Les Oiseaux Pleurent la Nuit

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Et, le mal naît au début de la nuit.

Je suis la lumière de l'Enfer,

L'ombre d'Éden.

Mes oisillons nourrissent le mal.

À l'aurore, la lumière devient ombre,

Au crépuscule, l'ombre devient lumière.

Et, le mal se meurt au lever du jour.

Il est de ces maux muets, de ceux qui n'ont pas de mot pour écorcher le papier.
Il est celui qui a réveillé la bête.
Mon œuvre inachevée que je désire retrouver.

Défaillant, j'avance en claudiquant, voyageant entre les brumes qui tapissent mon esprit. J'ai en moi une part d'ombre qui tente de dicter mes actes. Endormie, elle murmure parfois l'impensable, lorsque l'obscurité règne, que mes pensées vagabondent. Ce besoin viscéral, cette envie malsaine d'user de ma supériorité pour assouvir un désir prohibé. Mon cœur malmené, éreinté, cherche à apaiser ses tourments.
À la recherche de la pièce manquante, j'ai erré dans l'obscurité, jusqu'à ce soir d'été où nos regards se sont croisés.

D'une beauté irréelle, il est apparu quand l'espoir s'amenuisait. En une étreinte, j'ai fauché son cœur pour faire battre le mien.
À l'abri des regards, il a soufflé sur les braises de mon plaisir, étalant des picotements de contentement sur ma peau quémandeuse. Ce désir ardent, mordant ma chair d'une douleur appréciée.
Un sourire enjôleur sur une bouche gourmande, il a soupiré une plainte lorsque la pulpe de mon doigt l'a effleuré. J'ai picoré sa gorge, semant baisers et frissons, réclamant ses gémissements jusqu'à me noyer dans un océan de luxure.
C'est sous un ciel sans étoile que j'ai joui de ma domination. Petit ingénu, comme un oisillon tombé du nid, j'ai admiré sa candeur pour mieux l'abîmer.
Sublime créature, porteuse de promesses, c'est en un sourire qu'elle m'a charmé, attisant l'obscure partie de mon âme meurtrie.
Telles des roses épanouies, ses cuisses se sont ouvertes sous mes yeux ébahis. Sa beauté m'a impressionné, la pureté de son regard et l'envie qu'il susurrait du bout de ses lèvres carminées. Je me suis gorgé de ce tableau aux dizaines de couleurs, quelques lueurs aussi chaudes que mon derme brûlant, une teinte polaire enroulée autour de ses pupilles dilatées par le plaisir. Une union irrésistible pour ravir mon besoin de bestialité, éveiller un palpitant gisant dans une cage d'os brisés.
J'ai respiré son odeur, me repaissant de sa saveur jusqu'à en perdre la tête. Tel un vorace affamé, j'ai mordu sa carotide pour avaler les pulsations de son cœur animé par l'animosité.
Amant d'une nuit, amour de quelques heures pour semer les débris de ma cruauté jusqu'au lever du jour.
Et, la folie a pris le pouvoir lorsque ses reins se sont cambrés sous mon toucher, ravivant mes vices les plus immoraux. Un grognement échappé d'entre ses lèvres enflées par mes baisers, savait-il qu'au petit matin, son cœur ne battrait plus que dans de tristes réminiscences ?
Quelques gouttes salées sur ses joues où coulait une trainée noirâtre. Maquillage souillé pour contenter mes obscures pensées. Les paillettes dorées sur ses paupières brillaient sous mon regard enflammé. Objet de mes délices coupables, j'ai scruté sa magnificence torturée, enfarinée, son corps prostré de prostitué, jusqu'à son dernier souffle.

Pourtant, ce soir, je murmure à la lune, mes péchés et tourments, tente d'apaiser mon cœur larmoyant qui suffoque en s'apitoyant.

Combien y aura-t-il de victimes avant que mon mal soit rassasié ?

Entre mes doigts, sa respiration s'est éteinte, j'entends encore le trémolo dans sa voix. Vibrant d'effroi, ses larmes ont jailli lorsqu'il m'a supplié de le libérer. Il s'en est allé, mon torse contre sa poitrine malmenée, les paumes autour de son cou marbré.

Depuis, j'erre en hurlant des plaintes silencieuses, car il est de ces maux muets, de ceux qui ont éveillés un monstre tapi dans mon esprit. J'ai perdu pied, savourant l'acharnement comme pour ressusciter mon âme enterrée.
C'est en jouissant de plaisir, le regard terrifié, qu'il a lâché son dernier souffle. J'ai admiré son être gisant, des heures durant, une satisfaction macabre ourlant mes lèvres. Jusqu'à ce que le soleil se lève, réveillant à l'aurore, cette indésirable culpabilité nourrie par de nombreux regrets.
Son image hante mes nuits, ses iris bleu polaire et son sourire charmeur. C'est son visage que je recherche inlassablement parmi mes proies aux cheveux dorés. Parce que le mal naît à la tombée du jour ; au crépuscule, l'ombre devient la lumière de ma défaillance.
Il a scellé les barreaux de ma geôle, emportant la clé loin de moi, ensevelie avec lui. Après sa perte tragique, cette mort brutale, mes démons se sont libérés, réclamant que l'hémoglobine suinte de ces corps désespérés. Il a été mon premier tableau, peint à la main, bleui de mes poings, rougi de cette cruauté qui s'étend sous une peau veinée d'éther putride.
Il est de ces maux muets, de ceux qui brisent un homme, mon œuvre inachevée que j'aimerais peaufiner, celle que je pleure lorsque le soleil vient à se lever.
Et, mes oisillons deviennent aigles majestueux lorsqu'ils s'éteignent dans mes bras, mes sanglots arrosent les bouquets déposés sur leurs stèles improvisées.
Lorsque le dernier soupir s'élève, j'enlace un corps agonisant pour absorber l'ultime battement, ranimant mon cœur mourant.
C'est lorsque la mort s'éveille que je parviens à vivre, semant des oiseaux ensanglantés dans mon sillage, espérant un jour retrouver celui qui m'a aimé.
Mon cœur suffoque encore, à l'aurore il sanglote, réclamant les frissons de plaisirs que me procurent mes ingénus égarés.

Ils sont de ces maux muets, de ceux qui n'ont pas de mot pour écorcher le papier. Ils sont de ceux que l'on griffe pour voir perler les prémices du supplice, de ceux que l'on martyrise pour calmer les pulsions de démence qui ronge un esprit défaillant.
Mes oisillons nourrissent le mal, apaisent mon âme. Ils pleurent la nuit pour que je vive le jour.

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