Chapitre 24 : Île flottante

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- Rosa ! Que se passe-t-il ? Tu vas bien ?

La jeune femme en larmes n'arrivait pas à aligner deux mots. Les sanglots empêchaient le moindre mot de sortir de sa bouche. Comment expliquer ce qui s'était passé quelques heures plus tôt ?

- Respire ma puce.

Marc inspira et expira bruyamment pour guider le souffle de Rosa. La jeune femme calqua sa respiration sur celle du chef et retrouva la maîtrise de son corps. Marc attendit qu'elle parle. Il ne voulait pas la brusquer. Cela devait venir d'elle. Elle lui raconta alors l'agression et l'état de Robert. Marc ne comprenait pas.

- Qui a fait ça ? Ce sont les mêmes qui ont vandalisé la vitrine ?

- Oui. Je... il faut... il faut que je te dise Marc, tout ça c'est de ma faute.

- Hein ? Comment ça ?

Même si elle aurait aimé lui en parler de vive voix, elle lui devait la vérité. Son restaurant et l'un de ses employés avaient subi des dommages. Elle prit une grande inspiration et raconta son adolescence, la pression de son beau-père et de Luigi. Le kidnapping, le cambriolage, les intimidations. Marc ne dit rien. Il écouta, intégrant tout ce qu'elle lui révélait. Il serra les poings en comprenant les agissements sur la jeune femme. Il comprit mieux sa réaction lorsqu'ils s'étaient rapprochés sur le canapé. Elle n'avait gardé sa virginité que par ce concours de circonstances qui la rendait méfiante envers les hommes. Il appréciait d'autant plus d'avoir pu l'approcher. Un besoin viscéral de la protéger prit place en son ventre. Il voulait être sûr qu'il ne lui arriverait rien.

- Rejoins-moi !

Il avait dit cela comme un cri du cœur. Rosa s'était attendue à ce qu'il la plaigne ou qu'il la renvoie pour sauver son restaurant. Elle ne répondit pas, persuadée d'avoir mal entendu.

- Je suis sérieux Rosa. Retrouve-moi à Los Angeles. Tu me manques et je serais rassuré de te savoir ici.

- Je... Non, ce n'est pas sérieux Marc, ma place au restaurant...

- Sanders y est, il peut se passer de toi et puis il s'agit de ta sécurité, il comprendra.

- Mais Robert...

- Il ne sera pas en mesure de veiller sur toi le temps de sa convalescence. J'ai besoin de te savoir en sécurité, Rosa.

Elle ne savait que faire. D'un côté, elle avait très envie de le rejoindre, certaine que Luigi ne traverserait pas l'Atlantique pour l'attraper. D'un autre côté, elle avait l'impression d'abandonner tout le monde, pire de fuir devant l'adversité. Elle ne pouvait pas, elle avait toujours combattu, forte et droite devant cette ordure. Certes elle était lasse et il s'attaquait dorénavant à ses proches et cela l'affectait d'autant plus.

- Viens s'il te plait.

- J'ai des engagements, je... je ne peux pas partir comme ça ! Surtout avec Robert à l'hôpital et encore dans le coma. Non, Marc ce n'est pas possible.

- Et si je m'occupe de tout ?

- Même, ce n'est pas possible.

- Je comprends tu n'as pas envie de me rejoindre.

Marc regretta cette remarque puérile. Il s'en voulut de la manipuler et en même temps c'était l'impression qu'il avait. Finalement, peut-être ne voulait-elle vraiment pas le rejoindre, cherchant des prétextes pour refuser poliment.

- Marc, j'adorerais te retrouver à Los Angeles. Tu me manques aussi. Mais je ne peux pas fuir ainsi. Je ne suis pas du genre à me planquer. Oui j'en ai marre, oui j'ai peur pour les autres et pour moi aussi. Cependant, je refuse de me sauver en laissant les autres dans la panade.

Quelque pu rassuré, Marc lui proposa un deal.

- Je te propose de prendre un vol uniquement lorsque Robert sera tiré d'affaires. Cela te va ?

