Nathan est dans une galerie. La photo du cadavre de Roi est accrochée au mur.

NATHAN au public, satisfait

Acquitté. Faute de preuve. L’art gagne toujours, c’est irréductible. Il paraît que ça serait un crime de mettre un artiste derrière les barreaux, que ça serait même un acte d’ignorance. La création, ça s’épanouit au soleil, en liberté, ça ne saurait survivre au confinement d’une cellule, alors on m’a laissé partir. Ils avaient peur de se tromper, de priver le monde de l’art de ma carrière florissante, de faire une victime de plus en fait, alors je suis maintenant tiré d’affaire.

Ce n’est pas moi. Je n’ai rien fais. Ce sont eux. Ils ont accepté, tiré un trait sur les doutes en haussant les épaules, et m’ont ouvert la porte. Ils m’ont laissé en liberté et en plus, ils continuent : ils viennent voir les photos, ils consomment encore et toujours, ils achètent sans réfléchir, sans s’émouvoir. Ils ont du sang sur les mains mais ne prennent même plus la peine de l’essuyer. C’est naturel, totalement automatique : l’art permet tout, l’art explique tout, l’art excuse tout. L’art est tout puissant et n’accepte aucune limite.

Je suis artiste. Alors, je suis acquitté. Faute de preuve. Et eux, ils continuent, ils continuent, ils continuent, encore et encore, et l’art… L’art gagnera toujours.

Long moment d’apothéose.

Noir.