Nouvelle amitié ?

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Nos exercices de danse se succèdent sous les yeux attentifs de Madame, nous pratiquons plusieurs danses toutes les quatre au son des instruments de musique. J'imite une chèvre pour amuser mes compagnes, faisant allusion au fait que selon Aryon j'ai la grâce d'une chèvre comparé à la fameuse Blanche qui a tout pour elle. En attendant, plus personne ne vante autant les louanges de cette dernière qui ne supporte pas de ne pas être le centre de l'attention.

- « Faudra-t-il que je mange également mes manches et le devant de ma robe verte couvertes de broderies florales ? » Dis-je en faisant l'idiote.

Taiyo et Ameyalli s'en amusent fortement tandis que du coin de l'oeil, je vois Blanche agacée de me voir aussi désinvolte. Elle doit penser que je suis aussi bête qu'un cochon pour reprendre les dires de sa servante d'il y a une semaine, parfait. Si je veux prendre la place de mon dépravé de frère, il faut que je ne dévoile pas mes talents de suite mais petit à petit, ils apprendront à me craindre au fur et à mesure que mon influence grandira. Pour cela, il me faudra les meilleurs guides pour me conseiller dans mes décisions et m'aiguiller sur le meilleur choix à faire. Je sais de source sûre qu'oncle Atlas se tiendra à mes côtés si je suis choisie, Laura est certaine que je suis la marionnette parfaite pour gagner encore plus de pouvoir donc sur du court terme et avec précaution, je pourrais la garder près de moi, il y a ceux qui soutiennent cette dernière au conseil atlante et... Madame à la cour impériale. Au vu de ma situation, mieux vaut adopter la carte de la patience et de la tempérance jusqu'au moment propice où je pourrais coincer mon demi-frère avec son attrait pour les hommes. Je dois me tenir dans une position où je suis la moins spoupçonnable possible.

- « Où en êtes-vous concernant votre bal à quatre ? »

- « On cherche encore à se mettre d'accord sur les décorations de la salle d'appârat, Madame. On discute régulièrement de ce que nous allons porter et du festin que les cuisines devront préparer. »

- « Je salue votre zèle. Je tiens à ce que vous vous démarquiez à votre façon avec décence et que vous fassiez honneur à votre rôle de favorite impériale. »

- « Nous n'allons pas vous décevoir, Madame. » Nous dîmes en choeur. « Quelqu'un doit venir aujourd'hui pour prendre nos mesures et discuter de ce qu'on souhaite pour ce grand soir qui sera notre soir et on a hâte ! » S'enjaille Taiyo.

Pour ma part, pas tellement. Non pas que je n'y vois pas là l'opportunité de discuter de mes nouveaux goûts vestimentaires mais les favoris d'Alaric seront là... Aryon ne ratera cette occasion pour rien au monde de me rabaisser publiquement pour que sa "merveilleuse Blanche" brille. Abandonne Tezca et épouse-la au lieu de flatter son ego à longueur de journées ! Une noble dame entre alors dans la pièce, suivie par les trois favoris, et nous salue selon le protocole avant de mesurer Ameyalli en première.

- « Son Altesse possède de larges épaules, le mieux serait de dégager votre poitrine pour équilibrer avec votre bassin qui est plus fin. Votre chevelure de jais permet un beau contraste avec le blanc de la robe que vous porterez, de beaux bijoux choisis judicieusement pourrait bien vous embellir. La tradition autorise les damoiselles à l'honneur de porter une couleur avec le blanc. »

- « Tant que mes épaules et mes bras sont couverts, je ne suis pas difficile. Un dégradé vers le bas me conviendrait pour ma part. »

- « Allons, Ame... Tu restes belle malgré tout et je ne dis pas cela parce que je suis ton frère. »

- « C'est trop aimable à vous de rassurer votre soeur ! Je suis chanceuse d'avoir une grande soeur qui est là pour moi, quoi qu'il arrive. » Dit Blanche.

- « Bien, à qui le tour ? »

Taiyo se lève spontanément et se met devant la dame poure entendre son avis. Sa jovialité rend le moment plus plaisant que prévu et il ne fait aucun doute que pour ce grand soir, son accoutrement sera à la hauteur de sa personnalité aussi solaire que son prénom.

- « Vos épaules sont plus petites que celle d'Ameyalli, vos hanches sont plus développées et votre grain de beau est réchauffé par votre douce et flamboyante chevelure. L'or vous irait à merveille. »

- « C'est l'incarnation même du Soleil, elle illumine la pièce rien qu'avec sa présence. » Déclare Blanche enjouée.

- « Taiyo est une chaleur vive susceptible de brûler si on l'approche de trop près, comparé à vous, Blanche, qui est plus douce... » Annonce Aryon.

- « C'est ça, flatte bien son ego pour mieux rabaisser celui des autres... » Murmurai-je en tripotant ma bague.

- « Mes roses se distinguent par leurs goûts et leurs personnalités, je tiens à ce que cela transparaisse pour ce grand soir que sera le leur. Aucune n'est meilleure que les autres, chacune a ses forces et ses faiblesses et c'est justement ce que j'aime chez elle. »

- « Vous êtes trop bonne, Madame ! » Nous dîmes en choeur.

