Douceurs suisses

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 — J'aimerais me rappeler le goût du chocolat ! Me souvenir avant d'oublier à jamais. Viens ! Viens vite, nous n'avons pas beaucoup de temps. J'ai l'impression qu'il s'écoule de plus en vite. Il m'en reste peu, je veux vivre chaque instant comme jamais ! Chaque seconde de gagner doit être sublimée ! Je veux du chocolat et, toi aussi, mon ami, auprès de moi. Profitons des petits plaisirs de la vie, si simples mais si beaux finalement ! Et puis nous suivrons les traces de ce mets divin... Nous irons à la découverte des cacaoyers et de ses cueilleurs. Attends... Je l'ai aimé, le chocolat, n'est-ce pas, douta-t-elle un instant ?

 — Oui, tu adores le chocolat, tu ne vis que pour ça ajouta-t-il dans un rire mêlé de tristesse. Puis, tout en essuyant une larme qui s'était échappée, bien malgré lui de ses yeux embués, il ajouta : Mais ce n'était pas ce qui était sur ta liste ! Le prochain pays, normalement, c'est la Russie...

 — On s'en fiche : je crois bien que je l'ai déjà oublié, ta liste, s'amusa-t-elle. Qu'est la vie sans improvisation, sans spontanéité, sans trésors qui nous mènent par le bout du nez.

 Qu'est-ce qu'elle raconte, ne pût s'empêcher de penser son ami ? Elle perd la tête ! Pourra-t-on arriver au terme de ce périple, se demanda-t-il enfin ? Oh et puis, après tout, c'est peut-être elle qui a raison : la vie est assez courte pour savoir se faire plaisir en s'affranchissant de temps en temps des règles...

 — Ok, lui répondit-il, dans ce cas, on va quand même faire un tour du côté du lac Léman puis on part, direction l'Afrique. Ou ailleurs, si tu changes encore d'avis... Est-ce que tu veux que j'essaie de trouver un taxi pour que nous puissions atteindre les rives du lac ?

 — Non, laisse tomber le taxi. Regarde, nous ne sommes pas très loin. Allons-y à pied, si tu le veux bien. J'ai besoin de sentir la terre et les feuilles crisser sous mes pas. J'ai besoin d'air aussi.

 — Je comprends. J'en profiterai pour faire quelques prises de vue : d'ici on a vraiment une superbe vue !

 Arrivée devant le lac, Léonore, essoufflée, les traits tirés par la marche, pressa cependant son ami :

 — sors vite ta caméra ! Là, juste devant le lac, c'est parfait ! C'est parfait pour quoi, au fait ?

 — C'est parfait, parce que tu es belle, aussi belle que ce lac est tranquille. Regarde-le, comme il est immense et majestueux, humble et avenant. Regarde-le bien, photographie ces instants-là pour les glisser en toi, là, dans ton cœur. Là, dit-il en joignant le geste à la parole, une main sur son torse, tu n'oublieras plus jamais.

 Puis, discrètement, il appuya sur le bouton pour enregistrer le visage de Léonore. Après un instant pris pour fixer le lac face à elle, cette dernière se retourna pour le regarder :

 — Promets-moi, je t'en supplie ! Promets-moi de ramener ces images pour expliquer à tous ceux que tu croiseras à quel point la vie est précieuse. Tu as raison, tout ici est merveilleux. Je sais que je ne verrai plus jamais ces paysages et je suis triste. S'il vous plaît, ajouta-t-elle, en se tournant face à la caméra, préservez les trésors de notre planète. Elle est si fragile ! Permettez à nos enfants et petits enfants de pouvoir un jour voir ça.

 Mais soudain, alors que Léonore levait un bras pour montrer les montagnes au loin qui semblaient souligner la fragilité de cette majestueuse étendue d'eau, elle s'effondra, prise d'un malaise, et fendit, dans un bruit sourd la surface si tranquille du lac.

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