AU BORD DU PRECIPICE

6 minutes de lecture

LEY 

"Il faut parfois se trouver au bord du précipice pour comprendre à quel point on n'a plus envie de sauter."

Je regarde V avec rage. Le simple fait qu'elle ait prononcé le nom de Damian me fait frissonner de peur. Mon regard se fige quelques instants, ma respiration ralentie, et des flashs d'horreurs se succèdent dans mon esprit dérangé. Pourquoi ? Pourquoi je n'arrive pas à occulter ce genre de merde de mon cerveau. Mon regard se fait lointain et pendant un bref instant, mon environnement s'efface pour laisser place à un gros nuage noir.

V finit par comprendre par je ne sais quel miracle, que je m'apprête à faire une crise de panique. Elle appelle Isaac et en deux minutes à peine, je me retrouve propulsée sur le siège de la Mercedes berline classe E. Je tremble tellement que V est obligée de me maintenir. Mon angoisse est si violente que je perds conscience. Quand je reprends connaissance, je reconnais tout de suite les appartements de V.

Ma tête est un peu lourdes et mes pensées sont quelque peu brumeuses. Mais en parcourant la pièce des yeux , je découvre un homme assit dans un des sièges design. À peine je l'aperçois qu'il s'adresse directement à moi.

- Enfin de retour parmi nous, mademoiselle Carré ? Comment vous sentez-vous ?

Je ne comprends pas qui il est et surtout ce qu'il fout là. Alors, je ne me gêne pas pour le lui faire savoir.

- Qui êtes-vous ? Et que faites-vous ici ? Où est passée V ?

Il me regarde avec douceur, mais son sourire de faux-cul ne me dit rien qui vaille. Malgré mon attaque directe, il continue avec politesse.

- Pardonnez mon impolitesse, mademoiselle Carré.

Je me présente, je suis le docteur Jay Lagrange. J'ai été envoyé auprès de vous par dame Vénus.

J'examine ce mec de la tête aux pieds, avec j'en suis sûre, un dégoût manifeste. Non pas qu'il soit répugnant, bien au contraire, mais je n'ai aucune envie qu'un psy détraqué vienne examiner mon cerveau à la loupe.

- Je n'ai pas besoin de médecin, docteur Lagrange. Je suis certaine que vous êtes un excellent praticien, mais je ne suis pas folle.

J'affronte son regard perçant, mais ce connard ne se démonte pas. Bien au contraire, il affiche une moue amusée.

- Loin de moi l'idée de penser que vous l'êtes, mademoiselle Carré.

Son sourire de con s'élargit davantage, ce qui a pour effet de m'énerver encore plus. Ceux qui osent soutenir mon regard avec autant d'audace sont rare. Il faut dire que dès qu'un homme s'approche de moi, je suis en constante représentation. Or, V a permis à ce stupide docteur de me surprendre dans une position vulnérable.

- Si vous pensez que je ne suis pas folle, alors pourquoi venir me faire la conversation ?

Il me fixe, mais ne répond pas de suite, comme s'il cherchait à me donner la réponse appropriée. Je décide donc de l'attaquer afin d'anéantir sa crédibilité.

- Je croyais que les gens comme vous avaient réponse à tout. Qu'ils étaient intellectuellement snobs, qu'ils avaient la gueule d'Aloïs Alzheimer et qu'ils prescrivaient des antidépresseurs plus vite que leur ombre.

Il éclate d'un rire grave et secoue la tête, comme si ce que je disais était parfaitement ridicule.

- Et bien, mademoiselle Carré, votre vision des choses est très arrêtée. Serait-ce votre premier compliment à mon égard ?

- Absolument pas ! Vous n'êtes pas du genre que j'apprécie.

- Très bien. Pour répondre à votre question de tout à l'heure, je ne suis pas venu vous faire la conversation. Mes honoraires sont plutôt chers pour de simples discussion ! En revanche, j'espère savoir comment vous vous sentez après votre malaise? Je ne crois pas que vous soyez prête à me parler et ce n'est pas mon objectif actuel non plus. J'ai dû vous mettre sous un léger sédatif, car vous faisiez une crise caractérisée.

- Je vais très bien.

- Tant mieux, mademoiselle Carré. Dans ce cas, je pense qu'il est temps pour moi de partir.

Il se lève et se dirige vers la porte pour s'en aller comme si de rien n'était.

- Mais putain, où allez-vous ?

Il se retourne légèrement avec une expression des plus étonnée.

- Je rentre chez moi, mademoiselle. Ma journée fut assez longue donc je m'en vais, maintenant que vous allez parfaitement bien.

- Je ne comprends pas.

- Qu'est-ce que vous ne saisissez pas ? Il n'y a rien à comprendre, je vais simplement retrouver mon domicile.

- Vous n'êtes pas venu pour me psychanalyser, ou un truc du même acabit ?

