La fin des illusions - partie une

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J'ouvre les yeux et ai aussitôt l'impression de revivre un événement passé : Luc, assis sur une chaise, m'observe d'un regard bienveillant, comme lorsque je me suis réveillée dans cette chambre à Rome. . .

Ceci dit, le décor est différent. Au lieu d'un lit simple, mais confortable, je suis allongée dans un lit à baldaquins faisant au moins quatre fois ma taille. Le plafond est orné d'une peinture représentant des diablotins dans un ciel rougeâtre. Les murs sont recouverts d'un papier peint rouge au motif de plantes sur lesquelles sont enroulés des serpents. Leurs cadres et celui de la porte sont dorés et la chambre est éclairée par un lustre en cristal, pendant qu'un feu brûle dans le cheminée en marbre. Le sol est quant à lui recouvert d'un tapis écarlate bordé d'or.

Étonnée, je m'assieds pour poser des yeux ronds sur les meubles en bois sombre trônant autour de nous. En plus d'être élégamment sculptés, ils portent de curieux objets comme des chandeliers en or, une représentation miniature d'un navire à voiles, des petits coffrets en métal précieux. . . J'ai vraiment l'impression d'être dans un château venu tout droit d'une autre époque. Pourtant, rien n'est poussiéreux, preuve que le lieu est bien entretenu.

Je lance un regard interrogateur à Luc, qui me demande en souriant :

- Comment te sens-tu ?

- Euh. . . Je. . . Je crois que ça va. C'est juste que. . . je ne comprends pas. Où sommes-nous et comment sommes-nous arrivés là ?

- Nous avons survécu au crash. Tu as perdu conscience pendant notre chute, sûrement à cause de la peur. Tu as subi tant d'émotions intenses en un si court laps de temps. . . Je t'ai donc ramené jusqu'ici. Nous sommes dans l'un des nombreux hôtels particuliers du quartier du Marais. Celui-ci m'appartient.

- Nous sommes à Paris ? Comment sommes-nous arrivés jusqu'ici sans nous faire rattraper par les trois soldats de l'ASC ? Ils n'attendaient que la chute de l'avion pour venir nous cueillir.

- Les fruits ont quitté le buisson avant l'heure de la cueillette, dit-il en reprenant ma métaphore avec un clin d'oeil complice.

- Je n'arrive pas à croire que l'on s'en soit sortis indemnes. . . Est-ce que ça veut dire que les autres passagers vont aussi bien ?

- Je devais faire vite pour nous permettre d'échapper à nos poursuivants, se justifie-t-il aussitôt. Je n'ai pas eu le loisir de m'attarder pour m'assurer qu'ils s'en soient sortis. J'ai cependant entendu aux informations que seules quelques morts étaient à déplorer. La majorité des passagers sont encore en vie. Quand la police et les ambulances sont arrivés sur place, tous les blessés avaient déjà été guéris par cette thaumaturge. Enfin, ce dernier point n'a bien sûr pas été annoncé par la journaliste. C'est moi qui l'ai déduit seul. Je doute en effet que personne ne se soit blessé. Si quand ils sont arrivés, tous les survivants étaient en pleine santé, c'est certainement qu'elle les avait déjà soignés.

- Comment es-tu au courant pour son don ?

- Elle en a utilisé une face sur nous en faisant sombrer les membres de l'équipage dans la maladie. Je n'avais encore jamais vu un thaumaturge rendre des gens malades.

- Je ne pensais pas non plus qu'elle s'en servirait contre des innocents juste pour me mettre la main dessus, elle qui prônait sans cesse la défense de l'Humanité face aux démons et au mal en général. . . laché-je avec un mélange de déception et de dégoût. Ils m'ont vraiment menti sur toute la ligne.

Mes poings et mes dents se serrent. Je leur faisais confiance. Je pensais que nous nous étions liés d'amitié, mais je me trompais. Toute cette bonté, cette gentillesse et cette bienveillance dont ils faisaient preuve envers moi n'étaient que des mensonges et des illusions destinés à mieux me tromper. Ils ont profité de ma naïveté et de ma détresse et jamais je ne le leur pardonnerai ! Ils ne sont que des monstres revêtant des masques de saints protecteurs pour arriver à leurs fins !

Luc pose une main sur la mienne pour calmer les tremblements de rage qui l'animent. Il me dit ensuite sur un ton taquin :

- Allons. Est-ce vraiment dans cet état que tu compte te présenter à ton père ?

Ces paroles me rendent aussitôt le sourire.

- Où est-il ? lui demandé-je. Et quand pourrai-je le voir ?

- Tout de suite.

Pendant qu'il dit ces mots, ses traits changent, ses cheveux se rallongent tout en virant du doré à l'argenté et ses iris passent du vert au rouge. Mes yeux s'écarquillent de surprise et d'horreur lorsque je reconnais cette nouvelle apparence. C'est lui. . . La créature que je cherche à tuer depuis des jours pour venger maman se tient juste devant moi.

Je reste figée dans le lit, incapable d'esquisser le moindre geste, ni d'émettre le moindre son. Tout ce que je peux faire est me souvenir d'une conversation que j'ai eue avec Gwenn dans la cathédrale de Gap :

- C'est une qualité nécessaire pour débusquer les démons se cachant sous d'autres formes. . .

- Quelles formes peuvent-ils prendre ?

- Toutes, sauf celles des anges et de Dieu, naturellement.

Je sens chaque partie de mon corps trembler. Trompée. J'ai encore été trompée. Je me suis encore faite avoir.

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