- « A vous, princesse. »

Hésitante, je prends la place de Taiyo et autant dire que ce n'est pas un moment de plaisir. Même si je me suis habitué avec Safiye, cela reste difficile de me laisser toucher par quelqu'un à cause des sévices de Thurian et c'est à la limite du supportable même s'il n'y a aucun sous-entendu malveillant. Avant même que la dame me donne son avis sur ce qui me mettrait en valeur, je fais comprendre que je n'ai pas envie que des parties de moi soient visibles, ce qui ravit Aryon.

- « Quelle délicate preuve d'humilité ! Rester simple fera voir que tu es capable de connaître ta valeur et de ne pas chercher à se placer au-dessus de gens de meilleur statut. »

- « Prince Aryon ! Vous avez beau être l'échanson de mon époux, je ne vous permets pas de dévaloriser autant votre soeur. Elle représente l'Altantide autant que vous voire mieux. Vous n'avez guère votre mot à dire concernant ses choix ; si elle n'aime pas montrer des parties d'elle par pudeur ayez au moins la décence de le respecter. »

Voir mon demi-frère se faire sermonner de la sorte par Madame, surtout après avoir appris sa manière de me traiter, est satisfaisant. Je n'ai plus de blessures physiques à cacher mais ce n'est pas évident pour autant de passer au-dessus quand on est marqué comme au fer rouge. La noble dame invite alors Blanche pour la mesurer et comme toujours ne tarit pas d'éloges sur sa petite taille, ses mains délicates, sa blondeur dorée, ses beaux yeux améthyste, la perfection de son visage, ses airs juvéniles éveillant un instinct maternel,... A part sa beauté, que peut-elle bien avoir ?

- « Vous êtes libres de porter ce qui vous plaira, tout vous ira à merveille. »

- « V-vous me flattez, madame. » Dit la soeur d'Elaine avec sa fausse modestie.

- « D'ailleurs, n'es-tu pas encore femme, Elda ? » Me chuchote Ameyalli.

- « Non, je suis la seule de nous quatre qui ne les a pas encore eu malgré la croissance de ma poitrine. »

- « Cela n'explique pas pourquoi ils sont plus développés que ceux de Blanche. » Murmure Aryon.

- « C'est vrai que Blanche a deux citrons en guise de seins. Ne t'en fais pas, dans quelques années ce sera deux belles pommes prêtes à la cueillette. » Dis-je à voix haute sur un ton plaisantin. « Si tu veux donner l'illusion de croissance, mets les en valeur. »

Malgré la légèreté de l'ambiance, l'expression de Blanche m'étonne quelque peu, elle d'ordinaire si vaniteuse concernant sa beauté physique et toujours à aimer être le centre de l'attention. Son regard mêle la gêne au dédain ; elle n'aime donc pas qu'on lui parle de ses seins et encore moins qu'elle soit petite de taille. Au moins, cela lui fait voir à quel point c'est désagréable d'entendre des gens parler de son corps quand on le déteste. Nous remettant quatre petits carnets de dessin pour qu'on puisse proposer des croquis de ce que nous voulons pour le soir, congédiant les trois favoris d'Alaric. Une fois Safiye envoyée chercher du thé, nous avons toutes les quatre pris place chacune dans un coin pour débuter les dessins, Ameyalli avec Taiyo, Blanche auprès de Madame et moi près de la fenêtre entrouverte pour écouter le chant des oiseaux et le silence de la nature.

- « Quels cols permettent de dégager la poitrine, madame ? » Demande Ameyalli.

- « Nous avons celui-ci qui permet de maintenir votre poitrine en l'arrondissant et l'avantage de masquer les défauts potentiels. Dans le cas où vous avez un bon galbe, vous pouvez choisir celui-ci, à condition de ne pas le descendre trop bas. » Explique-telle en dessinant une forme carré puis un triangle.

- « Je vous remercie de votre réponse. Tu t'en sors, Taiyo ? »

- « Je suis des plus inspirées. J'ai tellement d'idées qui me traversent l'esprit que je ne saurais décider ce qui serait parfait pour moi. » Avoue-t-elle, enjouée. « Je crains de devoir vous accaparer pour m'aider à aiguiser mon choix, noble couturière. »

- « Vous m'en voyez ravie. Et vous, Blanche ? »

- « Pour ma part, j'ai déjà trouvé et je ne doute pas que la qualité ainsi que le résultat seront à la hauteur de mes attentes. » Ajoute Blanche, confiante.

La noble couturière passe voir mes consoeurs pour les aider à affiner leurs choix, proposer des corrections et également commenter ce qu'elles proposent. La seule esquisse aboutie est une robe dont les mancherons iront jusqu'aux coudes avant de devenir droites, avec un col sembable à un coeur et cintrée sous la poitrine, plusieurs perles décorent les coudes et la partie cintrée. Je l'imagine sans mal blanche comme verte ou bleue et dans le cas où elle est colorée, elle peut reservir.

- « Est-ce que l'inspiration t'a parlé, Elda ? » Demande l'Impératrice, remarquant mon silence et mon isolement.

- « Je vais laisser madame en juger par elle-même. » Répondis-je en me levant pour apporter le croquis.

- « Voyons voir cela... Le premier est simple, élégant... Cela fera sans nul doute une robe magnifique qui va vous sublimer, peu importe la couleur. » Constate-t-elle

Ameyalli, Taiyo, Blanche et Madame se lèvent pour regarder la robe dessinée. Blanche déplore l'absence de singularité et d'authenticité tandis qu'Ameyalli aime bien sa simplicité.

