Si j'ai le courage aujourd'hui

de vous écrire ceci

c'est que, quand sonnera minuit,

je ne serai plus ici.

Cela fait un an

que désespérément

leur retour j’attends,

mais en vain finalement.

Elles ont décidé

ce fameux soir d'été

de tout quitter

et de s'envoler.

Elles se sont évadées

de leurs corps mutilés

laissant leurs drapés de côté

pour plus légères, se laisser tomber.

C'est à cause de leur silence

que faible était notre méfiance,

mais en fait, depuis l'enfance,

elles étaient emplies de souffrance !

Ce fut leur dernier voyage,

ce soir où même l'orage,

s'en allait avec rage

pour fuir ce naufrage.

Elles s'étaient dévêtues là

puis ont élevé les bras,

n'ont fait qu'un seul pas

qui les mena vers l'au-delà.

Leurs âmes enfin libérées,

leurs corps enfin soulagés,

ces deux femmes ne pouvaient

qu'à présent respirer.

Voilà un an qu'elles sont parties,

et si j'ai le courage aujourd'hui

de vous écrire ceci c'est que,

quand sonnera minuit,

Je ne serai plus ici.

Je me libère aussi

de ce monde noirci

par l'absence de mes deux filles.

(inspiré du tableau "Les Cornes du Désir" de René Magritte)