- Ok.

- Je m'arrangerais pour le reste avec Sanders. Mais promets-moi que tu viendras. J'ai besoin de t'avoir près de moi. Sans toi, cette expérience est bien fade.

Elle entendit la peine du chef dans cette dernière phrase.

- Cela ne va pas ?

- Si, si, lâcha-t-il dans un soupir. Mais ce n'est pas aussi stimulant et intéressant que je pensais. Il y a pas mal de pression à cause des caméras et je me sens seul. Ce n'est pa aussi bien que les dernières semaines passées avec toi où l'on créait, inventait. Je ne retrouve pas cette émulation et ce plaisir ici. Pour te dire, je n'ai pas réussi à m'imposer encore. Ils refusent de tester les plats que j'aimerais mettre à la carte.

- Je comprends ça doit être dur.

Rosa bailla, ses paupières se firent lourdes et elle les ferma tout en écoutant Marc lui raconter ses déboires. Il devina bientôt qu'elle était sur le point de s'endormir, sa respiration se fit plus lente et plus bruyante. Il ne s'en offusqua pas, remarquant l'heure tardive en France et la journée éprouvante qu'avait vécue la jeune femme. Il raconta une énormité et devant la non réaction de la jeune femme, il comprit qu'elle s'était assoupie. Il en profita pour lui murmurer ces mots doux qu'il retenait, ces mots qu'il ne pouvait encore lui avouer. Il se dit que dans son sommeil elle percevrait peut-être ses sentiments et qu'elle le rejoindrait plus vite.

- J'ai envie de reprendre là où on s'est arrêté chérie, je pense encore à ta peau si douce et à tes lèvres délicieuses. J'ai besoin de t'avoir près de moi pour comprendre pourquoi mes pensées tournent tout autour de toi. Ma Rosa, rejoins-moi vite. Bonne nuit chérie. Fais de doux rêves...

Il écouta encore un peu le doux ronflement de la jeune femme, souriant d'être si près d'elle, dans une intimité que seul un amant pourrait vivre. Il rêvait que cela arrive encore, mais Rosa se trouvant près de lui, dans leur lit. Il finit par raccrocher à regret, avisant l'heure du service qui approchait.

Rosa se réveilla tard le lendemain, elle comprit qu'elle s'était endormie sur son téléphone lorsqu'elle le vit poser près de sa tête sur son oreiller, ce qu'elle détestait en général. Cependant, elle avait pris plaisir à s'endormir en écoutant la voix de Marc, comme une berceuse rassurante et réconfortante. Elle se sentait reposée, prête à affronter cette nouvelle journée. Le médecin de l'hôpital lui avait donné un arrêt, mais elle refusait de l'utiliser, elle deviendrait folle si elle devait restée inactive ne serait-ce qu'une journée. Elle se prépara en vitesse n'ayant pas le temps de se restaurer. Elle ne vit personne dans la maison. Les enfants du couple devaient être à la fac et Lydia était certainement déjà partie pour l'hôpital. Le mot qu'elle trouva sur la porte le lui confirma.

Quand elle arriva en retard au travail, Sanders, Barbara et Steeve semblaient méditatifs devant le trousseau de clés de la jeune femme.

- Il était sur la porte, expliqua le barman.

- Qu'est-ce qui a bien pu se passer ? Ce n'est clairement ni le genre de Robert, ni celui de Rosa.

Afin d'éclairer la situation, Rosa se racla la gorge et déclara :

- On s'est fait agressé à la fermeture.

La bombe était lâchée. Les trois têtes se retournèrent d'un seul mouvement. Ils furent tous surpris. Barbara les yeux écarquillés sonda la jeune cheffe, vérifiant ainsi qu'elle n'avait rien.

- Je vais bien, anticipa la jeune femme, par contre Robert s'est fait opérer en urgence et a été mis dans le coma.

La réalité dite à haute voix la frappa comme une claque et à l'instar de Barbara elle perdit le peu de couleurs qu'elle avait et les larmes dévalèrent ses joues.

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