- « Je vais partir sur la sécurité et opter pour celle-ci. Je pense que nous nous reverrons pour peaufiner les détails quand les patrons seront réalisés puis cousus. Pour moi, excepté les petits détails, je pense en avoir fini. »

- « Très bien, tu peux te retirer aux jardins ou à la bibliothèque. Je m'occupe de le dire à Safiye quand elle sera de retour. » Me dit Elaine.

Une fois hors de la pièce, je parcours les couloirs en songeant à comment faire chuter Blanche et Aryon de leurs piédestals dorés. Pour la première, je n'ai rien sur quoi jouer pour saper toute chance avec l'Empereur à part la faire marier rapidement et l'envoyer loin de la capitale ; pour le second j'ignore quand et comment agir malgré la bonne carte que j'ai en main. L'Atlantide ne saurait tolérer que son héritier tout désigné ne puisse être éligible au mariage à cause de sa préférence masculine mais connaissant Alaric, il tentera de couvrir l'affaire avec des excuses du genre que ce n'était que passager ou encore un moment d'égarement ou bien de l'éducation aux arcanes de l'amour.

Une main ferme m'agrippe le bras et le tire en arrière. Surprise, je me débats et me retourne pour voir qu'il s'agit justement du sujet de mes pensées et au vu de ses traits froncés, il est en colère.

- « Pour qui tu te prends, au juste ? Non seulement, tu te permets de me répondre et tu blesses Blanche. »

- « Et toi, d'où tu me rabaisses pour presque rien ? A t'écouter, Blanche est l'épouse parfaite alors demande sa main à Madame vu que tu aimes tant vanter des qualités qu'elle n'a guère. »

- « Ose répéter ce que tu viens de dire. »

- « Blanche est tellement belle avec ses beaux cheveux d'or et ses yeux violets, son teint de porcelaine, ses manières sont délicates tout comme les broderies qu'elle tisse de ses mains et son tempérament est doux comme de la soie, ce sont bien les mêmes mots que tu as employé pour la décrire à tes compagnons lors d'entraînements auprès de la Garde Céleste, non ? ... On voit que tu n'as jamais vu nos travaux à Taiyo, Ameyalli et moi puisqu'il parait qu'on est meilleures qu'elles. Oncle Atlas lui-même a certifié que j'étais bien meilleure danseuse contrairement à ce que tu as raconté à qui veut l'entendre, surtout le prince Séthi. »

- « Faut dire les choses telles qu'elles sont, Blanche est supérieure à toi, peu importe tes efforts, tes progrès et tes actes. C'est comme ça. »

- « J'en viendrais presque à me demander à qui aimes-tu tant lècher le postérieur avec tes flatteries de parvenu... Mais surtout, à qui tu réserves tes belles paroles mielleuses ? Blanche ? Madame ? Oncle Atlas ? L'Empereur ? Père, peut-être ? »

- « La conversation est on ne peut plus stérile. Je vais être clair, cesse de te donner des qualités que tu ne possèdes guère, cela t'évitera une humiliation de taille lorsque tu entreras dans la noblesse et que tu seras mariée. »

- « Je te retourne volontiers cette phrase, cher demi-frère. C'est quand même curieux que je n'ai pas entendu parler d'une quelconque proposition de mariage de ton côté, pourtant ce ne sont pas les pucelles qui manquent à tes pieds... A moins que tu ais quelque chose à cacher qui justifierait...»

Je n'ai pas fini ma phrase que je me prends une violente gifle qui me fait tomber. Tous les souvenirs des coups de Thurian et celui d'Aryon refusant d'annuler mon mariage me reviennent comme cette même claque en plein visage. Le prince atlante me hurle dessus de retirer ce que je viens de dire, de me taire sur ce geste et d'être plus respectueuse si je ne tiens pas à m'en reprendre une autre quand j'entends des pas précipités en notre direction puis Aryon se faire attraper puis escorter Quelques secondes de silences suivent ce départ précipité quand une grande main se pose sur mon épaule, me faisant sursauter et recroqueviller sur moi-même par crainte d'être à nouveau battue.

- « Pardonnez ma rudesse, je voulais m'assurer que vous n'avez rien... »

Mon coeur rate un battement à l'écoute de sa voix puis un autre quand je réalise que c'est bien le prince Ramsès qui se tient à genoux pour m'aider à me relever. Tremblante, j'optempère et le laisse m'amener dans un salon pour m'asseoir et me couvrir. Il me donne également un thé à l'aubépine.

