta. Referma la porte.
Silence.
Seulement son souffle.
Et ce goutte-à-goutte sourd de son propre sang — une longue entaille à la cuisse, faite quand la créature l’avait presque attrapé.
Il se recroquevilla dans le noir du placard, entre des manteaux moisis et une odeur de mort rance.
Et alors que les larmes coulaient de ses yeux, que ses doigts tremblaient sur sa propre plaie, quelque chose craqua dans sa tête.
Un souvenir.
Et si tout ça… avait commencé bien avant ?
—Flashback — 3 jours plus tôt
Mercredi 23 octobre 2025, 14h12
Université Saint-Basile, Département d’Archéologie
Tom se souvenait encore du sourire d’Eva, ce sourire un peu trop confiant qu’elle arborait en posant le vieux grimoire sur la table.
— « C’est lui. Le journal d’Hezekiah Ravenhurst. Le fondateur du manoir. »
Le carnet était couvert de cuir noir, gras au toucher.
Quand ils l’avaient ouvert, une odeur de viande pourrie s’était dégagée de ses pages.
Mais Eva s’en fichait.
Elle voulait « découvrir la vérité sur les légendes ».
Elle avait convaincu Lena, Nora, Alex, Samuel, et Tom de la suivre.
Une simple expédition.
Mais il y avait eu cette page, couverte de symboles.
Une page cousue avec de la peau humaine, il en était certain aujourd’hui.
Et ce mot, écrit au sang séché :
« N’entrez que si vous êtes prêts à nourrir les murs. »
Il avait ri, ce jour-là.
Tous avaient ri.
Le soir même, Eva réservait une voiture.
Trois jours plus tard, ils étaient au manoir Ravenhurst.
Retour — placard, nuit du massacre
Tom sursauta.
Quelque chose bougeait derrière la porte du placard.
Un bruit humide.
Lent.
Comme si quelque chose rampait sur la moquette.
Comme des doigts nus, déformés, qui traînaient un corps.
Il étouffa un cri.
Soudain, le silence.
Puis un chuchotement, juste contre la porte :
— « Tom… tu te souviens du grimoire ? Tu m’as menti… »
C’était Eva.
Sa voix, mais morte.
Creuse. Distordue.
Elle n’avait plus de cordes vocales, pourtant elle parlait.
Tom ferma les yeux.
Il tremblait de tout son corps.
Un grincement.
Le placard s’ouvrit lentement, depuis l’extérieur.
Et dans le noir… deux yeux blancs, injectés de veines noires, apparurent.
Juste au niveau de son visage.
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