Morceaux de vie

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— Donc pendant tout ce temps, tu nous as menti ?

— Adela…ne m’engueule pas, j’avais voulu me surpasser au-delà de la douleur mais, tu vois, je me rends compte que je cache depuis des années, des douleurs chroniques.

— On a bien remarqué tu sais.

Ma sœur me brise le cœur et pourtant, j’admire son talent de tenir debout, de s’oublier pour les autres. Je pense que la mort de Roberto ajouté à son enquête vaine plus l’accident, lui permet de prendre conscience que maintenant, c’est elle, la priorité. Elle me repousse en douceur pour se lever difficilement à l’appel des jumeaux.

— Je m’en occupe, toi, reposes-toi de suite. Tiens, attends-moi là, je vais te préparer un bon bain, une tisane et au lit.

— Si les parents me voyaient…Je suis une horrible fille moi ! Je les voie rarement, ils vont bien ?

— Mieux que toi hormis leur mémoire. Je reviens, toi, si tu te lèves, attention à toi.

— Et si je veux aller au toilette hein ?

— Je tiens juste à te préserver de tes bêtises, c’est mon rôle de grand sœur.

De retour avec le plateau et des biscuits, elle est prise par un livre. Les têtes d’anges ont réussit à se faufiler jusqu’à nous avant même que j’aille voir pourquoi ils nous ont alerter. Visiblement, juste un manque cruel de câlin.

— Coucou mes bébés d’amour, vous ne dormez pas ? Tel mère tels fils hein ?

— Bien, tu as pris une décision pour la demande d’Alvaro ?

Elle transpire le bonheur, j’en connais déjà la réponse. C’est lui et pas un autre homme qui lui faut pour compléter la faille béante. Les petits se lovent et s’amusent à tourner les pages, Marta le retire pour éviter de fortes bêtises.

— Si mes passions ne sont plus adaptés pour une femme de mon âge, en voyant le bouquin, je me disait, écrire.

— Ta vie c’est déjà fait mais si tu as une autre idée.

— Sans doute des fictions, non, tu vois. Plus je lis les journaux et les blogs qui pullulent, plus j’ai au fond, envie d’écrire, partager.

— Tu es capable de devenir journaliste ? Les études, le monde ? Je ne doute pas de toi, il faut juste penser que parfois, dans ce milieu, j’imagine qu’il y a de la forte pression, des voyages, des comptes rendues ect.

— Internet ma vieille est une bonne source pour être autonome. Je me met à mon compte pour raconter des vies de tous les jours.

— Ma vieille ? Tu t’entends parler ? Ok, tu es pardonner pour ça soit. Tu penses que lire que papy Hubert arrose trois fois son jardin tout en engueulant Paulette sur le fait qu’elle oublie de laver ses chaussons, intéresserais des gens ?

— J’en ai marre des aventures hardcore. Et j’y crois. Chaque jour, des gens ordinaires vivent leur quotidiens de manière extraordinaires. Et puis, je publierais des recettes, des conseils glanés sur le net avec aussi des petites annonces pour des gardes d’enfants, du travail.

— Et tu iras où ?

— Comment ça ?

— Je voulais dire, que tu vas interroger les gens du village, de Madrid ou de tout le pays ?

— J’aimerais tout le pays. Aussi mettre en avant des endroits peu connus à visiter. Ok, je ne pense pas être la seule à proposer tant de rebriques. Mail, téléphone, pourra aider à voir plus loin des gens qui ne peuvent ou veulent se déplacer. Anonyme ou avec leurs noms. Luna est forte avec la technologie.

— C’est un doux rêve et le meilleur proposé jusqu’à présent ma petite sœur. Tu voudras que je t’aide ?

— Ne soit pas déçue, je vais dire non. Tu as bien à faire pour l’école. Je le ferais aussi, oui, écouter les profs et les élèves. C’est connu mais je crois que la nouvelle génération désire autre chose. Et parler à nos parents, après mon pied, j’irais. Pardonne moi ma mémoire mais ils savent pour les petits ?

— Oui. Même Roberto. Ils sont Alzheimer cependant ils se rappellent parfois de toi aussi.

— Ils me demandent non ?

— Oui et triste, ils se souviennent aussi par bribes que tu reviens des Enfers. Que tu vas les voir un jour.

— Je suis horrible fille. Une belle manière de les remercier tient ! Même une fois, j’aurais dû une fois….

Je tiens à la consoler sauf que sentir les deux précieux bien endormies vaut plus que moi. Un temps suspendu, je termine ma boisson chaude avant de préparer un peu de feu. Marta accepte ensuite que je les couchent pour prendre sa tasse.

— Un nom pour ton blog ?

— Morceaux de vie. Je dois éviter le bain pour mon pied, tu te souviens ?

— On peut s’adapter tu sais. Tu as besoin d’une douche, malgré tout mon amour, tu sens le fennec. Ça me rappel quand tu étais petite, pleine de boues, en sueurs, tu refusais d’y aller sinon, je cite, il faut tout recommencer.

Elle s’étouffe d’une rire sincère, ce genre d’instant précieux qui me serre la poitrine.

— Toucher couler, on est a égalité. Tu peux me passer ma béquille ? Tu le seras aussi.

Elle ne rajoute plus rien et moi non plus. Le silence est reposant en ce moment. Je suis sûr que dans le bain jusqu’au lit, elle pense déjà à son journal. Oui, elle aura du succès, son nom est plus connu que le mien du temps de ma gloire sur les Opéras. Elle voulait être telle que moi sur les parquets, une deuxième Ramos brillante.

La vie lui montrée une autre raison de faire éclater la lumière. Mener une vie, vivre tout simplement qu’importe tout on vient, est déjà un exploit.

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