- « Pourquoi Aryon a-t-il levé la main sur vous ? »

- « J-je n'en sais rien... Cela n'était jamais arrivé malgré ses réflexions blessantes constantes. »

- « Quelle qu'en soit la raison, rien ne justifie qu'il vous frappe et je ne dis pas cela parce qu'Egypte, c'est interdit d'avoir un tel comportement envers une femme. »

- « Une fille, vous voulez dire... C'est un prince et il a tous les droits sur moi. Une fois roi, il pourra faire ce qu'il veut de moi... Me marier, me faire devenir prêtresse, m'enfermer, m'exiler, m'exécuter... »

- « Plus maintenant. Avec ce geste, sa légitimité ainsi que sa capacité seront lourdement remise en question ; un monarque qui s'emporte de la sorte et devient violent ne peut qu'apporter le chaos à son royaume. Je doute que votre père accepte de fermer les yeux sur un incident de cette nature connaissant sa piété familiale. Cela ne ressemble guère au roi Léandre. »

- « Vous avez pitié de moi, avouez-le. »

- « Oui, au sens où je n'aime pas la souffrance d'autrui... Et non que vous soyez dans une situation où vous vous sentez inférieure et que cela pourrait me donner le droit de me sentir supérieur à vous. La pitié signifie avoir de la compassion. »

- « On peut dire que vous savez remettre les choses à leur place... »

- « Et certaines personnes aussi quand les limites ne sont pas respectées... Aryon ne vous a jamais respecté une seule fois, en tant que soeur et individu. Je mentirais en disant que je sais ce que c'est d'être le cadet toujours dans l'ombre de l'aîné parce que je n'ai pas la même relation avec mon jumeau Séthi. »

- « Il faut dire qu'on cherche la ressemblance quant à vos personnalités. »

- « Pour autant, on est très proches malgré nos divergences... En un sens, ce n'est pas si mal qu'on ne soit pas totalement semblables. »

- « Pourtant, vous avez le même père, la même mère,... V-vous devriez également être entouré de nombreus... »

- « Je ne suis pas à l'aise avec la compagnie féminine de masse, elle a tendance à me mettre mal à l'aise presque autant que les flatteries auxquelles Séthi est friand. Je préfère de loin le son des épées qui s'entrechoquent et des braises ardentes de la forge... »

- « Autant, vous n'avez pas votre langue dans votre poche, autant vous n'avez pas la langue bien pendue. »

- « J'ai beau connaître quelques subtilités de la cour, je préfère de loin la rudesse des champs de bataille et... »

La porte s'ouvre et c'est le jumeau de Ramsès, vêtu d'une longue tunique bleue aux bordures argentés jusqu'aux hanches et ouverte sur le devant pour dévoiler sa peau de bronze, qui entre. Tout en lui est royauté que cela soit son apparence atypique ou sa courtoisie, il est clairement fait pour être roi d'Egypte. Il allait parler à son frère quand il remarque ma présence et l'ambiance se fait d'un coup aussi glacial que son regard, il s'avance en ma direction lorsque Ramsès se lève et se met entre nous et plusieurs longues secondes de silence passent avant que le benjamin ne le rompe.

- « Sors d'ici. »

Ce ton calme et assuré... Je n'en reviens pas ! Jamais je ne crois l'avoir entendu s'adresser à son frère de cette manière, lui qui ne parle presque jamais et en voyant l'expression de Séthi, lui non plus ne devait pas s'y attendre. Plusieurs secondes passent avant qu'il ne quitte la pièce sans avoir ouvert la bouche.

- « Et bien, vous savez vous faire comprendre quand vous dites non . »

- « Vous trembliez rien qu'à le regarder, votre regard était fuyant, tout indiquait que vous aviez peur donc valait mieux lui faire comprendre que sa présence est indésirables... Et puis, je connais l'inimitié entre vous et au vu de votre état, il ne valait mieux pas apporter plus de mal-être. Ne doutez pas que l'incident sera rapporté à ses Majestés et que vous allez devoir confronter Aryon devant eux. Pensez-vous être capable de parler ? »

- « Il va s'en tirer à bon compte tandis que moi... Je mettrais dans l'embarras Madame. »

- « Je ne suis pas un favori impérial mais je ne doute pas que jamais l'Impératrice Elaine aurait toléré que sa Rose préférée soit brutalisée quel qu'en soit la raison. »

- « Comment pouvez-vous affirmer une telle supposition ? »

- « Je ne suppose pas, je constate. Elaine vous porte beaucoup d'intérêt sur vos talents comme votte bien-être... C'est la même chose pour Ameyalli, Blanche et Taiyo mais vous... Sa manière de vous regarder évoque une mère fière de voir sa fille grandir. En tout cas, c'est à vous que revient le choix de parler ou de vous taire. »

Plusieurs coups se font entendre à la porte, une fois que le prince Ramsès indique la permission d'entrer, Safiye s'exécute et accourt vers nous pour me prendre les mains, inquiète. Elle me pose pleins de questions auxquelles je n'ai pas la tête à répondre avant de regarder ma joue encore rouge du coup d'Aryon. Après avoir remercier son Altesse de sa bonté, je prends congé avec mon amie pour aller aux jardins me ressourcer et lui expliquer ce qu'il s'est passé.

