On ne vit pas dans un monde juste

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Avec une forte pensée à Chahinez Daoud et Valérie Bacot, ainsi que leurs enfants, et malheureusement tant d’autres.

TW: violence conjugale, féminicide

On ne vit pas dans un monde juste.


Non, on ne vit pas dans un monde juste, c'est con à dire, mais on l'oublie si vite.

On vit dans un monde où, si une femme est victime de violences conjugales, ses plaintes peuvent ne pas être reçues par la gendarmerie.

On vit dans un monde où ces mêmes plaintes, si elles ont pu être déposées, n’empêchent en rien un agresseur clairement identifié de repartir à la charge. On vit dans un monde où l’on doute de la parole des victimes. Et où on laisse à leurs agresseurs le droit de circuler, le droit de harceler, le droit de frapper, encore et encore.

On vit dans un monde où un agresseur, objet de plaintes et condamné, peut sortir de prison pour retrouver celle qui était sa femme, lui tirer dans les jambes, puis l’asperger d’essence et la brûler vive, pour ensuite incendier sa maison.

On vit aussi dans un monde où il faut des mois – si ce n’est des années – à une soi-disant justice pour mettre des victimes sous une protection inefficace.

On vit dans un monde où des femmes se retrouvent à commettre un meurtre, parce qu’aucun autre choix sensé ne s’offre à elles, et où celles-ci subissent en conséquence la peine qui devrait être réservée à leur agresseur, seul véritable bourreau.

Car on vit également dans un monde où chacun préfère s’enfouir la tête dans une bassine emplie de paillettes plutôt que de même simplement regarder, et accepter cette réalité. Et pour ceux qui voient malgré eux : ceux-là se taisent, par peur, ou parce qu’ils ne savent que dire.

On vit dans un monde d’empotés. Un monde où l’on se dit « C’est pas grave » ; « Ce doit être un peu de sa faute à elle, aussi » ; « Revenez nous voir quand ce sera vraiment sérieux ».

On vit encore – non, on survit, pour ne pas dire qu’on sous-vit – dans un monde où justice ne peut se faire qu’après la mort.

Qu’après une mort.

Mais celle de qui ?

À la victime de peser le pour et le contre.

On vit en conséquence dans un monde où la peine capitale est encore réservée aux victimes d’un système, un système judiciaire doté d'un nombre toujours plus conséquent d’empotés. Un système vieux, sourd et malvoyant.

On vit dans un monde où beaucoup reste à faire.

On ne vit pas dans un monde juste, les gens. Et ce n’est qu’un exemple.

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