Chapitre 6

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Cœur marchait depuis un moment dans la ville. Elle finit par s’asseoir sur un banc afin de reposer ses jambes. Elle se déchaussa, essayant de soulager ses pieds souffrant dans ses Louboutin. Ce n’était qu’un stratagème pour attirer l’informateur.

−       Vous avez de magnifiques chaussures, commenta l’homme à ses côtés.

−       Je ne peux pas en dire autant du pins sur votre chapeau. Avait-elle vraiment besoin de marquer son territoire, plaisanta Cœur.

Le pins en forme de losange. Banal. Néanmoins, pas pour tous. La référence aux cartes n’échappait pas aux membres de l’organisation.

De plus, Carreau avait cette fâcheuse tendance à jouer avec les limites de l’acceptable. L’homme qu’elle venait de rencontrer n’était que le nouveau jouet de son amie. Toxique.  La jeune femme se demandait constamment pourquoi cet homme en costume trois pièces n’avait toujours pas pris ses jambes à son cou. Il avait pourtant aperçu le caractère spécial de Carreau. Chacun ses choix. S’il aimait jouer les cerbères, cela ne regardait que lui.

−       Elle aime montrer aux autres ce qui lui appartient. Commenta Cerbère. Je ne vais pas lui reprocher ça. Voulez-vous lire le journal ? enchaîna-t-il.

−       Oh avec plaisir. Qu’il y a-t-il de beau ?

−       Ça je vous laisse le découvrir chuchota l’homme au costume cravate. La page trois est la plus intéressante commenta le Cerbère en se levant, puis la saluant.

Tout avait été dit et transmis. Un échange d’informations simple. Une cible à abattre contre des informations intéressantes.

−       Remettez-lui mon bonjour, s’exclama Cœur en saisissant une nouvelle page du journal.

Les membres de l’organisation n’étaient plus, enfin les cartes n’était officiellement plus en activité. Chacune ayant pris leurs chemin à la suite de la mort de Joker. Cependant, officieusement, le goût du crime et de la justice régnait dans leurs veines.

Carreau ne tuait plus de ses propres mains. Néanmoins, il lui arrivait de vouloir descendre quelques têtes d’hommes imbus d’eux-mêmes et Cœur le faisait joyeusement.

Ce précieux journal contenait deux places pour un gala de charité. Bien joué Carreau. Cette femme si cruelle ne l’avait jamais laissé tomber, ce qui encourageait Cœur à lui porter une fière estime.

La tueuse retourna chez elle avec son précieux colis. Elle réfléchissait à la meilleure façon d’annoncer à Malcolm qu’ils allaient participer à un gala.

***

−       Je ne sais toujours pas pourquoi j’ai accepté.

−       Pour vous faire pardonner mon cher.

Cœur entra dans la peau de son personnage sous les soupirs de son partenaire d’un soir. L’homme n’aimait pas cette idée de s’exposer, surtout dans une soirée mondaine. Il posa néanmoins sa main sur celle de la jeune femme. Elle semblait sûre d’elle mais sa main s’agitait de plus en plus en se rapprochant de l’entrée.

Cœur pesta intérieurement, des souvenirs de son dernier gala lui revient en mémoire. Cette fois ci tout allait être différent, se promis la jeune femme. Elle avait deux missions.

−       Rappelez-moi ce que vous devez faire ici ?

−       Trouver deux hommes.

−       Ma compagnie ne vous suffit plus ?  Susurra l’avocat à ses côtés.

−       Votre plaisanterie est de très mauvais goût, clama Cœur en replaçant une des mèches de sa perruque derrière son oreille.

Cœur le tira dans la salle espérant faire disparaitre son maudit sourire qui ne cessait de s’agrandir.  La jeune femme se reconcentra sur son objectif : Trouver Anathole Somir.

-            Vous connaissez certaines personnes ? demanda Cœur.

-            Bien sûr, j’en ai déjà défendu quelques-unes.