- « Vous avez suggéré que vous vous doutiez de quelque chose concernant son inclinaison ! »

- « Le but était de le jauger et sa réaction dépasse de loin ce que j'aurais pu prévoir. Cette agression va lui porter un coup dur et affaiblir sa position à présent. Maintenant, il va devenir paranoïaque et me faire porter le chapeau pour le moindre malheur qui va le frapper. Sa crainte constante d'être découvert le poussera forcément à commettre une erreur à exploiter pour porter le coup fatal. »

- « Comptez-vous parler si l'Empereur vous convoquait concernant l'altercation ? »

- « Ma discussion avec le prince Ramsès m'a bien fait réfléchir, Safiye. Il va me falloir me la jouer très fine au moment voulu. D'un côté si je parle, j'affaiblis l'influence d'Aryon en prenant le risque de me placer en position d'ennemi. De l'autre, si je me tais, je préserve sa position d'héritier sans ombre au tableau mais je n'obtiendrais aucune justice pour le manque de respect dont il a fait preuve, avec un risque de récidive qui n'est pas à occulter. »

- « Dans les deux cas, vous en paierez les conséquences. »

- « Sur le plan politique, la seconde option est la plus avantageuse pour lui et non pour moi. Mon père n'aime pas entendre parler de discorde au sein de sa propre famille, surtout quand c'est le pouvoir qui en est la cause. Je ne le veux pas pour le vouloir, je le convoite pour m'assurer ma propre sécurité. »

- « Ma mère m'a souvent dit qu'en dehors de ce qu'elles ont entre leurs jambes, les meilleures armes des femmes sont les larmes. »

Je n'ai jamais eu a récourir à des larmes de crocodiles pour quoi que ce soit mais pour le coup, cela pourrait être à mon avantage. C'est ce même procédé que Blanche a souvent utilisé pour obtenir ce qu'elle veut alors pourquoi ne pas en profiter un peu aussi. Ameyalli arrive dans les jardins pour me dire que Madame et l'Empereur me convoque immédiatement dans le bureau impérial. C'est le moment de voir si j'ai mes chances en tant que comédienne. Safiye et moi la suivons jusqu'à la large porte de bois de chêne donnant accès à la pièce où Alaric s'occupe des affaires d'Etat et comme je m'y attendais, Aryon, Madame, Blanche, Nathaniel, Tezca, Taiyo sont là... Ainsi que Bjorn et Ramsès ! Si ces deux-là ont été témoins de la scène depuis le début, Aryon est fichu.

- « Princesse, sais-tu pourquoi tu es ici ? » Demande Alaric.

- « O-oui, Majesté. » Dis-je d'une voix tremblante.

- « Alors, dis-moi comment les choses se sont-elles passées ? »

- « Je quittais l'entretien convenu par Madame avec la couturière Adélaïde pour le bal des débutantes. En voulant me rendre aux jardins, son Altesse m'a interpellé et a lancé des accusations sans fondements. »

- « Quelles accusations ? » Questionne Nathaniel, curieux.

- « Il a prétendu que je suis horrible avec Blanche, que je cherche à la rabaisser à chaque occasion et que malgré tous mes efforts, jamais je ne la surpasserais parce que c'est comme ça. »

- « Est-ce vrai, Blanche ? »

- « N-non, pas du tout. Même si nous ne sommes pas amies, jamais Elda n'a cherché à me rabaisser, c'est ridicule. Elle est dure dans ses propos mais il n'y a aucune méchanceté. »

- « Ensuite ? »

- « Il m'a ordonné de faire preuve de tempérance pour que je sois une bonne épouse et noble dame de la cour, laissant entendre... Que je ne trouverais jamais d'époux avec tous les défauts que j'ai. » Dis-je, en retenant les larmes.

- « Prince Bjorn, avez-vous entendu la conversation qu'ils ont eu quand vous êtes passé ? »

- « Pas vraiment, Majesté. Quand je suis arrivé, la princesse était à terre et le prince lui hurlait dessus. »

- « Et vous, Prince Ramsès ? »

- « Il rabaissait sa soeur en la comparant à Blanche en disant qu'il était naturel que cette dernière soit la meilleure puisque c'est votre belle-soeur et que ce serait insultant qu'une autre la surpasse, que cela soit en broderie ou en danse. »

- « Elda, ma question sera directe : est-ce que oui ou non votre frère a levé la main sur vous comme les princes le supposent ? » Annonce Elaine.

Tête baissée, je réfléchis à ce que je vais dire puisque le sort d'Aryon va en dépendre. Dois-je dire la vérité au risque de représailles ou mentir pour continuer de subir en silence la tyrannie d'un frère qui ne l'a jamais été ? Je regarde d'abord Aryon qui me fusille pour signifier que je dois me taire comme toute bonne femme soumise à l'autorité masculine de sa famille si je ne tiens pas à subir ses foudres puis Ramsès m'encourage à parler.

- « C-c'est... » Balbutiai-je avant d'entamer un silence d'une dizaine de secondes. « C'est vrai, Majesté. Je m'inquiétais de ne voir aucune demande en mariage malgré sa popularité et ses qualités et quand je lui ai posé la question, il m'a frappé si sèchemment... » Répondis-je, les larmes aux yeux. « J'ignore pourquoi il a fait cela. »

- « Menteuse ! C'est une menteuse, Majesté ! Elle a fait des sous-entendus calomnieux sur mon compte. » Se défend mon demi-frère furieux. « Je te jure que si je mets la main sur toi... »

Enragé, Aryon s'avance vers moi mais Ramsès s'interpose et est prêt à dégainer son épée, faisant clairement comprendre que plus jamais il ne m'approchera et que s'il ose il devra lui faire face, quand bien même il est interdit de le faire devant l'Empereur. Alaric qui en a assez entendu congédie Madame et ses Roses tandis qu'il compte s'entretenir avec les princes sur la sentence à appliquer. Une fois dans le salon de Madame, les servantes nous servent des infusions relaxantes qui n'ont que peu d'effets vu l'incident survenu plus tôt.

