J’en ai fini avec les manipulation génétiques. Je jette mon diplôme de généticienne dans la cheminée. J’en ai fini avec l’écriture. J’alimente le feu de quelques exemplaires de Megan H. J’en ai fini avec la marine. Je jette mes galons au feu. J’en ai fini avec la Bible. Je n’ai trouvé qu’un exemplaire qui s’arrête au tome 7 mais ils brûle bien quand même. Sur ce, Ava arrive et m’arrête ;

• C’est quoi la suite ? C’est qui ?
• Une blague écrite par Greta, un gros volume, ça parle de climat, ça a mal tourné sur sa planète. C’est tout ce que j’ai trouvé d’elle qui brûle bien.

Je le mets dans le feu et on regarde la jolie couverture faire des flammes de toutes les couleurs. Ava récupère le reste du carburant du foyer. Mon badge d’accès à l’AZU et mes cartes de membres au Parlement.

• Comment je vais être à la hauteur, Jenna, d’être avec toi, d’être ton Ava ? La liste de celles qui n’y sont pas arrivées est longue et prestigieuse. Je ne suis rien à côté d’elles toutes et chacune.
• Je suis Jenna Jenkins, aujourd’hui, au présent, en Genève, avec ma femme Ava Jenkins, je suis la déesse du Pôle Sud et son agente spéciale en protection rapprochée, on est un couple et une équipe, en contrat et en mission, en spectatrice de la Fémunité, on existe juste au cas où et en attendant on n’a qu’une seule chose à vivre : s’aimer.
• Jenna, comment tu peux m’aimer, tu sais même pas qui je suis, en vrai. En apparence je suis la fille de Rachelle et je suis une agente de l’Octogone. Tout ça c’est vrai mais c’est du vent. Je suis quelqu’une d’autre. La Ava que tu connais, c’est mon plan B pour être tranquille et pouvoir avoir une autre vie, cachée, secrète. Tu le sais sans doute quelque part en toi. C’est pour ça que tu m’aimes. Mais ça va pas de plaire. Tu t’es battue toute ta vie contre ce qui m’anime.

Ava prend le tison et remue le feu dans la cheminée, les livres se déplient et ravivent la lumière qui l’éclaire. Elle me regarde et me livre son âme dans ses yeux bleus translucides, une invitation à lire en elle.

• Tout a commencé au lycée, à Sylvania. Le lycée Montaigne. Un lycée religieux, créé par Adé, Papesse aujourd’hui. Un lycée d’élite. Jusque là, tout est logique. Alors quoi ?
• La raison d’être de Adé, c’est quoi à ton avis ?

L’écriture. Et pas que de la Bible apparemment. Une alternative. Ava a tout lu mais elle écrit aussi, et pas de vulgaire romans comme j’ai pu le faire. Elle écrit des articles, elle est journaliste, elle écrit l’Histoire.

Analyse du chapitre « elle écrit l’Histoire »

Ce chapitre marque un tournant à la fois symbolique et intime dans le parcours de Jenna et dans la révélation de l’identité profonde d’Ava. Jenna procède à une purification par le feu, rejetant les identités passées (généticienne, écrivaine, militaire) pour n’être plus que « Jenna Jenkins » au présent. Parallèlement, Ava révèle sa véritable nature : loin d’être une simple agente, elle est une historienne et une journaliste, héritière spirituelle d’Adélaïde dans l’art d’écrire non plus la Bible, mais l’Histoire elle-même.

Symbolique des événements et thèmes majeurs abordés

- **La purification par le feu** :

Jenna brûle ses diplômes, ses écrits, ses galons et jusqu’à la Bible. Ce geste symbolise un rejet des identités imposées et une volonté de vivre uniquement dans le présent.

- **Le couple comme sanctuaire** :

Jenna et Ava se définissent comme « un couple et une équipe », une alliance qui transcende les rôles institutionnels.

- **L’écriture comme pouvoir alternatif** :

Ava incarne une nouvelle forme d’autorité : non plus occulte ou politique, mais historique et journalistique. Elle écrit l’Histoire, c’est-à-dire qu’elle donne du sens au réel en dehors des dogmes.

- **La révélation identitaire** :

Ava n’est pas celle qu’elle semblait être. Son « plan B » révèle une stratégie de dissimulation et de liberté, rappelant que dans la Fémunité, les identités sont multiples et souvent cachées.

Bilan sur chaque personnage présent

- **Jenna** :

Elle atteint un stade d’épuration existentielle. En brûlant ses anciens symboles, elle cherche à n’être plus que ce qu’elle est aujourd’hui : aimante et aimée.

- **Ava** :

Elle se révèle comme une figure intellectuelle et morale, héritière d’Adélaïde mais dans une démarche laïcisée : elle n’écrit pas des textes sacrés, mais l’Histoire des femmes.

- **Adélaïde** (mentionnée) :

Représente l’écriture sacrée et institutionnelle. En créant le lycée Montaigne, elle a semé les graines d’une écriture alternative, plus libre.

Conclusion philosophique

Ce chapitre interroge la possibilité d’une identité hors des institutions et des dogmes. Jenna, en brûlant ses attributs, cherche à échapper au destin ; Ava, en écrivant l’Histoire, cherche à le comprendre et à le raconter. Ensemble, elles incarnent un équilibre entre l’être et l’écrire, entre la simplicité du présent et la complexité de la mémoire. La véritable liberté ne serait donc ni dans l’oubli, ni dans la soumission au récit, mais dans la capacité à écrire sa propre histoire – et celle des autres.

Suite possible en une phrase

Et si cette révélation sur la véritable vocation d’Ava – écrire l’Histoire de la Fémunité – venait un jour menacer les récits officiels, y compris ceux de la Bible elle-même, encore brûlante dans la mémoire collective ?