-            Vos liens vont pouvoir nous aider. Cœur attrapa deux flutes de champagne et se retourna vers l’avocat. Vous voyez l’homme au milieu de la salle. Le blond à côté de la dame à la robe rose.

Malcolm observa et acquiesça.

-            Je suppose que nous devrons aller l’aborder ?

-            Bien joué Sherlock. Est-ce que vous connaissez quelqu’un dans son cercle ?

La tueuse espérait de tout cœur une réponse affirmative afin de faciliter l’approche.

-            La femme a son bras.

-            Allons-nous présenter mon cher ami.

Arrivés à leur hauteur, l’homme s’exclama :

-            Madame Tivoli. Comment vous portez vous ?

-            Oh monsieur Seldy. Parfaitement bien.

L’avocat se tourna vers ce fameux Anathole.

-            Enchanté. Malclom Seldy. Avocat.

A l’annonce de son nom, Cœur remarqua le changement d’humeur de l’homme.

-            Anathole Somir. Le regard de l’homme détailla la silhouette de Cœur.

-            Marianne Cortez se présenta Cœur.

-            Je ne savais pas que vous aviez une fiancé. Sa question curieuse braqua tous les regards vers l’avocat gêné.

-            Oh, détrompez-vous. Je suis une amie de Monsieur Seldy. Clarifia Cœur. Elle senti l’homme se détendre.

-            Je vais vous chercher un verre annonça Malcolm.

Il ne savait pas quoi dire. Il n’aimait pas particulièrement les soirées mondaine et encore moins les questions sur sa vie privée. Il réussit à s’éclipser.

-            Je vais vous accompagner Monsieur Seldy.

Cœur sourit à l’annonce de madame Tivoli. Elle lui courait après, et ce n’était pas pour lui déplaire. Cette dame ne s’était pas rendu compte de l’opportunité qu’elle venait de créer. Cœur allait amadouer sa cible.

-            Je crois que votre compagne vous a laissé tomber.

-            Vous êtes dans la même situation que moi, rappela Anathole.

-            Vous avez raison, je ne devrais pas faire la fière à ce sujet, souffla Cœur, le visage conscrit.

-            Ce n’est pas comme si une belle jeune femme comme vous, étiez seule.

-            C’est vrai que je suis en compagnie d’un bel homme répliqua Cœur en penchant légèrement la tête vers son interlocuteur.

-            Est-ce que vous vous y connaissez en art, Mademoiselle ?

-            Appelez-moi Marianne. Sourit la jeune femme. Je dois vous avouer que cela n’est pas mon point fort. Cependant, j’adorerais écouter un homme m’en parler. Vous devez être un fin connaisseur ?

-            Vous avez tapé dans le mile Marianne susurra-t-il. J’ai pas mal de tableaux dans ma galerie.

-            Vous êtes galeriste ?

-            Oui, je révèle des talents cachés en les exposant au monde.

Cœur le trouvait imbu de lui-même. Elle devait entrer dans son jeu.

-            Avez-vous découvert des talents cachés par ici ?

-             Voulez-vous les observer ?

-            Ce serait avec joie.

Sa cible détailla la salle.

-            Je pense que l’hôte de la soirée peut s’absenter quelques instants pour une belle demoiselle.

Il lui tendit la main qu’elle accepta. Si proche de lui, le contact lui était difficile. Elle résista à l’envie de lui envoyer son poing. Elle se concentra sur sa respiration. Les choses sérieuses pouvaient enfin démarrer.

Sa cible l’avait amenée à l’étage. Ils marchaient entre les sculptures, plus éberluantes les unes que les autres.

−        Laquelle préférez-vous ?

−        J’éprouve des difficultés à choisir. Elles sont toutes…

−        Magnifiques ! continua l’homme.

Pervers. Les sculptures représentaient pour la plupart des enfants dénudés, entrelacés avec des adultes. Cette façon de voir le monde n’était pas saine. Cet homme la dégoûtait. Elle commençait à comprendre pourquoi Carreau lui avait demandé sa tête.

−        Vous m'enlevez les mots de la bouche, plaisanta Cœur.

