À une autre fois et dans un autre endroit. . .

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Je fais le tour de la chambre en silence. J'ai besoin de marcher pour digérer tout ce que je viens d'apprendre en si peu de temps. . . Je regarde distraitement la décoration, jusqu'à passer devant le miroir, qui me renvoie le reflet d'une jeune fille aux longues boucles rousses et aux yeux rouges.

"Tiens, pensé-je. Il m'a retiré les lentilles de contact et la perruque."

- Ce n'était pas une vulgaire perruque, rétorque-t-il, comme s'il lisait dans mes pensées.

Je me retourne pour lui lancer un regard surpris. Il quitte la chaise pour me rejoindre en m'ordonnant :

- Regarde bien attentivement nos reflets.

J'acquiesce et m'exécute. Il passe sa main dans mes cheveux et ces derniers racourcissent aussitôt, tout en virant au blond, jusqu'à reprendre la forme qu'ils avaient avant que je ne perdre conscience. Surprise, je porte aussitôt la main à ces derniers et tire dessus. La douleur au niveau de mon cuir chevelu ne laisse plus aucun doute : ce sont bien mes cheveux, mais ils n'ont plus du tout la même apparence. . .

- Tu es capable de le faire toi-même, m'informe papa. Tu peux prendre la forme qui te plaît, comme tous les démons.

- Comment user de ce pouvoir ?

- C'est simple, répond-il en se plaçant dans mon dos pour poser doucement ses mains sur mes épaules. Concentre-toi sur une apparence. N'en oublie aucun détail. Il faut que tu la vois clairement dans ton esprit.

Je ferme les yeux pour me concentrer. Une apparence. . . Une s'impose aussitôt à moi. Je revois ses jolis traits, sa peau claire, ses longs cheveux bruns et ses yeux d'un vert étincelant. Un triste sourire se dessine sur mon visage et lorsque je regarde à nouveau le miroir, je tombe face à face avec maman. C'est comme voir subitement un fantôme. J'esquisse un mouvement de recul, mais les mains de papa qui me tiennent toujours fermement m'empêchent de m'éloigner. Au même moment, mon reflet refait surface, révélant mon expression choquée et la sueur perlant sur mes tempes. Je prends de grandes inspirations pour me calmer.

Pendant ce temps, papa fait claquer trois fois sa langue contre son palais. Ce son rapide et répétitif annonce sa désapprobation :

- Tu as rompu ta concentration. Recommence et ne te laisse pas déstabiliser par ce que tu verras. Rappelle-toi que ce n'est qu'une illusion dont tu as la maîtrise.

Je prends une profonde inspiration et referme les yeux pour me reconcentrer sur l'image de maman. Quelques secondes plus tard, je les rouvre, mais cette fois, je ne scille pas. Je sais exactement à quoi m'attendre. Je souris même au reflet que me renvoie le miroir.

Le pouce et l'index de Lucifer viennent attraper mon menton avec douceur et fermeté pour me forcer à le regarder. Il plonge son regard écarlate dans le mien pour dire avec un sourire nostalgique :

- Tu n'as pas besoin de prendre son apparence pour lui ressembler. Tu as déjà ses traits et une partie de sa personnalité.

Je lui rends son sourire et me blottis contre lui dans un élan d'affection et de gratitude.

- Merci, papa, lui murmuré-je.

Il garde le silence, mais je sens sa main caresser mes cheveux. Je laisse lentement mon apparence originelle refaire surface, puis lui demande :

- Pourquoi maman détestait-elle à ce point la race humaine ? Est-ce qu'elle a aussi été trahie par des gens en qui elle avait confiance et qu'elle pensait être ses amis ?

- Oui et même pire. . . Tu as eu la chance de ne pas avoir été trahie et abandonnée par ta propre famille. Ce n'était pas son cas.

Surprise et horrifiée par cette révélation, je m'écarte précipitemment de lui pour plonger mon regard dans le sien.

- Maman ? Trahie et abandonnée par sa propre famille ?

Sans même encore connaître les détails de cette histoire, je sens mon coeur se serrer. Si la douleur d'être trahie par de simples amis que je connaissais depuis peu est si intense, je n'ose imaginer ce qu'elle a enduré en se faisant trahir par des êtres qui partagent son sang et qu'elle a toujours connu. . . Les seules personnes sur qui on peut normalement être sûrs de pouvoir compter. . .

- Que s'est-il passé ? demandé-je d'une voix tremblante. Que lui ont-ils fait ?

- La bonne question que tu devrais te poser est : que comptes-tu faire, maintenant ?

- Je veux savoir ! protesté-je. Quand je saurai tout, je saurai ce qu'il faut faire ! Quand je saurai tout, je prendrai ma décision, terminé-je sur un ton plus calme.

- Bien, mais c'est une longue histoire. Je la raconterai donc une autre fois et dans un autre endroit. . .

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