- « La punition sera sévère, soyez en sûres. Bien qu'il restera à la cour, Alaric en avertira le Comte Atlas pour qu'il en fasse de même avec son Altesse Léandre... Laura sera enchantée de la nouvelle. » Dit Elaine, sérieuse.

- « Une telle faute pourrait bien lui porter préjudice, non ? »

- « En effet, sa capacité à gérer ses émotions est un facteur mineur mais déterminant pour un héritier royal, Blanche. » Explique Ameyalli. « Un monarque se doit avoir l'esprit insondable s'il ne veut pas être la marionnette de ses sujets et encore moins des sangsues qui composent son entourage à la cour. »

- « J'ai foi en la justice de l'Empereur, ses châtiments sont presque toujours à la hauteur de l'erreur commise. Et puis, son Altesse a été explicite quant aux sanctions où nous sommes les victimes. Je n'ai jamais compris pourquoi Aryon déteste-t-il autant sa soeur ? » Dit Blanche.

- « Parce que Laura est sa mère, c'est bien connu bien qu'injuste. Ce n'est guère étonnant qu'elle soit aussi détachée quand il s'agit de sa famille excepté le Comte Atlas et son épouse. »

J'écoute à peine leur conversation, trop occupée par mes pensées. Cet moitié de frère que je me suis mise à haïr à force d'aller de déception en déception, d'espérer une affection qu'il n'aura jamais et de constater qu'il a eu tout ce que j'ai toujours désiré sans lever le petit doigt... Sa chute n'en sera que plus savoureuse encore ; le premier acte vient de s'achever et le pire est à venir, Aryon... Je meurs d'envie de voir le désespoir dans tes yeux quand tu auras tout perdu. Je perds un parent mais il semblerait que j'y gagne quelque chose de bien plus important... Le prince Ramsès qui semble vouloir m'offrir son amitié.

Des coups à la porte me font sortir de mes pensées et quand Elaine ordonne d'ouvrir, c'est Safiye qui annonce que quelqu'un aimerait s'entretenir un court instant et quand la personne entre, c'est une surprise qui nous attend.

- « Sa Majesté l'Empereur a décidé de renvoyer le prince Aryon à Byblos à la fin du mois et de lui restreindre ses déplacements là-bas ; sauf cas particulier, il ne sera pas autorisé à quitter le palais comtal. »

- « Je vois, je suis quelque peu surprise que ça soit vous, prince Ramsès et non Nathaniel, qui ait été envoyé pour m'annoncer la nouvelle. »

- « Sa Majesté a besoin de la disponibilité de Nathaniel pour régler les affaires d'Etat. De plus, il me fallait venir ici pour m'entretenir avec... La princesse Elda. »

Tous les regards, Blanche la première, se posent sur moi aussitôt qu'il a terminé sa phrase. Q-quoi ? Mais pourquoi ? D'où il souhaite me parler ? Dans mon ancienne vie, on ne s'est parlés qu'une seule fois et c'était peu avant ma mort. Depuis qu'il est entré, il n'a regardé absolument personne dans la pièce, excepté moi et n'a pas détourné le regard une seule seconde ce qui me perturbe.

- « A-à quel propos, au juste ? » Demande Blanche.

- « Une affaire qui ne vous concerne pas vu que je suis indigne de votre intérêt. » Lâche-t-il sur un ton posé mais tranchant.

Il n'a vraiment pas froid aux yeux pour parler de cette façon, surtout à des personnes comme elle. Je ne saurais dire s'il s'agit là de provocation, de façon d'être ou d'une manière à peine déguisée de faire savoir ce qu'il pense d'elle. Je vois aux têtes que font mes compagnes que ses paroles ont eu un effet inattendu, elles ne devaient pas s'attendre à une réponse aussi directe et franche.

- « B-bien sûr, si vous voulez bien que nous nous installions... Plus loin... » Ai-je bégayé en lui indiquant un canapé proche du feu.

Nous prenons place sous les yeux curieux de Madame et des Roses impériales et il m'est impossible de parler, je ne sais pas quoi dire au point d'en perdre mon grec et la situation semble l'amuser au point que lui non plus ne prononce aucun mot. Sur la petite table en face de nous, les broderies faites le lendemain de mon arrivée sont posées à proximité de deux tasses encore chaudes qui n'ont pas été touchées. Je les prends par les anses et lui en tend une en guise de proposition, au moment où il allait la saisir, il jette un oeil à une des broderies, la mienne, avant de la prendre pour le regarder plus en détail. Après plusieurs secondes d'examen minutieux, il se tourne vers moi comme s'il me demandait comment j'avais eu l'idée et si par hasard, notre rencontre en était la source d'inspiration. Ma seule réponse est un sourire timide avant de boire. Curieusement, ce silence n'est pas gênant au contraire et cela permet d'entendre ce que les autres disent à voix basse.

- « M-mais ils ne se parlent pas. Quel intérêt de vouloir s'entretenir s'il n'y a aucune conversation ? » Demande Blanche ébahie.

- « Je suis bouchée bée. D'ordinaire, El' ne supporte pas discuter avec les hommes et encore moins leur compagnie. »

- « Peut-être qu'ils aiment juste communiquer en silence ? Cela donne moins mal à la tête. » Dit Ameyalli.

