Chapitre 26 : Enzo
Son père lui avait déjà parlé de ce lieu, ce lieu réservé aux Zodiaques. Voilà qu’il y mettait les pieds.
Il avait l’impression de respirer pour la première fois. L’air était différent ici, plus doux, plus volatile. Il prit une grande inspiration et sentit un poids s’envoler de ses épaules. Il avait cette sensation étrange au creux du ventre qui lui donna un frisson qui remonta jusque dans sa nuque. Il avait l’impression d’être enfin chez lui. Sans jamais y avoir posé les pieds avant, l’Envers lui avait manqué.
L’énergie démoniaque qu’il sentait d’ordinaire fourmiller partout sur sa peau, lui donnant la chair de poule lorsqu’elle devenait trop intense avait complètement disparu. Ici, cette essence n’existait pas.
Il prit un temps, au bout de ce pont recouvert d’herbe bien plus verte qu’il n’en avait jamais vu, pour admirer le manoir qui se tenait devant lui. Ses tours montaient jusqu’au ciel et se confondaient avec son bleu crémeux. Des couleurs ocre et orangées venaient parsemer le blanc des murs de touches lumineuses. Tout semblait si irréel. La lumière elle-même était étrange. Elle était omniprésente. Il n’y avait aucune ombre, aucun point d’obscurité. Tout était éclairé.
— Tu es prêt ? lui demanda Dorian.
— Il le faut.
Il laissa ses nouveaux compagnons ouvrir la marche et les suivit sans un mot.
Il tenait fermement contre lui le carnet qu’il avait emporté du laboratoire et touchait toutes les minutes la poche de son pantalon pour s’assurer que la clef s’y trouvait toujours. Il avait dans ses mains les preuves de tout ce qui s’était passé, les noms de chaque personne impliquée. Il était temps que tout prenne fin et qu’un nouveau commencement prenne vie.
Ils passèrent les grandes portes et pénétrèrent à l’intérieur de la bâtisse. L’endroit était immense. Des colonnes montaient jusqu’au plafond, un plafond qui semblait toujours plus haut, plus on s’y attardait dessus.
— Étonnamment, ils sont déjà en plein conseil, remarqua Martin.
Enzo regarda dans la même direction que le Lion. Une porte en bois massif orné de symboles et de rosace en fer noir était surmontée de treize petits cadrans, dans lesquels treize clefs étaient enfoncées. Il reconnut les douze signes du Zodiaque, seule la clef la plus à droite avait son symbole gratté et à moitié effacé. Leurs ancêtres avaient fait disparaître sa famille de l’Histoire. Il était temps qu’il vienne rendre l’honneur des siens à la place qu’ils méritaient.
— On t’attend ici, lui assura Adrien.
— Bon courage, lui souhaita Mélanie.
Le moment était venu. Il prit une grande inspiration avant de pousser la porte de la salle du conseil.
Son entrée créa un moment de silence autour de la grande table ronde. Les douze anciens des familles le regardèrent. La plupart étaient surpris et ne comprenaient pas qui il était et ce qu’il faisait là, mais il lut surtout la peur et la rage dans le regard de deux de ces anciens.
— Veuillez m’excuser de cette arrivée impromptue, malheureusement, je n’ai pas été convié à ce conseil, commença-t-il. Je vais donc commencer par me présenter à ceux qui ne me connaissent pas. Je me prénomme Enzo Serpentus, dernier héritier de la famille des Serpentaires.
À ces mots, il posa sa main sur la table laissant à tous la possibilité de voir le symbole de son signe dessus. Il était fier de l’effet qu’il faisait. Il aima particulièrement la réaction du Vierge, qu’il devina aux veines noires, qui avait un sourire en coin. Il devina qu’il était au courant de pas mal de choses et appréciait que cela bouge enfin.
— Il est temps que certains d'entre vous répondent de leurs actes. J’ai avec moi les preuves que deux de vos anciens, ainsi que plusieurs membres de vos familles ont été à l’origine de disparition, de meurtres et d’expériences sur des humains, mais aussi sur d’autres Zodiaques ! Il est temps que tout soit révélé et que nous prenions les mesures nécessaires contre eux !
Le conseil dura quatre heures. Quatre longues heures pendant lesquelles l’ancien des Balances et des Taureaux tentèrent de minimiser leurs actes. Heureusement, les autres familles restèrent lucides et à l’écoute.
Enzo ressortit du conseil la tête haute. Les Serpentaires revenaient chez eux. Tout n’était pas encore fini. Il restait à appréhender tous ceux qui avaient pris part à cette sombre histoire, mais il n’était plus seul. À présent, il était bien entouré. Il savait qu’il pourrait toujours compter sur ses nouveaux compagnons.
En parlant d’eux, il vit Adrien en pleine conversation avec son père un peu plus loin dans le couloir menant vers les jardins. Leur discussion semblait bien animée, mais le Vierge ne manquait pas de ressources. Il avait ses combats et pour eux, il n’avait peur de rien.
Sur sa droite, Mélanie et Dorian s’étaient réfugiés dans un coin à l’écart de tout le tumulte qu’ils avaient créé. Leur histoire semblait bien compliquée du point de vue du Serpentaire, mais elle semblait enfin rentrer dans l’ordre et devenir plus légère pour chacun d’entre eux.
Enzo finit par approcher Martin. Le jeune Lion se tenait accoudé contre l’un des piliers de la grande salle. Aujourd’hui, ils se ressemblaient beaucoup. Tous les deux n’avaient plus de famille, plus d’accroche. Ils se retrouvaient seuls.
— Qu’est-ce que tu vas faire maintenant ? lui demanda Martin.
— Je ne sais pas exactement. J’ai participé à tous ces problèmes alors je crois que j’ai encore à faire. Il reste de nombreux démons au laboratoire. Peut-être qu’il existe un moyen de les sauver, comme nous l’avons fait pour Maxime.
— Tu as besoin d’aide ?
— Toujours. Cette histoire a commencé avec nos pères. Elle se terminera avec nous, conclut Enzo.
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