−        Je ne savais pas que ce genre de choses vous plaisait également. Puis-je vous compter parmi nous ?

−        Que voulez-vous dire ?

Le sixième sens de Cœur commença à s’agiter. Que mijotait cet homme ? Son regard, rempli de scrupules, lui donnait la chair de poule.

−        Vous avez de bons amis.

−        Faites-vous référence à Malcolm ? Il est vrai qu’il est… utile. Cœur remarqua l’intérêt grandissant de l’homme. Il vous intéresse ? demanda innocemment la jeune femme.

−        C’est sa capacité qui m’intéresse, pour tout vous dire.

−        Il est vrai qu’il n’a quasiment jamais perdu une affaire. Avez-vous besoin de ses services ?

−        Ne vous a-t-il rien dit ?

−        Absolument pas. Nous ne parlons jamais de ses affaires.

−        Vous semblez proches.

−        Nous ne sommes pas ensemble. Si c’est cela qui vous intéresse… La jeune femme s’approcha lentement de l’homme. Il n’est pas vraiment mon style d’homme.

−        Et quel est votre style ?

−        Ceux qui aiment l’art, dit Cœur en montrant la pièce d’un geste de la main, faisant référence à cet art.

La tueuse n’attendait qu’une chose : appuyer sur la détente de son pistolet. Malheureusement, quelque chose la retenait. Ce type était intéressé par Malcolm, et son sixième sens lui disait que cet intérêt n’était pas pour quelque chose de sain. Elle se rapprocha encore plus et posa sa main sur la cravate de l’homme.

−        Mais vous êtes plus attiré par mon ami. Ce qui me rend assez triste. Voyez-vous, est-ce la façon dont il défend ses affaires qui vous attire ?

−        Pour être honnête, ce n’est pas moi qui le suis. J’ai des amis qui s’intéressent au même art que moi. Seulement, ils sont tombés sur des gens qui ne pensent pas comme eux. Ils ont besoin d’aide.

−        C’est d’une telle tristesse… Cœur n’en pensait pas un mot. L’ont-ils contacté ?

−        Oui, mais votre ami a refusé.

−        Je pensais qu’il ne refusait aucune affaire.

−        Allez savoir.

−        Je pourrais lui en toucher quelques mots. Quels sont les noms de vos amis ? Sous le regard inquisiteur Cœur rajouta :

−        Il me faut bien leurs noms pour lui demander de vous aider.

−        Cela ne sera pas nécessaire.

−        Ah bon ?

L’homme lui sourit.

-            Il est déjà avec nous. Et je suis sûr qu’il va changer d’avis.

L’organe de Cœur battait la chamade dans sa poitrine. Merde. Ce petit con l’avait devancé. L’homme en face d’elle sortit son arme pour la pointer vers elle. Fait chier.

-            Vous n’êtes pas obligée de faire cela vous savez ? Cœur leva les mains.

-            Entendez-vous ça ? Anathole regardait derrière elle. Pensez-vous qu’elle me suppliera si je lui colle mon silencieux sur la tête ?

-            Ne faites pas cela supplia son partenaire.

Cœur tourna la tête les yeux écarquillés. Malcolm était présent, lui-même menacé par une arme. Il était là, l’homme qu’elle devait abattre. Rodrigo. Un feu s’éveilla dans la poitrine de Cœur. Sa respiration s’accéléra. Elle voulait sa tête. Elle allait l’avoir. Elle réfléchit si vite. Il n’allait pas s’en prendre à Malcolm. Les accompagnateurs en avaient besoin. La seule qui risquait sa peau c’était elle.

-            Alors, repris Anathole un sourire espiègle. Il s’avança et posa l’arme sur sa tempe. La réponse a-t-elle changé ?

Malcolm plongea ses yeux dans les siens. Et acquiesça.

-            Laisse là tranquille. Elle n’a rien à voir avec cette affaire.

Rodrigo demanda à l’homme d’avancer. Ils sortirent du champ de vision de Cœur. Elle ne pouvait pas se permettre de le perdre. Fait chier. La jeune femme savait que si elle ne trouvait pas une solution, elle perdrait son seul moyen de faire payer à cet homme.