- « A-altesse... En quel honneur ai-je droit à votre venue ? »

- « Votre frère, le prince Aryon... Êtes-vous sûre que vous n'avez rien d'autre à me dire le concernant ? Même si je suis certain que vous avez dit la vérité à sa Majesté, je sens qu'il y a quelque chose que vous ne dites pas. » Chuchote-t-il.

- « Qu'entendez-vous par là ? »

- « Du peu que je le connais, il ne s'emporterait pas pour une inquiètude sur l'absence de pourparlers de mariage... Il y a autre chose de bien plus douteux et je suis certain que d'en avoir fait part à Aryon est ce qui a déclenché son courroux. Prenez garde parce qu'en gardant le silence, cela pourrait se retourner contre vous. Il serait possible qu'on vous accuse d'être sa complice... Involontaire, certes... Mais une complice malgré tout. »

- « Je ne suis pas certaine de vous suivre... »

- « Si vous possédez une quelconque information susceptible de changer la sentence de sa Majesté, utilisez-la tant qu'il est encore possible de le faire et avant qu'Aryon ne s'en serve pour vous affecter encore une fois. »

- « J-je vous remercie de vos intentions, mon prince. Comme vous pouvez le voir, je me porte bien malgré le contrecoups. » Dis-je à voix haute pour ne pas éveiller les soupçons. « Madame, puis-je me retirer à la tour des Roses ? »

- « Bien sûr, Ameyalli se chargera de me tenir compagnie ce soir. Son Altesse ne verrait aucun inconvénient à vous escorter, j'espère. »

- « Non, Majesté. »

De ce fait, Blanche, Taiyo et moi sommes allées à notre aile sous bonne surveillance. La première me pose des tas de questions sur ma relation avec Ramsès : comment nous nous sommes rencontrés, de quoi parlions-nous, si nous avions eu une correspondance cachée,... Elle est persuadée que nous avons une relation datant de plusieurs années et que je l'avais gardé cachée pour ne pas faire l'objet de commérages susceptibles de ruiner ma réputation.

- « Nous avons seulement un intérêt commun, l'idée d'une réconciliation entre l'Egypte et l'Atlantide. Il ne voit pas pourquoi la querelle des reines doit s'étendre à leurs progénitures. »

- « Pourquoi ne pas proposer un mariage avec Séthi ? Ce serait l'évènement parfait pour enterrer la hache de guerre. » Propose Taiyo, enjouée.

- « Elda et Séthi ne s'entendent pas du tout donc difficile de trouver un accord de mariage entre eux si c'est pour divorcer plus tard. » Crache Blanche d'un ton sec.

- « D'ailleurs, j'ai cru comprendre qu'il y avait des pourparlers vous concernant, Blanche. Concernant un potentiel mariage avec mon frère... » Commence Ramsès.

- « Un mariage avec Bjorn ? »

- « Avec le prince héritier de l'Egypte. »

- « Cela ferait de moi la reine consort ? »

- « Surtout, ne montez pas sur vos grands chevaux puis rien n'a encore été décidé. Puisque nous sommes devant l'entrée de la tour des Roses, je vais me retirer. »

Taiyo et Blanche partent devant mais le prince d'Egypte me retient un bref instant pour me remettre un curieux tissu dans lequel quelque chose semble caché avant de partir. En montant les escaliers, je tiens fermement ce présent et une fois arrivée, les jeunes filles m'attendant avec un air mutin sur le visage.

- « Tu as été bien longue pour monter, qu'est-ce qu'il te voulait ? »

- « Il m'a donné ceci. »

- « Fais-nous voir ce que c'est. »

M'asseyant sur un long siège placé contre un mur, garni de coussins multicolores, toutes deux me rejoignent et attendent de voir. En écartant délicatement les plis, j'y trouve un petit et fin bracelet argenté orné de plusieurs pierres d'améthystes séparées par des dauphins.

- « Et bien, et bien, c'est un joli présent pour signifier que tu lui plais. »

- «Tu plaisantes, on ne s'est jamais parlés avant aujourd'hui... Je te vois venir, Blanche : pas question de te le prêter et encore moins de le donner. S'il voulait t'en faire cadeau, il t'aurait stoppé toi. »

- « Juste de savoir que le prince Séthi pourrait devenir mon époux me satisfait déjà. Avez-vous des candidats en tête ? »

- « Mateus me plait bien. Sinon, il y a ... »

- « Je vais aller rejoindre ma chambre si cela ne vous ennuie pas. »

- « Est-ce le fait de parler mariage qui te dérange ? »

- « Je n'ai pas envie d'y songer, mon devoir envers l'Impératrice m'importe davantage pour l'instant. »

- « Avec toi, on va de surprises en surprises récemment. Tu ne veux pas entendre parler de mariage et encore moins d'amour comme si ces mots à eux seuls étaient une malédiction... Si c'est l'idée d'épouser un homme pouvant être ton père, on peut concevoir que l'idée est peu réjouissante malgré que cela soit ton devoir de fille de roi. Le prince Ramsès, réputé pour n'éprouver aucun intérêt pour les femmes et encore moins pour les mondanités, te porte un curieux intérêt dont on ignore la source et surtout... Tu portes des couleurs plus voyantes qu'avant ! » Enumère Taiyo et Blanche.

