AU REVOIR

2 minutes de lecture

Le silence s’abattit enfin dans la soute. Plus de hurlements métalliques, plus de coups sourds dans les cloisons. Juste le ronronnement régulier des moteurs. J’adorai ça.

Je lâchai enfin un soupir, mais la douleur revint, sourde, lourde. Comme une vague qui se retirait, le calmant de Renn s’était estompé. Il ne restait que la brûlure brute de ma hanche. J’ouvris ma trousse, nettoya tant bien que mal. Chaque contact m’arrachait un grognement. Je sortis une agrafeuse. Le clac métallique résonna dans la soute. La douleur explosa, un éclair blanc dans mon crâne. J’ai serré les dents jusqu’au sang :

  • Aouch ! Ça va laisser une cicatrice…

Yvain me regarda faire en secouant la tête.

  • Tu pourrais monter une Vendetta MK4 sur le Memento ? Ça évitera de finir en puzzle à chaque mission.

Son sourire était un peu forcé, mais il avait raison. Les canons du Gibson avaient eu plus d’impact qu’aucun de nous.

Renn rompit le silence, sa voix glaciale tranchant avec nos souffles encore courts.

  • J’aurai besoin de vos échantillons. Tous les deux. Tout de suite.

Il tenait son datapad serré, sa clef de données autour du cou. Ses yeux glissait déjà vers le chat lové dans un coin de la soute. La petite bête bâilla, s’étira comme si de rien n’était. Renn, lui, avait l’air de baver devant une découverte de musée. Je ne pense pas que ça se mange sur sa planète... Enfin, je sais plus...

Je rangeais mes compresses, jetai un regard sombre au scientifique.

  • Sérieusement ? Encore ? Après ce qu’on vient de traverser ?
  • Justement. C’est maintenant qu’il faut documenter.

Le silence retomba. Yvain s’éclaircit la gorge, passa une main sur sa nuque.

  • Rieve aurait adoré entendre ça, doc.

Il avait tenté la dérision, mais sa voix tremblait. J’ai senti mon ventre se nouer. Il y avait un petit malaise là...Rieve n’était pas qu’un uniforme. Il avait tenu jusqu’au bout, le canon levé face à l’impossible. Dans la tradition Necris, il avait gagné son nom. Et ça voulait dire qu’il ne serait pas oublié.

Je me suis laissée glisser contre la cloison avec une grande inspiration. On avait survécu. Mais à quel prix ?

Le chant du moteur berçait la soute, hypnotique. On avait l’impression que le Memento nous portait loin, très loin, alors qu’en réalité il venait à peine d’arracher ses griffes de la station.

Je fermai les yeux un instant, la tête contre la cloison, j’en ai presque ronronné. Yvain pianotait sur son panneau, nerveux, mais avec un regard bienveillant sur moi :

  • On n’a plus qu’un saut dans le réacteur, Mink. Après ça, faudra se poser quelque part… si on trouve un "quelque part".

Renn leva les yeux de son datapad, un éclat maladif dans le regard.

  • Quelque part, mais ailleurs. Ce qui compte, c’est que ce bloc de données ET le chat survivent.

Je tournai la tête vers la boule de poils lovée dans l’ombre. Elle ouvrit à peine un œil doré, indifférente, et recommença sa toilette. Simple. Tranquille. Presque trop.

Une odeur de plastique brûlé persistait encore dans mes narines. Je serrai le bébé Xarlax contre moi sans réfléchir, juste pour sentir autre chose que ce goût de cendre.

  • On a survécu, souffla Yvain.
  • Pourvu que ça dure…

Renn répondit à son tour, d’un ton clinique :

  • Jusqu’à ce qu’ils comprennent que nous ne sommes pas morts.

Le silence retomba. Dans l’espace, il n’y a pas d’écho. Mais dans ma tête, il y en avait un.

Et il avait les yeux gris.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire LouLaBelette ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0