-            La sculpture est fissurée, murmura Cœur.

-            Vous êtes une drôle de femme. Vous allez mourir et pourtant vous continuez de regarder les sculptures.

-            Je pensais qu’elles étaient vos précieuses acquisitions.

L’homme fronça les sourcils.

-            Effectivement.

-            Regardez-la.

Cœur pointa une fissure imaginaire. Lorsqu’elle s’aperçue que l’homme dévia ses yeux sur la sculpture, elle donna un coup dans le poignet de l’homme déviant l’arme de sa tempe. Un coup de feu retentit face à cette action. Ses oreilles sifflantes, elle lui agrippa le bras, faisant pression sur son poing. Il lâcha l’arme qu’elle envoya valser à l’autre bout de la pièce. Elle sortit son couteau qu’elle planta dans sa gorge. Elle le retira vivement et s’éloigna le plus rapidement possible. Elle devait retrouver Malcolm.

Les plans de l’établissement étaient clairs. Il y avait une porte de sortie à l’arrière. Elle coura aussi vite qu’elle le put. Poussant la première porte et dévalant les escaliers, elle tira la seconde porte. Le temps lui manquait. Elle s’élança vers le jardin. A l’arrière de celui-ci se trouvait un sentier caché. La tueuse s’avance alors prudemment dès qu’elle entendit des voix. Utilisant la pénombre et les arbres afin de camoufler sa présence, elle se rapprocha le plus possible. Elle réussit à jeter un coup d’œil.

Elle fut impressionnée. Malcolm se débattait. Il avait réussi à mettre l’un des trois hommes à terre. Les deux autres ne perdirent pas de temps pour plaquer l’avocat au sol afin de le ligoter. Rodrigo parti à l’avant de la fourgonnette laissant l’autre homme s’occuper du prisonnier. Chance. Une fois de dos, la jeune femme se précipita sur le kidnappeur et planta son couteau dans sa nuque. Sous l’effet de cette deuxième attaque la lame se brisa. Merdas. Elle n’avait pas le choix. Ses bras s’enroulèrent d’un côté de la tête de l’homme et de l’autre sa nuque. Elle exerça une pression si forte que le craquement de l’os retentit. C’était la fin pour lui. Elle laissa le corps tomber, et détacha l’avocat.

Il la regardait intensément. Trop intensément. Elle venait de tuer un homme sous ses yeux. Le sang de son premier meurtre changeait la couleur de sa robe. Elle se doutait que cette vision n’était pas belle à voir. Un autre coup de feu les firent sortir de leur trans. Cœur senti une douleur lui traverser le côté. Elle ne sut rien faire, un bras s’enroula autour de sa gorge.

-            Petite conne. Tu l’as buté.

-            Vous ne faites plus d’effort ma chère. Rigola Cœur.

Elle se doutait que la femme qui accompagnait Anathole était leur complice. Celle-ci resserra sa prise. Cœur ne savait plus respirer.

-            Va dans le fourgon, clama Rodrigo.

-            Vous la laissez tranquille. Murmura l’avocat les poings serrés.

Les kidnappeurs se regardèrent et acquièrent. Cœur se doutait qu’ils allaient la tuer dès qu’ils seraient entrés dans la fourgonnette. Elle avait tué deux des leurs. Son sang continuait de ruisseler le long de sa cuisse. Elle commençait à se sentir faible. Allait-elle y arriver ?

D’autres coups de feu retentirent. Cœur sentit ses yeux se fermer petit a petit. La pression sur sa gorge se raffermit, puis se libéra. Rien ne la retenait. Elle sauta sur Malcolm, pour l’allonger au sol, espérant qu’il ne soit pas touché par les balles. Elle ne savait pas qui, ni où. Ses sens et sa force l’abandonnait. Elle n’avait pas encore fini. Putain. Finalement, Joker avait raison. Elle était faible. Ses pensées partirent rejoindre les abysses.

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