- « Pour les couleurs, j'avais envie de changement et de ne plus être un faire-valoir. Je ne peux dire moi-même pourquoi Ramsès s'intéresse à moi alors qu'on n'a jamais rien échangés par le passé et j'aimerais me consacrer pour le moment à Madame. »

En retournant à ma chambre, Safiye y est déjà et m'amène à la pièce adjacente pour que je me détende dans un bon bain chaud parfumé à la lavande, censé m'aider à dormir. Une fois dévêtue et installée dans le bains, je me mets à penser aux récents évènements puisque de petits changements semblent susceptibles d'avoir des répercussions : tout d'abord, l'arrivée tardive du prince Ramsès, son intérêt à mon égard, le bal des débutantes pour les Roses impériales, la gifle d'Aryon,... Je ne sais plus quoi penser de comment faire en sorte d'atteindre mon objectif même si la gifle a dû porter un sacré coup. Prenant le tissu dans lequel se trouve le bracelet argenté, je le fixe longuement comme s'il allait me fournir quelque réponse à mes questions... Pourquoi s'intéresse-t-il à moi alors que cela n'a jamais eu lieu avant ? Quel intérêt à lier une amitié avec la fille de l'ennemie de sa mère ? Ne craint-il pas de s'attirer les foudres de son jumeau ? Ramsès est une véritable énigme à lui tout seul, jamais personne, sa famille compris , n'a su lire en lui pour connaître ses pensées.

Tu as fait la guerre toute ta vie au nom de l'Egypte, défendu ton frère Séthi devenu roi sans jamais rien demander en retour si ce n'est de servir de nobles causes, tu n'as jamais voulu te marier et avoir de descendance. Quelle avenir t'attend dans cette nouvelle vie ? La renommée ? Une vie simple ? Je ne saurais répondre à cette question.

- « Princesse Elda ? Êtes-vous là ? »

- « Va voir qui est ce, Safiye. »

Safiye ouvre la porte et j'entends la voix d'un garde ayant reçu l'ordre de m'escorter à l'empereur immédiatement, cependant mon amie s'interpose en signifiant que je suis actuellement dans mon bain et donc pas présentable... Ce à quoi il demande à ce que je me prépare rapidement. Alaric me convoque si tard ?! Qu'est-ce que cela peut bien vouloir dire ? Ma dame de compagnie m'aide donc à mettre une robe légère de couleur bleu pâle avec des détails floraux argentés soulignant le profond col, aux manches bouffantes jusqu'aux coudes et un châle blanc pour me couvrir. Une fois prête, je quitte ma chambre en suivant le garde jusqu'au bureau impérial où Alaric est seul, assis sur son siège derrière son bureau.

- « Vous m'avez faiy mander, Majesté. » Dis-je en m'inclinant.

- « En effet... Que pensez-vous du châtiment réservé à ton frère ? Le jugez-vous à la hauteur de son méfait ? »

- « Je ne suis pas juge, Majesté. Vous êtes le représentant des lois et donc êtes le seul être apte à apporter la justice aux opprimés et aux victimes. Votre justesse a contribué à votre renommée, j'ai foi en votre jugement. »

- « Je vais considérer cela comme un Oui ... A vrai dire, même si je peux affirmer que vous m'avez dit la vérité, vous n'avez peut-être pas tout dit à cause du public... Je vous donne l'opportunité de le faire et cela restera entre nous. »

- « Sa Majesté est clairvoyante, il y a bien une chose que je n'ai osé dire de vive voix par crainte. Il se peut que cela soit sans fondement ou alors que j'ai mal interprété les faits... Mais... Je soupçonne son Altesse le prince Aryon... D'avoir une liaison illicite avec un homme. »

- « Est-ce que vous mesurez la portée des propos que vous venez de prononcer ? C'est tout de même une accusation très grave, surtout quand vous connaissez comment la chose est perçue à l'Atlantide. »

- « Oui, Majesté. Comme je l'ai dit, il est possible que j'ai mal compris ce que j'ai vu. »

- « Et avec qui Aryon aurait-il une liaison ? »

- « Tezca, votre chambellan. Il y a 2 ou 3 ans, je les ai vu ensemble à la lagune... Très proches, au départ j'y ai mis sur le compte d'une profonde amitié de part leur loyauté à votre égard et du fait qu'ils soient à votre service mais je les ai vu s'embrasser dans la serre peu de temps après. »

- « Par embrasser, entendez-vous une accolade ou ... ? »

- « Je ne sais pas, l'angle ne pouvait permettre de bien discerner. »

- « Vous pouvez disposer. »

Une fois retirée du bureau et de retour à ma chambre, je fais part à Safiye de mon entrevue et de sa potentielle efficacité dans mon plan. Même s'il ne doute pas de la loyauté de ces favoris, la graine du doute lui fera voir ce qu'il n'a peut-être jamais vu avant ou alors ce qu'il sait déjà mais garde secret pour ne pas faire de scandale à la cour. Puisqu'il prête foi aux paroles de Madame quant à nos propos, malgré qu'il ne m'apprécie pas autant que son adorable belle-soeur, il sait que ce n'est pas mon genre de faire de telles insinuations comme cela sans fondement. En tout cas, j'ai hâte de voir comment tu comptes t'en tirer Aryon, à la fin du mois tu seras à Byblos tandis que je pourrais tranquillement travailler ma réputation et mon potentiel. La gifle que tu m'as donné, je vais te la rendre et bien plus violente... A tel point que tu pourrais bien ne pas t'en relever.

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