- Pourquoi devrais-je vous psychanalyser ou un truc du genre, comme vous dites ? Vous venez tout juste de me dire qu'il n'y avait aucun problème. Alors pourquoi cette question ?

- Vous venez de dire que V vous avait chargé de vous occuper de moi. De plus, elle m'a sorti ces conneries comme quoi je devrais voir quelqu'un pour parler de la mort d'Ely, de mes cauchemars et de Damian.

Même si Damian se trouve à plusieurs plusieurs kilomètres de moi, je prononce son prénom à voix basse tel un souvenir terrifiant et perpétuel.

- Il ne s'agit pas de ce que Dame Vénus veut pour vous, mademoiselle Carré, mais plutôt ce que vous voulez pour vous-même. Je suis capable de m'occuper de vous médicalement et c'est ce que j'ai fait. Cependant, il n'est pas question de vous forcer à quoi que ce soit. Vous êtes libre de refuser de me parler et je n'ai pas l'intention de perdre mon temps avec quelqu'un qui n'a pas besoin de mon aide.

- On peut dire que vous ne vous embarrassez pas de scrupules !

- Ce n'est pas dans mes habitudes, en effet.

- V vous paye, je pense que vous devriez. Ce ne serait pas du luxe.

- L'argent n'est pas un problème. De ce fait, je ne suis pas homme à prendre des autres sans agir. Si je considère que cela ne mène nulle part, il est évident que je n'accepterai pas le règlement des factures.

- Vous n'êtes décidément pas conforme à l'image que je me fais d'un psy de votre genre.

- C'est certain, réponse à tout, intellectuellement snob, look d'Aloïs Alzheimer, prescription massive d'antidépresseurs. Je ne suis pas de ceux-là, mademoiselle Carré, et je ne vous demande pas de vous y faire. À bientôt, j'ai comme l'impression que nous nous reverrons sous peu.

Il ne me laisse pas le temps répliquer et s'en va. À peine a-t-il franchi le seuil de la porte que V fait son entrée. Je ne lui donne pas une minute pour s'installer je lui pose déjà des questions sur le beau docteur Lagrange.

- Sexy, brun, pupille vert forêt. Tu sais les choisir. C'est qui ce type V ?

- Je crois savoir qu'il s'est présenté, Ley.

- Tu sais très bien ce que je veux dire ! Ne fait pas l'idiote, s'il te plaît.

  - Ce type, comme tu dis, va être ton médecin, Ley. Je ne pense pas qu'il soit judicieux d'en savoir plus. 

- Qui a dit que j'acceptais cette histoire ?  

 Ley, putain ! Ne recommence pas. Tu m'as fichu une peur bleue, merde !Comment tu te sens, tu as dormi longtemps ? 

- Quelle heure est-il ? 

- Bientôt vingt et une heure. 

- Comment ? Comment as-tu pu me laisser dormir aussi longtemps à autoriser docteur zarbi à me foutre un sédatif ? Je n'ai même pas avancé sur l'organisation de la soirée "black mask" ! Et le traiteur doit être paniqué, car je ne l'ai pas appelé ! 

- Bordel, Ley, calme-toi ! Héléna a fait le nécessaire, alors tu peux te détendre. 

- Cette situation ne peut plus se reproduire. Héléna consacre son temps à effectuer mon boulot, V. 

- Il n'est pas question que tu fasses quoi que ce soit, temps que tu ne te sentiras pas mieux. L'Aurora va très bien ! J'ai même pensé qu'il serait judicieux que tu prennes du recul loin de Paris.

 - J'espère que c'est une blague V. 

- Ce n'est pas une plaisanterie. Depuis cette soirée au Donjon Star, tu es méconnaissable, Ley. Je ne sais pas ce qui s'est passé avec Lucas Lambert, mais depuis cet épisode tu n'es plus la même ! 

-À qui la faute ? Dit-moi, V, à qui la faute ? 

- Ne me mens pas. Tu veux cet homme. 

- Peut-être... Mais à quel prix ? T'es-tu seulement demandé s'il était bon pour moi ? 

- Bon sang, l'attraction entre vous deux est si forte qu'elle pourrait embraser une forêt. 

- Certes, mais je ne peux pas. J'ai besoin de quelqu'un de plus sécurisant, il est dangereux.

 - Franchement oui, il est imprudent. 

Elle part en direction du salon quelques minutes, puis revient et me tend un bouquet de tournesols. 

- Examine la carte. Elles sont arrivées cet après-midi. 

Je prends l'élégante enveloppe et l'ouvre. 

"Mademoiselle Carré, je n'ai pas eu l'occasion de vous demander pardon, mais j'espère que ces rayons de soleils sauront exprimer mieux que moi mes regrets. L . Lambert" 

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 2 versions.

Vous aimez lire Line In ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0